Le coup de gueule d'une agriculture !

  • l’année dernière
Avec Sophie Lenaerts, agricultrice et éleveuse de vaches laitières dans l’Oise et première vice-présidente de la Coordination rurale


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##C_EST_A_LA_UNE-2023-03-03##

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Transcript
00:00 En direct du Salon de l'agriculture, depuis le stand de la coopération agricole,
00:05 le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Patrick Rocher.
00:09 - Il est 7h14, bon réveil à l'écoute de Sud Radio, en direct évidemment du Salon de l'agriculture,
00:16 avec Sophie Lennartz, je le disais tout à l'heure, qui est agricultrice depuis une trentaine d'années,
00:23 maintenant c'est ça, éleveuse dans l'Oise avec votre mari.
00:26 Vous n'étiez pas destinée dans un premier temps à l'agriculture, vous aviez fait des études de marketing.
00:31 - Oui, oui, oui.
00:32 - Qu'est-ce qui vous a poussé à venir dans l'agriculture ?
00:35 - Ben mon conjoint.
00:36 - Votre conjoint, oui.
00:37 - Bon après je dois quand même vous dire que j'avais fait des études agricoles
00:40 parce que je voulais me spécifier quand même dans le monde agricole,
00:43 mais j'étais partie plutôt sur la transplantation embryonnaire
00:46 ou des choses plus scientifiques que le côté pratique.
00:49 - Bon vous ne regrettez pas quand même 30 ans après,
00:51 même si les temps sont difficiles là aujourd'hui, vous allez nous le dire.
00:54 - Des regrets non, parce que voilà ce qui est fait est fait,
00:57 mais par contre il est vrai que le métier d'agriculteur aujourd'hui
01:00 n'était pas du tout celui auquel j'ai embrassé il y a 30 ans.
01:02 - C'est-à-dire ?
01:03 - Les contraintes administratives, les strates, le regard de la société,
01:07 la désinformation, parce que je pense qu'on ne parle pas de nous
01:11 comme c'est la réalité des choses.
01:14 Et donc je le répète ici comme je le dis souvent,
01:16 bon sang quand vous avez des questions, venez nous voir sous nos serbes.
01:19 - Mais c'est quoi la désinformation alors autour de l'agriculture selon vous ?
01:22 - Par exemple la maltraitance animale, l'exploitation animale,
01:26 qu'on ait des riches patrimoniaux, enfin non, on s'en dête toute notre vie.
01:31 Et aujourd'hui au jour où je devrais transmettre mon exploitation,
01:34 je vais la donner à mes enfants ?
01:36 - Oui, et là vous avez l'impression que vraiment la société n'est pas attentive
01:41 à ce que vous faites quoi ? À ce que vous faites réellement ?
01:44 - Parce qu'ils ont des informations de tous bords,
01:48 parce qu'il y a des effets de mode,
01:50 parce qu'on leur fait croire que la viande c'est pas bon,
01:53 que le lait c'est pas bon, parce qu'ils ont des images,
01:55 on leur a mis des images.
01:57 - C'est pas tous les français quand même qui sont comme ça.
01:59 - C'est une minorité mais qui fait beaucoup de bruit.
02:01 - Oui.
02:02 - Et qui fait beaucoup de bruit, qui a beaucoup d'influence,
02:03 parce qu'ils ont beaucoup de finances.
02:04 - Et ça, ça vous tape sur le système ?
02:06 - Ça tape sur le système parce que c'est pas la réalité des choses.
02:09 Enfin moi personnellement, en plus je fais ferme pédagogique.
02:12 - Oui.
02:13 - Donc j'ouvre ma ferme aux écoles, aux familles,
02:15 à des gens qui veulent faire des fêtes.
02:17 Qu'est-ce que j'ai à cacher en voulant ouvrir ma ferme ?
02:20 - Oui.
02:21 - Je pense qu'on a un regard, je pense que les gens nous regardent de loin,
02:24 mais ne viennent pas à l'intérieur voir ce qu'il s'y passe.
02:26 Alors travailler avec du vivant c'est pas facile.
02:28 Tous les jours on n'a pas des images très agréables,
02:30 mais j'ai envie de dire, comme dans l'élevage d'un chien,
02:32 vous avez 8 chiots, il y en a un qui meurt.
02:34 C'est pas gay, mais ça fait partie de la vie,
02:36 et ça fait partie de la vie du maurice.
02:37 - Et oui d'ailleurs, Sophie, il y a toujours une question que certains se posent.
02:40 Oui alors on élève des bêtes pendant des années,
02:43 ensuite ces bêtes vont à l'abattoir,
02:46 ou alors il y a de la maltraitance, comme vous le dites.
02:48 Enfin la maltraitance c'est parce qu'on fait avancer les troupeaux.
02:51 Qu'est-ce que vous leur répondez à ces gens-là ?
02:54 Vous leur dites "mais nous on aime les bêtes".
02:56 Parce qu'ils se posent la question "comment vous pouvez aimer les bêtes ?"
02:59 - Bien sûr qu'on aime nos bêtes.
03:02 Moi sur 30 ans, à raison d'une centaine de vos parents,
03:05 j'en ai élevé plus de 3000.
03:07 Avec des noms, à l'époque on devait même mettre des petits dessins sur leur carte d'identité.
