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NewsTranscription
00:00 - Bonjour Fabienne Pascoe. - Bonjour Philippe.
00:02 - Vous êtes journaliste, critique de théâtre, comme on dit, redoutée.
00:05 Vous avez été éditatrice de la rédaction du magazine Télérama de 2005 à 2022.
00:09 Hebdo madère dans lequel vous êtes entrée en 78.
00:12 Et puis, Salarié, vous avez fait partie de la rédaction à partir de 80.
00:16 Pendant deux ans, vous étiez pigiste.
00:17 Vous avez fait toute votre carrière là-bas et vous y êtes encore.
00:20 C'est un cas quasiment unique, ce que vous écrivez toujours pour Télérama.
00:23 - Oui, ma direction s'est achevée.
00:27 Et Valérie Hurier m'a honorablement et très intelligemment remplacée.
00:32 Mais moi, j'aime tellement ce journal et j'aime tellement mon métier de journaliste culturel.
00:38 Aller explorer, défricher des jeunes créateurs, des jeunes metteurs en scène, des jeunes acteurs.
00:43 Que je reste jusqu'à mes 70 ans parce que je ne les ai pas encore.
00:48 - Combien de temps ? - Deux ans et demi.
00:51 - Je n'aurais jamais posé la question si vous n'aviez pas vous-même lancé le sujet.
00:53 Alors, on ne connaissait quasiment rien de votre vie privée.
00:56 Moi, je ne connaissais rien. Et même au sein du journal,
00:58 beaucoup de choses étaient secrètes. Il y a eu plusieurs phases, on va les raconter.
01:01 Et tout s'éclaire avec ce récit.
01:04 Ça s'appelle "Les menthes", c'est publié chez Stock.
01:06 "Les menthes" et non pas "la menthe", c'est vous.
01:08 Même si c'est un livre sensuel parfois, voire sexuel.
01:11 Tout commence par un coup de foudre en 1978
01:15 pour une histoire d'amour qui aura duré jusqu'à la mort de Louis Dandrell.
01:19 Qui était-il ?
01:20 - Alors, Louis Dandrell, c'était un homme admirable, bien sûr,
01:24 puisque je l'ai follement aimé dès que je l'ai vu.
01:27 Il avait révolutionné France Musique à l'époque
01:32 parce qu'il avait écrit "Musique" avec un "s".
01:35 Il était alors jeune journaliste musique au monde.
01:39 Et Jacqueline Baudrier l'avait débauchée pour diriger France Musique.
01:43 Il avait 33 ans. Enfin, ça ne se ferait plus.
01:45 Ce genre de choses ne se ferait plus aujourd'hui.
01:47 Et donc, il avait voulu introduire toutes les musiques.
01:50 Le jazz, le rock.
01:53 Ce qui était une révolution. Il a eu contre lui les Vichtros et Sartre, par exemple.
01:57 Des esprits aussi affûtés qu'eux
01:59 ont reproché à Louis et à ses producteurs
02:03 de ne plus pouvoir travailler et écrire tranquillement
02:05 en écoutant Bach sans aucune interruption.
02:09 Donc, il a fait ça. Puis, il a introduit aussi les infos, l'actualité de la musique.
02:15 - Mais ça, quand vous le voyez, vous avez un coup de foudre immédiat en quelques secondes.
02:19 Ça, vous ne le savez pas encore.
02:20 Vous ne savez pas que c'est lui qui a sali.
02:22 Mais vous le voyez, vous êtes complètement transporté.
02:24 Je vais lire la manière dont vous racontez la présentation, Fabienne Pascoe.
02:28 Vous êtes dans les couloirs où il y a un type qui parle de musique baroque.
02:31 "Je ne pus bientôt moi-même détacher les yeux de la silhouette agile et nerveuse
02:35 qui paraissait bondir entre chaque répartie.
02:37 Il était question de musique baroque.
02:38 Sous des cheveux blonds crantés, le visage de l'homme qui soutenait les baroqueux
02:43 était anguleux, sa bouche mince et rieuse.
02:46 Sa voix électrisait l'espace, douce et tranchante à la fois.
02:49 Une vraie musique qu'il prenait visiblement plaisir à moduler, à mettre en scène.
