️ "Pourquoi moi ?"
Découvrez le documentaire exclusif sur le mental des sportifs de haut niveau à 18h30 sur beIN SPORTS 1
Pour répondre à ces questions et définir leur profil, John FERREIRA et Julien GRES sont allés à la rencontre de grands champions tels que Nikola et Luka KARABATIC, Thierry OMEYER, Justine DUPONT et Brahim ASLOUM. Ils ont également rencontré Ghani YALOUZ (ex-directeur de l'INSEP), Cécile TRAVERSE (docteur en psychologie du sport), mais aussi Niklas HAUSLER et Fabian STEINBERG (neurophysiciens qui travaillent avec le club de Liverpool). Ces témoignages permettent de comprendre qui ils sont, comment ils fonctionnent et en quoi ils sont différents.
Découvrez le documentaire exclusif sur le mental des sportifs de haut niveau à 18h30 sur beIN SPORTS 1
Pour répondre à ces questions et définir leur profil, John FERREIRA et Julien GRES sont allés à la rencontre de grands champions tels que Nikola et Luka KARABATIC, Thierry OMEYER, Justine DUPONT et Brahim ASLOUM. Ils ont également rencontré Ghani YALOUZ (ex-directeur de l'INSEP), Cécile TRAVERSE (docteur en psychologie du sport), mais aussi Niklas HAUSLER et Fabian STEINBERG (neurophysiciens qui travaillent avec le club de Liverpool). Ces témoignages permettent de comprendre qui ils sont, comment ils fonctionnent et en quoi ils sont différents.
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SportTranscription
00:00 Vers 8-9 ans, ma vocation est venue.
00:02 Je me suis dit, ce que je veux faire plus tard,
00:04 c'est être joueur de l'équipe de France,
00:06 c'est être meilleur joueur au monde.
00:08 Quant à ça, quant à ce feu-là,
00:10 derrière c'est plus facile d'aller travailler,
00:12 c'est plus facile de faire les sacrifices,
00:14 de faire les efforts.
00:16 Ce dépassement de soi,
00:18 c'est un grand mot,
00:20 mais au final, c'est que tu ne te dépasses pas.
00:22 C'est que tu utilises plus de capacités
00:24 que tu n'as pas.
00:26 C'est un mot qui est très important.
00:28 Tu utilises plus de capacités que d'habitude.
00:30 Je crois que ce qu'a besoin un champion,
00:36 c'est de se fixer des objectifs et d'y croire.
00:38 Ça a été mon obsession au quotidien.
00:40 Pour moi, c'est important que cette pression,
00:46 ce soit une pression, je qualifierais ça de pression positive.
00:48 En fait, c'est ça qui va faire
00:50 que tu vas faire de meilleurs matchs.
00:52 Et Thierry Oveillard,
00:54 peut-être la possibilité, il va la tenter.
00:56 Allez Thierry !
00:58 Formidable !
01:00 Exceptionnel.
01:02 Pour réussir au plus haut niveau,
01:04 c'est dans la tête que peut se faire la différence.
01:06 Alors, nous nous sommes posés cette question.
01:08 Comment fonctionne le cerveau
01:10 des plus grands champions ?
01:12 Et pour y répondre, nous sommes allés
01:14 à la rencontre des neuroscientifiques de Neuro11
01:16 qui collaborent entre autres avec Liverpool.
01:20 Ils ont fait un étude sur Neymar
01:22 où ils l'ont mis dans un scanner du cerveau
01:24 et ils ont trouvé que quand il tournait son pied,
01:26 il utilisait moins d'énergie pour le tourner.
01:28 Donc dans son cerveau, il a besoin de moins d'activation.
01:30 C'est un bon exemple.
01:32 Les meilleurs des meilleurs,
01:34 ils sont plus efficaces à le faire.
01:36 Ils ont une structure du cerveau plus efficace,
01:38 des connexions plus bonnes.
01:40 Et à la rencontre de Cécile Traverse,
01:42 docteur en psychologie du sport.
01:44 Ils sont capables d'aller chercher
01:46 la solution juste,
01:48 de décider vite
01:50 grâce à ce stockage.
01:52 Ils sont là où on les attend
01:54 et prêts à être extrêmement performants.
01:56 Alors que nous,
01:58 si on se projette là-dedans,
02:00 on est effrayés.
02:02 Comment ces 5 grands champions
02:06 ont-ils fait face à leur peur
02:08 et à leur doute ?
02:10 Comment se sont-ils construits ?
02:12 Quelles ont été leurs ressources et leurs moteurs ?
02:14 Se considèrent-ils comme les meilleurs ?
02:16 En quoi sont-ils différents ?
02:18 En fait, ça a commencé...
02:30 Ma mère voulait une fille.
02:32 Au moment où je nais,
02:34 je suis un garçon.
02:36 Elle m'a chuchoté comme si j'en étais une d'ailleurs.
02:38 Mais ça a été important parce que ça a été
02:40 des moments clés dans ma vie
02:42 qui m'ont donné la possibilité,
02:44 j'ai eu envie de démontrer à ma mère,
02:46 principalement,
02:48 que je n'étais pas aussi fragile qu'elle l'imaginait.
02:50 Pour elle, l'image du boxeur,
02:52 c'était Rocky,
02:54 le nez cassé, les arcades ouvertes.
02:56 C'était ça pour elle, la boxe.
02:58 Et puis, à travers des discussions
03:00 avec ma maman,
03:02 j'avais besoin de la rassurer.
03:04 Je crois qu'elle avait besoin que je la rassure.
03:06 Je pense qu'inconsciemment,
03:10 mon histoire avec le handball a commencé
03:12 tout petit, dès ma naissance.
03:14 Mon père était gardien de but
03:16 en ex-Syroslavie.
03:18 Je suis né en ex-Syroslavie.
03:20 Il a joué pour l'équipe nationale aussi.
03:22 Donc, je pense que
03:24 j'ai baigné dans le sport
03:26 et notamment le handball
03:28 dès ma naissance.
03:30 Moi, par exemple, de ce côté-là,
03:32 c'est vraiment ma mère qui m'a beaucoup aidé
03:34 à avancer,
03:36 à jamais baisser la tête,
03:38 baisser les bras.
03:40 Je vis un chemin un peu particulier.
03:42 Elle a toujours été là pour me pousser,
03:44 pour m'accompagner.
03:46 J'avais un peu ce côté "dur" avec mon père.
03:48 Et à côté, ma mère
03:50 qui était toujours le soutien
03:52 et celle qui venait à la fin
03:54 tout réafistoler et continuer à avancer.
03:56 Bonjour.
04:00 Bienvenue.
04:02 Entrez chez moi.
04:04 Voilà.
04:08 Mes petits sont avec moi.
04:10 Toujours.
04:14 Toujours m'accompagnent.
04:16 Là, c'était à Londres.
04:18 Là, c'est avec...
04:24 Voilà.
04:26 Là, Lucas joue encore au tennis
04:28 avec papa.
