Lors de cette 11e de journée de mobilisation, 570 000 manifestants ont défilé dans les rues du pays selon le ministère de l'Intérieur contre "près de 2 millions" pour l'intersyndicale. Le gouvernement, de son côté, reste sur sa ligne de fermeté. François Ruffin, député LFI de la Somme, est l'invité de 22h Max sur BFMTV.
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00:00 Bonsoir François Ruffin.
00:01 Bonsoir.
00:02 Merci beaucoup d'être là en plateau avec nous en direct ce soir député de la France
00:05 Insoumise de la Somme, engagé évidemment contre cette réforme des retraites depuis
00:08 trois mois, et prêt pour la douzième journée de mobilisation ?
00:11 Oui évidemment.
00:12 Il y a un marathon qui est engagé, on ne sait pas si on va être médaille d'or aux
00:16 Jeux Olympiques de l'année prochaine, mais c'est bien parti.
00:19 On a déjà des kilomètres dans les pattes, mais on sait qu'il reste un certain nombre
00:22 de kilomètres devant aussi.
00:23 Vous serez interrogé ce soir par Pauline Simonnet, par Pablo qui s'installe, par Géraldine
00:27 Vosner et par Antoine André, on va parler de cette réforme de la stratégie adoptée
00:31 que vous pourriez adopter pour la faire tomber de la manière dont vous tentez de parler
00:35 aux électeurs de gauche, notamment de l'inflation, etc.
00:37 Mais de droite, du centre, d'abstentionnistes, de partout à la France tout entière, il n'y
00:43 a pas d'éthique sur le vaisseau.
00:45 On a beaucoup de choses à voir.
00:46 Simplement sur le sujet qui nous intéressait juste avant que vous n'entriez sur ce plateau,
00:50 avec encore une fois ces tensions des violences aujourd'hui, 150 policiers et gendarmes
00:54 blessés dans les cortèges.
00:55 En France, on n'a pas le nombre de blessés côté manifestants pour l'instant.
00:59 Est-ce que vous dites que ces violences sont le résultat d'une colère qui explose ?
01:03 Ou est-ce que vous faites une distinction totale entre ce qui se passe là, ces violences-là,
01:08 et la colère des manifestants, c'est-à-dire des vrais manifestants ?
01:11 De toute façon, je refuse toute violence d'où qu'elle vienne.
01:13 Qu'elle vienne des manifestants protestataires de cette manière-là, qu'elle vienne de la
01:18 police, qu'elle vienne du gouvernement.
01:19 Donc il y a un refus, et pour des raisons à la fois morales.
01:22 Je veux dire que quand je vois un homme ou une femme qui porte un uniforme ou qui n'en
01:27 porte pas et qui se retrouve allongé sur une civière, personne ne peut s'en réjouir
01:32 de mon point de vue.
01:33 Et aussi pour des raisons politiques.
01:35 Parce que qu'est-ce qui se passe ? À quoi vous avez consacré votre soirée ? Vous n'avez
01:40 pas consacré votre soirée à vous demander le gars de chez Saint-Gobain, que je croisais
01:44 ce matin, qui se dit "bon sang, je suis dans un four qui a 70 degrés, comment je vais
01:49 faire ? C'est même pas retenu dans les critères de pénibilité, je suis en 5-8, ça fait
01:52 30 ans que je fais ça, comment je vais tenir jusqu'à 64 ans ? C'est pas ça.
01:55 Vous avez consacré votre demi-heure à parler des 600 personnes dans le cortège de terre.
02:00 Non, non, c'est pas vrai.
02:01 On vient d'en parler les 15 dernières minutes, avant ça on était arrêté de Montréal-Morant
02:04 de la CGT pour parler justement de la mobilisation.
02:06 J'explique pourquoi je suis opposé aux violences, à la fois sur le terrain moral et sur le
02:11 terrain politique.
02:12 Mais vous êtes minoritaire dans votre famille politique, pardon.
02:14 Vous êtes l'un des très très rares à le dire clairement.
02:18 On a posé la question à un certain nombre de députés de l'ANUP, à l'FI, et des VER
02:28 aussi, on n'a pas eu de confondation, ça n'a pas été possible.
02:32 En tout cas, quand j'entends Jean-Luc Mélenchon par exemple, il me semble qu'il y a une certaine
02:35 clarté sur le fait de dire…
02:39 Parce que vous parlez peut-être une langue différente ?
02:40 En tout cas j'ai les mêmes oreilles que vous, tout va bien de ce côté-là, je crois
02:44 qu'on est à peu près normalement composés.
02:45 Mais voilà, pour moi il y a un piège qui nous est tendu, je l'ai dit d'avance,
02:52 après le 49-3, toutes les issues politiques quelque part ont été bouchées.
02:57 D'ailleurs ça me fait penser, vous voyez pendant la crise de Gilets jaunes, j'interroge
03:01 des syndicats policiers et ils me disent "on est dans une crise sociale, une crise politique
03:06 qui réclame une réponse sociale, une réponse politique, on n'offre qu'une réponse policière".
03:10 Et on se retrouve dans la même situation, on a une crise sociale, une crise politique
03:15 qui réclame une réponse sociale, une réponse politique, on n'a qu'une réponse policière.
03:19 Les policiers se retrouvent pris au milieu de ça, mais je veux dire, il y a pour moi
03:23 quelque chose qui est de l'ordre de la stratégie du chaos, qui fait qu'on a un débat qui
03:27 subit un détournement et que la question elle est plus "qu'est-ce qui se passe pour
03:31 les gens qui vont devoir aller bosser jusqu'à 64 ans", ce qui moi me tient à cœur, ce
03:35 qui n'est plus même "qu'est-ce que c'est que cette crise démocratique très profonde
03:40 dans laquelle le pays est en train de foncer" mais qui devient…
03:42 Pour vous c'est un kidnapping d'une certaine manière ?
03:44 Ce que font les casseurs qui utilisent…
03:46 Ce que je veux pas être hémiplégique dans le constat.
03:49 Mais François Ruffin…
03:50 Vous êtes très clair.
03:51 Et je pense que le gouvernement ne devrait pas l'être non plus, vous voyez, et je
03:56 veux pas être hémiplégique dans le constat.
03:58 Mais François Ruffin, quand vous voyez ces images en direct en Etat-Unis d'Italie
04:00 à Paris avec des casseurs qui là sont en train de monter une barricade et mettre le
04:03 feu à des poubelles, vous dites quoi ? C'est un kidnapping d'une certaine manière, on
04:06 est en train de kidnapper votre mouvement.
04:08 Ensuite, moi je distingue ce qui est du jet de pierre sur des gens et ce qui est de l'ordre
04:12 de la barricade, enfin vous voyez, il y a des degrés de choses qui sont pas de la même
04:16 nature.
04:17 Enfin je le redis, moi c'est pas par la violence qu'on sortira de cette crise.
04:20 Mais maintenant, qui a la clé de l'apaisement dans le pays ? La clé de l'apaisement dans
04:25 le pays pour moi c'est très clair, c'est le gouvernement qui a la clé de l'apaisement,
04:29 qui a un certain nombre de solutions qui lui ont été proposées encore hier quand Madame
04:33 Borne a reçu l'intersyndical à Matignon, et par des gens très responsables.
04:38 Il fait des mois et des mois qu'on a Laurent Berger et compagnie, des gens qui sont raisonnables
04:43 et qui offrent des pistes de sortie pour le pays de cette crise profonde.
04:48 Alors il y a le retrait, c'est non.
04:49 Il y a le référendum, c'est non.
04:52 Il y a la médiation.
04:53 On sait pas encore.
04:54 En tout cas, de la part du gouvernement.
04:57 Ils pourraient le poser sur la table sans attendre le référendum d'initiative partagée.
05:00 On va parler toutes ces portes de sortie, on va parler aussi de la mobilisation.
05:03 12e journée la semaine prochaine, mais juste avant, un détour par cette avenue d'Italie,
05:06 ce qui est en train de se passer du côté de la Place d'Italie, avec l'une de nos
05:11 reportères qui est sur place, reportère de BFMTV, avec donc ce début de barricade
05:15 sur cette grande avenue, sur cette large avenue d'Italie à Paris.
05:19 Oui, vous voyez cette barricade qui a été montée avec du mobilier urbain, plus précisément
05:24 des containers à poubelle qui ont été tout simplement posés au milieu de la rue et
05:29 là qui sont en train d'être enflammés, c'est-à-dire que le but c'est de faire
05:33 une barricade de feu.
05:34 Tout à l'heure il y avait encore des voitures, mais les voitures ont fait demi-tour parce
05:38 que tout simplement elles ont vu que la rue était bloquée et vous voyez ces derniers
05:41 éléments récalcitrants qui sont là et qui souhaitent bloquer la rue.
05:45 Tout à l'heure il y avait quand même des membres des forces de l'ordre qui étaient
05:47 encore présents mais qui finalement se sont retirés et là évidemment le risque c'est
05:52 que quand même il y ait des débordements, notamment outre le mobilier urbain, d'autres
05:56 dégradations dans la rue et c'est pour cela évidemment que les manifestants restent
06:01 actuellement, c'est pour dégrader du mobilier urbain.
06:04 Je dis manifestants mais en fait là on est clairement sur des casseurs et sur des gens
06:07 qui ont envie de se confronter aux membres des forces de l'ordre.
06:11 Là actuellement ce qui est étonnant c'est de ne pas voir d'effectifs de police arriver,
06:16 c'est ça qui est le plus étonnant parce que généralement ils sont quand même assez
06:19 rapides et ils arrivent très très vite sur place parce qu'ils sont très mobiles,
06:23 on pense notamment aux équipes motorisées qui dès qu'il y a un débordement arrivent
06:26 et là ce qui est étonnant c'est de ne voir personne arriver actuellement.
06:29 Mais en tous les cas ces éléments perturbateurs ont l'air d'avoir envie de rester sur place
06:33 et de ne pas se disperser, c'est ce que vous voyez actuellement.
06:36 Merci à vous François Ruffin, la mobilisation du jour.
06:40 On reste à niveau élevé.
06:41 Je veux bien commenter ça.
06:42 Ah pourquoi ? Allez-y.
06:43 D'abord parce qu'il y a un feu de cheminée qui est en train de se faire.
06:45 Foubelle.
06:46 Foubelle.
06:47 Mais vous savez, dans l'histoire de France et en particulier au XIXe siècle, on a eu
06:53 des images qui pouvaient ressembler à ça avec des barricades successives 1789, 1830,
06:58 1834, 1848, 1871.
07:01 Une violence populaire insurrectionnaire régulière dans notre histoire.