02:52 Mais déjà, je n'entendais plus rien, je ne comprenais plus rien.
02:56 Mes oreilles bourdonnaient.
02:57 C'est comme dans les livres, les films, les pièces de théâtre.
03:00 Mon cœur cognait à se rompre contre mes côtes.
03:02 Mon souffle devenait court.
03:04 J'avais du mal à respirer."
03:05 Je vais vous dire, Fabienne Pascoe, si vous ne t'y êtes pas en face de moi,
03:08 je vois ça dans un film, je n'y crois pas.
03:10 Le coup de foudre, comme ça, tellurique, immédiatement,
03:13 ça me paraît complètement dingue. Et pourtant, c'est vrai.
03:17 Et pourtant, c'est comme ça que ça s'est passé, parce que j'ai été saisie.
03:20 Alors, il avait la réputation, quand même, là on est en 78,
03:23 France Musique, c'était en 74.
03:25 Entre temps, il avait créé Radio Classique pour se venger un peu de France Musique,
03:30 parce qu'alors là, il avait fait un robinet classique sonore à Radio Classique à l'époque.
03:35 Et ensuite, il avait fondé ce journal, Le Monde de la Musique, avec Télérama et Le Monde.
03:40 - À l'époque, je vous interromps, j'y pense un instant, à l'époque,
03:43 on parlait beaucoup sur France Musique.
03:44 Vous connaissez le mot génial de Pierre Bouteillet ?
03:46 - Non. - Pierre Bouteillet dit "le service public, c'est simple,
03:49 si ça parle, c'est France Musique, si y'a de la musique, c'est France Info qui est en grève".
03:52 - Oui, c'était un mot formidable.
03:57 - Je reviens à Louis. Sauf qu'il est fascinant, Louis Dandrel, mais il n'est pas libre.
04:02 Il est marié, il a des enfants. - Non, il n'est pas marié.
04:04 - Ah, il n'est pas marié. - Il n'est pas marié, il vit avec quelqu'un.
04:06 - Vous avez raison, il a des enfants, il ne s'intéresse absolument pas à vous.
04:10 Vous dites naïvement "je le croyais libre, et sans orgueil, je multipliais les travaux d'approche".
04:16 C'est peu dire que vous avez fait des travaux d'approche, et d'abord en vain.
04:19 - Oui, en vain, on peut même dire, mais vous savez, c'était tout en respectant fondamentalement sa vie privée,
04:25 en ne le pourchassant pas, je peux dire que je l'ai harcelé.
04:30 Je peux dire que je l'ai harcelé avec respect, mais c'est ça aussi l'amour,
04:35 quand vous voulez quelqu'un, et je le voulais, c'était le seul homme que j'avais jamais admiré.
04:40 Moi, ayant quand même déjà une petite connaissance de la chose,
04:43 et puis ayant déjà interviewé des artistes.
04:46 - Vous savez que si la même phrase avait été prononcée par un homme,
04:50 "je l'ai harcelé, je l'ai harcelé", mais c'est ça l'amour, quand on veut quelqu'un,
04:54 trois petits points, si c'est un homme qui dit ça à ce micro, à n'importe quel micro d'ailleurs...
04:58 - Je mesure, oui, mais j'ai bien rajouté dans le respect.
05:01 Dans le respect, c'est-à-dire que je ne m'infiltrais pas dans sa vie,
05:05 je n'appelais jamais chez lui, je n'avais d'ailleurs pas son numéro de téléphone,
05:09 et je ne l'oppressais pas, mais c'est vrai que quand on aime,
05:14 si on veut se faire aimer, il faut aussi se faire remarquer, il faut savoir être présent,
05:19 dans le tact et la finesse, et le respect de l'autre, encore une fois.
05:22 - Vous avez fini par le rencontrer, et même plus que ça, comment ?
05:25 Elle va nous le dire, Fabienne Pasco, invitée de Culture Média sur Europe 1,
05:29 ça s'appelle "Les Menthes", à tout de suite.