04:30 Commencer avec ta famille,
04:36 c'est sûr que t'as un petit cocon
04:38 qui se crée, une confiance.
04:40 Tu comprends tout simplement.
04:42 Moi, au tout début, à 10 ans,
04:44 c'est quand mon frère ne sort pas de l'eau
04:46 et je ne comprends pas.
04:48 Vu que je passe mon temps avec mon frère,
04:50 j'ai envie de savoir et de comprendre
04:52 pourquoi la personne
04:54 avec laquelle je joue,
04:56 ne joue plus avec moi, mais joue avec sa planche.
04:58 Qu'est-ce qu'il y a ?
05:00 Ça m'intrigue.
05:02 Quand tu vas surfer,
05:04 tu ne sais pas à quoi t'attendre.
05:06 Tu vas dans un océan qui est en mouvement constant.
05:08 Tu dois t'adapter à ça.
05:10 C'est toujours différent.
05:12 Ça amène...
05:14 Tu ne peux pas te lasser, tout simplement.
05:16 J'ai commencé le monde à l'âge de 6 ans.
05:18 Peut-être même un peu avant,
05:22 parce que mes parents jouaient tous les deux.
05:24 Dès mon plus jeune âge,
05:26 je me retrouvais à l'âge de 6 ans.
05:28 J'étais un peu plus jeune.
05:30 J'étais un peu plus jeune.
05:32 J'étais un peu plus jeune.
05:34 J'étais un peu plus jeune.
05:36 J'étais un peu plus jeune.
05:38 J'étais un peu plus jeune.
05:40 J'étais un peu plus jeune.
05:42 J'étais un peu plus jeune.
05:44 J'étais un peu plus jeune.
05:46 Dès mon plus jeune âge,
05:48 je me retrouvais les week-ends dans les salles de hand.
05:50 J'ai pris ma première licence à 6 ans.
05:52 C'est un sport que je n'ai jamais arrêté de pratiquer
05:54 jusqu'à la fin de ma carrière.
05:56 Ce sont des chercheurs permanents, justement.
06:04 C'est directement lié sur eux-mêmes
06:06 et ils ont des capacités introspectives très fines.
06:08 Ils n'ont pas peur d'aller regarder
06:10 leur histoire de prévention.
06:12 leur histoire de prévention.
06:14 J'avais 15-16 ans.
06:20 J'étais dans le tennis.
06:22 J'étais un espoir du tennis.
06:24 Peut-être faire un jour Roland-Garros
06:26 et gagner un grand chlem.
06:28 Ça a toujours été ça.
06:30 Ça faisait des années qu'on me le répétait.
06:32 Je me voyais mal dire à mon père
06:34 « J'arrête tout, je reviens au hand »
06:36 alors que ça faisait 10 ans que le tennis
06:38 était toute ma vie.
06:40 C'était un peu...
06:42 Lui savait tous les sacrifices que j'avais fait.
06:44 Ça aurait peut-être été dur
06:46 de comprendre sa décision.
06:48 Donc je n'ai pas osé tout de suite.
06:50 J'ai un peu forcé le truc.
06:52 J'ai continué, continué.
06:54 Sauf qu'au bout d'un moment,
06:56 je n'y arrivais plus.
06:58 Ma mère savait.
07:00 Je me confiais à elle.
07:02 Je lui disais tout.
07:04 Elle le savait.
07:06 Un jour, c'est elle qui m'a dit
07:08 qu'elle allait jouer avec mon père tous ensemble.
07:10 On a bien expliqué les choses.
07:12 Ça s'est fait comme ça.
07:14 Lui était traineur des gardiens
07:16 à Montpellier, au centre de formation.
07:18 Je suis parti avec lui et j'ai fait un entraînement
07:20 au centre de formation à Montpellier.
07:22 À partir de ce moment-là,
07:24 ma trajectoire a changé.
07:26 Je me suis remonté vers le poste de gardien de but
07:30 à l'âge de 12 ans.
07:32 Je me suis rendu compte de l'importance
07:34 de ce poste-là.
07:36 Je suis certainement compétiteur.
07:38 Je détestais perdre.
07:40 Je me suis dit que
07:44 à ce poste-là, si tu n'as pas un bon gardien,
07:46 tu ne peux pas gagner.
07:48 Sans savoir que j'allais forcément
07:50 être performant,
07:52 que ça allait être le poste
07:54 où j'allais m'éclater.
07:56 En tout cas, j'avais déjà mesuré
07:58 la responsabilité
08:00 et le côté décisif
08:02 de ce poste-là.
08:04 C'est drôle.
08:06 Je pense que je n'ai pas eu
08:08 trop d'objectifs
08:10 comme "Je veux être
08:12 championne du monde".
08:14 J'avais peu d'objectifs
08:16 comme ça
08:18 jusqu'à faire mon premier
08:20 championnat du monde.
08:22 J'ai fait deuxième en longboard
08:24 quand j'avais 15 ans.
08:26 Je me suis dit que j'avais 15 ans
08:28 et que je faisais deuxième au championnat du monde.
08:30 C'est super, mais là, je devrais
08:32 être première, mais il n'y a pas
08:34 beaucoup de chemin à faire.
08:36 Ça ne me paraissait pas
08:38 excitant.
08:40 C'était dans une discipline, en longboard.
08:42 Je voyais la discipline du shortboard,
08:44 qui était la discipline plus phare du surf.
08:46 Il y avait beaucoup plus de concurrence.
08:48 Je surfais,
08:50 mais je n'avais pas de plan.
08:52 À partir du moment où je suis deuxième
08:54 à 15 ans, c'est les marques
08:56 qui sont venues vers moi.
08:58 Je me suis rendue compte
09:00 qu'il y avait un gros côté professionnel.
09:02 Il y avait une demande d'interview,
09:04 de marque, de contrat.
09:06 C'est là où j'ai été baignée
09:08 en rien de temps
09:10 dans ce milieu professionnel.
09:12 C'est là où je me suis dit
09:14 ce qui m'attire, ce que j'ai envie de faire.
09:16 C'est surtout ce projet-là
09:18 qui va me permettre de surfer tous les jours.
09:20 C'était le côté enfant
09:22 d'être dans l'océan et de surfer tous les jours
09:24 et de profiter de ces vagues-là
09:26 et de progresser et d'apprendre.
09:28 Là, un peu plus tard, vers 8-9 ans,
09:30 ma vocation est venue.
09:32 Je me suis dit
09:34 ce que je veux faire plus tard,
09:36 c'est être joueur de l'équipe de France
09:38 et être meilleur joueur au monde.
09:40 Quelqu'un qui me dit
09:44 "Je veux être champion du monde,
09:46 champion olympique", moi je le prends au mot tout de suite,
09:48 même à l'avant. C'est très bien.
09:50 Moi je préfère entendre ça à la limite.
09:52 Et pourquoi ? Et pourquoi on n'a pas le droit de rêver ?