07:05 Comment on s'en est sorti ? On s'en est sorti par le haut, par la République et le suffrage
07:11 universel qui a été un mode de régulation des conflits.
07:15 Et quelques massacres.
07:17 Versailles c'était avant, enfin s'il s'agit des Versaillais.
07:22 Mais enfin en tout cas on s'en est sorti en construisant cet outil qui nous a permis
07:26 que la régulation ne passe plus par de la violence insurrectionnelle.
07:31 Aujourd'hui je pense qu'on est dans un même état.
07:33 C'est-à-dire qu'il nous faut inventer des nouveaux outils démocratiques qui permettent
07:38 que ça ne passe pas par de la violence insurrectionnelle mais qu'il y ait une régulation institutionnelle
07:42 qui permette une intervention populaire quand il y a des accords, comme le désaccord profond
07:47 qui est là.
07:48 Moi je souhaite qu'il y ait un 49-3 citoyen.
07:50 Mais vous sortez profondément une France insurrectionnelle aujourd'hui ?
07:53 Non, en tout cas je pense qu'il y a… je ne dis pas qu'on est au bord d'une situation
07:58 interactionnelle, je ne veux pas dire qu'on est dans une situation révolutionnaire.
08:01 Je dis qu'en revanche on est dans une crise démocratique très profonde.
08:04 Vous ne faites pas la distinction entre quelques énervés qui n'ont des revendications que
08:11 très lointaines avec celles que vous portez et la foule des… je trouve que la comparaison
08:18 est quand même très très audacieuse.
08:19 Non mais je vous dis que dans l'âme des gens, et y compris des gens qui ne bougent
08:24 même pas en manifestation, il y a quelque chose qui est de la colère, qui est simplement
08:28 de l'ordre de « là-haut de toute façon on a beau faire ils ne nous entendent pas ».
08:32 Ça s'appelle du ressentiment, ça s'appelle comme vous voulez…
08:35 Un populisme aussi.
08:36 Mais non, mais ça correspond à une situation présente.
08:38 Les gens, ils ont dit très clairement ce qu'ils pensaient de cette réforme des retraites
08:43 depuis des mois et des mois maintenant.
08:44 Ils l'ont dit de manière calme et pacifique.
08:46 Ils l'ont dit dans des sondages.
08:48 Oui, les sondages.
08:49 Ils l'ont dit dans des sondages.
08:50 La démocratie ce n'est pas les sondages.
08:53 Vous allez me dire ce que c'est votre démocratie à la fin, qu'est-ce qui va en rester.
08:58 Votons, d'accord ? Deux Français sur trois disent non on ne veut pas de cette réforme.
09:02 Quatre salariés sur cinq, qui sont quand même les premiers concernés, disent qu'on
09:05 ne veut pas de cette réforme.
09:07 Aucun gouvernement ne peut pas mettre les sondages dans le champ.
09:09 Tous les syndicats unis disent qu'on ne veut pas de cette réforme.
09:12 L'Assemblée, on ne lui demande pas de voter parce que sinon une majorité des députés
09:18 auraient voté contre cette réforme.
09:19 Mais vous demandez une réforme institutionnelle dans ce cas.
09:21 Oui, je la demande, je vais y venir.
09:23 On a même tous les syndicats unis qui ne veulent pas de cette réforme.
09:27 À la fin, ça fait quand même un petit peu beaucoup.
09:29 Et on a un homme très isolé là-haut qui dit si, il y aura cette réforme.
09:34 Est-ce que le problème ce n'est pas les institutions ?
09:36 Parce que les institutions, François Ruffin, pour les réformer, pourquoi pas ? Mais ça
09:42 va prendre du temps.
09:43 Là, on est dans une situation d'urgence avec un pays, on voit bien, qui est en crise
09:46 depuis six mois, depuis le début de cette réforme.
09:48 Est-ce que le problème aujourd'hui, c'est plus qu'institutionnel ? C'est le problème,
09:52 vous l'avez nommé, le problème d'un homme qui, dans sa façon de gouverner, finalement,
09:56 s'enferme dans une forme de rapport de force extrêmement brusque.
09:59 Mais qui le payera dans les urnes ?
10:00 Oui, mais qui ne le payera pas dans les urnes ?
10:01 Pas lui-même personnellement, mais dans les urnes.
10:02 Oui, parce qu'il ne se représentera pas.
10:03 C'est ça le sujet du moment.
10:04 Je vais vous dire, moi, ce qui adviendra de Macron, je m'en fiche.
10:09 Ce qui adviendra de mon pays et de la démocratie dans mon pays, je ne m'en fiche pas.
10:15 Quelle est la situation de l'an dernier ? Emmanuel Macron est réélu sans élan et sans panache,
10:24 avec un deuxième tour, Farage Samarine Le Pen, où il dit "ce vote m'oblige".
10:28 Derrière, il y a des élections législatives où, dans des coins comme le mien, il n'arrive
10:32 pas à envoyer ses candidats au deuxième tour, où il est décroché dans des ports entiers
10:36 de pays, où on a un groupe Rassemblement National qui n'a jamais été aussi puissant.
10:40 Dans les terres populaires notamment.
10:41 Oui, dans les terres comme les miennes.
10:43 Ça veut dire une situation de grande fragilité, de grande fragilité pour sa famille politique,
10:48 pour lui-même, mais même une situation de grande fragilité démocratique pour le pays,
10:52 avec un pays fracturé en trois blocs, un bloc central-libéral, un bloc d'extrême-droite,
10:58 un bloc de gauche.
10:59 Et personne ne veut bosser avec les autres.
11:00 Mais au-delà de ça, que doit faire un homme qui se retrouve à la tête de l'État, dans
11:06 cette situation de fragilité pour le pays ? Je pense qu'il doit gouverner avec sagesse,
11:11 avec modération, avec prudence, avec mesure.
11:15 Or, qu'a fait Emmanuel Macron depuis un an ? Il a comblé sa fragilité par de la brutalité.
11:22 Il passe dans sa solitude par-dessus le corps social tout entier.
11:30 Eh bien, ça produit des dégâts dans le pays, ça produit de la tension dans le pays.
11:35 Alors, il y a ces feux de poubelle, ok, mais derrière, il va y avoir plus grave.
11:39 Derrière ce qui va s'installer dans le pays, c'est un nouveau décrochage, on va y venir,
11:44 je pense, debout du bloc central-libéral.
11:47 Et où ça va aller ? Où ça va aller quand on produit ce ressentiment profond dans le
11:53 pays, quand on produit cette résignation ? Ça fait six mois que je donne mon avis.
11:59 Mais François Ruffin, on voit que les pompiers d'ailleurs sont en train d'intervenir à
12:02 l'avenue d'Italie, je le précise tout de suite avec ces images en direct de Nicolas
12:05 de Rossy.
12:06 Emmanuel Macron, il vous a déjà répondu, son entourage vous a déjà répondu, l'entourage
12:09 de l'Elysée, qui dit si les gens ne voulaient pas aller 64 ans, ce n'était pas Emmanuel
12:13 Macron qu'il fallait mettre au pouvoir, qu'il fallait mettre notamment au premier
12:16 tour de la présidentielle l'an prochain.
12:17 Et puis Emmanuel Macron et son entourage vous répondent quand ils vous disent qu'Emmanuel
12:21 Macron était très clair au moment de la présidentielle sur son programme et qu'on
12:25 a un président élu avec ce programme qui est en train d'appliquer ce programme aujourd'hui.
12:29 Vous savez, il y a plein de choses à dire de ça.
12:32 Dans son programme, il y avait par exemple que les accompagnantes d'enfants en situation
12:35 de handicap auraient un salaire décent, le salaire minimum.
12:38 Il n'y a pas la même célérité à mettre cette mesure en œuvre.
12:43 Donc on pourrait faire un certain nombre de comparaisons de cette nature-là.
12:46 Mais je pense qu'il faut se placer au-dessus de ça.
12:48 Il faut se dire que le président de la République est garant de l'unité de la nation et que
12:53 ça passe par-dessus.
12:54 Et que là, ce qu'il fait, ce qu'il fait par orgueil, ce qu'il fait pour son égo,
13:02 ce qu'il fait parce qu'il est atteint d'une forme d'hubris, de démesure, comme
13:05 on dit dans la tragédie grecque, fait qu'il est en train de briser le pays.
13:10 Il est en train de conduire la division dans un pays qui est déjà blessé.
13:14 Qui est blessé pourquoi ? Qui est blessé parce qu'on sort de deux années de crise
13:18 Covid avec des gens qui sont ulcérés, qui sont fatigués, qu'on a la guerre en Ukraine
13:23 derrière, qu'on a les factures d'énergie qui explosent, qu'on a les salaires qui
13:27 suivent pas l'inflation.
13:28 On a tout ça.
13:30 Et je le disais, moi, il y a six mois, je disais faire cette réforme des retraites
13:34 aujourd'hui pour le pays est une folie.
13:36 On conduit le pays dans une folie.
13:38 Donc, venir dire, je l'avais dit, ça ne tient pas.
13:42 Si on veut être à la hauteur de ce qui se passe aujourd'hui, on doit prendre des décisions
13:48 qui doivent viser l'apaisement de ce pays.
13:50 Qui doivent se dire, mais qu'est-ce qu'on a à faire ensemble ?
13:53 Là, et manifestement, ça produit des brandons de la discorde.
13:56 Qu'est-ce qu'on a à faire ensemble ? On a un pays à réparer ensemble.
13:59 Ça, vous l'avez déjà dit plusieurs fois, notamment à Emmanuel Macron.
14:02 La réponse, elle semble assez claire.
14:04 Il veut aller jusqu'au bout et tenir sur sa réforme des retraites.
14:06 Qu'est-ce que vous pouvez faire de votre côté, vous, la gauche, la France insoumise,
14:10 pour rassembler ce pays, pour justement éviter ce que vous êtes en train de nous décrire,
14:14 le pire, un pays fracturé, divisé, brisé, et cette explosion de violence ? Qu'est-ce
14:18 que vous vous proposez si Emmanuel Macron, et c'est ce qu'il a dit qu'il ferait, maintient
14:22 cette réforme et continue à passer ?
14:24 D'abord, vous avez prononcé le mot "jusqu'au bout", et je pense que c'est un mot qui est
14:28 juste et que nous avons un jusqu'au boutiste.
14:30 Il le revendique d'ailleurs, il s'en fiche de l'impopularité.
14:34 Ça me paraît très problématique.
14:36 Tout ça, rappelons-le, d'après l'OFCE, s'épargnait 0,1 point de PIB.
14:41 Donc, on n'est plus dans du budgétaire, on est dans du symbolique de l'autoritaire.