05:35 En compagnie de Fabienne Pasco, elle signe "Les Menthes", c'est un récit chez Stock,
05:39 vous racontez une histoire d'amour folle qui a duré toute une vie, on peut le dire comme ça,
05:44 vous avez rencontré quelqu'un qui ne voulait pas de vie, il s'appelait Louis Dandrell,
05:47 et puis finalement, je vais raconter un petit peu la suite,
05:50 vous avez fini par vous marier, vous avez eu deux enfants, mais d'abord,
05:54 dans le péché, comme on disait à l'époque, vous lui avez fait un enfant dans le dos,
05:58 parce que vous êtes quand même parvenu à vos fins, Fabienne.
06:00 - Oui, parce que Louis était un homme, et quand on aime quelqu'un, on accepte tout,
06:06 on pardonne tout, on prend la personne en bloc.
06:08 Donc, hélas, Louis aimait deux femmes.
06:11 Et sa compagne, qu'il a fini par épouser quand j'étais enceinte,
06:17 ce qui était quand même bien le signe qu'il ne me voulait pas,
06:20 sa compagne était une femme formidable.
06:23 - Pendant que vous étiez enceinte de lui ? - De lui, oui.
06:26 - Parce que par ailleurs, parfois vous avez d'autres amants de passage, mais c'est anecdotique.
06:29 - Comment voulez-vous tenir ?
06:32 Et en plus, je vais vous dire, la perversité de la chose, c'est que
06:36 je pouvais avoir d'autres hommes dans ma vie, rien que pour continuer à être séduisante,
06:41 à être sexy. Je me disais, il ne faut pas lâcher ça, c'est un moyen aussi de l'avoir avec toi,
06:47 parce qu'on avait une relation très forte.
06:49 Et donc, si vous voulez, oui, à un moment, il venait, il repartait,
06:56 et je me suis dit, cet homme que j'aime profondément, dont j'accepte qu'il en aime une autre,
07:02 dont j'accepte les incartades, dont j'accepte les mensonges,
07:05 dont j'accepte les trahisons, parce qu'il est comme ça, je l'aime comme ça, je le veux comme ça.
07:10 Je me suis dit, ça va se finir, je n'y arriverai pas,
07:13 donc autant avoir un enfant du seul homme que j'aime.
07:16 Et donc, j'ai eu Paul, mon fils aîné.
07:21 - Et deux enfants ? - Et deux enfants, et j'ai eu les deux de la même façon.
07:25 Vous voyez, je ne suis vraiment pas politiquement correcte,
07:27 parce que les enfants dans le dos, comme vous le disiez, j'ai vraiment fait ça.
07:31 Et ce n'est pas bien, ce n'est pas forcément bien pour l'équilibre de l'enfant.
07:36 - Tout ce que vous dites dans "Livre d'un mot", le livre est dédicacé à Paul, à Luc,
07:40 c'est vos deux enfants, j'ai bien compris.
07:42 Est-ce que vous leur aviez raconté tout ce que vous dites dans ce livre ?
07:46 Est-ce qu'il y a des choses qu'ils ont découvertes en vous lisant ?
07:50 - Je pense qu'il y a des choses qu'ils ont découvertes en me lisant.
07:53 Mon aîné n'a toujours pas lu le livre, qu'il ne voulait pas que j'écrive,
07:58 donc j'ai très peur de sa réaction.
08:01 Le second a trouvé ça dingue, je lui ai dit "mais tu te rends compte quand même ce que c'est qu'un amour fou ?"
08:09 Il m'a dit "mais maman, c'est pas de l'amour, c'est de la folie".
08:12 C'est cette génération des 26 ans, c'est pour ça aussi que j'écris ce livre,
08:15 parce que c'est un témoignage de la passion folle.
08:18 Alors bien sûr, ça m'a brisé, mais ça m'a régénéré aussi.
08:21 - Vous parlez de réaction, votre papa était militaire, je crois qu'il a terminé sa carrière avec le grade de général.
08:25 Vous racontez une visite à l'hôpital militaire du Val-de-Grâce en 1993,
08:29 il est terrassé par un cancer, ce sont peut-être ses dernières heures, en tout cas ses derniers jours,
08:34 et il vous demande que vous fassiez un serment.