09:54 [Musique]
10:12 Pourquoi on n'a pas le droit d'avoir
10:14 des objectifs comme ça qui paraissent
10:16 surréalistes ? Mais c'est pas surréaliste,
10:18 c'est juste qu'il a un rêve
10:20 et souvent les rêves, on peut les réaliser les rêves.
10:22 J'ai eu la chance de le vivre,
10:24 j'ai eu la chance de le vivre en tant qu'athlète,
10:26 j'ai eu la chance de le vivre en tant qu'entraîneur,
10:28 j'ai eu la chance de le vivre en tant que sélectionneur.
10:30 Rien n'est impossible.
10:32 Les limites, c'est celles qu'on se fixe.
10:34 Aujourd'hui, je dis qu'une chose,
10:36 c'est que dans le sport, il n'y a jamais de miracle.
10:38 Mais il y a souvent des surprises.
10:40 Tout le monde sait, oui,
10:44 qu'il faisait la musculation tout petit
10:46 en cachette quand il avait
10:48 interdit parce qu'il était trop petit.
10:50 Mais il a vu ça à la télé,
10:52 il voulait faire, alors on l'a découvert.
10:54 Le soir, on attendait,
10:56 toc, toc, toc,
10:58 en fait, il faisait la musculation
11:00 tout seul. Et on a dit,
11:02 mais non, il ne faut pas,
11:04 c'était trop tôt.
11:06 Je m'entraînais avec des gamins qui avaient 4-5 ans de plus que moi.
11:08 Le soir,
11:10 aux entraînements de l'équipe 1, de l'équipe 1ère
11:12 que mon père entraînait, je faisais des tirs
11:14 avec les gardiens, j'avais 10 ans,
11:16 je jouais avec des adultes.
11:18 Et au riz d'âge, je jouais tout seul
11:20 contre l'équipe adverse et gagner.
11:22 - Si lui, quand il était petit,
11:24 il tirait trop, il se faisait engoler
11:26 après. Parce que
11:28 si jamais l'équipe, même si elle a gagné,
11:30 non, mais tu peux pas,
11:32 d'abord, il faut voir,
11:34 donner la balle et après,
11:36 si il y a personne, tu tires.
11:38 Mais lui, c'est sûr qu'il était un peu,
11:40 il avait envie de tirer quand on était plus...
11:42 Mais bon,
11:44 il a...
11:46 C'est pas facile, mais
11:48 ça l'a aidé beaucoup, pour après, je pense.
11:50 - La concrétisation de mon rêve,
11:54 c'est-à-dire d'être pro et de jouer en équipe
11:56 de France, je l'ai compris
11:58 que plus tard, parce que quand on grandit,
12:00 quand on a 15-16 ans, on rentre
12:02 en sport-études, en centre de formation,
12:04 et là, on affronte des joueurs
12:06 qui jouent encore contre des plus vieux que moi,
12:08 mais qui font partie des meilleurs joueurs en France,
12:10 des meilleurs joueurs au monde. Donc là, tu vois
12:12 le niveau que c'est et ce que ça implique
12:14 pour y arriver.
12:16 - Quant à ça, ce feu-là, derrière, c'est plus facile
12:18 d'aller travailler, c'est plus facile de faire
12:20 les sacrifices, de faire les efforts.
12:22 - Ah bah oui, moi, c'est depuis tout petit.
12:24 Ils ont...
12:26 Quand les autres, ils allaient au cinéma,
12:28 ils ne pouvaient pas parce qu'il faut s'entraîner.
12:30 Quand, pour exemple,
12:32 on peut aller à la plage,
12:34 non, non, il faut aller à l'entraînement.
12:36 Mais depuis tout petit.
12:42 - Moi, j'ai commencé à 15 ans.
12:44 A 16 ans, je rentre en équipe de France.
12:46 Donc moi, à 15 ans, on est en 96.
12:48 Il y a les Jeux olympiques qui arrivent.
12:50 Donc en début d'année, en fin d'année,
12:52 il y a les Jeux olympiques à Atlanta.
12:54 Donc ça faisait une année que j'avais pratiqué la boxe.
12:56 Et je vois ça à la télévision
12:58 et je me dis, bon, j'aimerais bien être là dans 4 ans.
13:00 Et j'ai fait des tests pour entrer
13:02 en équipe de France.
13:04 On acceptait pas les mineurs à ce moment-là,
13:06 à l'INSEP. On fait l'exception pour moi,
13:08 donc on intègre d'autres mineurs.
13:10 Et puis j'ai l'objectif dans ma tête,
13:12 dans 4 ans, de faire les Jeux olympiques.
13:14 Et je crois que ce qu'a besoin un champion,
13:16 c'est de se fixer des objectifs et d'y croire.
13:18 Parce que je commençais à peine la boxe.
13:20 Sur le papier, c'est pas faisable.
13:22 Mais voilà, j'ai mis toute ma détermination.
13:24 Mais par contre, pendant 4 ans, j'ai mangé boxe,
13:26 j'ai dormi boxe, j'ai fait l'amour boxe.
13:28 Voilà, ça a été mon obsession au quotidien.
13:30 Comme j'étais mineur tous les 3 mois,
13:32 je recevais un compte rendu
13:34 au sein de ma famille,
13:36 à l'école et à mon club de boxe.
13:38 Et je me rappelle d'une phrase que j'ai lue
13:40 qui m'avait un peu vexé.
13:42 C'était "Brahim, ne brûle pas les étapes,
13:44 t'es prévu pour 2004".
13:46 Et au fond de moi, je me dis,
13:48 c'est là où ma phrase revenait en permanence.
13:50 Vous avez le droit de le penser,
13:52 mais moi j'ai le droit de penser autre chose.
13:54 Et le fait de me challenger tout seul
13:56 m'excitait suffisamment pour aller chercher
13:58 des ressources au fond de moi-même.
14:00 Parce que je te cache pas que c'est dur.
14:02 Le sport de haut niveau, alors la boxe à sa spécificité,
14:04 mais le sport de haut niveau est dur.
14:06 Je me nourrissais au quotidien
14:08 et je savais qu'il fallait pas que je le dise à mes camarades.
14:10 Parce qu'il fallait pas que ça se dilue.
14:12 Il fallait pas que j'enlève de cette force.
14:14 Il fallait qu'au fond de moi, j'ai un truc.
14:16 Pas une revanche, parce que c'est pas ça,
14:18 mais j'avais envie de démontrer à tout le monde
14:20 qu'ils avaient tort de penser telle ou telle chose.
14:22 Déjà, ça commence à l'entraînement.
14:24 Est-ce qu'ils cherchent à gruger ?
14:26 Est-ce qu'ils cherchent à donner plus ?
14:28 Est-ce qu'ils cherchent à faire toujours plus ?
14:30 On voit déjà les traits de caractère.
14:32 C'est quelque chose qui leur appartient, qui est inné.
14:34 La personnalité, elle évolue avec le temps.
14:36 C'est quelque chose qui évolue.
14:38 Les traits de caractère, on voit quelqu'un
14:40 qui peut être agressif sur des moments de combat,
14:42 qui veut toujours faire plus,
14:44 qui veut s'affirmer.
