VIOLENCES, INTIMIDATIONS, IMPUNITÉ : CE RAPPORT EXPLOSIF QUI ACCABLE LA BRAV-M

  • l’année dernière
La BRAV-M - Brigade de répression de l’action violente motorisée - se trouve actuellement au centre de tous les débats et symbolise la gestion particulièrement violente du maintien de l’ordre sous le gouvernement Macron/Borne.
La La BRAV-M (qui n’est pas une unité légalement constituée à proprement parler) est considérée par de nombreux observateurs comme une milice privée au service du gouvernement et d’Emmanuel Macron. Pas étonnant de ce point de vue qu’une pétition publiée sur le site de l’Assemblée Nationale demande sa dissolution. Pétition qui avait enregistré plus 260 000 signatures et qui a été arbitrairement enterrée par la Commission des Lois de l’Assemblée Nationale. Or si cette pétition avait atteint les 500 000 signatures d’ici le 15 juin, la question de la dissolution de la BRAV-M aurait pu être débattue dans l’hémicycle. Débat clos.
L'Observatoire parisien des libertés publiques, vient de publier un rapport qui accable et documente minutieusement les actions ultra-violentes de la BRAV-M. Lucas, membre de cette observatoire, est avec nous sur le plateau du Média pour discuter de ce rapport. C’est l’entretien d’actu, animé par Nadiya Lazzouni.

Lien du rapport : https://site.ldh-france.org/paris/files/2023/04/Rapport-BRAV-M-complet-12.04.2023.pdf
Transcript
00:00 La BRAVEM, elle se situe actuellement au centre de tous les débats.
00:03 Elle symbolise la gestion particulièrement violente du maintien de l'ordre.
00:07 La BRAVEM, c'est quelque part une milice privée au service du gouvernement et d'Emmanuel Macron.
00:11 Alors pas étonnant qu'une pétition publiée sur le site de l'Assemblée nationale demande sa dissolution.
00:16 Pétition qui avait enregistré plus de 260 000 signatures et qui a été arbitrairement enterrée
00:23 par la Commission des lois de l'Assemblée nationale.
00:25 Alors si cette pétition avait atteint les 500 000 signatures d'ici le 15 juin,
00:29 la question de la dissolution, la BRAVEM, aurait pu être débattue dans l'hémicycle Médébaclo.
00:34 Alors loin d'arranger son portrait, l'Observatoire parisien des libertés publiques
00:38 vient de publier un rapport qui accable et documente les actions ultra-violentes de la BRAVEM.
00:44 Lucas, membre de cet observatoire, est avec nous sur le plateau du Média pour discuter.
00:48 Il vient de ce rapport, c'est l'entretien d'actu.
00:57 Bonsoir Lucas, comment allez-vous ?
00:59 Très bien, très content d'avoir sorti ce rapport.
01:01 Oui, content de vous recevoir et merci encore pour votre patience.
01:05 Jour de manifestation oblige, alors je suis forcée de vous poser la question.
01:09 Est-ce que vous étiez dans le cortège parisien ?
01:11 Est-ce que vous avez eu des remontées sur d'éventuelles violences policières aujourd'hui ?
01:16 Alors je suis désolé, je vais vous décevoir.
01:19 Je fais partie d'un collectif, l'Observatoire parisien des libertés publiques,
01:22 où on documente les pratiques policières en manifestation.
01:26 Et on a pour règle de ne parler que de ce qu'on a observé dans le cadre de nos observations.
01:34 On mène des observations toujours par équipe de trois,
01:36 en prenant des notes pour voir ce qui se passe minute par minute.
01:39 On prend aussi des images et après on fait un travail d'analyse là-dessus.
01:42 Et on ne communique que lorsque on a fait ce travail.
01:46 Et ça nous permet d'éviter de faire des erreurs et d'être certain d'avoir une parole crédible
01:50 et de tendre vers le plus de scientificité possible.
01:54 On va respecter votre devoir de réserve.
01:57 Alors avant de rentrer dans le vif du sujet et de parler de votre rapport sur la BRAV,
02:02 est-ce que vous pourriez nous présenter cet Observatoire parisien des libertés publiques ?
02:07 Bien sûr. Alors c'est un collectif qui a été créé par les sections parisiennes
02:11 de la Ligue des droits de l'homme et du Syndicat des avocats de France en 2019.