14:46 Qu'est-ce qu'on peut faire ? Nous sommes représentants de la nation.
14:50 Ça veut dire que la démocratie, c'est du conflit, mais c'est l'organisation du conflit,
14:56 c'est l'institutionnalisation du conflit.
14:57 Moi, j'ai pour rôle de porter la voix des gens que j'ai vus ce matin, qui travaillent
15:04 chez Stor & J, ou qui travaillent chez Veralia, mais aussi des gens qui ne viennent même
15:09 pas sur les piquets de grève, mais qui sont femmes de ménage et qui se disent "mais bon
15:15 sang, il est fou de nous mettre deux ans de plus".
15:16 Donc, j'ai la voix de porter cette voix-là pour qu'ils se sentent reconnus en nous et
15:20 qu'ils se disent "nous ne sommes pas des gens qui ne sont rien, il y a des gens qui
15:24 nous écoutent, on existe et on n'est pas condamnés à se résigner".
15:28 – François Ruffin, vous avez employé plusieurs fois le mot de crise.
15:31 Anthony a l'employé, on l'a quasiment tous employé, crise.
15:34 Je guette les réactions sur le plateau.
15:35 Vous avez tiqué, Pablo, tout à l'heure quand Anthony parlait de crise, précisément,
15:39 en disant que ça faisait six mois qu'on était en crise, je vous ai vu tiquer et noter sur
15:42 votre petit carnet.
15:43 – Non, mais je ne suis pas… – C'est la déchire.
15:46 – Non, ce n'est pas que je ne suis fondamentalement pas d'accord avec le fait que ça fait six
15:49 mois qu'on est en crise, mais j'ai l'impression que ça fait beaucoup plus de temps, en fait,
15:53 qu'on vit cette crise démocratique et institutionnelle et que, d'ailleurs, on mélange les institutions
15:58 et la démocratie de façon assez forte.
16:02 Moi, ce qui me trouble, en fait, quand je vous écoute, François Ruffin, il y a une
16:06 chose que je… j'ai l'impression que vous faites une proposition, une proposition qui
16:11 est tout à fait valable dans le champ politique, mais qu'elle n'est pas suivie derrière,
16:15 en fait, par des faits.
16:18 Tout à l'heure, vous citiez des sondages.
16:19 Vous avez cité les sondages qui disaient qu'en gros, une majorité de Français étaient
16:23 contre la réforme.
16:24 Il y a aussi des sondages qui disent que, récents, notamment, et là pour BFMTV, en
16:29 gros, qui disent que, certes, le Bloc central s'écroule, certes, il y a une dynamique
16:34 du côté du Rassemblement national, mais surtout que du côté de la NUPES, c'est assez stagnant.
16:38 Qu'est-ce que vous faites de ça, en fait ?
16:40 Est-ce que le discours, en fait, qui est porté par la gauche, par la NUPES, par vous, est-ce
16:46 que vous avez l'impression qu'il n'arrive pas à prendre ?
16:48 Attendez avant de répondre.
16:49 Pardon.
16:50 Il faudrait qu'on détaille le sondage, précisément.
16:52 Pablo est en train de marcher sur les plates-bandes.
16:54 Pauline, ce sondage est là pour qu'on continue à en parler, que tout le monde sache de quoi
16:59 on parle ce soir.
17:00 Donc, c'est un sondage qui ne cherche pas à prédire ce qui va se passer en 2027, puisque
17:04 là, Emmanuel Macron, il ne sera plus candidat.
17:06 Là, la question qui est posée, en fait, c'est de refaire le match.
17:08 On a posé d'abord la question pour le premier tour.
17:10 Si le premier tour avait lieu maintenant, pour qui voteriez-vous ?
17:13 Et vous allez voir, il y a une progression spectaculaire de Marine Le Pen, 31 %, près
17:19 de 8 points au-dessus d'Emmanuel Macron.
17:21 C'est une inversion de l'ordre d'arrivée.
17:23 Emmanuel Macron à 23 %, qui est 5 points en dessous de ce qu'il avait fait en 2022.
17:27 Pour le reste, les équilibres sont plus ou moins maintenus, même si Jean-Luc Mélenchon
17:31 est un peu en recul au profit de Fabien Roussel, qui double son score.
17:35 Ce qui est intéressant, c'est que du côté de Marine Le Pen, on voit qu'elle gratte un
17:38 peu partout, dans toutes les catégories électorales.
17:41 Et puis, au deuxième tour, c'est là évidemment que c'est le plus "spectaculaire".
17:44 C'est Marine Le Pen qui l'emporte très largement, 55 % contre 40 %, parce qu'en fait, dans la
17:51 question qu'on pose aux Français, finalement, il y a un vote barrage, mais contre Emmanuel
17:56 Macron, cette fois.
17:57 Et du côté des électeurs de Jean-Luc Mélenchon, c'est la même chose du côté de Valérie
18:01 Pécresse ou de Yannick Jadot.
18:03 Finalement, le report ne se fait pas bien du tout.
18:06 Et puis, on regarde également du côté des législatives ce qui se passerait.
18:09 Et là, on voit que c'est un effondrement, en tout cas un net recul pour ensemble.
18:15 La coalition d'Emmanuel Macron, 21,5, quatre points de moins.
18:18 Et en fait, il perdrait la moitié de leurs députés.
18:20 La NUPES, elle reste effectivement, comme le disait Pablo, au même niveau, 25,5 %.
18:27 Le Rassemblement national, en revanche, monte.
18:29 C'est la plus forte progression.
18:30 On est donc au coup d'à-coups entre la NUPES et le RN.
18:33 Regardez ce que ça donne en projection de sièges à l'Assemblée.
18:36 Effectivement, c'est trois blocs.
18:37 On est sur cette tripartition de la vie politique qui se maintient avec 150 à 180 sièges pour
18:42 la NUPES et 150 à 175 sièges pour le Rassemblement national.
18:45 Voilà, les choses sont posées.
18:46 Vous pouvez répondre à Pablo et à Pauline aussi, également.
18:50 D'abord, je pense que ce sondage, et qui fait suite à une série d'autres, devrait être
18:55 pour nous un électrochoc.
18:56 Oui.
18:57 D'abord, pour le camp du président de la République.
19:01 Moi, je parie sur un effritement dans la durée du camp libéral central.
19:05 Et là, on a un décrochage.
19:08 On a un bloc qui se décroche d'un coup.
19:11 Je pense que ça devrait être une alerte et une vraie remise en cause de la politique
19:16 qui est menée par le gouvernement.
19:17 Je dis pour eux, mais pour le pays tout entier.
19:20 Ça, c'est la première chose.
19:21 Ça les concerne, mais je dis que ça nous concerne aussi.
19:23 La deuxième chose, c'est pour nous.
19:26 On doit se demander comment ça se fait qu'on a une crise sociale majeure qui se produit,
19:31 qui est sur un thème à nous, les retraites.
19:32 Et en plus, le deuxième thème qui est derrière, c'est quoi ?
19:35 Dans le quotidien de la vie des gens, c'est l'inflation, c'est les salaires, c'est comment
19:41 on remplit son cadier, comment on fait son plein.
19:43 C'est encore un deuxième thème de gauche.
19:44 Comment ça se fait que dans ce climat-là, ça ne bascule pas vers nous et ça bascule
19:50 plus vers le Rassemblement national ?
19:52 Je pense que ça doit nous servir de remise en cause.
19:55 Comment vous l'expliquez, ça ? Où est-ce que vous pêchez ?
19:59 Je pense qu'il doit y avoir une vraie interrogation.
20:02 Est-ce que quand on parle, on cherche à parler au pays tout entier ou bien on cherche à
20:07 parler à un bout de notre camp ? C'est pour ça que quand vous me disiez tout à l'heure,
20:13 je viens parler pour le pays, je viens parler pour la gauche, je viens parler pour les
20:16 gens qui sont dans les manifs, je viens parler pour un continuum de tout ça, mais j'ai pour
20:19 objectif de parler au pays tout entier, donc à qui on s'adresse.
20:23 De quoi a besoin le pays aujourd'hui ? Est-ce qu'il a besoin d'être radicalisé ou est-ce
20:29 qu'il a besoin d'être rassuré ? Pour moi, le pays aujourd'hui, il a besoin d'être rassuré.
20:34 Justement, il y a un début d'explication.
20:36 Ça me fait penser à vous qui faites campagne dans un quartier de Damien, je me rappelle
20:41 très bien, vous aviez une espèce de combo pour parler aux gens et vous vous adressiez
20:46 comme ça aux gens et qui vous disaient "on votait à gauche, mais maintenant on va voter
20:50 Marine Le Pen".
20:51 En réalité, c'est un peu comme sur la police, par rapport au reste de l'AFI et de la NUPES,
20:55 vous avez une spécificité que je trouve tout à fait intéressante, c'est-à-dire que
20:58 vous battez pour ramener le peuple de gauche à voter à gauche sur les thèmes de pouvoir
21:04 d'achat, sur les thèmes de pauvreté, sur les thèmes de niveau de vie, sur les thèmes
21:07 des salaires, et on vous entend beaucoup là-dessus.
21:10 Mais en réalité, pendant ces débats sur la réforme des retraites, ce qu'on a vu de
21:13 l'AFI et de la gauche, c'était de l'agite propre à l'Assemblée, c'était beaucoup
21:17 de discours sur les violences policières et sur l'autoritarisme d'Emmanuel Macron,
21:21 et pas sur les thèmes de gauche qui vous sont si chers et que vous êtes en train d'évoquer
21:26 là.
21:27 Est-ce que ce n'est pas ça que, d'une certaine façon, la NUPES a raté dans cette réforme,
21:30 c'est-à-dire de vraiment parler à cet électorat ouvrier populaire qui aujourd'hui se tourne
21:34 vers le Rassemblement National ?
21:35 Je crois que c'est moins une question de fond que de ton.
21:39 Vous savez, je vous ai dit, finalement, Emmanuel Macron, qu'est-ce qu'il devrait faire aujourd'hui
21:46 ? Il devrait parler avec mesure, avec pondération.
21:50 Je pense que plutôt que d'être quasiment le symétrique d'Emmanuel Macron…
21:55 Comme les Mélenchon ?
21:56 Comme on l'est.
21:58 Eh bien, je pense qu'on devrait se détacher, prendre de la hauteur.
22:03 Essayer de prendre de la hauteur, ce n'est pas facile tous les jours parce qu'ils sont
22:05 énervants quand même.
22:06 Mais essayer de prendre de la hauteur et se dire comment on rassemble le pays.