14:46 Donc ça, c'est vraiment dans ce que tu es,
14:48 dans ta construction,
14:50 dans ton cerveau, tout simplement.
14:52 Et après, à partir de là,
14:54 on identifie que c'est quelqu'un qui a certainement
14:56 le bon profil et tous les atouts
14:58 pour aller chercher un titre olympique.
15:00 Qu'est-ce qui est différent des autres ?
15:04 La différence est que, d'abord,
15:06 ils ont, génétiquement,
15:10 un cerveau parfait,
15:12 ce qui fait possible
15:14 qu'ils puissent s'adapter,
15:16 en raison de leur entraînement, à un tel niveau.
15:18 Il y a beaucoup de facteurs
15:20 qui doivent être combinés
15:22 pour atteindre un tel niveau.
15:24 Je pense que ce n'est pas seulement
15:26 que vous avez besoin de génes parfaits,
15:28 vous avez besoin d'un environnement parfait,
15:30 un environnement social, un environnement émotionnel,
15:32 vous avez besoin d'un personnage parfait,
15:34 une caractéristique, un mental parfait.
15:36 Tous ces facteurs doivent être
15:38 combinés parfaitement
15:40 pour atteindre ce niveau haut,
15:42 comme Michael Jordan
15:44 ou Karabatić.
15:46 Ce qui a fait la différence,
15:51 ça a été toujours le mental.
15:53 Et le mental qui pousse
15:55 à rien lâcher,
15:57 à te donner à 100%
15:59 sur tout ce que tu fais,
16:01 à ne jamais être satisfait,
16:03 à avoir ce mental de compétiteur.
16:05 On est des compétiteurs.
16:07 Et donc, dans ce qu'on fait,
16:09 une fois qu'on met un pied sur le terrain,
16:11 bien sûr, on est un sport pro,
16:13 donc on a ses équipiers autour de soi,
16:15 et c'est encore différent d'un sport individuel,
16:17 mais ce mental de compétiteur
16:19 qui te pousse sur un terrain,
16:21 tu es mon adversaire, je vais te montrer
16:23 que je suis meilleur que toi.
16:25 Si tu avais quelqu'un de meilleur que moi,
16:27 je ne serais jamais satisfait.
16:29 C'est quelque chose de dur,
16:31 de pas facile à gérer.
16:33 Moi, quand j'étais jeune
16:35 et que je commençais mal un match,
16:37 j'avais énormément de mal à revenir
16:39 et très souvent, ça donnait des mauvais matchs.
16:41 Et puis, au fur et à mesure
16:43 qu'on prend de l'expérience,
16:45 qu'on commence à maîtriser
16:47 tous les contours de ce poste si particulier
16:49 de gardien de but,
16:51 on apprend, on sait que,
16:53 si on a mal commencé un match,
16:55 parfois on va bien commencer,
16:57 parfois ça va bien se passer mi-temps,
16:59 on va avoir un creux
17:01 en milieu de match, et puis on va réussir
17:03 à revenir.
17:05 Et j'ai appris à mettre
17:07 derrière moi les périodes
17:09 difficiles,
17:11 et pour derrière, me reconstruire petit à petit
17:13 dans les matchs, pour arriver
17:15 à revenir dans le match et
17:17 être décisif. Je me rappelle que quand j'étais jeune
17:19 et que j'arrivais vers le très haut niveau
17:21 et qu'on jouait contre des très grands
17:23 gardiens de l'histoire de notre sport,
17:25 et qu'on était dans les vestiaires,
17:27 j'écoutais un peu les joueurs qui parlaient entre eux
17:29 et qui disaient "Aujourd'hui, on va jouer
17:31 contre tel gardien, ça va être dur".
17:33 Et moi,
17:35 j'ai travaillé tout au long de ma carrière
17:37 et j'avais envie d'enchaîner les bonnes performances,
17:39 d'être régulier tout le temps, et c'est pour ça aussi
17:41 que j'avais envie d'être bon à chaque match,
17:43 peu importe l'adversaire. C'était pour un peu
17:45 construire
17:47 ce côté
17:49 "Aujourd'hui, on va jouer
17:51 contre Thierry Omeyer et ça va être dur".
17:53 Je suis parti en Allemagne
17:55 pour progresser, pour rencontrer
17:57 l'adversité et parce que Kiel,
17:59 à cette époque-là, c'était le meilleur
18:01 club au monde, et pour travailler avec
18:03 Nuka Serdaroussic, qui a été mon entraîneur
18:05 et mon mentor, et qui m'a fait
18:07 passer à un autre cap,
18:09 et pour jouer dans le meilleur champion
18:11 du monde. C'était une étape nécessaire
18:13 pour moi, pour ma quête,
18:15 pour devenir le meilleur joueur au monde.
18:17 Plein de fois, je vois des joueurs
18:19 en face de moi, quand on prépare
18:21 la vidéo, quand on regarde les matchs,
18:23 et je me dis "mais eux, ils sont meilleurs que moi".
18:25 Et ça me pousse
18:27 à être encore
18:29 plus prêt, à être encore plus concentré
18:31 quand je rentre sur le
18:33 terrain, à montrer
18:35 que je suis meilleur que ces joueurs-là, qui m'impressionnent.
18:37 Je m'étais fixé un cap de 4 ans.
18:39 C'était "ouh,
18:41 je fais les Jeux Olympiques et je deviens un bon boxeur,
18:43 si c'est pas le cas, mon pote, tu reviens en ce moment
18:45 avec ta famille". Et comme ma famille est
18:47 commerçante et dans la boucherie, même si c'était pas le métier que je voulais faire,
18:49 et bien, il fallait que je me plie
18:51 à ces exigences. Donc voilà, j'avais la réalité
18:53 aussi de ce qu'était que la vie.
18:55 Et pourtant, j'avais que 16 ans. Je voulais me donner
18:57 les moyens aussi de réussir par moi-même,
18:59 je voulais pas qu'on décide de ma vie.
19:01 C'est toutes ces choses-là. Donc oui, je me suis mis
19:03 des garde-fous, pour pas me perdre,
19:05 pour pas avoir de regrets.
19:07 J'avais peur d'avoir des regrets aussi.
19:09 Pour eux,
19:11 c'est une évidence
19:13 qu'il y a un plan.
19:15 Regarde, nous, les premiers,
19:17 de temps en temps, quand on veut
19:19 faire les choses correctement,
19:21 à notre échelle, on fait une liste.
19:23 Mais eux,
19:25 ce qu'ils vont vouloir aller
19:27 chercher, c'est une médaille
19:29 olympique, une coupe du monde,
19:31 etc. Donc,
19:33 c'est pas un détail. Ils ont besoin
19:35 de se prouver qu'ils avancent.
19:37 Ils ont besoin d'avoir un plan qui leur montre
19:39 le chemin, qui va leur permettre
19:41 d'atteindre les objectifs fixés.