02:15 La première observation date du 1er mai 2019.
02:19 Avant cela, il y a d'autres observatoires qui ont vu le jour,
02:22 notamment celui de Toulouse, celui de Bordeaux, qui fonctionnent à peu près de la même manière que nous
02:27 et qui avaient déjà sorti aussi des rapports super intéressants avant la création de l'Observatoire parisien.
02:34 Et donc l'Observatoire parisien s'est créé à la suite de ceux-ci.
02:40 Alors on parle beaucoup des BRAV sans trop savoir ce qu'est cette unité.
02:43 On sait juste qu'ils sont très violents.
02:46 Il existe des BRAV-M, des BRAV-L et même depuis quelques temps,
02:50 la BRAV-N. On s'y perd un peu.
02:53 Qu'est ce que c'est concrètement la BRAV et les BRAV-M ?
02:57 Alors effectivement, on s'y perd un peu.
02:59 Nous, on s'est surtout concentrés sur la BRAV-M.
03:02 Mais ce qu'on a compris, c'est que le dispositif BRAV, c'était un dispositif qui avait été créé par Didier Lallement
03:07 au moment de son arrivée à la préfecture de police de Paris.
03:10 Et c'est un dispositif qui vise à donner à priori plus d'autonomie aux agents sur le terrain.
03:16 Didier Lallement disait que ce dispositif permettait aux responsables sur le terrain de prendre des décisions
03:22 sans attendre un ordre qui venait de la salle de commandement.
03:25 Il parlait d'autonomie tactique qui était conférée aux BRAV.
03:29 Au sein de ces BRAV, qui en fait, à priori, sont un mode d'organisation dans lequel se trouvent souvent les compagnies d'intervention,
03:37 qui sont ces policiers aux casques à bandes bleues qu'on voit généralement dans les manifestations à Paris.
03:41 Au sein de ces BRAV, il y a la BRAV-M, c'est-à-dire la BRAV motorisée, qui se déplace à moto et dont les agents interviennent après être arrivés à moto.
03:50 Alors, on a eu du mal à savoir exactement comment fonctionnait ce dispositif, le dispositif BRAV,
03:55 notamment parce qu'on a aussi adressé des questions à la préfecture de police de Paris.
04:00 C'est la Ligue des droits de l'homme qui a adressé ces questions pour nous.
04:03 C'était début octobre. La préfecture n'a pas répondu.
04:06 Donc la Ligue des droits de l'homme a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, qui a donné début janvier un avis favorable.
04:13 La préfecture n'a toujours pas répondu. Et, coïncidence ou miracle, on a reçu hier soir les documents.
04:20 Mais le rapport était déjà sur le site. Donc, on va regarder ce qu'il y a dans ces documents.
04:25 Je n'ai pas encore pu en prendre connaissance et peut-être que ça nous donnera plus d'informations et d'éclairage sur ce dispositif.
04:30 - Donc, c'est une unité non constituée, mais il y en a quand même une qui est permanente, c'est ça ?
04:34 - Voilà, c'est ça. Il y en a une qui a été créée, qui est permanente. Je crois que c'était en octobre 2020.
04:40 Celle qui est permanente, a priori, ce qui serait permanent dedans, ce seraient seulement les conducteurs et conductrices de moto.
04:48 Il semble que même pour la Bravem permanente, les agents qui interviennent, ceux qui sont derrière, viennent de compagnies d'intervention différentes selon les journées.
05:00 Mais c'est une Bravem permanente dont on se demande un petit peu ce qu'elle fait hors journée de manifestation.
05:05 On sait qu'elle intervient en banlieue et on ne sait pas trop ce qu'elle y fait. Et c'est assez effrayant.
05:09 - On devine ? - On peut deviner, oui. Nous, malheureusement, on n'observe que les manifestations à Paris.
05:15 - Ce qui est terrible, c'est que ces membres de la Bravem, ce sont des volontaires.
05:20 - Alors, ça, vous me l'apprenez. C'est ce qui est dit parfois par la préfecture. J'ai vu que Jérôme Foucault disait ça.
05:27 On peut se demander s'ils sont volontaires. Moi, j'avais entendu qu'au début, ils avaient du mal à trouver des volontaires.
05:31 Donc, je ne sais pas comment ça se passe exactement. - Il y aurait des volontaires et des personnes repérées pour leur capacité en maintien de l'ordre.
