• l’année dernière
À l’âge de 22 ans, Andrea a appris qu’elle était séropositive. Les médecins lui ont dit qu’elle était porteuse du virus depuis 10 ans. Elle nous parle de son quotidien avec le virus, ses difficultés et l’acceptation de la maladie. Aujourd’hui, c’est une femme épanouie.

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Amusant
Transcription
00:00 Il me regarde et me dit "Mais vous êtes ostacide, j'avais 12 ans, j'étais encore VIH, mais c'est pas possible"
00:05 Et là c'était encore un autre coup en fait que j'ai pris, je me suis dit "Mais comment ça, ça fait 10 ans"
00:10 J'avais 22 ans, j'ai rencontré un homme avec qui je sortais et il m'a demandé si j'avais déjà fait mon test VIH
00:18 Et moi je lui ai dit "Non, j'ai jamais fait"
00:20 Donc j'ai pas trouvé d'inconvénient, c'était ma première fois, mais pour moi y'a pas de raison que ça soit positif
00:25 Donc je lui ai dit "Ok, je vais le faire"
00:27 Il a fallu attendre je crois 3 jours pour avoir le résultat
00:30 Et donc on va chercher le résultat, on arrive au laboratoire
00:33 Et là y'a l'infirmière qui me prend de côté et elle commence à me dire avec des mots un peu...
00:38 Elle veut pas dire le mot en fait "Vous avez le VIH" tout simplement
00:41 Et je suis là, je suis embrouillée, je suis devant "Mais c'est quoi le problème, qu'est-ce que j'ai ?"
00:45 Et là elle me dit "Ah, vous êtes positive au VIH-SIDA"
00:48 Et tout d'un coup, ça bourdonne en fait dans mes oreilles, je me suis dit "Qu'est-ce qu'elle me raconte ? C'est faux, elle dit n'importe quoi"
00:53 Et là je sors, je monte dans la voiture de mon ex, le copain de l'époque qui m'avait accompagnée
00:58 Et c'est à ce moment là que je réalise qu'elle m'a dit que je suis positive
01:01 Et là je me suis mise à pleurer, j'ai dit "Mais c'est fini, ma vie elle est foutue, qu'est-ce que je vais faire, j'ai 22 ans"
01:05 J'ai l'impression d'être descendue aux enfers en fait
01:08 J'étais là, Andrea qui a 22 ans, qui a toute sa vie, qui avait ses objectifs de vie, etc, ses rêves
01:14 Et tout à coup, on me dit "J'ai le VIH"
01:16 Pour moi c'était... Je fais partie en fait d'une catégorie de personnes
01:20 Les séropositives, les gens qu'on montre à la télé
01:23 Aujourd'hui c'est moi
01:24 Et là je me suis dit "Mais comment ça a pu m'arriver ?"
01:26 J'ai commencé à me poser plein de questions
01:28 "Qu'est-ce qui m'a contaminée ? Qu'est-ce que j'ai fait pour m'irriter ça ?"
01:32 Et quelques jours après, je suis allée voir le médecin
01:34 Et là c'était la deuxième douche froide
01:36 Parce que je ne savais pas à quel stade de la maladie j'étais
01:39 Quand j'ai vu le médecin, elle m'a regardée avec des yeux remplis de peur
01:42 Elle m'a dit "Vous n'avez pas de symptômes ?"
01:45 Je lui ai dit "Non, je me sens bien, à part que je suis un peu fatiguée"
01:48 C'est vrai que j'étais vraiment très fatiguée tout le temps
01:51 Je ne comprenais pas, je me suis dit "Peut-être que je suis une flemmarde, je ne sais pas"
01:54 Et elle me regarde et me dit "Mais vous êtes ostacite"
01:57 Et là elle me pose des questions
01:59 "Vous n'avez pas de vomissements, de la diarrhée ?"