22:11 Mais pardon, j'ai deux exemples sur ce que vous dites là, sur les dernières 24 heures.
22:15 Jean-Luc Mélenchon qui explique que M.
22:17 Darmanin est un mélange de Bolsonaro et de Trump.
22:20 Quand Bastien Lachaud, votre collègue député insoumis, explique que le modèle du gouvernement,
22:25 leur modèle, c'est Vichy.
22:26 Vichy.
22:27 En tout cas…
22:28 Non mais attendez.
22:29 Non mais je vais vous dire, je vais répondre.
22:32 Vous n'allez pas faire les questions et les réponses.
22:35 Allez-y.
22:36 Vichy.
22:37 Il s'appelle la France Bobo, pas la France des tours d'Amiens.
22:40 Le comportement de M.
22:42 Darmanin est extrêmement inquiétant.
22:43 Je veux dire, quand il a une vision hémiplégique, il doit être lui aussi le garant de l'unité
22:51 de la nation.
22:52 Il doit se demander comment on maintient la paix publique pour tous.
22:56 Et ce qui se passe par exemple à Saint-Sauline, il y a des manifestants violents et il y a
23:04 des gens qui ont des papiers des mamies, il y a des gens avec leurs poussettes qui sont
23:07 frappés par des tirs.
23:09 Je pense que quand on est ministre de l'Intérieur, on doit couvrir tout ça, dire tout ça, montrer
23:15 tout ça et avoir un regard critique sur qu'est-ce qui se passe.
23:18 Qu'est-ce qui se passe quand on a une réponse policière à une crise sociale et une crise
23:23 démocratique.
23:24 Quand hier, M.
23:27 Darmanin, quand même, je veux dire, les alertes, il y a le Conseil de l'Europe qui
23:31 alerte, il y a le rapporteur de l'ONU qui alerte.
23:34 Sur le matelas de l'ordre en France.
23:35 Oui.
23:36 Il y a la défenseure des droits qui alerte.
23:37 Il y a même la Maison-Blanche qui alerte presque.
23:41 Vous tombez dans le piège du débat sécuritaire.
23:43 Non, non, c'est vous qui me posez la question sur M.
23:46 Darmanin.
23:47 Si vous m'amenez sur ce thème-là, je suis bien obligé de vous répondre.
23:50 Je vous dis, il y a des alertes quand même de toutes ces institutions et ici, en France,
23:56 on ferait comme si ça n'existe pas.
23:58 Je vous dis, je ne veux pas être hémiplégique.
24:01 Je ne suis pas hémiplégique sur la violence qui se produit du côté des manifestants,
24:05 et le gouvernement ne doit pas l'être, du côté des forces de l'ordre.
24:08 Très bien, mais est-ce que c'est nécessaire d'aller chercher Vichy, régime collaborationniste
24:13 avec l'Allemagne nazie, etc. pour comparer ce qui se passe aujourd'hui en France ?
24:16 C'est ce que font nos collègues insoumis ?
24:17 En tout cas, je dis que qu'est-ce qui se passe pour le pays depuis maintenant cinq
24:24 années d'Emmanuel Macron ? Je vous l'ai dit, on a une réponse policière.
24:27 Qu'est-ce qui se passe ? On a un resserrement libéral autoritaire qui se produit.
24:31 Libéral ?
24:32 Libéral.
24:33 Libéral ? Où ?
24:35 C'est l'argent magique qui, pendant deux ans, a arrêté.
24:40 Et alors, on viendra sur le thème économique.
24:45 C'est un fonctionnement libéral.
24:48 Là, il vient d'y avoir 150 milliards d'euros de profit pour le CAC 40.
24:52 C'est le record de tous les temps, du jamais vu, jamais connu, et on ne va pas y toucher.
24:56 80 milliards d'euros de dividendes, jamais on n'en a versé autant, et on ne va pas
25:01 y toucher.
25:02 Il n'est pas prévu de lui toucher.
25:04 Bon, je veux dire, on est dans un fonctionnement libéral autoritaire.
25:09 Donc, que vient proposer M.
25:12 Darmanin ? Il vient de proposer de poursuivre plus profondément dans cette voie, qui me
25:16 paraît une voie inquiétante.
25:17 Et quand hier, il vient dire, écoutez, à la Ligue des droits de l'homme, si vous continuez
25:23 à observer comme ça ce qui se passe sur le plan policier et à émettre des critiques,
25:28 on va vous couper les vivres.
25:29 La Ligue des droits de l'homme, en l'occurrence, avait attaqué au tribunal l'arrêté préfectoral
25:33 qui interdisait le transport d'armes avant la manifestation.
25:37 L'attitude de la Ligue des droits de l'homme est parfaitement ambiguë dans ces affaires.
25:42 Ben oui, elle a été ambiguë avant la manifestation.
25:43 Mais enfin, c'est tout à fait dans le droit, si ils considèrent… Vous avez lu le truc ?
25:45 Ben, ils l'ont arrêté.
25:46 Il faut qu'on puisse…
25:47 Mais non, mais écoutez, bien sûr.
25:48 Non, non, non, non, c'est pas ça.
25:50 Il y a des procédures en France, en fait, c'est un état de droit.
25:53 Donc, si l'arrêté est considéré par certains avocats de la Ligue des droits de l'homme
25:57 comme contrevenant à des lois, il est tout à fait normal que la Ligue des droits de
26:02 l'homme l'attaque.
26:03 Vous voulez concevoir que même parmi d'anciens membres de la Ligue des droits de l'homme,
26:08 beaucoup sont frappés de ce glissement de…
26:11 Vers quoi, en fait ?
26:12 Justement, soldement.
26:13 Ils défendent l'état de droit, en fait.
26:14 Non, pas l'état de droit, là, c'était…
26:15 Non, l'état de droit.
26:16 Non, les caisseurs, là.
26:17 Un ministre, quand il y a des observateurs qui viennent en série dire ça, ne doit pas
26:22 dire "écoutez, si vous n'êtes pas content, on va vous faire taire", parce que c'est
26:26 ça le message qui est passé.
26:27 Ce n'est pas forcément habile.
26:29 Si vous n'êtes pas…
26:30 Mais non, mais donc, il y a un glissement autoritaire et je pense qu'il y a la nécessité
26:34 de marquer ça et de dire que ce n'est pas normal de glisser sur les…
26:36 Parlez de glissement autoritaire, sans parler, parce que vous mélangez Sainte-Soline et
26:41 les manifestations, deux choses qui n'ont strictement rien à voir, mais admettons,
26:44 Sainte-Soline, on a quand même une manifestation dont le but déclaré est d'aller casser
26:50 des biens.
26:51 C'est ça le but, avec 1 500 personnes qui attaquent.
26:54 C'est un trou aussi.
26:55 C'est pas juste un trou dedans.
26:56 Je vais vous dire, moi je n'ai pas envie de passer ma soirée là-dessus, mais d'abord,
27:01 parce qu'il peut être fait un trou de terre avec une bâche dessus et en revanche, il
27:06 peut être fait aux forces de l'ordre, aux policiers sur place, c'est deux choses différentes.
27:09 Et je pense que la grande masse des manifestants ne sont pas allés à Sainte-Soline pour taper
27:13 sur la police.
27:14 Ce n'est pas vrai.
27:15 Donc là, il y a un mélange entre les deux.
27:17 Je parle des organisateurs.
27:18 J'ai pas envie de passer la soirée là-dessus.
27:21 Je le dis, il y a un approfondissement, un glissement libéral et territaire.
27:26 C'est la voie que propose M.
27:28 Darmanin.
27:29 C'est un gros tirement.
27:30 Qu'est-ce qui se passe ? Au fond, je me permets, mais je citerai Gramsci qui dit "Nous vivons
27:35 un temps de détachement de l'idéologie dominante".
27:37 Ça veut dire que concurrence, croissance, mondialisation, qui sont en gros les trois
27:40 mots-clés de l'ordre libéral, ça ne tient plus, les gens n'en veulent plus, ça les
27:45 dégoûte.
27:46 Que nous dit Gramsci ? Il nous dit "Dans ce temps-là, les dirigeants ne parviennent
27:51 plus à diriger, à la place, ils se mettent à dominer et ils recourent à la force de
27:55 coercition".
27:56 Voilà le moment que nous vivons.
27:57 Vous pensez vraiment que ça dégoûte les gens, la croissance ? Parce que là, on vous
27:59 entend, ils veulent des hausses de salaire, des choses que vous défendez.
28:03 Ils veulent des meilleurs salaires pour les enseignants, ils veulent un hôpital qui fonctionne.
28:08 Mettre de la concurrence, par exemple.
28:09 L'hôpital qui fonctionne, par exemple.
28:10 Qu'ils n'ont pas.
28:11 Non mais oui, mais mettre de la concurrence dans le gaz alors que déjà ça marche pas
28:16 dans l'électricité, instaurer de la concurrence entre l'université.
28:20 Je pense que le mot concurrence, le mot mondialisation et même le mot croissance sont aujourd'hui
28:24 des mots minés qu'il ne faut plus envie dans le pays.
28:27 Qu'est-ce qui se passe ? Du coup, on remplace ça par la force de coercition.
28:30 Qu'est-ce qu'on voit en ce moment ? La force de coercition sur les salariés, ce sont les
28:34 réquisitions.
28:35 La force de coercition sur les manifestants, c'est la matraque.
28:37 Et la force de coercition sur l'Assemblée, c'est le 49-3.
28:40 Ça tient comme ça pendant ce temps-ci.
28:42 Sachant que la force la plus puissante, en principe, c'est la force de résignation.
28:46 François Ruffin, vous disiez, il ne faut pas être hémiplégique, il faut être dans
28:49 l'apaisement.
28:50 Pardon de revenir, c'est la dernière fois que je vous posez la question, parce que vous
28:53 avez évité de répondre.
28:55 Vichy, encore une fois.
28:56 Est-ce que dans un moment où vous dites il faut de l'apaisement, il faut de la mesure
29:00 de toutes parts, est-ce que c'est sain que dans votre camp, on aille récupérer Vichy
29:05 pour expliquer ce qui se passe aujourd'hui ?
29:06 Je pense que la comparaison avec Vichy a été faite parce que le dernier moment où on
29:10 s'en est pris de cette manière-là à la Ligue des droits de l'homme, c'était sous
29:12 le régime de Vichy.
29:13 Mais c'est la seule comparaison que je ferai pour ma part.
29:15 Vous êtes pour la 6e République, comme la France insoumise et la NUPES, mais est-ce
29:23 que pour passer par cette 6e République, est-ce qu'il faut passer par une déstabilisation
29:27 de nos institutions ?
29:28 Non.