05:38 Alors, je ne sais pas à quelle occasion, mais c'est le cas. Alors, pourquoi l'Observatoire s'est intéressé à cette unité spécifiquement ?
05:43 Est-ce que c'est lié aux polémiques qu'on connaît ? - On s'est intéressé très tôt à cette unité.
05:49 D'abord, à travers des travaux qui ne concernaient pas spécialement cette unité, mais on a publié des rapports d'observation, des notes d'observation,
05:55 où souvent, on était amené à détailler un petit peu les actions de la Bravem et à s'intéresser à elles.
06:00 On s'est intéressé à cette unité parce que, d'abord, elle était nouvelle et il y avait assez peu de choses qui avaient été faites dessus.
06:07 Ça fait très longtemps qu'on travaille, on est très nombreux et nombreux à travailler là-dessus, sur ce rapport depuis longtemps.
06:12 Et voilà, il y avait assez peu de choses. C'était nouveau. Et puis, il nous semblait qu'il y avait quelque chose de symbolique avec la Bravem.
06:21 En plus, des violences dont la Bravem fait preuve, mais qui, malheureusement, ne sont pas spécifiques à la Bravem.
06:27 Les compagnies d'intervention, les BAC sont très violentes aussi. Les CRS et les gendarmes mobiles peuvent l'être aussi.
06:32 - Ils sont plus violents que les CRS quand même, les Bravem, non ? - Oui. En tout cas, enfin, je dis ça un peu rapidement peut-être, mais oui, en général,
06:39 ils nous semblent plus violents. Et peut-être à cause de deux choses, qui sont d'abord le fait que les CRS et les gendarmes mobiles ont une formation spécialisée
06:49 en maintien de l'ordre que n'ont pas les agents de compagnie d'intervention ou de BAC. A priori, maintenant, c'est plutôt les agents de compagnie d'intervention
06:55 qui forment les Bravem. Et les Bravem sont dotés de cette autonomie tactique qui est susceptible de leur permettre d'agir sans forcément avoir
07:05 une appréciation globale de la situation, peut-être de réagir pour des considérations qui leur sont propres, sans chercher la désescalade,
07:15 là où les CRS et les gendarmes mobiles ne peuvent pas agir tout seuls. Ils attendent un ordre.
07:21 - Alors quand je disais qu'ils étaient plus violents, je me suis un peu basée sur votre rapport et notamment à l'utilisation des grenades GMD et GENL,
07:33 des grenades en gros de désencerclement que les Bravem utiliseraient plus que les CRS.
07:40 - En tout cas, il y a une enquête de Mediapart qui avait été publiée sur l'utilisation des grenades et de ces grenades, maintenant, c'est les GENL,
07:48 c'est les grenades de désencerclement, oui. Les agents qui les utilisent n'ont pas le droit de les lancer en l'air. Ils doivent les faire rouler à terre.
07:54 Et l'enquête de Mediapart montrait que, effectivement, chez les Bravem, il y avait beaucoup plus de lancers non réglementaires que chez les CRS.
08:00 - Alors se pose aussi la question des interpellations. L'Observatoire note que les Bravem est un outil de communication au service du pouvoir.
08:08 - Alors, effectivement, les Bravem sont faites pour les interpellations. Didier Lallement le disait et il le dit dans son livre aussi, "L'ordre nécessaire",
08:20 qu'il a sorti après son passage à la préfecture. Et il y a un passage qui est très intéressant dans ce livre parce qu'il reconnaît lui-même que l'exigence de faire des interpellations
08:31 est liée à des exigences de communication. Il dit que le pouvoir a besoin de communiquer, ou en tout cas, souhaite communiquer sur le nombre d'interpellés.
08:39 D'ailleurs, on sait très bien, ça s'est encore montré récemment, que les interpellés, très souvent, ne sont coupables d'aucune infraction.
08:45 Et Didier Lallement reconnaissait lui-même que, dans le livre, il reconnaît, il dit "ça ne va pas de soi, le fait de faire des interpellations comme ça dans la foule,
08:55 ce n'est pas évident". Et il dit lui-même que ça pose des problèmes. Et nous, c'est ça qu'on observe sur le terrain. C'est que quand une unité comme la Bravem va chercher
09:06 quelqu'un pour l'interpeller, souvent, ça oblige l'unité à fendre la foule et à créer énormément de désordre.