19:43 Ils ont besoin de voir qu'ils s'en rapprochent.
19:45 Parfois, ils divisent
19:47 en tellement de
19:49 choses que
19:51 un objectif qui paraît quand même
19:53 loin devient tout à fait
19:55 atteignable.
19:57 Ils savent jouer avec tout ça,
19:59 pour avoir l'énergie nécessaire.
20:01 Parce que faut quand même
20:03 toujours aller la trouver.
20:05 [Musique]
20:11 Il y a quelque chose
20:13 qu'on retrouve chez la tête d'un haut niveau,
20:15 c'est juste de vouloir gagner,
20:17 d'être le meilleur. On peut penser
20:19 à un brin d'égoïsme,
20:21 à un brin de ce qu'on
20:23 peut mal interpréter, mais
20:25 c'est juste des gens qui ont
20:27 envie de gagner des titres,
20:29 d'être les meilleurs du monde,
20:31 dans leur spécialité.
20:33 C'est tout à leur honneur, sauf qu'aujourd'hui,
20:35 ça demande aussi
20:37 de comprendre pourquoi
20:39 ils ont des traits de caractère, pourquoi ils peuvent être
20:41 égoïstes. Mais c'est pas parce que tu es égoïste
20:43 dans le sport que tu es égoïste dans la vie. Tu es égoïste
20:45 parce que tu dois penser qu'à toi, tu dois penser
20:47 à t'améliorer, tu es
20:49 concentré sur toi-même. C'est pour ça qu'on dit souvent
20:51 qu'ils ont des égos un peu surdimensionnés.
20:53 C'est un égoïsme qui est sain,
20:55 totalement sain, parce qu'à un moment, si tu penses pas
20:57 à toi, personne le fera pour toi. Quelqu'un qui n'a pas
20:59 d'égo,
21:01 qui...
21:03 Je ne pense pas que ça puisse réussir. J'ai bien dit
21:05 que je ne pense pas. Je ne détiens qu'une vérité.
21:07 Je n'ai bien dit que je ne pense pas.
21:09 On a tous un égo. Moi le premier.
21:11 Donc oui, on a envie de réussir.
21:13 C'est pas tabou. Bien au contraire. Après,
21:15 effectivement, comme tu dis, en France,
21:17 on a un problème avec ça. Oui,
21:19 on a certainement un problème. On est franchouillard.
21:21 Donc on pense forcément
21:23 que quelqu'un est arrogant, que quelqu'un...
21:25 C'est vrai que si c'est Zlatan, ça nous fait plutôt rire.
21:27 Mais par contre, si c'est Kylian, ça nous dérange.
21:29 Ben non. Pourquoi ?
21:31 Kylian, il est champion du monde.
21:33 Zlatan, non.
21:35 Voilà.
21:39 Ce dépassement
21:53 de soi, c'est un genre de mot...
21:55 Au final, c'est que tu ne te dépasses pas.
21:57 C'est que tu utilises
21:59 plus de capacités que d'habitude.
22:01 Je suis toujours dans un seuil de maîtrise.
22:03 Et quand je surfe,
22:05 je suis à 70%
22:07 de mes capacités.
22:09 Donc j'ai toujours une marge.
22:11 Et en fait,
22:13 quand tu vas te dépasser, je reste
22:15 dans cette marge. Sauf que là, c'est pas 70%,
22:17 mais je vais aller à 80%.
22:19 Donc la fois d'après, je vais pouvoir
22:21 progresser comme ça. Mais en fait,
22:23 tout ce que je vais faire,
22:25 je suis toujours un peu
22:27 en deçà de ma limite.
22:29 C'est à propos de connaître toi,
22:31 connaître toi-même, connaître tes pensées
22:33 et utiliser ça dans un environnement
22:35 de haute performance.
22:37 Et je pense que c'est ce que le meilleur
22:39 de la meilleure fait
22:41 beaucoup mieux que un athlète
22:43 normalement succèsful.
22:45 Donc il est mieux d'utiliser
22:47 ce que tu as.
22:49 Et c'est ce que je pense
22:51 que c'est le meilleur de la meilleure.
22:53 Et c'est ce que je pense que c'est le meilleur
22:55 de la meilleure.
22:57 Et c'est ce que je pense que c'est le meilleur
22:59 de la meilleure.
23:01 Vu que ça allait assez vite,
23:03 les objectifs ont augmenté,
23:05 ont pris de l'ampleur.
23:07 Et ça a été de jouer en équipe de France,
23:09 d'essayer de suivre
23:11 les traces de mon père et de mon frère.
23:13 J'avais Nico à mes côtés
23:15 qui me conseillait, j'avais mon père.
23:17 J'avais des conseils que je ne pouvais pas faire mieux.
23:19 Et je pense que moi, ça m'a servi.
23:21 Ça n'a pas été un poids, au contraire.
23:23 Ça aurait pu l'être parce que forcément,
23:25 des fois, quand tu arrives sur le terrain,
23:27 tu as attendu.
23:29 Moi, je viens de reprendre,
23:31 je n'ai pas le même niveau que Nico.
23:33 Et forcément, les gens vont comparer,
23:35 les gens vont parler.
23:37 Mais moi, ça a été une force plus qu'autre chose.
23:39 Et ça m'a permis d'avancer plus vite.
23:41 Certains sont doublement épanouis
23:43 dans leur pratique
23:45 parce qu'on a vraiment le sentiment
23:47 qu'il y a une symbiose parfaite
23:49 entre ce qu'ils sont
23:51 et la discipline qu'ils ont choisie.
23:53 Alors que d'autres, c'est plus complexe.
23:55 Tout ne leur ressemble pas.
23:57 Ils ont le talent de cette discipline-là.
23:59 Mais ce n'est pas forcément
24:01 là où ils se reconnaissent le plus.
24:03 Donc là, c'est plus compliqué parfois.
24:05 Tous les combats,
24:07 peu importe le niveau de mes combats,
24:09 à chaque fois avant de monter sur un ring,
24:11 je me dis "Mais qu'est-ce que tu fous là ?
24:13 T'es con ou quoi ?
24:15 Tu n'as trouvé que ça à faire d'aller prendre des coups ?"
24:17 Vraiment, je m'insultais de tous les noms.
24:19 Mais au moment où j'ai touché le plus bas de mon égo,
24:21 d'un coup, mon nom est...
24:23 Comme si tu avais pris
24:25 un shoot de Nédralin
24:27 et je rentre sur le ring où je me prends un peu pour muscleur
24:29 à ce moment-là. Parce que déjà, je ne peux plus faire marche arrière.
24:31 Et sans doute que le fait
24:35 de me titiller au fond,
24:37 de me rabaisser
24:39 dans ma réflexion,
24:41 de me dire ces choses-là au fond de moi-même
24:43 me vexe tellement.
24:45 Au moment où je monte sur le ring, ça y est,
24:47 j'ai enlevé toutes les carapaces et je suis prêt à batailler
24:49 avec n'importe qui.