29:29 D'abord, je vais vous dire, sur la 6e République, je suis démocrate.
29:35 Il me semble que je suis profondément démocrate.
29:37 Et ça veut dire qu'y compris la 6e République, elle doit être validée démocratiquement.
29:42 Il faut être sûr qu'aujourd'hui, une majorité du pays est pour sortir de la 5e République,
29:48 pour sortir de l'élection du président de la République au suffrage universel.
29:52 Et je ne suis pas convaincu qu'il y ait une majorité pour ça dans le pays.
29:55 En revanche, on voit qu'il y a un blocage quand tout le pouvoir est entre les mains
29:58 d'un seul homme.
29:59 Donc ce système institutionnel, il est à faire évoluer.
30:01 Je parlais tout à l'heure, je disais, ce qu'il nous faut aujourd'hui, c'est un
30:04 49-3 citoyen.
30:05 C'est-à-dire qu'il y a un 49-3 du gouvernement, il y a un 49-3 du président.
30:09 Il faut que le peuple puisse intervenir quand il est en désaccord.
30:12 Et quand il y a 10% du corps électoral qui se saisit de lui-même, fait signer une pétition
30:17 par exemple, on doit se dire qu'il doit y avoir un référendum.
30:20 Donc c'est le Conseil constitutionnel la semaine prochaine ?
30:22 Non mais oui.
30:23 Vous espérez que ce soit validé et qu'on puisse aller vers un référendum d'initiative
30:27 pour le 5e ?
30:28 Mais vous savez, là, malheureusement, il y a beaucoup de trucs parce qu'il faut qu'il
30:30 y ait des députés et des sénateurs qui signent.
30:32 Bon, c'est fait.
30:33 Il faut que ça soit validé par le Conseil constitutionnel, c'est fait.
30:35 Mais à la fin, il faut que le président de la République, il accepte quand même
30:37 d'en faire un référendum.
30:38 Donc ça fait quand même beaucoup de conditions pour que le peuple puisse intervenir.
30:42 Et je pense que, vous savez, c'est le nerf de la chose.
30:46 Toute crise sociale en ce moment en France débouche sur une crise démocratique.
30:50 La crise des Gilets jaunes a commencé sur le prix des gasoils et on est sortis sur le
30:53 référendum d'initiative citoyenne, qui paraît une excellente mesure moi.
30:57 Mais là, c'est pareil, on entre sur une crise sociale, 62-64 ans, on en sort sur une crise
31:02 démocratique.
31:03 Ce qu'il y a de profond dans le pays, c'est qu'au fond, on est en démocratie et pourtant
31:08 les gens ont le sentiment et ce n'est pas qu'un sentiment qu'on dirige sans eux et contre
31:13 eux.
31:14 La faute presque originelle, mais ce n'est pas la seule, remonte au 29 mai 2005, quand
31:18 80% des ouvriers, 55% des Français au total viennent dire non, on ne veut pas de la concurrence
31:26 libre et non faussée, non, on ne veut pas de la libre circulation des capitaux et des
31:29 marchandises, y compris avec les pays tiers, et qu'on fie comme si de rien n'était, les
31:33 gens se disent, si c'est ça la démocratie, à quoi bon la démocratie ?
31:36 Mais de la même manière, dans la crise des gilets jaunes, on ne s'en sort pas par un
31:40 compromis social passé avec le mouvement, on ne se demande pas si on va refaire un retour
31:44 de l'impôt de solidarité sur la fortune, si on va mettre la TVA à 0% sur les produits
31:49 premiers nécessités, des choses qui étaient proposées.
31:50 Il y a eu des élections l'année dernière et vous ne les avez pas gagnées, donc on
31:55 en revient toujours à ça.
31:56 Je vous dis juste une chose, je considère que le PAI est divisé en trois blocs, je
32:02 vous l'ai dit, fracturés.
32:03 Ça veut dire que c'est un devoir pour le président de la République aujourd'hui de
32:07 se demander comment on répare ça, mais ça serait un devoir pour nous aussi.
32:11 Ça veut dire que si jamais on arrive au pouvoir, on ne doit pas considérer que parce qu'on
32:15 a une majorité à l'Assemblée, on fait ce qu'on veut dans le pays, non, on doit le
32:19 faire avec modération, avec pondération, en pensant à réparer ces fractures-là et
32:23 à réparer le pays autrement, parce qu'aujourd'hui on est dans un pays qui a un hôpital en Lambeau,
32:27 normalement on devrait réparer ça.
32:28 On a un rail qui déraille, on devrait réparer ça.
32:31 On a une école de la République qui recrute ses enseignants en job-dating, on devrait
32:35 réparer ça.
32:36 On a un défi climatique à affronter, on devrait réparer ça.
32:39 Et on devrait rassembler le pays pour réparer ça.
32:42 Et moi ce que je regrette le plus depuis six mois, c'est l'immense gâchis pour mon pays,
32:46 parce que c'est de tout ça dont on devrait débattre.
32:49 Ce sont tous ces chantiers-là qui devraient être sur la table et à la place.
32:52 Emmanuel Macron nous enlise dans quelque chose qui représente, je le redis à l'arrivée,
32:56 c'est le défi.
32:57 C'est ce qui s'en sort le mieux pour l'instant, et on l'a vu dans ce sondage, c'est Marine
33:01 Le Pen, c'est le Rassemblement National.
33:02 Et sur les raisons de cette progression, il y avait un autre enseignement de ce sondage,
33:06 c'est chez les actifs, chez les travailleurs.
33:09 C'est là qu'elles progressent le plus.
33:10 Est-ce que, vous parliez du ton, il faudrait changer le ton plus que le fond, mais sur
33:13 le fond, est-ce que finalement, et vous l'aviez déjà noté à plusieurs reprises, est-ce
33:17 que ce n'est pas ça l'essentiel de la gauche, de retrouver le bon discours, le bon ton avec
33:22 les travailleurs sur ces valeurs travail ?
33:24 J'écris un bouquin là-dessus l'année dernière, qui était les conclusions que je tirais de
33:28 ma propre campagne législative.
33:30 Maintenant, dire que sur le fond, nous avons raison plus que le Rassemblement National.
33:35 Nous, nous proposons l'indexation des salaires sur l'inflation, ce qui me paraît une nécessité
33:40 aujourd'hui pour nous.
33:41 Le Rassemblement National, pas.
33:43 Nous proposons qu'il y ait une taxation des dividendes.
33:46 Le Rassemblement National, pas.
33:48 Nous proposons le retour de l'impôt de solidarité sur la fortune.
33:51 Le Rassemblement National, pas.
33:52 Le partage des richesses ne figure pas dans le programme du Rassemblement National.
33:56 Donc je pense que la question n'est pas sur le fond, elle est sur la présentation, sur
34:01 le ton.
34:02 Est-ce qu'il n'y a pas non plus un problème de cohérence ? Parce qu'on voit bien dans
34:04 ce sondage qu'effectivement, Emmanuel Macron souffre beaucoup de ce défaut de cohérence.
34:09 D'ailleurs, on parle des retraites.
34:10 Il n'était pas pour la retraite à 65 ans, il était pour la retraite à points.
34:12 Ensuite, c'était Édouard Philippe qui était pour celle à 65 ans.
34:16 Puis c'est Élisabeth Borne qui, elle, était contre, qui doit la mettre en place.
34:19 On perd le sens de ce qu'il veut atteindre.
34:21 Mais vous, également, on ne voit pas bien.
34:25 Vous citez une liste de sujets sur lesquels tout le monde est d'accord en réalité, sans
34:32 expliquer comment vous les financez.
34:35 On a, je le répète, 3 000 milliards d'euros de dettes.
34:39 Très bien, mais vous savez.
34:41 On voit dans les sondages aussi ce défaut de crédibilité ou de sens.
34:47 On a le sentiment parfois, vous parlez à des clientèles.
34:50 Non, non.
34:51 Je parle au pays tout entier.
34:53 Je parle de votre ami politique, je ne parle pas de vous.
34:55 Je viens pour parler au pays tout entier.
34:57 Vous pouvez dire comment on le finance, puisque dans ce que je vous ai présenté, il y a
35:00 deux mesures sur trois qui sont au contraire des mesures de recettes.
35:02 Et vous savez qui a le plus creusé le déficit sur les deux dernières décennies ? C'est
35:08 le président Sarkozy et c'est le président Macron.
35:10 Et pourquoi ? Parce que le déficit public, il a moins été creusé par des dépenses
35:16 que par de moindres recettes, dans les deux cas.
35:19 Donc, il y a un souci de recettes.
35:22 Votre souci, c'est la décroissance.
35:23 C'est ça le problème.
35:25 Les gens, ils connectent à un moment que ça ne va pas marcher.
35:27 Vos mesures, si en même temps, on cesse de produire et on organise…
35:33 Qui parle de cesser de produire ? Ce qu'il faut se demander, c'est qu'est-ce qu'on
35:37 veut produire ? Vous voyez par exemple, le président Macron était en Chine aujourd'hui.
35:42 Je pense que le principal sujet, hormis les sujets géopolitiques, à discuter avec la
35:47 Chine, c'est notre déficit commercial.
35:48 Vous savez, le déficit commercial de la France cette année, c'est 164 milliards d'euros.
35:52 C'est colossal.
35:53 Ça veut dire 14 fois plus que le déficit de retraite.
35:56 Donc, prévisionnel.
35:57 C'est-à-dire qu'on nous bassine avec le déficit de retraite de 12 milliards d'euros
36:00 à venir, ok, mais déficit commercial.
36:03 Aujourd'hui, 164 milliards d'euros.
36:05 La principale chose à l'intérieur, c'est la Chine, un quart de ce déficit commercial.
36:11 Comment on va faire pour avoir moins d'importations de téléphones portables ?
36:16 Mais là, ça rejoint quand même une nécessité qui est aussi celle de protéger la planète.
36:20 On a à affronter ce défi climatique.
36:24 Pour moi, pour mes enfants, c'est presque métaphysique.
36:29 Une fin de l'humanité possible, en tout cas vivre dans une série de catastrophes permanentes.
36:35 Là, il y a la nécessité pour moi de produire moins de téléphones portables.
36:38 Oui, il s'agit d'en produire moins.
36:41 Il s'agit d'en importer moins.
36:42 Il s'agit de se dire que ce genre d'objet-là, on en consomme un tous les deux ans maximum
36:48 plutôt que d'être dans un renouvellement permanent.
36:51 Et si vous faites ça, vous diminuez la production, mais vous diminuez surtout les importations.
36:55 Mais vous créez des inégalités parce qu'il y a ceux qui pourront se payer les téléphones
36:59 portables qui seront les privilégiés et les classes populaires.