09:11 - D'ailleurs, vous documentez sur deux pages le sens de la mise en scène des Bravem. Est-ce que ça y participe, ça ? Que ce soit sur les réseaux sociaux,
09:18 comme lors des interventions. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que vous entendez par là ?
09:22 - Alors, le sens de la mise en scène, c'est sur les réseaux sociaux. Et effectivement, il y a un journaliste, Maxime Sirvins, qui a fait un article super là-dessus,
09:32 où il a vraiment fait de la veille sur les réseaux sociaux. Mais avant d'être sur les réseaux sociaux, c'est en intervention et dans leur équipement.
09:38 Le fait qu'on ait comme ça des agents habillés tout en noir, dans des tenues, d'ailleurs, qui ne sont pas des tenues de policiers, qui sont des tenues de motards, au départ.
09:46 Il y a une inscription "police", mais ils ressemblent à des unités en civil. Les motos sont noires et banalisées. Le magazine de la préfecture de police indiquait même
09:54 que les feux de signalisation avaient été volontairement dissimulés sous la carrosserie. Donc, on ne sait pas trop pourquoi, mais il faut que rien ne laisse
10:01 transparaître... En tout cas, ça laisse assez peu transparaître de loin cette qualité d'agent de police. Et on les voit souvent se placer comme s'ils étaient en embuscade
10:12 dans les manifestations. Ça ne les empêche pas d'être visibles, mais on a l'impression qu'ils veulent montrer, justement, le fait qu'ils se cachent et qu'ils peuvent fondre
10:20 sur les gens de n'importe où, même sans forcément arriver en moto, même quand ils sont à pied. Ils ont cette posture.
10:27 - Ils cherchent à semer la terreur.
10:29 - Peut-être leur emblème, c'est un frelon, leur récusson, c'est un frelon dans une posture menaçante.
10:38 Et ils sont aussi toujours casqués, alors qu'habituellement, si on parle par exemple des gendarmes mobiles ou des CRS, le fait de porter le casque, c'est un ordre
10:47 qui est reçu de la hiérarchie et qui est censé indiquer aussi aux manifestants le niveau de tension dans lequel on est et faire passer un message.
10:55 Les bravems, le casque est porté en permanence. Sous le casque, ils ont très souvent des cagoules. Ils ont aussi parfois une espèce de visière fumée
11:06 sous la visière transparente du casque et très souvent, on ne voit rien du tout de leur visage. Et ça, c'est aussi quelque chose qui est très intimidant.
11:12 Et sur les réseaux sociaux, on les voit se mettre en scène dans des postures qui ressemblent un peu à du film d'action où ils portent encore leur cagoule.
11:22 Il faut rappeler peut-être que le port de la cagoule, d'ailleurs, est interdit selon le schéma national du maintien de l'ordre.
11:26 - Il faut exception. On sent bien que c'est un corps d'exception au sein de la police.
11:32 - Oui, mais en même temps, ce n'est pas vraiment un corps. Et c'est ça aussi qui est étonnant. Ce sont des agents qui viennent d'autres services.
11:38 - Une unité peut-être d'exception.
11:41 - Oui, une unité, un dispositif d'exception. Et on peut se demander aussi si eux-mêmes, ça ne les met pas dans...
11:46 Enfin, si ça ne les conduit pas lorsqu'ils sont dans ce dispositif bravem à performer un rôle.
11:51 - Alors, il y a aussi un paragraphe dans ce rapport plutôt cocasse sur le choix de la chronique "brave".
11:57 Un choix qui illustre la vision du maintien de l'ordre sous Macron.
12:01 - Effectivement, Didier Lallement disait dans une audition au Parlement qu'il avait choisi cet acronyme à dessin.
12:08 Il y avait déjà eu des unités policières qui s'étaient appelées les "braves".
12:11 L'acronyme a été repris et il dit qu'il l'a choisi parce qu'il aime les acronymes signifiants.
12:17 Dans le même passage, il rappelle que lorsqu'il était à la tête de l'administration pénitentiaire,
12:21 il avait créé les "ERIS", qui sont ces unités chargées de mater les mutineries en prison.
12:25 Et "ERIS", c'est la déesse de la colère. Et il dit "la déesse de la colère me semblait assez adaptée".
