• il y a 11 mois
Marie est atteinte du syndrome d’Usher, une maladie dégénérative qui lui fait perdre peu à peu la vue et l'ouïe. L’évolution progressive de sa maladie est un déclic : elle a décidé de partir faire le tour du monde avec son copain, avant de perdre totalement ses sens. À bord d’un camion aménagé, ils arpentent le monde entre émerveillement et grosses galères. Voici leur témoignage plein d’espoir !

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Voyages
Transcription
00:00 Je suis atteinte d'une maladie dégénérative génétique.
00:03 Mes deux parents sont porteurs sains, c'est-à-dire qu'ils ont le gène, mais ils n'ont pas de symptômes.
00:07 Et moi, j'ai le gène et puis c'est déclaré.
00:09 Donc c'est une maladie qui touche plusieurs sens.
00:13 Pour moi, elle touche à la fois l'ouïe, donc je porte des appareils auditifs des deux côtés depuis que j'ai l'âge de 5 ans.
00:18 Par contre, au niveau visuel, c'est un peu plus compliqué.
00:20 C'est venu progressivement à l'adolescence.
00:22 Nos champs de visuel, normalement, c'est 180° pour les personnes, donc c'est à peu près ça.
00:26 Moi, il me reste environ 30-20°, donc je vois vraiment ce qui est en face de moi.
00:30 Plus aussi la cécité nocturne, c'est-à-dire que je ne vois pas quand c'est sombre.
00:34 Et donc ça, c'est amené à réduire de plus en plus.
00:37 J'ai fait d'autres examens et ils ont observé que la perte de champs visuels plus mes appareils auditifs,
00:43 donc la perte auditive, ça s'appelle le syndrome de Usher.
00:46 Donc c'est un petit peu l'épique d'amouplesse que j'ai aussi dans ma tête,
00:48 de me dire "Je ne sais pas comment ça va être plus tard".
00:51 La maladie de Marie, finalement, c'est aussi une des raisons qui nous a fait changer de vie.
00:55 Ce n'est pas la raison principale, mais c'est quelque chose qui nous a poussé finalement à nous dire
00:59 "On ne veut pas attendre soit d'être jeu et d'être à la retraite pour en profiter ou vivre notre vie,
01:04 ou soit attendre que Marine ne voit plus. On va y faire maintenant, on peut le faire, on le fait".
01:08 Avant, j'ai rencontré Quentin, donc je suis partie en PVT en Australie, donc je suis partie toute seule en Sac à Beau.
01:14 Et c'est certain que j'ai dû penser à moi, mes indispensables.
01:17 Mes indispensables, c'est des paires de lunettes,
01:19 j'ai une idée parce que si je casse mes lunettes de vue, il me faut une autre chance.
01:23 Du soleil, bien sûr, pour me protéger les yeux.
01:25 J'ai des outils de contact, donc je crois que j'en ai suffisamment.
01:28 Et pour les appareils, j'ai une paire de secours qui est en fait mon ancienne paire,
01:33 donc elle est toujours moins efficace que la paire que je porte actuellement.
01:36 On a beaucoup voyagé tous les deux en sac à dos, même avant de se connaître, on voyageait pas mal dans le monde.
01:41 On avait beaucoup voyagé comme ça et on en avait un peu marre.
01:44 Plus le fait de la maladie de Marie, on s'est dit "En van, moi, ça faisait des années que je voulais voyager comme ça autour du monde".
01:50 On a acheté un van et c'est pour ça qu'on est parti dans ce mode de vie,
01:54 en se disant "Le soir, quand on rentre chez nous, c'est chez nous en fait".
01:57 On n'est pas dans une auberge, on n'a pas besoin de chercher un logement tous les jours.
02:00 On cuisine chez nous, on est chez nous, on a même notre chat dans le camion.
02:03 On a pris un petit gabarit pour qu'il puisse rentrer dans un container pour quand on veut traverser les océans
02:08 et qu'il puisse avoir une bonne capacité pour rouler sur des pistes.