37:01 Vous allez se faire téléphoner.
37:03 Mais non, vous dites pour tout le monde, c'est tous les deux ans.
37:05 Mais bon, voilà, j'entre dans une mesure parfaite.
37:07 Ça fait pas rêver.
37:08 Peut-être que ça fait pas rêver, mais enfin, c'est une mesure qui affronte ce qui est
37:14 un défi économique, qui est le déficit commercial dont on ne parle pas et qui doit affronter
37:19 aussi le souci climatique qu'on a en face de nous.
37:23 Mais plus généralement, on doit se demander comment on rassemble le pays pour réparer
37:27 tout ce que je vous ai dit.
37:28 Justement, la méthode Ruffin.
37:29 Oui, la méthode Ruffin.
37:30 Ah bah, je voudrais qu'on en parle de la méthode Ruffin.
37:32 "Vis ma vie", vous avez piqué le concept ATF1.
37:34 Oui, ça fait longtemps.
37:35 Voilà, ça fait longtemps.
37:36 En fait, vous allez régulièrement à la rencontre des Français et vous vous mettez
37:41 pas à leur place, mais vous les accompagnez, par exemple au boulot, etc.
37:44 J'ai une séquence à vous montrer avec Noël.
37:47 C'est une des dernières vidéos, je crois, que vous avez publiées.
37:49 Ça fait longtemps.
37:50 Ça concerne la réforme des retraites.
37:51 Un cariste proche de la retraite, fin de carrière, 1800 euros par mois après 40 ans
37:56 de boulot.
37:57 Vous êtes allé le voir chez lui juste avant l'embauche.
37:59 Il était 4 heures du mat, je crois, pour prendre le petit-déj et il vous parle de
38:02 sa retraite.
38:03 Là, normalement, au 1er mars 2023, je prends ma retraite.
38:08 Après, moi, ce qui fait peur, c'est de prendre ma retraite.
38:12 Moi, j'ai fait mes calculs, j'ai 1300 euros qui s'en vont, entre tout ce que je paye.
38:18 Je fais pas des folies.
38:19 Le boulot que je fais, travailler à la nuit, moi, je ne vais pas aller jusqu'à 150.
38:26 Moi, je veux bien.
38:27 Je veux bien me donner pour mon pays, je veux bien me bosser.
38:31 Et au bout d'un moment, tu sais plus.
38:33 Tu veux aller à 20h avec ta petite-fille.
38:35 Bien sûr, c'est quand même plus intéressant.
38:37 Moi, je vais être en retard si je m'en vais pas, maintenant.
38:42 Vous dites que votre famille politique a oublié de parler à ces gens-là aussi.
38:46 Non, enfin, je veux dire, il faut… La gauche, elle pourrait être morte dans ce pays.
38:51 On pourrait ne plus en parler.
38:52 Je veux dire, quand la gauche, c'est l'héritage de François Hollande qui donne Emmanuel Macron
38:59 derrière, ça a de quoi dégoutter toute personne de gauche.
39:03 Donc, moi, je considère que le bilan de Jean-Luc Mélenchon est d'avoir remis la gauche
39:08 debout et remis la gauche debout sur ses deux jambes, la jambe rouge et la jambe verte.
39:12 Donc, au contraire, on a continué… Vous savez, moi, je suis né en politique.
39:18 Enfin, j'ai lancé mon journal Fakir en 99 et c'est un moment où il y avait Lionel
39:22 Jospin à la gauche plurielle et où il n'osait pas prononcer le mot ouvrier.
39:26 Mais François Ruffin…
39:27 Je veux dire, on en est revenu.
39:28 Donc, dire qu'on ne cherche pas à s'adresser.
39:30 Je dis qu'en revanche, on doit se demander comment on parle.
39:33 Est-ce que… Je pense qu'il faut citer les métiers.
39:35 Moi, je m'applique à ça.
39:36 Je m'applique à dire caissière, je m'applique à dire cariste, à dire manutentionnaire,
39:40 à prononcer le mot de tous ces métiers qui ont tenu le pays debout et à qui Emmanuel
39:44 Macron a promis reconnaissance et rémunération.
39:46 Et il n'y a ni l'un ni l'autre derrière.
39:47 Au contraire, il y a deux ans de plus.
39:49 Bon, mais voilà, je pense qu'il s'agit de presque héroïser.
39:54 Vous savez, de la même manière que dans l'après-guerre, le Parti communiste avait
39:57 héroïsé les mineurs d'oeufs et les métallos parce qu'ils avaient remis le pays debout.
40:01 Je pense que nous, on doit héroïser les métiers de la deuxième ligne, les évoquer,
40:06 les montrer parce que ce sont eux qui ont tenu le pays debout et qui au fond, tous les
40:10 matins encore, si on peut prendre le métro, si on peut avoir tout qui fonctionne, de la
40:15 lumière, allumer notre casserole sur le gaz, c'est parce que ces gens-là, ils font
40:18 leur boulot et ils tiennent le pays debout.
40:20 Simplement, la sociologie de votre électorat, François Ruffin, c'est ça votre dharma.
40:24 Moi, je vous trouve tout à fait convaincant.
40:26 C'est-à-dire que ce que vous faites là, à 4h du matin avec un caraïste, je pense
40:30 qu'il y a beaucoup de vos amis députés de la France insoumise qui, au lieu d'aller
40:33 chez Hanouna, devraient aller auprès de cette France insoumise.
40:36 Je vais aller au bout de mon propos.
40:38 Ce matin, je n'avais pas été gazé, mais ce soir, je suis ici.
40:40 Ce que je veux dire, c'est que la sociologie aujourd'hui de votre électorat et de la France
40:44 insoumise, ce n'est pas les employés et les ouvriers, ce n'est pas les caraïstes.
40:46 Ces gens-là, ils votent Rassemblement national.
40:48 Or, Jean-Luc Mélenchon est la majorité des les filles.
40:50 Et je vous mets à part, parce que pour moi, vous êtes vraiment quelqu'un à part dans
40:56 cette famille politique.
40:57 LFI, la France insoumise, a un électorat qui est bobo, qui est salarié, qui est cadre,
41:03 et qui n'est pas cette France-là, déclassée des ouvriers que vous connaissez bien parce
41:07 que vous êtes élus de là-bas et parce que vous allez les voir, mais vous êtes bien
41:10 le seul dans votre famille à faire ce boulot.
41:12 Sociologiquement, ce n'est pas tout à fait vrai.
41:13 C'est une obligation un peu plus compliquée.
41:16 Ce n'est pas si vrai que ça.
41:18 L'histoire, c'est dire que, quand bien même on le voudrait, ce n'est pas facile.
41:22 Ce n'est pas parce qu'on mène cette bataille-là qu'elle sera automatiquement gagnée.
41:27 Je viens quand même pour mettre…
41:28 Moi, je suis un homme, vous savez, le pessimisme de la justicité et l'optimisme de la volonté.
41:32 Il n'y a pas de fatalité à l'histoire.
41:34 Je veux vous dire ça quand même.
41:35 C'est-à-dire que là, on regarde les sondages, on dit Marine Le Pen, elle monte et tout ça.
41:38 Il n'y a pas de fatalité à l'histoire.
41:39 L'histoire, c'est ce que les femmes et les hommes en font.
41:42 Je veux dire, la crise de 1929, elle débouche sur le New Deal aux Etats-Unis, sur le nazisme
41:45 en Allemagne, sur le Front populaire en France.
41:48 Donc, il n'y a pas de fatalité.
41:49 C'est ce qu'on en fera.
41:50 Et heureusement, il y a eu février 1934, qui a été comme un électrochoc pour la gauche
41:56 française, qui a réagi et qui a fait le Front populaire.
41:58 Moi, je demande en effet à ce qu'il y ait un électrochoc, qu'on soit conscient du
42:02 fossé qui peut se creuser et qu'on se demande quelles sont les méthodes pour aller combler
42:06 ça.
42:07 Je ne dis pas que j'ai des recettes magiques.
42:09 J'ai des trucs qui peuvent marcher.
42:10 Vous faites le boulot.
42:11 Vous avez les bras.
42:12 Je ne suis pas le seul.
42:13 Mathilde Panot est allée accompagner des éboueurs à Paris.
42:17 Une fois.
42:18 Fabien Rousset, lui, a une autre proposition.
42:21 Il a rencontré Bernard Cazeneuve et lui, il dit que la lupesse est dépassée et qu'il
42:24 faut rassembler au-delà.
42:25 C'est une proposition concrète pour essayer justement d'être plus fort à gauche.
42:30 Je la trouve très peu concrète en vérité.
42:32 Je pense que la question d'élargir notre socle, elle se pose, mais elle ne se pose
42:37 pas par les figures.
42:38 On est assez large de ce point de vue-là.
42:40 Le grand souci aujourd'hui, c'est qu'on voit tout ce qui décroche du bloc libéral
42:44 central.
42:45 Typiquement, pour moi, c'est les gens qui, jusqu'à maintenant, ont en tête un chef
42:51 de ligne dans un sous-traitant de l'industrie agroalimentaire qui travaille la nuit, qui
42:56 a 1800-1900 euros et qui partait en vacances avec ses parents et qui ne peut plus emmener
43:02 ses enfants en vacances.
43:03 Très concrètement, les vacances sont un symptôme de ce sur quoi on se prive en premier.
43:07 Ça, ça produit un sentiment de déclassement.
43:09 Ça fait que ça décroche du bloc libéral central parce qu'il n'y a plus l'assurance
43:15 de la vie de main, comment on va payer les études aux enfants, voire comment on va pouvoir
43:19 remplir son caddie, très concrètement.
43:20 Ça décroche en ce moment de manière accélérée de ce bloc libéral central.
43:24 Nous, il faut qu'on soit capable d'aimanter ça, d'aimanter les particules qui décrochent
43:29 du bloc libéral central.
43:30 Je suis vraiment dubitatif que ce soit avec Bernard Cazeneuve ou d'autres figures un
43:34 peu surannées de cette nature-là qu'on y parvienne.
43:36 La question n'est pas celle-là.
43:37 Je vous le redis.
43:38 La question est du ton qu'on adopte.
43:40 De ces gens qui étaient attachés au bloc libéral central, c'est aussi parce que,
43:45 et même la réforme des retraites, pour moi, elle témoigne de ça, d'un souhait de stabilité.
43:49 Il y a un désir de stabilité et on doit incarner de la stabilité.
43:53 Même si on veut transformer la société, on veut la transformer avec stabilité.
43:57 On veut produire de l'ordre joyeux.
44:00 C'est loin du bruit et la fureur de Mélenchon.