12:29 Donc il a utilisé comme ça cet acronyme et on a l'impression que ça sert aussi peut-être à faire peur.
12:34 Et nous, on pense que la "bravem" participe d'une...
12:38 Enfin, elle a, pour dissuader les gens d'aller manifester.
12:42 - Alors, il y a une véritable stratégie de la peur par leur uniforme intimidant.
12:48 C'est ce que vous nous avez expliqué.
12:50 Et également par des arrestations arbitraires.
12:54 - Alors, les arrestations, effectivement, souvent, elles sont arbitraires.
12:58 Ce n'est pas le fait de la "brave" spécifiquement.
13:01 Les compagnies d'intervention aussi.
13:03 La "BAC" probablement aussi.
13:05 N'importe quelle compagnie, ça, c'est probablement plutôt lié aux ordres reçus par les agents.
13:10 Bon, nous, on ne peut pas savoir, quand on est sur le terrain,
13:14 exactement si une interpellation est arbitraire ou pas.
13:16 Souvent, elle nous semble arbitraire.
13:18 C'est l'impression que ça donne.
13:19 C'est qu'ils prennent des gens au hasard.
13:21 Et ce côté arbitraire des interpellations a été documenté aussi par des journalistes.
13:26 Récemment, ça a été édifiant quand on voit le nombre d'interpellés
13:31 et qu'on le compare au nombre de personnes qui ont été poursuivies,
13:33 sachant que toutes les personnes poursuivies, elles-mêmes,
13:36 ne seront pas forcément condamnées et que même les personnes condamnées,
13:39 on peut parfois se demander en fonction de quelles infractions elles sont condamnées.
13:42 Quand on pense aux lois anti-casseurs ou des choses comme ça,
13:45 ça peut être des infractions un petit peu fourre-tout.
13:46 Donc, il y a une possibilité, effectivement, pour les forces de l'ordre
13:51 d'interpeller un petit peu au hasard.
13:54 C'est en tout cas l'impression qu'on a sur le terrain.
13:56 - Mais le rapport pose également la question d'un potentiel retour des voltigeurs.
14:00 - Oui, alors on a forcément traité cette question puisque les Bravem
14:04 sont souvent comparés aux voltigeurs.
14:06 Même dans les manifestations, les gens parfois parlent de voltigeurs
14:09 en voyant arriver la Bravem.
14:10 Didier Lallement et le préfet Laurent Nunez aujourd'hui aussi,
14:17 insistent toujours sur le fait que les Bravem n'interviennent pas à moto.
14:20 Les agents interviennent à pied.
14:23 En tout cas, c'est la règle alors que les voltigeurs intervenaient à moto.
14:26 Nous, on rappelle d'abord que les voltigeurs, le dispositif des voltigeurs,
14:32 il a été supprimé à la suite de la mort de Malik Ousekine,
14:35 qui a été tué par des agents qui étaient à pied.
14:36 - Qui sont descendus de leur moto.
14:38 - Qui étaient descendus de leur moto et qui intervenaient à pied.
14:41 On a vu des scènes, et là, on peut penser à des vidéos aussi très célèbres,
14:45 comme celle du journaliste Noman, où on voit des voltigeurs,
14:48 pardon, justement, je dis des voltigeurs à ma langue sourche.
14:50 - C'est très révélateur.
14:51 - On voit des Bravem qui frappent quelqu'un au sol et s'acharnent sur lui
14:58 avant de le laisser.
14:59 En tout cas, on a aussi fait des recherches.
15:03 On est tombé sur un article du "Monde" qui date de quelques semaines
15:08 ou quelques jours après la mort de Malik Ousekine et qui parle des voltigeurs.
15:11 Et l'article dit que ce qui pose problème chez voltigeurs,
15:15 c'est un esprit qui anime les membres de cette unité et qui voit tout passant
15:19 ou tout manifestant comme une menace potentielle.
15:21 L'article ne met pas l'accent sur le fait que les voltigeurs interviennent
15:24 à moto spécifiquement, même si j'imagine que ça devait être
15:29 peut-être encore pire quand ils intervenaient à moto.
15:30 - Alors, il y a un autre point qui nous semble important, en tout cas,
15:34 aux médias.
15:35 Vous documentez très largement, au-delà des violences physiques,
15:38 plusieurs manquements à la déontologie policière de la part des Braves.