02:13 Quand on va chez des amis ou quand on passe chez des gens, même à l'étranger, au l'autre bout du monde,
02:17 souvent les gens nous disent "Venez dormir chez nous, c'est plus confortable, on a une chambre d'amis et tout".
02:22 Et on leur dit "Non, en fait, nous, on a notre maison avec nous, on est bien dedans".
02:26 Et souvent, on préfère rester dedans, c'est plus simple pour tout le monde.
02:28 Ça, voyager en van, on a beaucoup d'attentes au départ, beaucoup de rêves.
02:32 On s'était fait une idée pour voir, on a acheté un véhicule en France, on va rentrer en France, qu'on est au Canada.
02:37 Et on va partir de France, on va aller d'Allence tout simplement, jusqu'au bout de la Chine.
02:41 Et on s'est rendu compte que déjà aller en Chine, aller en Canada, c'est compliqué.
02:45 Donc on s'est dit que ce qui allait définir notre trajet, c'était pas tant nos envies,
02:49 mais plutôt le climat, la situation géopolitique, le prix des visas, les autorisations.
02:55 Et enfin, nous avons dit "Finalement, on n'était pas partis pour faire un truc hyper organisé, hyper strict,
03:01 à telle date, il faut qu'on soit là, il faut qu'on ressorte du pays à telle date, on va voir ça, ça, ça, ça".
03:05 C'était assez fixé.
03:06 De toute façon, où qu'on aille, on découvrira quelque chose, c'est certain.
03:10 On ferait voir le loin possible et on verra.
03:12 Mais il faut quand même se dire que tous les jours, on se pose la question de où est Scundorf.
03:16 Régulièrement, où est-ce qu'on va chercher de l'eau ?
03:18 Est-ce que c'est sécuritaire où je suis ?
03:20 Alors, qu'est-ce qu'on va faire nous aussi ? Qu'est-ce qu'on va visiter ?
03:22 Tout ça, ça demande du temps, ça demande une organisation.
03:25 Il n'y a toujours pas de date de fin à cette histoire et c'est ça qui nous donne du temps.
03:29 Parfois, on est dans une route, on se dit "Tiens, aujourd'hui, on voudrait aller à tel endroit".
03:33 Puis sur la route, on voit un lac super joli, on s'arrête.
03:35 Au final, on passe 3-4 jours au bord du lac.
03:38 On ne sait jamais trop où on sera le lendemain directement, c'est très rare.
03:41 On travaille un peu sur la route, depuis le canéau.
03:43 Avant de partir, j'avais quelques rêves, en moint de vue,
03:46 j'aimais des choses que j'avais envie de voir.
03:47 C'est vraiment un jour où je n'aime plus voir, je regrettais de ne pas être allée voir ça.
03:52 Et Persépolis, ça en fait partie.
03:53 En Iran, je suis très attachée à l'histoire et à la culture et au patrimoine en général.
03:58 Donc là, vraiment Persépolis, enfin l'entier de Perse,
04:02 si on avait pu aller au Niraq en Israël, la situation était un peu plus compliquée.
04:05 Ça, ça faisait partie de ce que je voulais voir.
04:07 J'ai toujours été attirée par le désert.
04:09 Les steppes de Mongolie aussi, ça me fait rêver, peut-être un prochain voyage.
04:13 L'essentiel, je me dis, c'est que je découvre quelque chose,
04:17 que j'apprenne quelque chose, où que je sois.
04:18 C'est sûr que vivre dans un camion, c'est une autre maison,
04:22 mais c'est aussi notre véhicule qui nous déplace,
04:24 donc on essaye d'en prendre le plus soin possible.
04:26 Je fais très attention, on l'entretient beaucoup.
04:28 On n'a pas eu de panne mécanique,
04:30 mais on s'est mis dans des situations compliquées nous-mêmes.
04:34 Je pense que c'était au Nomad, on s'est coincé dans un wadi,
04:38 un lit de rivière asséché.