44:02 On doit produire un ordre joyeux.
44:04 Je vous disais dans le reportage qu'on voit, le gars, je sais qu'il a envie d'aller
44:08 à la patinoire avec sa petite-fille ou l'équivalent, à la piscine ou au cours de zumba, à la
44:13 gymnastique.
44:14 Mais il faut qu'on soit capable de proposer aussi du chemin au bonheur pour des gens.
44:18 Attendez, joyeux, le bonheur, c'est au Roussel, ça aussi ?
44:21 Les jours heureux.
44:22 Mais les jours heureux, vous savez, c'est le Conseil national de la réforme de 1945.
44:25 C'est quand même une...
44:26 On est d'accord.
44:27 Mais ce que vous savez, je ne cherche pas à vous poser à Fabien Roussel, à Jean-Luc
44:32 Mélenchon.
44:33 Vous devriez, vous devriez, vous devriez poser à Jean-Luc Mélenchon.
44:36 Je fais tout, moi, vous savez, mon parcours depuis 23 ans, c'est quoi ?
44:41 C'est tout faire pour que la vie des gens ne soit pas occultée par la vie des grands.
44:45 Quand on rencontre des mémoires de Saint-Simon qui parlent du 17e siècle, on voit Versailles,
44:52 on voit Louis XIV, on voit les courtisans, il n'y a pas un paysan à l'intérieur.
44:55 Je ne veux pas que la vision qu'on a de notre pays, ça soit une place pour les paysans
45:00 de notre temps.
45:01 Pas bloqué.
45:02 - Comment est-ce qu'on fait pour passer de ce discours, du discours que vous tenez là
45:05 sur le plateau et que vous tenez globalement tout le temps, à un outil stratégique ?
45:11 Là, en l'occurrence, vous, votre vaisseau, c'est la France insoumise, c'est la NUPES,
45:16 c'est je ne sais pas quoi, c'est le mouvement ouvrier peut-être qui est en train de renaître
45:20 là dans les retraites.
45:21 Mais comment est-ce qu'on fait tout d'un coup pour que ça marche stratégiquement ?
45:24 - Je ne dis pas tout d'un coup.
45:26 Si tu veux, je n'ai pas de baguette magique.
45:29 Sinon, je la sortirai.
45:31 - Mais c'est quoi le chemin stratégique pour y arriver ?
45:34 - Dans ce que vous avez dit, il y a des choses intéressantes.
45:36 D'abord, moi, je suis de gauche.
45:37 J'embrasse la gauche dans la totalité de ses traditions.
45:40 Donc voilà.
45:41 Et ensuite, vous avez dit le mouvement ouvrier.
45:43 Là, ce qu'on voit, c'est que les syndicats, et je n'en aurais pas fait le pari au départ,
45:48 ont été capables, dans un pays qui est en dépression pour moi, qui est hanté par la
45:53 résignation, ils ont été capables de mettre des millions de personnes dans les rues.
45:56 Mais pas seulement des millions de personnes dans les métropoles.
45:58 Ils en ont mis chez moi, à Doulan, à Albert, à Nel, à Friville-Escarbottin.
46:02 Ça veut dire que demain, oui, un programme de gauche, il doit être porté aussi avec
46:07 les 200 personnes qui sont allées sur la place de Friville-Escarbottin.
46:10 Pas seulement qui votent à gauche, mais qui le portent.
46:13 Donc ça veut dire qu'il doit y avoir un dialogue avec les syndicats, à tous les échelons
46:17 des syndicats, pour qu'on s'y mette ensemble et qu'on relève le défi qui est montré
46:22 dans le sondage, qui est que l'histoire n'est pas écrite.
46:25 Si jamais on laisse faire la pente, sans doute que ça risque de glisser de ce côté-là.
46:28 Mais nous, on a pour volonté de se retrousser les manches et de la faire basculer dans l'autre sens.
46:33 Avec des syndicats, l'arrivée de Sophie Binet, c'est une bonne nouvelle pour vous ?
46:36 Moi, je travaille, je vous le disais en ovnant le couloir.
46:41 Moi, je n'ai pas envie de faire de l'ingérence dans les syndicats en disant que telle personne
46:44 c'est une bolchonne, telle personne, c'est pas une mauvaise chose.
46:47 Donc je pense que Sophie Binet, elle fait très bien son travail sur les premiers jours.
46:52 Elle maintient l'intersyndical.
46:53 Elle va intervenir à Matignon de manière punchy.
46:56 Elle est à la fois sur le terrain en même temps, donc il y a une très bonne entrée dans l'eau,
46:59 dans une situation qui est quand même particulièrement complexe.
47:02 Mais il faut travailler avec tous les syndicats qui sont dans cet intersyndical.
47:06 Je dirais même qu'il faut être capable d'être dans la même intersyndical politique.
47:10 Mais Jean-Luc Mélenchon a été très critiqué par les syndicats.
47:13 Et la stratégie de LFI à l'Assemblée nationale a été très critiquée par les syndicats.
47:17 C'est-à-dire qu'encore une fois, François Ruffin, comme sur la police,
47:20 comme sur la reconquête des terres de gauche, sur cette question centrale,
47:24 vous êtes une voix singulière au sein de LFI.
47:26 Vous nous décrivez exactement l'inverse de ce qu'a fait Jean-Luc Mélenchon et LFI
47:29 depuis le début de la réforme des retraites.
47:31 En tout cas, pour ma part, j'ai considéré que j'avais à me mettre en appui de l'intersyndical,
47:36 à la fois nationalement, mais aussi localement.
47:38 Dans ma vie, la mienne, quand l'intersyndical décidait quelque chose,
47:41 le blocage de la zone industrielle, comment on peut faire pour appuyer ce blocage, par exemple.
47:46 Mais donc, maintenant, vous savez, ce qu'il faudrait presque,
47:49 c'est qu'on ait une intersyndicale politique qui soit l'équivalent de l'intersyndical.
47:53 – C'est-à-dire ? – C'est pas la NUPES.
47:55 – C'est la NUPES, mais je pense que la NUPES, maintenant, on a dit l'acte de la NUPES,
47:59 je pense qu'en effet, il faut aller plus loin.
48:00 – Alors vous dites qu'elle est dépassée, comment ça va aller ?
48:02 – Non mais je ne dis pas qu'elle est dépassée.
48:04 – Elle va se fracturer à un moment sur la ligne dont on parlait.
48:07 Comment voulez-vous concilier…
48:08 – Mais Mélenchon aussi a parlé d'acte de la NUPES.
48:11 – Comment voulez-vous concilier ce mouvement ouvrier que vous espérez récupérer
48:17 et qui a besoin d'emplois industriels, qui a besoin de partage de salaire,
48:21 et la décroissance verte, en fait, qui dit qu'il ne faut plus produire,
48:27 il faut presque une régulation des naissances.
48:29 Comment vous conciliez ces deux mouvements ? Ça ne fonctionne pas.
48:34 – Vous savez, ce qui a fait partir les usines depuis 40 ans,
48:37 c'est pas la décroissance, c'est pas les écolos.
48:40 – Vous voulez les faire revenir ? – Bien sûr.
48:42 – D'accord, mais ça n'est pas compatible, encore une fois,
48:46 avec tout ce que prône une frange de votre mouvement.
48:49 – Mais bien sûr que si, je suis tout à fait convaincu
48:51 qu'il n'y aura pas d'opposition des écologistes si on fait les efforts
48:55 pour que renaisse une filière du médicament en France,
48:57 alors qu'on a 85% de nos principes actifs qui sont en Chine.
49:00 Je veux dire, vous savez, soit on se place dans une situation
49:04 où les contradictions ne peuvent pas passer, soit on essaye de les dépasser.
49:08 Et je suis convaincu qu'à tout moment quasiment,
49:11 il y a la possibilité du dépassement de ces contradictions.
49:12 Vous prenez par exemple la fausse opposition pour moi
49:15 entre Sandrine Rousseau, le droit à la paresse,
49:18 et Fabien Roussel, la valeur travail.
49:21 – Vous pensez que c'est une fausse opposition ?
49:22 – C'est une totalement fausse opposition parce que l'histoire du mouvement ouvrier,
49:25 c'est l'histoire de la conjugaison des deux.
49:27 C'est l'histoire de la dignité par le travail, de la fierté par le travail,
49:30 on est fier de gagner sa vie.
49:33 Mais c'est aussi la libération du temps de travail.
49:35 C'est les enfants qui ne vont plus à la mine,
49:38 c'est le congé maternité, c'est les congés payés,
49:42 c'est le dimanche chômé, c'est le samedi à l'anglaise,
49:44 c'est la retraite et la retraite à 60 ans.
49:45 Donc l'histoire du mouvement ouvrier n'est pas l'opposition des deux,
49:49 mais au contraire c'est le dépassement dialectique de cette contradiction.
49:52 Et en fond, je pense que sur plein de sujets comme ça,
49:55 on a affaire à des fausses oppositions qui sont mises en scène,
49:58 mais qui a tout à fait la possibilité de ce dépassement.
50:00 Si jamais on arrive à bien dialoguer ensemble,
50:03 si jamais il y a une confiance qui se met.
50:04 Aujourd'hui on a les ingrédients, on n'a pas la sauce.
50:07 Il nous faut mettre de la sauce au milieu pour que ça forme une vraie équipe.
50:10 François Ruffin, je rebondis sur ce que vous disiez tout à l'heure Pablo,
50:13 sur la stratégie, le chemin qui peut vous amener au pouvoir.
50:19 Est-ce que député c'est une bonne situation ?
50:21 Est-ce que député c'est une situation suffisante pour pouvoir changer le pays ?
50:24 Ou est-ce que vous visez au-delà ?
50:26 Non, moi je suis député, ce que j'aime bien c'est représentant de la nation.
50:31 Donc c'est au fond une fonction tribunitienne.
50:33 Je l'ai dit depuis mes premiers jours à l'Assemblée,
50:35 je ne me suis pas fait d'illusion dessus, ce qui m'a fait éviter d'avoir un ulcère.
50:38 Mais c'est que la loi ne se fait pas à l'Assemblée.
50:42 La loi elle est décidée par le Président de la République,
50:44 elle est fabriquée technocratiquement par les ministères
50:47 et ensuite elle est enregistrée à l'Assemblée nationale.
50:50 Et elle peut être contestée, et voilà, on vient représenter la voix des gens.
50:57 Ce n'est pas inintéressant, mais ce n'est pas là que se passe le pouvoir.
51:00 Donc vous visez au-dessus ?
51:01 Il est évident qu'on vise au-dessus.
51:02 Non mais vous.
