Cyril Chabanier, président confédéral de la CFTC sur franceinfo le 5 avril 2023.
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00:00 Qu'est-ce que vous attendez de ce rendez-vous, la première rencontre, le premier dialogue direct avec Elisabeth Borne
00:05 depuis finalement la présentation de cette réforme des retraites le 10 janvier dernier ?
00:10 Nous attendons tout simplement qu'elle entende les millions de salariés de français qui sont dans la rue
00:15 et qui s'opposent aujourd'hui à cette réforme des retraites et qu'elle retire ce texte
00:20 et qu'elle reconvoque les organisations syndicales à négocier un nouveau texte
00:24 en écoutant enfin nos propositions pour financer notre système par répartition autrement que par le report de l'âge légal.
00:32 Retirer cette réforme des retraites, elle l'a déjà dit, ce n'est pas du tout au programme.
00:36 Ça ne risque pas de tourner très rapidement au dialogue de sourds ?
00:40 Écoutez, c'est une possibilité. Après, on n'est jamais à l'abri d'une bonne surprise.
00:44 Donc je ne vais pas dire sa réponse avant de la voir rencontrer.
00:48 En tout cas, nous, nous y allons pour ça. Nous y allons pour parler des retraites,
00:52 parler de cette mobilisation, lui demander le retrait.
00:55 Non pas d'ailleurs pour ne plus parler des retraites, pour faire une autre réforme.
00:59 À la CFTC, nous avons conscience qu'il faudra faire une réforme des retraites,
01:02 mais réellement juste et efficace, ce qui n'est pas le cas de cette réforme qui est injuste et brutale.
01:07 Nous verrons bien comment ça va se passer. La première ministre fera sûrement un petit discours introductif.
01:12 Nous prendrons tous la parole et nous attendrons avec impatience sa réponse.
01:16 Et selon sa réponse, nous aviserons.
01:19 – Ça veut dire que vous vous dites que si Elisabeth Borne veut vous voir, les syndicats,
01:23 c'est quand même peut-être pour entre-ouvrir une porte, c'est ce que vous espérez en tout cas ?
01:28 – On l'espère, c'est une possibilité. On a un peu de mal à comprendre ce rendez-vous d'aujourd'hui.
01:33 Ça fait des semaines que nous demandons à rencontrer le président de la République
01:37 ou la première ministre, on n'a pas pu les rencontrer.
01:40 Nous avons le Conseil constitutionnel qui rend son verdict le 14, donc dans très peu de jours.
01:45 Si c'est pour nous recevoir aujourd'hui, pour rien nous dire ou dire que le texte ne bouge absolument pas,
01:50 quel est l'intérêt de cette réunion ? À ce moment-là…
01:53 – Pourquoi vous y allez alors ?
01:54 – D'abord parce qu'on ne connaît pas la réponse de la première ministre,
01:57 donc permettez d'avoir quand même un espoir.
01:59 Et puis il y a une tradition républicaine, on a demandé depuis des semaines à être reçu.
02:04 Quand la première ministre vous reçoit, vous y allez.
02:06 Mais c'est vrai que si c'est pour avoir aucune annonce, à ce moment-là,
02:10 il fallait nous recevoir qu'après ou en tout cas attendre le verdict du Conseil constitutionnel.
02:15 – Sur le moment de ce rendez-vous, vous dites finalement que c'est soit trop tard,
02:18 c'est-à-dire qu'il aurait fallu en parler avant de mettre la réforme au vote du Sénat et de l'Assemblée,
02:24 soit trop tôt, puisque maintenant il y a le Conseil constitutionnel
02:27 qui risque d'être le juge de paix dans cette affaire et ce sera le 14 avril.
02:30 – Oui, vous avez raison, c'est soit trop tard, soit trop tôt,
02:33 à moins d'avoir une annonce qui vraiment en trouve une porte pour modifier ce texte.
02:39 – La nouvelle secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet,
02:41 estime pour sa part qu'on ne peut pas parler des autres sujets
02:44 tant que le gouvernement ne retire pas sa réforme des retraites.
02:48 Est-ce que vous êtes tous sur la même ligne, sur cette ligne-là en particulier ?
02:53 – En tout cas pour la CFTC, on est sur cette ligne-là.
02:55 Il me semble que dans les différentes déclarations ces jours-ci,
02:58 j'ai entendu je crois la même chose de la part des différents leaders.
03:02 Il y a un combat qu'on mène en ce moment,
03:04 je vous rappelle que demain il y a une manifestation à Paris et dans toute la France,
03:08 il y a encore des actions qui se font, il y a des grèves reconductibles,
03:11 on attend avec impatience le verdict du Conseil constitutionnel
03:15 à la fois sur le texte mais aussi sur le référendum d'initiative partagée.