03:12 Mais on sait que c'est la finalité des choses.
03:14 J'ai envie de dire, c'est triste à dire, mais c'est comme l'être humain,
03:17 on naît et on meurt.
03:18 C'est pas gay, bien sûr que c'est pas gay.
03:20 Mais c'est une finalité des choses,
03:22 parce que parfois il y a une bête,
03:24 tout simplement parce qu'elle tombe, elle se fait mal,
03:26 on va pas la laisser souffrir.
03:28 Après c'est de tous les temps que nous sommes des carnivores
03:31 et que nous mangeons de la viande.
03:32 - Alors sur cette passion, parce que vous l'avez cette passion,
03:35 est-ce que vous allez réussir à la transmettre ?
03:36 Je sais que vous avez trois enfants,
03:38 vous avez plus de la cinquantaine.
03:39 En France, un exploitant sur deux a plus de cinquante ans.
03:42 Le problème c'est la transmission.
03:43 Est-ce que vous allez pouvoir faire cette transmission
03:46 et de façon tranquille ou pas ?
03:48 - Tranquille non, parce que déjà je voudrais déjà la transmettre maintenant
03:52 alors que j'ai pas l'âge de la retraite.
03:53 Donc si je la transmets maintenant avec une valorisation,
03:57 je vais payer des plus-values.
03:58 Donc fiscalement c'est énorme.
04:01 Ça veut dire que sur tout mon travail de trente ans,
04:03 je vais devoir payer presque 40% d'imposition de plus-values.
04:06 - Ah bon ?
04:07 - Donc mon entreprise qui valait, je vais dire n'importe quoi,
04:09 cent, il y a trente ans, qui vaut trois cents, trente ans après,
04:12 j'ai envie de dire c'est normal,
04:13 toute personne travaille c'est pour faire croître son entreprise,
04:16 eh bien sur ces deux cents de différence,
04:18 je vais devoir payer au minimum 40% de plus-values.
04:21 - Qu'est-ce que vous auriez comme question à poser
04:23 au ministre de l'agriculture que je recevrai tout à l'heure, Marc Fénot ?
04:26 S'il n'y en avait une, capitale pour vous, pour l'agriculture aujourd'hui.
04:29 - Je le vois quasi tous les jours,
04:31 donc on a l'occasion de débattre de pas mal de sujets.
04:35 Moi j'ai une phrase qui me vient en tête,
04:38 et qui est un peu notre slogan de la coordination rurale,
04:41 c'est "foutez-nous la paix et laissez-nous travailler".
04:43 C'est quelque chose de dingue,
04:45 c'est que c'est tout le monde qui ne connaît pas notre métier
04:47 qui vient nous dire comment on doit le faire.
04:49 - Oui, mais "foutez-nous la paix"
04:51 et en même temps vous avez besoin de l'État, du gouvernement,
04:54 pour des aides, sans soutien,
04:56 il n'y aurait plus vraiment d'agriculture aujourd'hui en France.
05:00 - Là où je vous contredit entre guillemets,
05:03 nous n'avons jamais demandé de primes.
05:05 Nous on voulait des prix.
05:07 Parce que ces primes, on sait très bien que c'est éphémère,
05:09 en même temps on les prend parce qu'on n'a pas le choix aujourd'hui.
05:12 Mais moi si vous me demandez
05:14 ce que je dis aux ministres tous les jours,
05:16 ou ce que ma présidente dit tous les jours aux ministres,
05:19 c'est "bon sang, payez-nous la valeur de notre travail et de notre matière première".
05:23 C'est tout ce qu'on demande.
05:24 Et si on avait ça, on ne serait pas obligés de faire des offices ?
05:28 - Oui, mais alors évidemment, vous le savez,
05:29 nous sommes dans une compétition internationale,
05:31 et à ce niveau-là, il y a des produits qui viennent de l'étranger qui sont moins chers.
05:35 - Eh bien oui, mais ça c'est pas normal.
05:36 Et donc je vais vous expliquer pourquoi.
05:38 - Allez-y, il nous reste 30 secondes.
05:39 - On nous a demandé de faire de la montée en gamme,
05:41 ce que nous avons très bien fait.
05:43 Donc on fait des produits d'excellence, qu'on vend à l'export,
05:46 vous vous rendez compte, moins cher que ce qu'on importe,
05:48 qui est de moins bonne qualité que ce que nous faisons.
05:50 Est-ce que vous trouvez ça normal ?
05:52 - Oui.
05:53 - Donc il y a un déséquilibre valeur sur l'export et l'import,
05:56 et donc forcément qu'il y a quelque chose qui ne va pas.
05:59 - Et donc nous n'avons plus à France la capacité de produire des produits d'entrée de gamme.
06:03 Et on sait très bien que tout le monde ne sait pas se payer des produits d'excellence.
06:06 Mais comme l'entrée de gamme, on ne nous autorise plus à le faire,
06:10 eh bien on l'importe.
06:11 La France est capable de le faire, en surface, en qualité et en compétence.
06:15 Laissez-nous le faire !
06:16 - Voilà le message "parlons vrai" de Sophie Lénard ce matin,
06:19 agricultrice ici, en direct du stand de la coopération agricole.
06:23 Merci, "parlons vrai", c'est bien le cas avec vous,
06:26 continuer évidemment sur Sud Radio jusqu'à 9h.

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