02:02 J'ai dit "Non"
02:03 Donc j'aurais dû maigrir, j'aurais dû avoir justement des boutons sur le corps
02:07 Tout ça, je n'ai pas eu tous ces symptômes là
02:09 Je me suis dit "Si je n'avais pas fait ce test, peut-être qu'il me restait quelques mois à vivre"
02:13 "Que mon corps avait tellement lutté, qu'il suffit peut-être que je tombe un petit peu malade et que c'est fini"
02:19 Et là elle m'a dit "Il faut absolument que vous mettez sous traitement, on n'a pas assez de défense immunitaire"
02:23 Le virus VIH, c'est celui qui donne la maladie de SIDA
02:27 Il y a plusieurs phases, il y a la primo-infection
02:30 Quand on est tout de suite infecté, on a des symptômes un peu tout bêtes
02:34 Maux de tête, être enrhumé, la fatigue, un petit peu de diarrhée aussi
02:39 Et après cette phase, on a la phase asymptomatique où on n'a plus rien
02:43 C'est-à-dire qu'il n'y a plus de symptômes en vie normalement
02:45 Et le virus fait un peu son petit bout de chemin
02:47 Après on passe à la phase 3, on commence à avoir d'autres symptômes comme la diarrhée
02:51 L'amaigrissement, des boutons, on appelle ça zona aussi qu'on a partout sous le corps
02:55 Là, le virus a vraiment fait son chemin
02:58 Et quand on arrive à la phase 4, qu'on appelle maintenant le SIDA
03:01 Là maintenant, c'est la maladie
03:02 C'est-à-dire que nos défenses immunitaires sont en dessous de 200 CD4
03:07 CD4 en fait, ce sont les globules blancs
03:09 Une personne normale est entre minimum 500 et 1200, 1600 je ne sais plus
03:14 Et quand on est en dessous de 200, le corps ne peut plus lutter
03:18 Il suffit d'une petite maladie et on meurt
03:21 À ce moment-là, j'avais encore plus peur de mourir
03:23 Au début, je me disais 40 ans, mais là je voulais dans 10 ans partir
03:26 Mais le médecin m'a rassurée, elle m'a dit que j'allais être sous traitement
03:30 Et grâce au traitement, j'allais avoir une bonne espérance de vie
03:33 J'allais pouvoir avoir des enfants
03:35 Mais j'avoue que je n'y croyais pas
03:37 Je me disais qu'elle ne voulait pas me faire paniquer
03:39 Donc elle me dit ça
03:40 Mais ce n'est pas possible de vivre longtemps avec le SIDA
03:42 Pour moi, c'était ça
03:43 Et donc, j'ai dit à mes ex que j'avais le VIH
03:46 Est-ce qu'eux, ils ont fait leur test ?
03:47 Parce que je voulais savoir vraiment d'où ça venait
03:49 Aussi, pour les prévenir, j'ai eu pitié
03:51 Je me suis dit que je n'aimerais pas qu'ils se retrouvent dans la même situation que moi
03:54 Et d'avoir ça sur la conscience
03:56 Je n'ai pas l'impression qu'ils m'ont tous dit la vérité
03:59 Parce que comme par hasard, ils avaient tous fait leur test et c'était bon
04:02 Qui me l'a transmis ?
04:04 C'est la question en fait
04:05 Je n'arrivais pas à trouver la réponse
04:07 Donc j'ai discuté de ça avec mon médecin
04:09 Pour savoir ça fait combien de temps que j'ai le virus
04:11 Ce n'est pas une vérité absolue
04:13 Mais elle pense que le virus, ça faisait déjà 10 ans que je l'avais
04:16 Et là, je me suis dit que j'avais 12 ans, j'étais encore VIH
04:18 Je me dis que ce n'est pas possible
04:20 Et là, c'était encore un autre coup que j'ai pris
04:22 Je me suis dit, comment ça, ça fait 10 ans ?
04:25 Pour le SIDA, il faut des années
04:27 Après, ce n'est pas pour tout le monde
04:29 Mais en majorité, 10 ans passent
04:32 Des fois, plus de 10 ans passent pour arriver à ce stade
04:34 Je me dis, j'ai passé autant d'années avec ce virus
04:37 Et finalement, je repensais
04:39 Parce que quand j'étais au lycée, à Abidjan
04:41 Je me rappelais que j'avais des fois des furons qui venaient et qui repartaient
04:45 Mais en grand nombre
04:47 Je me dis, c'était quoi ça ?