24:51 Pour moi, c'est important que cette pression
24:53 je qualifierais ça de
24:55 "pression positive".
24:57 C'est ça qui va faire que tu vas faire
24:59 des meilleurs matchs.
25:01 Il y a des choses que je faisais en match que je ne faisais jamais
25:03 à l'entraînement.
25:05 Parce que tu n'es pas dans un état "second"
25:07 à l'entraînement
25:09 qui va faire que tu vas
25:11 aller faire des parades
25:13 que tu ne t'imaginais même pas.
25:15 Donc après,
25:17 il y a cette adrénaline de la compétition
25:19 qui fait que tu te transformes
25:21 et que tu arrives à faire
25:23 des performances hors normes.
25:25 C'est dingue de se dire que
25:37 même quelqu'un qui va faire du sport collectif
25:39 qui sera avec une équipe,
25:41 avec des personnes complètement
25:43 des environnements extérieurs qui peuvent
25:45 changer, qui ne sont pas maîtrisables
25:47 et que toi tu arrives à être
25:49 dans ce mouvement
25:51 hyper fluide,
25:53 hyper connecté.
25:55 Franchement, à vivre,
25:57 c'est exaltant.
25:59 Ça donne du sens
26:01 à tout ce que tu as fait jusqu'à présent.
26:03 Et tu sens
26:05 qu'il y a tout qui s'aligne. C'est vraiment ça.
26:07 Ce qui est sûr, c'est que
26:09 là où j'ai pris le plus de plaisir,
26:11 c'est sur les matchs avec un maximum
26:13 de pression, un maximum d'enjeux.
26:15 Des quart de finale de Jeux Olympiques,
26:17 des demi-finales de championnat du monde,
26:19 des finales de Jeux Olympiques.
26:21 Je me rappelle de ma première finale
26:23 des JO en 2008
26:25 où à l'échauffement,
26:27 je n'ai pas dit un mot.
26:29 Il y avait une pression énorme
26:31 parce que c'est le match
26:33 que tout handballeur
26:35 rêve de disputer, les finales des Jeux Olympiques.
26:37 Mais c'est de ça
26:41 que j'avais besoin pour réussir à faire
26:43 des performances,
26:45 mes meilleures performances.
26:47 C'est là où tu vas chercher au plus profond de toi
26:49 pour derrière
26:51 gagner les matchs.
26:53 Ce jour-là,
26:55 si on me voit à l'échauffement, on se dit
26:57 "il ne va pas faire un bon match". Et pourtant, derrière, je fais un match
26:59 à 19 arrêts, 50% d'arrêt.
27:01 C'est dans ces matchs-là
27:05 que j'arrivais à donner le meilleur de moi-même.
27:07 C'est très intéressant
27:09 sur le système de cerveau optimal,
27:11 sur l'être dans la zone, dans le flux.
27:13 C'est que ça se produit automatiquement.
27:15 Et peut-être qu'il a vécu dans ce match
27:17 ceci,
27:19 qu'il était au niveau parfait,
27:21 qu'il n'était pas trop excité,
27:23 qu'il n'était pas sous-stimulé,
27:25 mais que c'était la bonne balance pour lui.
27:27 Et puis son cerveau a aussi appris
27:29 que ce mode,
27:31 ce mental
27:33 pour lui,
27:35 fonctionne vraiment bien. Il était vraiment
27:37 relaxé en même temps. Il n'était pas trop excité.
27:39 Comme tu l'as dit, il était un peu relaxé
27:41 et un peu sur l'adrénaline, ce qui est fou.
27:43 Mais il s'est rendu compte que si je combine
27:45 tout ce que j'ai appris dans ma carrière,
27:47 c'est le résultat que je peux donner,
27:49 qui est la meilleure performance de ma vie.
27:51 Ça arrive !
28:01 Nicolas réussit !
28:03 Et pour la première fois, l'équipe de France
28:05 sort pour le break !
28:09 C'est un des
28:11 grands moments
28:13 de mon histoire,
28:17 de l'histoire de l'équipe de France.
28:19 C'était un match incroyable.
28:21 C'était une époque où on a été
28:23 vraiment les deux équipes qui ont dominé
28:25 le monde mondial.
28:27 Et aussi pendant ce mondial-là,
28:29 les journalistes avaient un peu monté
28:31 en rivalité. Ivan Obalić et moi,
28:33 j'avais été élu mélangeur
28:35 au monde il y a deux ans avant ça.
28:37 Lui, ça avait été je crois trois ans avant.
28:39 Ce match-là, en plus, face à
28:43 la Croatie, à Zagreb,
28:45 dans la Nouvelle Arena, avec 15 000 croates
28:47 qui étaient contre nous, qui nous sifflaient
28:49 et qui me sifflaient en particulier.
28:51 Ça avait été un match
28:53 hyper chaud. J'avais mes parents dans les tribunes,
28:55 mon père aussi, qui est croate.
28:57 Durant toute la compétition,
28:59 j'avais compris un peu
29:01 toute la pression qu'il y avait autour de moi.
29:03 Tout le pays
29:05 attendait ce match-là, France-Croatie,
29:07 en finale. Et j'avais
29:09 compris que j'allais avoir un accueil particulier.
29:11 Mon père me l'avait aussi dit. Fais attention,
29:13 ils vont essayer de te provoquer, les joueurs
29:15 adverses, le public. Ils vont tout
29:17 faire pour que tu t'énerves, pour que tu pètes
29:19 un plomb et que tu prennes des deux minutes,
29:21 voire carton rouge. Donc
29:23 fais attention, sois concentré,
29:25 reste concentré sur ton match
29:27 et ça viendra.
29:29 Mais surtout, ne réponds pas aux provocations.
29:31 J'ai pris plein de coups
29:33 pendant le match, des provocations,
29:35 et je ne disais rien. Je me relevais
29:37 avec un petit sourire
29:39 pour énerver l'adversaire.
29:41 Donc ça a été...
29:43 Je suivais les conseils de mes parents, de mon père
29:45 et de l'autoconditionnement
29:47 avant ce match-là.
29:49 Et battre les Croates
29:51 chez eux, devant leur public, c'est vraiment un exploit
29:53 incroyable, en plus en finale de championnat du monde.
29:55 Pour mes premiers...
29:57 Pour ma première victoire
29:59 en championnat du monde, oui, c'est
30:01 un gros souvenir. La boxe, pour une finale olympique,
30:03 c'est la fin des Jeux olympiques.
30:05 Donc le village a changé complètement
30:07 d'ambiance
30:09 et
30:11 en bas de ma petite maisonnette,
30:13 c'est là où tous les sportifs français s'étaient
30:15 donnés rendez-vous. Donc toute la nuit,
30:17 je les ai entendus faire la fête.
30:19 Et toute la nuit que Dieu fasse,
30:21 je me dis juste je descends 5 minutes
30:23 juste pour rigoler et je remonte dans ma chambre.
30:25 Et je me disais, il y avait toujours une phrase qui revenait,
30:27 je me disais "oui mais si tu fais ça, c'est peut-être à cause de ça
30:29 que tu vas perdre, tu ne seras pas champion".