15:42 Vous l'avez dit tout à l'heure, l'utilisation de la gagoule,
15:44 qui est normalement, en principe, proscrite.
15:45 Quels sont les autres règles auxquelles il manque ?
15:49 - Le port du RIO.
15:52 Les Bravemes, mais là encore, ce n'est pas spécifique aux Bravemes,
15:55 c'est plus général dans la police.
15:57 Le RIO est très peu porté.
16:00 Nous, on fait des décomptes quand on peut.
16:03 On passe en observation devant des lignes de policiers ou de gendarmes
16:07 et on compte combien y a de policiers et combien porte le RIO
16:10 ou combien ont un RIO visible.
16:11 Souvent, ils sont une minorité à le porter, alors que la loi les oblige
16:16 à le porter.
16:17 Et ça, ça donne vraiment l'impression que ce n'est pas la loi qui est
16:21 le principe directeur de leur action.
16:22 C'est peut-être une conception de l'ordre qu'ils ont, je ne sais pas.
16:24 Mais en tout cas, ce n'est pas la loi, puisque le RIO, il ne le porte pas.
16:28 Et puis souvent, tout simplement, l'usage de la force.
16:32 La loi est claire là-dessus, sur le fait que l'utilisation de la force
16:35 doit être strictement nécessaire et proportionnée.
16:38 Et nous, on voit que très souvent, ce n'est pas le cas.
16:41 Très souvent, les sommations ne sont pas faites.
16:43 Alors, la loi prévoit des exceptions, des moments où les forces de l'ordre
16:49 ont le droit d'utiliser la force sans sommation.
16:51 Mais souvent, ils le font sans sommation et on a l'impression que ça ne rentre
16:56 pas dans le cadre de ces exceptions.
16:58 - Ils affichent aussi leur appartenance à des groupes politiques d'extrême
17:01 droite de manière assez décomplexée.
17:04 - Alors ça, chez les Bravem, on ne l'a pas tant vu que ça,
17:08 parce que leur uniforme...
17:11 En général, ils sont quand même tout en noir.
17:14 Par contre, je pense que vous faites référence à un cas qu'on a documenté,
17:18 c'est le cas d'un commissaire qui intervient, ou qui, en tout cas,
17:21 est intervenu en Bravem, mais qui intervient aussi souvent
17:23 en compagnie d'intervention, à propos duquel Le Monde avait fait
17:27 une enquête pour découvrir qu'il était responsable de la blessure
17:32 d'un photographe qui avait eu le nez cassé d'un coup de matraque.
17:34 Et le journal Le Monde avait, avec cette enquête vidéo, vu que ce commissaire...
17:39 - C'est le commissaire P, c'est ça.
17:40 - Il avait nommé le commissaire P et ce commissaire avait frappé
17:43 énormément de gens d'une manière qui semblait totalement gratuite
17:46 dans sa charge.
17:47 Ce commissaire, on a pu l'identifier et on voit qu'il est encore très
17:52 souvent présent en manifestation, quasiment systématiquement,
17:57 enfin, en général, en commandement de CI, on le voit, de compagnie
18:01 d'intervention.
18:02 Et pendant longtemps, il portait sur son casque une insigne qui est
18:06 la "Sign Blue Line", qui est un symbole dont le sens n'est pas très
18:10 clair, mais qui est quand même plutôt associé à des groupes
18:15 d'extrême droite.
18:16 Apparemment, au départ, c'est des policiers américains qui le portaient
18:20 pour symboliser cette "Sign Blue Line".
18:22 C'est la ligne bleue très fine qui séparerait l'ordre du chaos et la
18:26 ligne bleue, ce sont les forces de l'ordre.
18:28 Ce commissaire ne la porte plus depuis quelques semaines et l'inspection
18:33 générale de la Gendarmerie nationale a interdit aux gendarmes de porter
18:37 cette "Sign Blue Line" à peu près au même moment.
18:40 Nous, on ne l'a plus vu la porter.
18:41 Alors lui, il n'est pas gendarme, il est policier, mais ça l'a peut-être
18:44 dissuadé de continuer à porter cette insigne.
18:46 Et alors ces Bravem qui ne respectent pas ces règles,
18:50 qui disent la CAGOOL, les RIO cachés, ce n'est pas spécifique à eux,
18:53 mais est-ce qu'ils ne sont pas sanctionnés ?