04:48 Peut-être que c'était mon corps qui réagissait
04:50 A l'époque, je n'étais pas active sexuellement
04:52 Je me suis posé la question, ce n'était pas justement un objet souillé qui m'a coupé
04:57 Après, j'ai arrêté de chercher
04:59 J'étais toujours encore avec mon copain de l'époque
05:02 Il était resté, il n'est pas parti
05:04 Dès le début, je pensais que c'était bon
05:06 Je me voyais marier avec lui et les enfants
05:09 Mais ce n'était pas ça
05:11 Parce que finalement, je me suis rendue compte qu'il avait peur de moi
05:14 Une fois, il y avait ma brosse à dents qui était à côté de sa brosse à dents
05:18 Il était en panique, il s'est énervé
05:20 Pourquoi j'ai mis ma brosse à dents à côté de sa brosse à dents ?
05:22 C'est quoi le problème ?
05:23 Mais la façon dont il était énervé
05:25 Je me suis dit que c'était bizarre, on a des rapports sexuels et tu as peur d'une brosse à dents
05:29 J'ai compris qu'il n'avait pas accepté
05:31 Il n'avait même pas pensé à se renseigner sur le virus, la maladie, etc.
05:37 Alors qu'il m'accompagnait à mes rendez-vous médicaux
05:39 Des mois se sont passés
05:40 Finalement, il est venu un jour chez moi
05:42 Au bout d'un an
05:43 Ça a quand même duré un an
05:44 Il m'a dit "Non, Andréa, on n'est pas compatibles, il faut que ça s'arrête"
05:48 Je lui ai dit "Ok"
05:49 J'ai eu mal
05:50 Je me suis dit "Mais c'est fini pour moi"
05:51 J'ai même supplié à Juvelou de rester
05:53 Il m'a dit "Non, il ne peut pas, il s'en va"
05:56 J'ai fait une tentative de suicide
05:57 J'ai avalé les comprimés de mon traitement, toute la boîte
06:00 Parce que j'ai lu qu'une auvergne d'eau, ça pouvait tuer
06:03 J'ai avalé et je me suis dit "Au moins je vais mourir et ça sera fini"
06:07 J'étais en dépression sans le savoir
06:09 Parce que je devais rester forte pour ma soeur, mes parents
06:13 Mais en même temps, je souffrais
06:15 Parce que je ne pouvais pas en parler vraiment
06:18 C'est une douleur qu'on se rend compte qu'on ne peut pas partager avec quelqu'un
06:21 Je ne sais pas, c'est bizarre
06:22 Ça touche tellement, nous-mêmes, notre âme
06:25 Parce qu'on a l'impression qu'on va mourir
06:27 Les gens qui sont en face de moi ne pouvaient pas comprendre
06:29 Ils me disaient "Non, mais ça va aller, ce n'est pas la fin, tu vas prendre ton traitement"
06:33 Et moi je me disais "Mais qu'est-ce que vous racontez ?"
06:35 Même si je prends mon traitement, qui va vouloir de moi en fait ?
06:38 Quelle vie je vais avoir avec ce virus-là ?
06:40 C'est telle la maladie qu'il ne fallait pas avoir
06:42 Et en plus, c'est une maladie qui te donne une mauvaise réputation
06:45 Moi, on allait dire oui, c'est parce qu'elle a une vie sexuelle désordonnée
06:50 Qu'aujourd'hui, elle a eu le VIH
06:52 Et ce n'était pas le cas
06:53 Et c'était ça qui me dérangeait aussi en fait
06:55 D'avoir cette étiquette-là aujourd'hui
06:58 Alors qu'il y a énormément de personnes qui ont des rapports sexuels non protégés
07:01 Et qui ne l'ont pas forcément
07:03 Et je trouvais ça injuste
07:05 J'avais une vie sexuelle, c'est vrai que j'avais des copains
07:08 Mais j'avais un seul copain à la fois
07:10 Je n'avais pas une vie sexuelle désordonnée
07:13 Je ne me droguais pas
07:14 Je ne faisais pas la fête à outrance