30:31 J'ai été en bataille avec moi-même toute cette nuit-là.
30:33 Et franchement, ça a été la nuit
30:35 la plus folle, je la garde
30:37 en mémoire parce qu'elle a été
30:39 faite de pleins de rebondissements
30:41 dans mes pensées.
30:43 J'ai fait le combat 100 fois,
30:45 je l'ai gagné 100 fois,
30:47 je l'ai perdu 100 fois, j'ai tout fait.
30:49 En fait, à ce moment-là,
30:51 j'ai compris que c'était bien de visualiser les choses.
30:53 J'avais besoin de
30:55 sans doute des choses qui m'ont rassuré,
30:57 savoir le pire
30:59 des situations, voilà ce qu'il faudra faire.
31:01 J'avais préparé mon "cerveau"
31:03 à
31:05 que le plan ne se déroule pas
31:07 comme je l'avais prévu.
31:09 Je sois prêt à rebondir, mais dans l'instant T,
31:11 parce que la boxe, on est proche l'un de l'autre
31:13 à 50 cm et on se donne des coups de poing.
31:15 Donc chaque erreur est sanctionnée.
31:17 Ça se joue sur des regards, ça se joue sur un coup,
31:19 ça se joue sur pleins de petits détails
31:21 que les gens ne peuvent pas apercevoir.
31:23 Mais moi je sais que dans ce tournoi olympique,
31:25 j'ai fait perdre des...
31:27 J'ai fait en sorte que mes adversaires perdent,
31:29 je les ai vus dans leurs yeux qu'ils perdaient,
31:31 qu'ils allaient perdre en plus.
31:33 Tu vois, quand je boxe mes gros Romero,
31:35 le champion olympique,
31:37 je sais qu'à la fin de la première reprise,
31:39 il a compris que dans mes yeux, j'allais le faire marron.
31:41 C'est aussi un type spécifique d'intelligence.
31:45 Donc on a l'intelligence émotionnelle,
31:47 l'intelligence sociale, l'intelligence cognitive.
31:49 Quelqu'un peut être un parfait musicien,
31:53 il peut être un parfait athlète,
31:55 et ils ont aussi leur type spécifique d'intelligence.
31:59 On aime l'idée qu'ils aient été frappés par la grâce,
32:01 que ce soit des génies.
32:03 Ça nous régale.
32:05 Mais du coup, cette représentation
32:07 que l'on a de l'athlète de haut niveau,
32:09 ça fausse un peu les choses.
32:11 Parce que si vous êtes frappé par la grâce,
32:13 si c'est du génie, pourquoi parler de don de soi,
32:15 pourquoi parler d'effort quelque part ?
32:17 C'est juste une histoire qui se déroule
32:19 comme elle devait se dérouler.
32:21 En premier lieu, pour moi,
32:23 quel que soit l'aspect de la performance dont on parle,
32:27 en premier lieu, c'est que ces gens,
32:31 ils ne se contentent pas du cadeau talent.
32:35 Ils vont chercher ce qui se cache derrière.
32:39 Et leur grande force,
32:41 c'est leur capacité à exploiter ce talent,
32:45 à le faire fructifier,
32:47 à le détourner, à l'utiliser plutôt à leur avantage,
32:51 en permanence.
32:53 C'est ça le sport de haut niveau, pour moi,
32:55 c'est se comprendre le plus possible.
32:57 Pour pouvoir se comprendre,
32:59 la compétition aide,
33:01 ou des challenges personnels,
33:03 plein de choses.
33:05 Plus on se challenge, plus on comprend.
33:07 Mais dans des situations où il faut trouver des solutions,
33:09 où tu te mets dans une situation
33:11 où tu es un peu stressé,
33:13 là tu vas chercher en toi plein de solutions.
33:15 Mais à partir du moment où tu as une base,
33:17 elle est toujours mouvante, cette base.
33:19 Et là, ça y est,
33:21 tu peux aller dans la précision
33:23 et ça continue d'être épanouissant.
33:25 Ce Graal, tu le tiens.
33:27 Il est là.
33:29 Tu le connais.
33:31 Il est là.
33:33 Tu le connais.
33:35 Il est là.
33:37 Tu le connais.
33:39 Il est là.
33:41 Tu le connais.
33:43 Il est là.
33:45 Tu le connais.
33:47 Il est là.
33:49 Tu le connais.
33:51 Il est là.
33:53 Il est là.
33:55 Tu changes de statut.
33:57 Les gens
33:59 ont d'autres types d'attentes
34:01 vis-à-vis de toi.
34:03 Et bien évidemment,
34:05 tu en fais partie.
34:07 Tes attentes aussi changent.
34:09 Et tes peurs changent.
34:11 La peur de ne pas pouvoir confirmer,
34:15 la peur de décevoir,
34:17 etc. Donc ce changement de statut
34:19 chez certains
34:21 peut conduire
34:23 à être plus focalisé sur
34:25 jouer pour ne pas perdre
34:27 plutôt que
34:29 jouer pour gagner.
34:31 Atlanta, effectivement, je tape mon tableau.
34:33 Je me retrouve en finale.
34:35 Sauf qu'aujourd'hui,
34:37 j'ai gagné ma demi-finale
34:39 pour accéder à la finale.
34:41 Ce qui a été toxique, quelque part,
34:43 c'est les gens qui étaient autour de moi,
34:45 qui étaient heureux, qui chialaient.
34:47 Parce qu'on a attendu plus d'un siècle une médaille olympique.
34:49 Elle arrive, mais bon, il ne fallait pas s'arrêter
34:51 à la médaille, à la finale.
34:53 Et justement, c'est de se dire
34:55 qu'on doit se préserver.
34:57 Donc moi, j'ai fait l'erreur. Je me suis tapé les médias.
34:59 Je me suis tapé
35:01 les gens qui voulaient parler, les politiques,
35:03 etc. Et puis, en fait, je me suis retrouvé
35:05 au lit à minuit, quoi.
35:07 Minuit et demi.
35:09 Sans être massé, sans avoir fait de récupération.
35:11 Alors que mon adversaire, lui,
35:13 il a fini son match à 18h.
35:15 Il était à l'hôtel. Il était en train de récupérer.
35:17 Il avait pas le temps pour le combat.
35:19 T'arrives en finale.
35:21 T'as la dernière marche. T'as une heure de match.
35:23 Pour atteindre le Graal.
35:25 Et encore là, c'est les Jeux olympiques.
35:27 C'est plus fort que tout. Et tu perds.
35:29 Et c'est horrible parce que c'est
35:31 tellement de sacrifices. T'arrives au bout.
35:33 Tu peux quasiment toucher la médaille d'or
35:35 du doigt. Et tu perds.
35:37 Et c'est des matchs...
35:39 Moi, je vais me souvenir des actions
35:41 négatives que j'ai faites sur ce match-là
35:43 qui auraient pu nous faire gagner, peut-être.