18:57 Pas de sanctions de la part du gouvernement, de leur autorité ?
19:00 La CAGOOL, le RIO, non.
19:03 Le commissaire P, dont je vous parlais, il a été médaillé quelques
19:08 mois après les violences que le monde a documentées.
19:13 Donc le fait qu'il ait été médaillé et qu'il soit maintenu sur le terrain,
19:17 ça envoie quand même, je pense, à l'Observatoire, un très mauvais
19:21 signal aux agents aussi qu'il a sous son commandement et aux agents
19:26 en général.
19:27 Et pourtant, Darmanin avait affirmé dans le JDD, avoir la main ferme
19:31 avec ceux qui déshonorent l'uniforme.
19:32 Pourquoi ce malcard ?
19:33 Je ne sais pas ce qu'il appelle déshonorer l'uniforme.
19:35 Alors comment et pourquoi, face aux innombrables témoignages de violences
19:40 policières, la Bravem peut-elle être maintenue en exercice ?
19:44 C'est la question qu'on pose dans la conclusion du rapport,
19:47 où on se demande même aussi comment elle a pu être créée.
19:50 Parce que la Bravem, elle a quand même été créée pendant les Gilets
19:55 jaunes, quelques mois après le début du mouvement, mais à un moment
19:59 où la question des violences policières commençait vraiment à émerger
20:02 dans le débat public, en tout cas, se montrait de manière plus importante.
20:12 Il y avait eu tous ces Gilets jaunes qui avaient été borniés,
20:15 il y avait eu des Gilets jaunes qui avaient eu des mains arrachées, etc.
20:19 Et à ce moment-là, alors qu'il y avait ces polémiques sur la violence
20:22 policière, la Bravem a été créée.
20:24 Alors, on ne sait pas, c'est sûrement une manière de reprendre la main.
20:28 On se dit à la fin, c'est des hypothèses qu'on donne dans le rapport,
20:33 peut-être une forme de provocation et peut-être même une espèce de coup
20:37 de force, peut-être aussi que l'institution utilise un petit peu,
20:41 c'est une question qu'on se pose à la fin et qu'on laisse ouverte.
20:43 Est-ce que...
20:45 - Est-ce qu'à terme, elle pourrait remplacer la BAC ?
20:47 - Alors, dans les manifestations, on a eu l'impression que ça remplaçait
20:50 la BAC.
20:51 Dans nos observations, en tout cas, on a remarqué qu'à partir du début
20:57 2020, on ne voyait plus la BAC en manifestation, on ne voyait plus
21:01 que la Bravem.
21:02 Par contre, là, en février, on a revu la BAC dans les manifestations.
21:07 Je ne sais pas pourquoi la BAC est revenue, je ne sais pas si c'est
21:09 une décision stratégique ou si c'est parce que la hiérarchie manquait
21:13 de force, simplement.
21:15 Mais effectivement, on a l'impression qu'il y a une continuité entre
21:18 la BAC et la Bravem.
21:19 - Alors, dissoudre la BRAV, c'est l'objet d'une pétition qui a
21:26 récolté 263 887 signataires, dûment vérifiés par le biais de
21:31 France Connect en seulement 13 jours.
21:33 Sauf que voilà, le 5 avril, la Commission des lois a tout
21:37 simplement décidé de la classer à l'issue d'une discussion qui n'aura
21:41 pas duré une heure.
21:42 On écoute le député LFI.
21:43 - Simplement, aujourd'hui, vous ne pouvez pas évacuer sous le tapis
21:47 qui est 260 000 citoyens qui aient signé cette pétition.
21:50 Et oui, c'est une pétition engagée, mais toutes les pétitions ont un
21:53 objectif engagé.
21:54 Elles ouvrent un débat et elles posent une question sur le maintien
21:56 de l'ordre.
21:57 Et la Bravem est la pointe avancée de votre politique de répression,
22:00 de gens qui, oui, roulent sur des manifestants, mettent des coups
22:03 de matraque, tiennent des propos racistes le soir.
22:06 Est-ce qu'on peut accepter d'avoir des policiers qui se comportent
22:08 de cette manière, qui aujourd'hui disent à des gens "mais tu es venu
22:11 en France parce que tu as traversé la mer ou tu t'es accroché
22:13 à une aile d'avion".