07:16 Franchement, j'étais une fille rangée
07:19 Une fille banale en plus
07:20 Et je ne me suis pas dit que je pouvais être exposée au VIH/SIDA
07:25 On se rend compte que ça peut toucher n'importe quelle personne finalement
07:29 Et quand j'ai fini, je suis sortie de cette épreuve-là
07:33 Je me suis dit "C'est bon Andrea, tu arrêtes"
07:35 "Il faut que tu reprennes ta vie en main, ce n'est pas possible"
07:37 "Même s'il te reste 10 ans à vivre, tu vas vivre ces 10 ans"
07:40 "Et ce gars-là, ciao"
07:41 Et donc, je me suis dit il faut que je prenne ma vie en main
07:44 Et me renseigner
07:45 Et là, j'ai décidé de me renseigner au fait vraiment
07:48 Pour cette maladie-là, j'ai commencé à faire des recherches toute seule sur Internet
07:51 Je me suis rendue compte qu'on pouvait vivre jusqu'à 70 ans, même plus
07:55 Et faire des enfants
07:57 Et ne pas être malade au fait
07:59 Mais également, j'ai vu qu'il y avait des choses méta-interdites
08:03 Quand tu es séropositive, tu ne peux pas avoir par exemple d'assurance-vie
08:06 Et pour prendre un prêt à la banque aussi
08:10 Tu as énormément de refus
08:11 Parce qu'on remplit pour l'assurance la case santé
08:15 Pour voyager aussi, il y a des pays qui n'acceptent pas
08:17 Avant, les Etats-Unis n'acceptaient pas
08:18 Mais aujourd'hui, ils acceptent
08:19 Mais le Canada, tu ne peux pas être résident au Canada quand tu es séropositif
08:22 A moins d'avoir un conjoint canadien et d'avoir une sécurité sociale privée
08:27 Et même par exemple, en Côte d'Ivoire
08:29 Et je crois qu'en France aussi
08:30 On ne pouvait pas rentrer à l'ENA et tout
08:33 Pas participer au concours public
08:36 On demande le test VIH
08:38 On ne peut pas être dans la police, le gendarme, ni être militaire
08:42 Non, ça je l'ai su beaucoup plus tard dans mes recherches
08:44 Parce que le médecin vient juste et te dit que ton traitement est bon
08:48 Et puis ciao
08:49 On ne nous dit pas vraiment toutes les réalités
08:51 Mais j'ai repris go à la vie
08:53 Donc pour moi, ça allait
08:56 Un jour, j'ai décidé de sortir, d'aller à une fête
09:00 Et donc à cette soirée, j'ai rencontré un homme
09:04 Avec qui le courant est très bien passé
09:06 Et là, je me suis dit "Non, Andrea, ne t'emballe pas
09:08 Tu sais que tu as un autre problème
09:10 Ne viens pas te mettre dans des histoires comme ça"
09:12 On s'est fréquenté et je me suis dit
09:14 Il va arriver un moment où je vais devoir lui dire
09:17 Ça, ça va être compliqué
09:18 Et je ne pouvais pas, c'est-à-dire que ça avait créé en moi une honte
09:22 Et donc j'ai trouvé un moyen pour lui dire
09:24 Je lui ai envoyé un message
09:26 On était dans la même pièce
09:27 Je me suis dit par un message de plus facile
09:29 Que de le regarder dans les yeux et de lui dire
09:31 Je lui ai envoyé un message, je lui ai dit
09:33 "Je suis séropositive"
09:35 Donc il se retourne, il me regarde et il rigole
09:37 Il dit "Mais ce n'est pas un problème"
09:39 "Quoi, comment ça ce n'est pas un problème ?"
09:41 Il est sérieux, est-ce qu'il a bien lu ce que je lui ai dit ?
09:43 Il dit "Bah, tu es séropositif alors"
09:45 "Pour autant que je ne veux pas être avec toi"
09:47 Et après il m'a demandé
09:49 Est-ce qu'on peut aller voir le médecin ensemble ?