51:03 Moi aussi je veux dire...
51:04 Vous avez une vision.
51:05 J'espère bien qu'on vise au-dessus.
51:06 François Hollande vient de dire "moi aussi".
51:07 Mais oui, mais j'espère bien qu'on vise pas seulement à représenter la nation,
51:12 mais qu'on vise à aider à transformer notre pays dans le bon sens et à le réparer.
51:16 Vous voulez dire que vous voulez être candidat un jour à la présidentielle ?
51:18 Non mais vous savez, entre la présidentielle et député, il y a d'autres trucs.
51:21 Léo Lagrange, qui nous a produit les congés payés dans son petit ministère
51:25 qui était grand comme des toilettes au moment du Front populaire,
51:28 je pense qu'il a participé à amener beaucoup de bonheur
51:30 et beaucoup de bonheur doit la durer dans la vie des gens.
51:32 Donc il y a un certain nombre de ministres comme ça
51:36 qui ont aussi participé à transformer la vie des gens.
51:39 Donc on peut être dans une équipe qui contribue à transformer la vie des gens
51:43 sans rêver forcément à son soul.
51:45 Jean-Luc Mélenchon, on le voit bien aujourd'hui, est un peu abîmé.
51:48 Vous avez un problème avec Jean-Luc Mélenchon ?
51:50 On attendra une psychanalyse.
51:53 Il est un peu abîmé par cette séquence des retraites,
51:55 il est un peu abîmé par les coups de force qu'il a voulu faire à l'Assemblée,
51:59 notamment auprès de ses troupes.
52:00 Il a fait un affaire Katniss, on sent bien que c'est quand même
52:02 un personnage politique qui aujourd'hui ne semble plus tellement en phase avec le mouvement.
52:06 Il y a besoin d'une acclaration parce qu'il faut aussi,
52:08 quand on veut changer le pays, il faut être capable de dire "je", François Ruffin.
52:12 "Je", la présidentielle.
52:13 Généralement, on m'a plutôt reproché l'inverse.
52:15 Pourquoi ? Vous avez une vision, vous avez une analyse.
52:18 On peut être d'accord ou pas d'accord, vous avez une vision,
52:20 vous avez une analyse cohérente, vous avez une réflexion politique
52:22 sur comment est-ce qu'on peut organiser les choses.
52:24 Bon, il est temps de prendre vos responsabilités,
52:27 de dire "oui, je suis taillé pour le job",
52:30 pour un jour être candidat à la présidence de la République.
52:32 Vous pensez que dans ce moment-ci, et je le…
52:35 Non mais franchement, soyons sérieux quoi, soyons sérieux.
52:39 Dans ce moment-ci, je vous le dis, moi, l'inquiétude…
52:44 J'ai ouvert, j'ai participé à l'inauguration la semaine dernière
52:48 d'une section du secours populaire à Flixecours dans ma circonscription.
52:53 J'étais effaré par la queue qu'il y avait à l'entrée.
52:55 Voilà, on est à… je sais pas combien d'années, vous voyez, je compte pas encore.
52:59 On est à 4 ans de l'élection présidentielle.
53:04 Je pense que les gens, ils ont envie d'entendre autre chose
53:07 que "quel est-ce que c'est le casting ?"
53:09 Je veux dire, la question aujourd'hui prégnante, c'est la question de l'inflation.
53:12 C'est la question de "comment je fais pour me fournir…
53:17 qu'on mette des antivols dans notre pays sur la viande ?".
53:20 Et voilà. Je veux dire, c'est quand même un signe.
53:23 On a plus de 33% le prix de la viande depuis un an.
53:26 Et c'est ça.
53:28 Les gens, quand on leur parle à la sortie du supermarché,
53:30 ils ont changé de supermarché pour beaucoup
53:32 parce qu'ils ont repéré qu'à tel endroit c'était moins cher.
53:34 Et ils y vont à pied même des fois.
53:36 Vous utilisez l'inflation pour pas répondre à la question politique qui se pose quand même.
53:39 Pour un homme politique, c'est légitime de poser cette question.
53:41 Je vous réponds sur ce qui m'intéresse, c'est-à-dire la vie des gens.
53:45 Et comment on va la transformer ?
53:47 Et bon, je vous réponds sur ça, puisque vous me posez pas la question,
53:49 je me la pose à moi-même, sur l'inflation.
53:51 Il y a la nécessité d'indexer les salaires sur l'inflation.
53:54 Ça devrait relever de l'évidence.
53:56 Vous savez...
53:57 Mais vous pouvez jouer aussi sur l'inflation et sur l'explosion des prix de l'énergie.
53:59 C'est quand même l'énergie à la base.
54:01 Alors, je veux bien. D'accord.
54:03 D'abord, sur l'inflation, l'INSEE a dit 37%.
54:10 L'inflation, c'est dû au taux de marge des entreprises qui ont augmenté.
54:13 Donc on est déjà à plus d'un tiers.
54:15 La Banque Centrale Européenne s'est réunie en séminaire
54:17 dans des iglous en Finlande pendant une semaine
54:20 parce qu'ils ne comprenaient pas ce qui se passait au niveau de l'inflation.
54:22 Ils se sont dit que les salaires n'augmentent pas
54:24 et pourtant on a de l'inflation, qu'est-ce qui se passe ?
54:26 Ils ont dit qu'il y a une boucle bénéfice-prix.
54:30 Donc là, il y a quand même un gros souci au niveau des prix.
54:35 Et quand vous regardez l'énergie, il y a de l'énergie importée.
54:38 Donc notre obsession, je le redis en lien avec le déficit commercial,
54:42 devrait être comment on importe moins d'énergie.
54:44 C'est-à-dire que...
54:46 C'est une mesure que j'ai proposée il y a cinq ans.
54:48 Je disais qu'il nous faut prioriter les logements.
54:51 Plus de passoires thermiques.
54:53 Au rythme où on va pour les passoires thermiques, on en a pour 2000 ans.
54:55 D'accord ? Non.
54:56 On devrait mettre le paquet sur les passoires thermiques.
54:58 Pourquoi ? Parce que ça fait moins de factures pour les gens.
55:01 Ça fait moins de réchauffement de la planète.
55:03 Mais ça fait moins de problèmes de santé
55:05 pour les habitants qui ont de l'humidité.
55:07 Mais en plus, ça garantit l'indépendance nationale
55:10 parce qu'on importe moins.
55:11 Donc on devrait mettre le paquet aujourd'hui.
55:13 - Maxime, vous avez dit que ça ne s'investit à rien.
55:15 Et là, vous nous dites un programme.
55:18 C'est pour quand vous allez prendre le pouvoir ?
55:20 - Évidemment.
55:21 J'essaie d'influencer à l'endroit où je me trouve.
55:24 Même si ce n'est pas mon camp.
55:26 Mais j'espère qu'il ouvre ses oreilles.
55:27 Je regrette qu'il ne le fasse pas.
55:29 Parce que je pense qu'on a des idées aussi.
55:31 Je pense que la démocratie, c'est une certaine qualité de dialogue
55:35 qui fait que même ses adversaires politiques,
55:37 il y a des idées qui ne sont pas si mauvaises que ça.
55:39 Et on les récupère.
55:40 - Ce que vous avez décrit tout à l'heure,
55:41 vous n'avez pas la possibilité de faire ça.
55:43 - Je dois néanmoins continuer à faire mon boulot
55:45 qui est d'apporter des idées aux gens.
55:47 Que ça devienne évident dans la société
55:49 qu'aujourd'hui, le paquet devrait être mis
55:51 sur la rénovation thermique des logements, par exemple.
55:53 Mais après, vous avez quand même un autre problème.
55:55 C'est que normalement, on parle du gaz.
55:58 OK, on parle du pétrole. C'est importé.
56:00 L'électricité, elle n'est pas importée.
56:02 Et pourtant, on a lié le prix de l'électricité au prix du gaz.
56:07 Je veux dire, on est dans l'ordre de la démence.
56:09 - Mais le gouvernement a agi.
56:10 Est-ce que vous pouvez reconnaître que le gouvernement a fait des choses ?
56:12 - Si on regarde ce qui s'est passé dans les autres pays européens,
56:15 l'inflation, je peux vous le dire, je connais bien la Belgique notamment,
56:17 l'inflation, elle n'est pas la même ailleurs.
56:19 Même si c'est toujours très dur pour les gens qui le vivent en France.
56:21 Vous pouvez reconnaître qu'il y a des choses qui ont été faites.
56:23 - D'un mot, François Arrivaud.
56:24 - Je peux reconnaître tout ce que vous voulez.
56:25 La Belgique, par exemple, les salaires sont indexés sur l'inflation.
56:27 Puisque vous connaissez la Belgique.
56:29 - Là, je parlais de l'énergie.
56:30 - Ça veut dire que du coup, les salariés
56:32 ne souffrent pas quasiment de l'inflation
56:34 puisqu'elle est prise en charge à l'intérieur des salaires.
56:36 - Les coûts de l'électricité, c'était...
56:38 - Mais vous savez, moi, je vois des sous-traitants de l'automobile,
56:41 leur coût de l'électricité est multiplié par 7.
56:43 Quand vous passez d'une facture de 100 000 euros
56:45 à une facture de 700 000 euros,
56:47 je voyais un brasseur la semaine dernière,
56:49 sa facture d'électricité est multipliée par 2.
56:51 Donc là, non.
56:52 Le gouvernement, ce qu'il doit faire sur l'électricité,
56:54 il doit dire on détache le prix de l'électricité du prix du gaz
56:57 même s'il s'agit de désobéir à l'Union européenne.
56:59 - On arrive au bout, François Arrivaud.
57:00 - Il faut désobéir à l'Union européenne
57:01 et faire décrocher le prix du gaz du prix de l'électricité.
57:03 - On arrive au bout.
57:04 Merci beaucoup d'avoir été notre invité ce soir.
57:06 C'était riche.
57:07 - Passionnant.
57:08 - Voilà, passionnant.
57:09 Convaincu, en tout cas.
57:10 - Pas sûr que non.
57:11 - Pas sûr que non, mais convaincu.
57:12 Merci beaucoup en tout cas d'avoir été notre invité.
57:14 On espère que vous reviendrez pour annoncer votre candidature à l'Argent-Régal.
57:17 - A lui, hein.
57:18 - On a voulu le faire.
57:20 - La candidature au ministère des congés.
57:22 - Au ministère du bonheur.
57:24 - Dans un instant, figurez-vous,
57:25 pour ceux qui ont raté le début de l'interview,
57:27 on recommence.
57:28 Merci à mes camarades de m'avoir accompagné. Merci à vous, à très vite.