Agriculture et sexisme : l’exception du bio

  • l’année dernière
Alors qu’Oxfam révèle que les inégalités de genre touchent particulièrement le milieu agricole, l’Humanité est partie à la rencontre d’Yseult Delgeon, agricultrice en Ile-de-France.

Ses mains protégées du froid glacial par ses gants, Yseult Delgeon découpe les feuilles abimées de ses poireaux. Elle l’admet : « Je viens d’un milieu privilégié de l’agriculture ». Sa production est Bio, domaine du milieu agricole dans lequel les femmes sont surreprésentées. Pourtant, selon un rapport Oxfam paru ce mercredi 1er mars, et intitulé « Les inégalités sont dans le pré », les femmes sont sous représentées et désavantagées dans l’agriculture. Parmi les agriculteurs actifs de France métropolitaine, on retrouve 29% d’agricultrices seulement, qui gagnent en moyenne 29% de moins que leurs homologues masculins. Un écart de salaire d’un quart supérieur à la moyenne française des inégalités salariales liées au genre.

Mais sur l’exploitation que co-gère Yseult Delgeon avec Boris Canal à Saint-Augustin (Seine-et-Marne), pas question de discrimination liée au genre. Ici, on embauche ceux qui veulent travailler pour une agriculture responsable et respectueuse de la terre. La taille et la carrure ne comptent pas, seuls sont requis sur le CV : les compétences, l’envie de travailler et la capacité à « prendre soin des légumes ».

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00:00 Selon un rapport Oxfam paru aujourd'hui sur les inégalités de genre dans le milieu
00:07 agricole, les femmes y sont sous-représentées et désavantagées.
00:11 Seulement 29% d'agricultrices pour 29% de salaires en moins, soit un quart de plus que
00:16 la moyenne des écarts de salaire en France.
00:18 Alors aujourd'hui, l'humanité est partie à la rencontre d'Isult, agricultrice, en
00:22 Île-de-France.
00:30 Ça fait 6 ans que j'ai changé de métier.
00:35 Avant, j'étais sage-femme à l'hôpital public.
00:38 Je cherchais un autre métier qui fasse sens pour moi.
00:41 Et d'un point de vue personnel, je commençais à m'intéresser au réchauffement climatique,
00:45 à me rendre compte en fait de tous les liens de l'alimentation, dans beaucoup de problèmes
00:51 de société.
00:52 Mais à ma petite échelle, je ne pourrais pas non plus dire que j'ai été discriminée
00:57 à des moments où vraiment le fait d'être une femme, ça m'a pesée.
01:02 Quand je suis arrivée ici en stage, c'était une de mes premières expériences en maraîchage.
01:25 Ma première idée, c'était de me dire je vais tester parce que j'ai l'impression que
01:32 c'est un métier qui pourrait me plaire, mais par contre, je suis sûre que je n'y
01:36 arriverai jamais parce que je suis une femme et parce que je suis petite en plus.
01:39 Et là, en fait, j'ai l'impression que ce n'est pas le facteur vraiment limitant.
01:43 Il y a une différence de force physique sûrement avec un homme ou quelqu'un de plus grand,
01:49 mais je ne pense pas que ce soit le plus limitant en fait.
01:53 Je sais qu'ici, Iseult et Boris qui sont associés, ils se tirent le même salaire.
01:57 Pour les salariés ici, il n'y a pas du tout de différence.
02:00 Toujours selon le rapport Oxfam intitulé "Les inégalités sont dans le pré", les
02:05 femmes sont surreprésentées dans les pratiques agricoles durables, élevage extensif, circuit
02:09 court ou comme ici, le bio.
02:11 Aujourd'hui, dans le bio, il y a du bio, un peu ce qu'on appelle industriel et du
02:14 bio quand même plus à taille humaine.
02:17 Et je pense que c'est pour ça qu'il y a plus de femmes dans le bio que dans le reste
02:21 de l'agriculture, ce qui est l'agriculture conventionnelle, parce qu'il y a quand même
02:25 pas mal de ce qu'on appelle le care, prendre soin des légumes, passer beaucoup de temps
02:29 à faire des tâches de care.
02:31 Et c'est vrai que même dans les fermes où il y a beaucoup d'hommes, il y a certaines
02:36 tâches qui sont toujours réservées aux femmes et on n'en sort pas forcément avec
02:40 l'agriculture biologique.
02:41 On est plus sur des petites surfaces, moins de mécanisation, plus de temps passé à
02:47 s'occuper des légumes.
02:48 Je pense que c'est pour ça qu'il y a beaucoup de femmes et beaucoup de ventes directes aussi,
02:51 de liens avec le consommateur.
02:53 On nourrit des gens, ces gens nous parlent, c'est très concret.
02:56 Malgré tous les stéréotypes qui existent, tout ce qu'on a mis dans notre tête, quand
03:01 on est une femme, on s'identifie bien à l'agriculture biologique.
03:03 Il y a quelque chose quand même dans ce métier qui est prendre soin.
03:06 Et prendre soin, pour moi, ça devrait être l'affaire de tous.
03:09 Or dans notre société, c'est plus l'affaire des femmes.
03:11 Aussi bien mon associé et moi, si on travaille bien ensemble, c'est qu'on a ce côté,
03:18 on veut que les légumes soient beaux, on veut que la terre soit belle, on veut en prendre
03:22 soin.
03:23 C'est vraiment, je pense, une manière de penser qui devrait se répandre, prendre
03:26 soin de ce qu'on a, comme prendre soin de la planète.
03:28 Nous, ce qui nous motive ici, c'est entre autres être aussi sûr des rapports humains
03:49 qui soient justes.
03:50 Encore une fois, que ce soit sur la question du genre ou toute autre question.
03:56 On essaie de mettre en place des rapports entre personnes qui ne soient pas basés sur
04:02 la domination, mais qui soient basés sur l'échange.
04:04 C'est ce qu'on essaie de mettre en place ici.
04:06 Je pense qu'effectivement, plus ce sera vrai partout, mieux ce sera.
04:10 Dans l'exploitation, Diesel et Boris, pas de place pour les stéréotypes de genre.
04:14 Ici, les valeurs d'égalité, d'échange et de partage, ainsi qu'une même vision
04:17 de l'alimentation et de l'écologie sont les seuls critères déterminants pour le
04:21 recrutement de nouveaux collaborateurs.
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