09:51 Pour en savoir plus
09:52 Parce que lui, il ne connaissait pas vraiment
09:54 Il savait qu'on pouvait vivre avec
09:55 Mais après, il ne sait pas vraiment
09:56 Tout ce qui peut en découler de la maladie
09:58 Donc on est allé voir mon médecin
09:59 Qui lui a expliqué que je suis bien en traitement
10:03 Et que justement, je suis indétectable
10:05 Être indétectable, c'est lorsque le virus
10:08 A une quantité très très faible dans le sang
10:11 Et donc ne peut plus se transmettre
10:13 Je ne veux pas avoir des rapports non protégés
10:15 Je ne peux plus le contaminer
10:16 Et donc le médecin lui a expliqué ça
10:19 Et donc il était rassuré
10:21 Il était vraiment rassuré
10:22 Il s'est dit "Ah mais bon, ça va"
10:23 "T'as juste à prendre des médicaments"
10:25 "Pas grave"
10:26 Et donc on a fait nos petites vies
10:28 Ça se passait très bien
10:29 Je sentais que j'étais vraiment à l'aise avec lui
10:31 Il ne me mettait pas de différences
10:33 Je me sentais comme une femme en fait, tout simplement
10:35 On a ménagé ensemble
10:36 Et là, j'ai commencé à vouloir avoir un enfant
10:39 Là c'était la question qui se posait
10:41 Comment on allait faire un enfant ?
10:42 Parce qu'à l'époque, je ne savais pas
10:44 Qu'on pouvait avoir des rapports non protégés
10:46 Donc je me suis dit "Mais comment on va faire des enfants"
10:48 "Si on ne peut pas avoir des rapports ?"
10:49 Je me renseigne sur internet
10:51 Où je vois qu'on peut faire une auto-insémination
10:54 Ça dit que le gars recueille son sperme
10:58 Dans un pot en plastique
11:00 Et avec une seringue sans aiguille, il me l'injecte
11:02 Comme un truc, comme une fibre en fait
11:04 Je me suis dit "Bon, on va faire ça"
11:06 Et donc c'était ma première grossesse
11:08 J'étais super contente
11:10 On pouvait le faire sans préservatif dès le début
11:12 Et on s'est quand même cassé la tête
11:14 À faire tout ça
11:16 Heureusement que c'était que pour le premier
11:18 Parce que c'est un exercice
11:20 Pour moi c'était vraiment
11:22 J'ai besoin de faire un enfant
11:23 Parce qu'on m'a dit que je n'allais pas avoir d'enfant
11:25 Donc je voulais avoir cet enfant-là
11:27 Je le ressentais au plus profond de moi en fait
11:29 Et aussi avoir un enfant
11:30 C'était une manière de cacher aussi
11:32 Ma séropositivité
11:33 C'est-à-dire que quand les gens allaient voir que j'avais un enfant
11:35 Ils ne pouvaient jamais imaginer que j'ai le VIH
11:37 Je construisais une identité à l'opposé
11:39 De tous les clichés en fait liés au VIH-SIDA
11:42 Et en plus de ça, je n'étais pas toute magrichonne
11:46 Donc quand les gens me voient
11:48 "Toi bien portante, tu ne fais pas malade"
11:50 Donc dans la tête des gens
11:52 Même s'il y avait la rumeur
11:54 Les gens disaient "C'est faux, elle a un enfant"
11:56 "Elle est mariée, elle n'est pas mince"
11:58 Donc pour les gens c'est faux
12:00 C'était une thérapie en fait pour moi
12:02 Par exemple, je ne voulais pas aller dans les groupes de parole
12:04 Parce que je ne voulais pas être associée à la maladie en fait
12:06 Pour moi, aller dans les groupes de parole
12:08 C'est avec les gens séropositifs
12:10 C'est des endroits qui font pitié
12:12 Pour moi c'était ça dans ma tête
12:13 C'est-à-dire "Non, je n'ai pas besoin de leur ressembler"
12:16 Parce que pour moi, dans mon esprit en fait
12:18 C'était difficile d'arriver à me dire "Je suis séropositive"
12:21 C'est-à-dire qu'à chaque fois que je me dis
12:23 "Ah, on dirait que tu es séropositive, je déprime"
12:24 Quand je ne pense pas à ça, tout va bien
12:26 C'était vraiment difficile d'accepter ce statut-là, ce mot-là
12:29 C'est la plus violente envers moi-même en fait
12:31 C'était de l'auto-stigmatisation
12:33 Et finalement, il y a énormément de personnes séropositives