04:40 On avait eu des informations, comme quoi c'était possible d'y passer,
04:42 mais en fait, on ne parlait pas du même wadi avec les mêmes personnes.
04:45 Avec les personnes, et en fait, on a avancé dans le lit de rivière,
04:48 on a fini sur des petits galets tout ronds,
04:50 et on a fini par se coincer là-dedans,
04:52 on était à des kilomètres de toute situation,
04:55 et pas de réseau, et voilà.
04:57 On est resté coincé là-dedans, on a fini par sortir,
04:59 parce qu'il y a quelqu'un qui est passé, qui a essayé de nous aider.
05:02 Ça a pris du temps, nos pneus étaient chignis suite à ça,
05:06 on a dû le lendemain en rouler avec des pneus qui n'avaient plus de crampons,
05:08 on était sur la pente de roulement.
05:11 On a dû trouver des pneus en urgence en Oman.
05:13 C'est sûr qu'en Oman, pour un bébé qui n'est pas 4x4,
05:16 c'est là où il a le plus souffert, clairement.
05:18 Parce que, bien sûr, il y a des routes où il va se sauter,
05:20 mais notre but, ce n'est pas de dormir au bord des routes,
05:23 on comprend que ça prend des pistes,
05:25 et les pistes sont parfois pas en bon état,
05:27 ou il y a juste un sablé.
05:29 Donc, à peine on avait passé la frontière roumaine-est,
05:31 où il y a une petite piste, tu vas au bord de plage,
05:33 on te dit "ouais, ça va, on y va", et tu te mets à chien dans la tente.
05:37 Mais tout de suite, il y a un pick-up qui est arrivé avec un Omanais,
05:40 qui a sorti sa corde, et qui nous l'a sorti de là.
05:42 Et je pense qu'on n'était pas les premiers à se faire avoir,
05:44 que ce soit des locaux ou des étrangers.
05:46 Donc, je me suis dit "bon, moi, si on tombe en galère,
05:49 apparemment, ils ont l'air assez aidants".
05:50 Et c'était vrai, parce que dans le Nil, une terre asséchée,
05:53 pareil, il y avait un local qui finit par arriver avec son pick-up aussi.
05:56 Son pick-up, par contre, a lâché l'affaire aussi.
06:00 Donc, on s'est retrouvés deux véhicules Oman dans l'ouest,
06:02 et on s'est dit "bon, ça commence à être compliqué".
06:05 Et on prend le temps, et en étant chez nous,
06:07 on a fini par ressortir tous.
06:09 Une autre galère qu'on a eue, c'est à Teheran.
06:13 On attendait pour avoir les visas pour le Pakistan,
06:17 donc on était en ville, on attendait pendant à peu près une semaine.
06:21 Il y avait beaucoup de chats errants.
06:23 Donc, quand il y a des chats errants,
06:24 on a souvent des croquettes pour nourrir les chats.
06:26 Donc, on nourrissait les chats.
06:28 Et il y avait un petit chaton qui était vraiment trop petit,
06:31 pas sevré, rien.
06:32 Donc, on le nourrissait, il était très sauvage.
06:34 On a fini par parler à une dame à Teheran qui nous a dit
06:38 "ben écoutez, si vous arrivez à l'attraper,
06:39 moi, je le ferai adopter, le chaton".
06:41 Donc, on a fini par réussir à l'attraper.
06:43 On le met dans le camion, il devient un peu moins sauvage.
06:46 Et au moment de le mettre dans la boîte pour le transporter chez la dame,
06:48 le chat a peur, il s'enfuit.
06:50 Et en fait, il est rentré dans le tableau de bord du camion,
06:53 derrière le volant, derrière la direction.
06:55 Et le chat s'est coincé là-dedans, le chaton.
06:58 Donc, impossible d'y accéder, de le sortir,
07:00 il miaulait, il miaulait.
07:01 Lui, il ne voulait pas faire demi-tour.
07:03 Ce qu'il voulait, c'était aller en avant,
07:04 il ne pouvait pas faire demi-tour.