22:14 Voilà aujourd'hui ce qu'est la Bravem.
22:16 Et nous allons continuer à porter la mobilisation pour exiger la
22:20 dissolution de cette unité-là, qui est une unité violente.
22:24 - On vient d'entendre le député LFI, Thomas Porte.
22:27 C'était justement en commission des lois.
22:29 Alors, j'imagine que vous avez bien suivi le dossier de cette pétition.
22:33 L'Observatoire se positionne-t-il pour la dissolution des Bravem ?
22:36 - Alors, par principe, l'Observatoire ne se positionne pas,
22:39 n'émet pas de recommandations.
22:40 Par contre, on a été créé, l'Observatoire, par la Ligue des
22:43 droits de l'homme, qui a aussi sa propre pétition, qui demande
22:46 la dissolution de la Bravem, mais pas seulement.
22:48 - Combien de signatures à ce jour ?
22:50 - Là, je ne sais pas.
22:51 Par contre, on tient aussi à insister sur le fait que la Bravem n'est
22:57 pas le seul problème.
22:57 Dissoudre la Bravem et laisser tout le reste, ça ne changerait pas
23:02 forcément les choses.
23:03 Vous parlez tout à l'heure des gilets jaunes.
23:04 La Bravem n'existait pas encore.
23:05 Ça n'a pas empêché l'usage des LBD, l'usage des grenades, etc.
23:09 Donc, la pétition qui est lancée par la LDA, je demande aussi plein
23:13 d'autres choses, l'interdiction des NAZ, par exemple, l'interdiction
23:15 du matériel classé matériel de guerre, comme les LBD ou certaines
23:20 grenades explosives.
23:21 - Vous allez plus loin, oui, que la dissolution.
23:26 - Il ne faudrait pas croire que la Bravem est seule responsable.
23:28 Souvent, les agents de la Bravem interviennent aussi en compagnie
23:31 d'intervention.
23:32 Les compagnies d'intervention peuvent se révéler très dangereuses.
23:35 - Ils se sont fait particulièrement remarquer durant ces manifestations.
23:38 On a presque oublié les gendarmes et les CRS qui sont tout aussi
23:43 violents, peut-être pas plus, mais à niveau égal.
23:46 - C'est difficile de savoir exactement, mais les CRS et les
23:52 gendarmes mobiles ont quand même cette spécialisation dans le
23:54 maintien de l'ordre.
23:55 Je ne dis pas du tout qu'ils ne sont pas violents.
23:59 Là, les observatoires sont en train de documenter ce qui s'est passé
24:02 à Seine-Sauline.
24:03 C'était des gendarmes.
24:04 Il y a évidemment énormément de problèmes avec la gendarmerie
24:06 mobile et avec les CRS.
24:08 En manifestation à Paris, on trouve que c'est encore pire
24:11 lorsque les manifestants ont affaire à des Bravem, à des compagnies
24:17 d'intervention ou à des BAC.
24:18 Et nous, par exemple, en tant qu'observateurs, les quelques fois
24:24 où on a été bousculé ou violenté par des forces de l'ordre,
24:29 c'était très souvent la Bravem.
24:30 - Merci beaucoup, Lucas, membre de l'Observatoire parisien
24:35 de la liberté publique.
24:36 Foncez voir ce rapport qui a été publié aujourd'hui.
24:40 Oui, voilà, c'est ça.
24:41 Aujourd'hui, un rapport très fourni qui accable et documente
24:45 minutieusement les actions ultra violentes de la Bravem.
24:48 Écoutez, j'espère que vous serez invité par Hanouna sur TPMP,
24:52 au moins, il pourra être sûr que vous connaissez bien le sujet.
24:55 - Pas sûr qu'on ira.
24:56 - Voilà, peut-être pas sûr, mais en tout cas, ce serait
24:58 une invitation qui pourrait peut-être faire oublier
25:00 celle des faux Bravem.
25:01 - Merci.
25:02 - Merci à vous.
25:03 - Merci à vous.
25:04 - Merci à vous.
25:05 - Merci à vous.
25:06 - Merci à vous.
25:07 - Merci à vous.
25:08 - Merci à vous.
25:09 - Merci à vous.
25:10 - Merci à vous.
25:11 [SILENCE]

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