12:35 Qui le font en fait
12:36 À force d'entendre certaines choses
12:38 On répète nous-mêmes en fait
12:40 Et on n'arrive pas nous-mêmes à s'accepter, à s'aimer
12:43 Et donc cette grossesse est très bien passée
12:45 Et j'ai accouché par césarienne, par choix
12:47 Le médecin m'a laissé le choix parce que
12:49 Je pouvais accoucher par voix basse
12:51 Étant donné que j'étais indétectable
12:53 Mais la flippette, j'ai choisi la césarienne
12:55 Au moins c'est zéro risque
12:57 Si on n'est pas indétectable, ce n'est pas grave
12:59 Parce que sous traitement aussi, on ne transmet pas le virus
13:02 Mais c'est quand même à partir d'un certain seuil
13:04 C'est-à-dire qu'il ne faudrait pas avoir des tachages viraux
13:07 C'est-à-dire le nombre de virus dans le sang
13:09 Très très élevé en fait
13:11 Et à la naissance, on donne un traitement antirétroviral à l'enfant
13:14 Pendant deux semaines à quatre semaines
13:16 Pour éliminer tout le trait du virus
13:18 Juste par précaution
13:20 Les enfants, eux, s'ils sont suivis, il n'y a aucun problème
13:22 Et après, ma première fille
13:24 Finalement, on a commencé à avoir des rapports non protégés
13:27 Le médecin nous a donné l'autorisation
13:29 Après tout ça
13:31 On a eu notre deuxième fille
13:33 Et ensuite, la troisième fille
13:35 Qui est venue juste après
13:37 Et c'est quand j'étais enceinte
13:39 De ma troisième fille
13:41 Qui m'est venue l'idée de parler publiquement du virus
13:44 Je me suis rendue compte que j'avais commencé à guérir
13:47 Au fur et à mesure que les années passaient
13:49 Finalement, ta vie, elle n'est pas pire qu'une autre personne
13:53 Tu vis bien
13:55 Tu vis comme n'importe quelle autre personne
13:57 Et les gens ne peuvent même pas s'imaginer que tu vis avec du VIH
14:00 Et je pense que c'est le moment d'aider toutes les personnes qui souffrent
14:03 Et aussi de déconstruire l'image qu'on a sur le VIH
14:07 Je pense que ça a quand même beaucoup évolué au fil des années
14:10 Et si toi tu l'as eu, il faut te rendre compte que n'importe quelle personne peut l'avoir
14:13 Et là, j'ai décidé de prendre la parole, de raconter mon histoire
14:16 Je me suis dit que ça peut donner de l'espoir aux gens
14:18 Ça peut aussi casser les préjugés
14:20 Et d'autres personnes qui sont en souffrance
14:23 Peuvent se rattacher à mon histoire
14:25 Je me suis dit qu'elle est passée par là et qu'elle a pu construire une vie
14:28 Et que moi aussi, si je passe par là, je peux trouver quelqu'un à qui m'identifier
14:32 Pendant ce moment de souffrance, à qui je peux parler, etc.
14:36 Et donc je l'ai fait sur les réseaux sociaux
14:38 Et finalement, à ma grande surprise, j'ai eu que des messages positifs
14:41 De gens que je connais, des gens que je ne connais pas
14:43 Qui m'ont envoyé plein de messages d'amour
14:45 Je suis restée tout ce temps comme ça, m'auto-stigmatiser
14:48 Alors que les gens m'ont donné autant d'amour
14:50 Je n'ai plus honte
14:52 C'est juste une maladie comme une autre, en fait
14:54 Il faut que les gens sachent ça
14:56 Et surtout que vous nous côtoyez tous les jours
14:59 On a des personnes qui se reposent autour de nous
15:01 On ne se rend pas compte parce qu'on se cache
15:03 On est cachés dans la société, mais on est là
15:05 Je suis sûre qu'il y aura des stars, même des chefs d'État
15:08 Il y a tout le monde, mais sauf qu'on est cachés
15:10 Donc c'est un peu ce message-là aussi que je vais faire passer
15:14 En prenant la parole à travers les médias
15:16 Je vous en avise, hein, je vous en prie
15:19 Je suis restée tout ce temps comme ça, m'auto-stigmatiser
15:22 Alors que les gens m'ont donné autant d'amour
15:24 Je suis restée tout ce temps comme ça, m'auto-stigmatiser
15:26 [SILENCE]

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