03:19 Donc quand on mène une lutte, quand on mène un combat,
03:21 on se concentre sur cette lutte et sur ce combat.
03:24 Donc on ne peut pas parler d'autres sujets aujourd'hui, ce n'est pas le moment.
03:28 – Votre trésor de guerre quelque part, les syndicats,
03:30 c'est l'unité depuis le début de ce mouvement qui a été remarqué, salué par beaucoup.
03:36 Sophie Binet de la CGT a tout de même prévenu,
03:39 ce rendez-vous, dit-elle, risque de tourner court.
03:41 Si la CGT claque la porte parce qu'Elisabeth Borne répète dès le début
03:45 qu'elle ne veut pas retirer son projet, est-ce que vous partez aussi ?
03:49 – On va voir ce que la Première Ministre va nous dire
03:52 et puis je crois que tout le monde est attaché, y compris Sophie Binet
03:58 avec qui j'ai pu échanger hier, sur le fait que ce combat on ne peut le mener
04:02 et on ne peut le gagner qu'ensemble.
04:03 Donc on est tous très attachés à cette inter-syndicale
04:06 et je crois que nous ferons tous les compromis nécessaires
04:10 pour pouvoir prendre des décisions communes, je ne suis pas inquiet.
04:13 Vous savez, depuis le 19 janvier, j'entends,
04:15 l'inter-syndicale va se fissurer dans les jours à venir.
04:17 Ça fait trois mois, on a montré, je crois, notre intelligence, notre compromis,
04:21 que ce combat on le menait ensemble, donc je ne suis pas très inquiet.
04:24 Puis, vous savez, dans ce type de réunion, la Première Ministre introduit le sujet,
04:28 passe la parole à l'ensemble des huit organisations syndicales,
04:31 donc je ne pense pas que la réunion durera cinq minutes,
04:34 même si je ne suis pas sûr qu'elle durera trois heures aussi, telle qu'elle est prévue.
04:38 - Donc chacun pourra s'exprimer, en tout cas c'est ce que vous espérez.
04:40 Vous allez dire quoi, Élisabeth Born, vous êtes le représentant d'un syndicat réformiste,
04:45 le gouvernement, après avoir beaucoup oscillé entre les différents arguments pour défendre sa réforme,
04:49 s'est arrêté, on va dire, ces dernières semaines, sur celui de l'équilibre financier du système des retraites.
04:55 Qu'est-ce que vous allez proposer, vous ?
04:57 Comment on réforme autrement, sans faire travailler les Français plus longtemps ?
05:01 - On réforme autrement déjà en agissant sur les recettes plus que sur les dépenses.
05:06 Il faut arrêter avec ce triptyque "baisser les pensions, augmenter les cotisations",
05:11 il y a d'autres sujets.
05:12 Il y a une directive européenne qui vient de passer ces jours-ci,
05:15 et qui doit être transposée en France pour l'égalité salariale.
05:18 Rien que l'égalité salariale femme-homme, c'est plusieurs milliards d'euros qui rentrent dans les caisses.
05:23 On sait que si on améliorait l'emploi des seniors de 10-15%, c'est 10 milliards qui rentrent dans les caisses.
05:28 Voilà des premiers sujets qu'on pourrait mettre sur la table et qui régleraient le problème du déficit.
05:33 Après, il y en a d'autres, on peut faire des contributions plus importantes pour les gros revenus.
05:36 Aujourd'hui, quelqu'un qui gagne 10 000 euros par mois ou 3 500 euros par mois,
05:40 a le même taux de 6,9 de cotisation.
05:43 Ça pose un certain nombre de questions.
05:45 Il y a plein de sujets qu'on a évoqués lors des concertations,
05:49 mais qui ont été balayés dans revers de la main en quelques secondes.
05:52 En fait, et je le dis depuis le départ, sur ce sujet des retraites,
05:55 le véritable problème, c'est qu'on n'a pas pu parler de mode alternatif de financement
05:59 et qu'on n'est pas non plus allé au bout sur des sujets clés tels que la pénibilité,
06:03 où honnêtement, il y a des petites choses dans cette loi, mais on ne l'a pas traité dans le fond.
06:07 Donc, il faut prendre le temps. Il n'y a pas d'urgence financière.
06:12 À la CFTC, vous savez, on n'a jamais dit qu'il n'y avait pas de problème de déficit dans l'avenir de notre système.
06:17 Mais il n'y a pas une urgence à traiter ça rapidement.
06:19 Il y a des tas de sujets qu'on peut mettre sur la table.