07:06 Alors, on lui a acheté à manger pour le mettre au pied du volant,
07:11 en se disant "ben on va sortir, on va aller se malader quelques heures,
07:14 voir s'il sort".
07:14 On est revenu, il était encore coincé.
07:17 Donc, en plein Teheran, on a dû démonter tout le tableau de bord du camion
07:20 pour s'enfuir le chat.
07:21 Avant que je travaillais, j'avais un stress qui était dû au fait de mon handicap.
07:26 Parce que je n'en avais pas forcément parlé à tous mes collègues.
07:29 Ils n'étaient pas tous au courant de mon handicap.
07:31 Donc, je rentrais dans mes collègues, je manquais des tâches.
07:34 Et c'était une question, je me mettais une question vraiment phénoménale
07:38 pour arriver à pallier mes handicaps,
07:40 faire que mes handicaps ne se voient pas au quotidien,
07:43 de paraître comme tout le monde dans un environnement
07:45 où il fallait être rentable, rapide, efficace
07:48 et pas de place aux sentiments.
07:50 Donc, le jour où j'ai arrêté ce job-là,
07:52 et où j'ai commencé à vivre comme j'avais envie,
07:55 et en ayant du temps,
07:57 je me suis dit "mais en fait, c'est le stress de la vie que j'avais d'avant,
08:01 il s'est remboulé".
08:03 Et pour rien que ça, mon handicap en fait, il n'a pas changé,
08:06 il n'est pas devenu moins fort, au contraire, il s'est même un petit peu dégradé.
08:10 Et je le vis beaucoup mieux.
08:11 Je le vis beaucoup mieux au quotidien, je suis beaucoup moins en difficulté,
08:15 je suis beaucoup moins stressée.
08:17 Et pour ça, c'est ça beau, toutes les maisons à vendre,
08:21 tous les meubles à vendre, tous les objets à vendre,
08:24 pour partir et se sentir beaucoup mieux.
08:26 Je pense qu'il est toujours bon de rappeler qu'à peu près,
08:28 si on prend l'ensemble des personnes handicapées,
08:31 il y a à peu près 80-90% de ces personnes handicapées
08:35 qui sont en terme de handicap invisibles.
08:37 Et c'est vrai qu'on ne se rend pas compte à quel point
08:40 le handicap est présent autour de nous.
08:42 C'est quelque chose qui, au final, est normal,
08:45 c'est quelque chose qui est courant.
08:47 Et on ne se rend pas compte à quel point les règles,
08:49 elles sont doublement invisibles, à part quand j'attache mes cheveux ou mes lunettes.
08:53 Mais bon, déjà, ça montre pas que j'ai une rétine pigmentaire
08:57 qui est lourde pour à peine devenir aveugle.
08:59 On ne pense pas à ça.
09:00 Marie, elle peut regarder son téléphone dans le métro et tenir sa canne blanche,
09:04 ce n'est pas incohérent parce qu'elle voit encore un peu,
09:06 mais pas suffisamment pour être 100% autonome.
09:09 Et on peut se garer sur une place handicapée
09:13 et descendre tous les deux en marchant naturellement.
09:15 Marie, on tient le bras, elle n'a pas l'impression qu'il y a un handicap en jeu,
09:19 une situation de handicap, et pourtant, il y en a.
09:22 Donc, c'est là-dessus qu'on assiste aussi pas mal.
09:24 Oui.
09:25 Je pense que le message, c'est, si vous pensez que vous subissez votre vie,
09:29 arrêtez de la subir et essayez de la prendre en main.
09:32 Essayez-le, c'est le livre, on essaye.
09:34 Au pire, on vient mort.
09:36 On prendra une vie un peu plus conventionnelle
09:38 et au final, on ne reflète du tout en vie.
09:40 On sait que c'était ça, c'était ce que vous voulez.
09:43 Et trouvez ce dont vous avez besoin et fabriquez le.
09:47 Allez-y.
09:48 Sous-titrage Société Radio-Canada

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