08:36 - Oui, mon père était très humilié qu'un homme avec qui j'ai eu un enfant ne m'ait pas épousé,
08:42 il a vécu très mal. Quand il a su que j'étais enceinte, il a commencé une grève de la faim par exemple.
08:47 Et c'est son confesseur qui est venu lui dire "mais on ne refuse pas un enfant de Dieu Jean".
08:51 Donc c'est ce qui a poussé mon père finalement à m'accepter.
08:56 Ça a été très dur, j'ai accouché seule, j'étais vraiment solitaire, abandonnée.
09:02 Et donc mon père qui exigeait que je porte une alliance quand j'étais avec lui,
09:06 qui a voulu que je lui promette de ne plus jamais avoir de deuxième enfant,
09:11 de cet homme qui me refusait.
09:14 Et moi j'avais déjà en tête un deuxième enfant, j'adore les enfants.
09:18 Et donc il m'a demandé de lui jurer, je lui ai dit "non papa, pas question, c'est inadmissible ce que tu me demandes".
09:25 Et je suis partie et mon père est mort deux jours après, je ne l'ai plus jamais revue.
09:29 - Vous racontez "il vous tient la main" et vous enlevez votre main de la sienne ?
09:32 - Exactement.
09:33 - C'est vraiment une image de film. Vous disiez "cet amour impossible"
09:37 alors que vous ne parveniez pas à l'avoir à vous, vous écrivez ceci
09:41 "je me souviens même d'avoir rêvé qu'un accident te rende un jour handicapé,
09:45 j'aurais adoré te pousser sur une chaise roulante toute ma vie durant, au moins tu aurais été à moi".
09:50 Il y a aussi une histoire d'emprise que vous souhaitiez qu'il avait sur vous,
09:54 parce que vous le désiriez, et l'emprise que vous souhaitiez avoir sur lui.
09:57 Et cette emprise, vous avez fini par l'avoir, parce que ce que je n'ai pas encore raconté,
10:01 c'est que ce sont deux récits enchâssés.
10:03 Une histoire, si j'ose dire, que vous racontez par le début, et l'autre par la fin,
10:06 puisqu'il est mort, je ne sais pas si on meurt de la maladie d'Alzheimer,
10:09 mais en tout cas, il avait la maladie d'Alzheimer, il n'est plus de ce monde.
10:12 - Voilà, oui, je pense, comme je suis un peu une sorcière Bérichon aussi,
10:16 je pense qu'il y a des choses qu'il ne faudrait pas penser, même pas se formuler dans la tête.
10:20 Et c'est vrai que j'aimais tellement passionnément Louis,
10:23 vous voyez j'ai la voix qui tremble, qu'il y a des moments où je me disais,
10:27 mais pour lui prouver mon amour, qu'il soit malade et que je sois toujours là.
10:30 Et c'est ce qui s'est passé.
10:32 Et j'ai été toujours là, puisqu'avec mes deux fils qui ont été admirables,
10:35 qui ont suivi toute la formation Alzheimer,
10:38 on a eu la chance de garder Louis chez nous à la maison et il est mort chez nous.
10:44 - Il faut le dire, parce que moi j'ai vu le livre, mais ceux qui ne l'ont pas lu et qui nous écoutent sur Europe 1,
10:48 il finit par venir habiter avec vous.
10:50 - Ah oui, oui, il finit par m'épouser quand même.
10:54 - Voilà, parce que ce n'est pas seulement l'histoire d'un amour impossible,
10:58 c'est aussi l'histoire d'un amour réalisé.
11:00 - Voilà, mais quand la femme qu'il aimait est morte, un an après...
11:04 - On est en quelle année ?
11:06 - On est en 97.
11:08 Nous nous sommes mariés en 97 et ça a été 20 ans de bonheur, de paix,
11:18 où je pense qu'il a fini par m'aimer.
11:22 - Fabienne Pascoe avec nous, Culture Média continue à parler de cinéma,
11:26 on va parler de gastronomie, parce que vous faites la cuisine aussi dans ce livre,
11:29 avec des passages absolument savoureux, c'est le cas de le dire.
11:31 A tout de suite sur Europe 1.
11:33 - Le repas. - Je vous ai dit que je me suis pas fait chier.