35:45 Je vais gagner toute ma vie en me touchant.
35:47 Et c'est terrible d'arriver si proche
35:49 du but et de rater.
35:51 Et donc, cette amertume, cette déception,
35:53 on s'en sert pour derrière rebondir.
35:55 Pour moi, gagner, déjà, même une seule fois,
35:57 c'est quelque chose de très difficile.
35:59 Mais quelque chose d'encore plus difficile
36:01 pour moi, c'est gagner
36:03 sur la durée. Et c'est de ça
36:05 dont je suis le plus fier dans ma carrière
36:07 quand je me retourne.
36:09 C'est d'avoir su me remettre
36:11 en question en permanence.
36:13 Je pense que c'était quelque chose
36:15 que j'avais en moi.
36:17 J'avais envie de marquer
36:19 l'histoire de mon poste,
36:21 de mon sport, mais aussi
36:23 de faire partie des plus grands.
36:25 Et pour ça,
36:27 je pense que déjà, on avait
36:29 une équipe assez exceptionnelle
36:31 avec l'équipe de France, mais aussi
36:33 dans les différents clubs dans lesquels j'ai joué.
36:35 C'est d'arriver
36:37 à maintenir
36:39 ce niveau de performance.
36:41 Et je me disais
36:43 parfois, c'est dommage,
36:45 je n'ai pas assez savouré le premier titre olympique.
36:47 Tu es sur un nuage, tu te dis,
36:49 j'ai eu la chance de tout gagner,
36:51 championnat du monde, championnat d'Europe,
36:53 ligue des champions. Le seul truc qui manquait,
36:55 c'était les JO.
36:57 Et là, tu te dis, cette année, ça va être
36:59 un peu plus tranquille. On va se dire,
37:01 je vais profiter.
37:03 Mais non, en fait,
37:05 une semaine après, tu te retrouves
37:07 à GTE Akil,
37:09 une super coupe d'Allemagne,
37:11 un titre mineur,
37:13 mais ça reste un titre. Tout de suite,
37:15 l'esprit compétiteur est à nouveau présent.
37:17 Et puis, ok, ce titre olympique,
37:19 il est acquis, mais derrière,
37:21 il y a une saison, il y a des objectifs en club.
37:23 Et moi, ce que j'avais envie,
37:25 c'était de rester en haut.
37:27 Des fois, on me dit,
37:37 est-ce que tu n'as pas un relâchement quand tu gagnes quelque chose ?
37:39 Moi, c'est un peu l'effet inverse,
37:41 au final, parce que derrière,
37:43 je me dis, j'ai envie de revenir,
37:45 j'ai envie de revivre ça. Et du coup,
37:47 tu remets un coup d'accélérateur,
37:49 tu repars au travail. Pour moi,
37:51 c'est un effet un peu boule de neige
37:53 et un cercle vertueux.
37:55 Mais d'un autre côté, tu es plus attendu
37:57 et tu sais que les autres vont
37:59 augmenter leur niveau, vont faire encore plus
38:01 pour te faire tomber, pour te battre.
38:03 Donc, pour moi, c'est encore plus dur
38:05 de rester en haut,
38:07 de confirmer et d'y revenir.
38:09 C'est pour ça que
38:11 ça m'impressionne.
38:13 Plus la longévité de certains champions,
38:15 ce qu'ils arrivent à faire sur la durée,
38:17 c'est ça qui est pour moi le plus impressionnant.
38:19 On n'a pas eu de champion olympique depuis 64 ans.
38:21 Pour eux, un champion olympique, c'est un champion du monde demain.
38:23 Et je l'ai cru moi-même.
38:25 Je pensais que dans l'avenir,
38:27 j'allais être champion du monde professionnel.
38:29 Bon, ce n'était pas le cas.
38:31 Il m'a fallu quelques années, il m'a fallu 7 ans
38:33 pour être champion du monde professionnel.
38:35 En fait, ce qu'il y a, c'est que
38:39 durant mes premières années, j'avais conscience
38:41 que c'était des combats d'apprentissage.
38:43 Je n'avais pas des craques encore en face de moi.
38:45 Et c'est vrai, quand j'ai fait mon premier cheval du monde,
38:47 j'ai la prétention de vouloir prendre le meilleur.
38:49 Je ne regrette pas, vraiment pas du tout
38:51 tout ce que j'ai choisi.
38:53 Et je me suis dit, ok, je vais boxer
38:55 Lorenzo Parra.
38:57 Quand je boxe au Parra, je me suis dit,
38:59 cette notion de défaite n'existait pas au fond de moi.
39:01 Quand je monte sur le ring, au premier coup de poing,
39:03 je sais que je vais être dans la merde.
39:05 Là, chaque coup de poing que j'avais pris au départ,
39:07 je me suis dit, putain, on est dans une autre dimension.
39:09 Je me parle clairement dans ma tête,
39:21 je me dis, bon, bref, ça va être extrêmement dur.
39:23 Mais je n'ai pas encore la notion de défaite dans ma tête.
39:25 Le problème, c'est que j'en reprends une ici,
39:27 j'en reprends une sur la tempe,
39:29 et je me suis dit, ok, je vais me faire un gros crochet.
39:31 Et c'était ma plus grosse angoisse,
39:33 c'était de faire la croix sur le ring.
39:35 Donc je tombe à la ronde verte, je fais une roulade,
39:37 je me lève et je sens que mon corps est en train de tanguer,
39:39 comme ça.
39:41 Je monte les mains, je laisse me frapper pendant 1 minute 30
39:43 dessus, sans trop m'exposer.
39:45 Et à ce moment-là, je sens qu'au niveau de sa puissance,
39:47 ça baisse un petit peu,
39:49 parce qu'il avait un rythme qui était assez soutenu.
39:51 Et je me dis, bref, c'est une question de timing,
39:53 il faudra le choper au bon moment.
39:55 J'attends le bon timing, je lui mets un gros crochet gauche,
39:57 et puis je m'incline,
39:59 et j'ai fait 5 mois de dépression derrière.
40:01 Tout dépend de ce que représente la défaite pour toi.
40:03 Il existe deux types d'état d'esprit.
40:05 Les gens qui ont un état d'esprit fixe,
40:07 et les gens qui ont un état d'esprit de développement.
40:09 Les gens qui ont un état d'esprit fixe
40:11 ont un relationnel à la défaite
40:13 extrêmement complexe,
40:15 parce que justement,
40:17 elle vient perturber leur identité.
40:19 Le talent,
40:21 quand tu as un état d'esprit fixe,
40:23 à partir du moment où tu as un talent,
40:25 quand tu as un état d'esprit fixe,
40:27 à partir du moment où on t'a validé le fait qu'on te l'a donné,
40:29 que tu le possèdes,
40:31 c'est toi.
40:33 Et quand tout d'un coup tu échoues,
40:35 c'est extrêmement déstabilisant,
40:37 parce que qu'est-ce que ça signifie exactement ?
40:39 On se serait trompé ?
40:41 Donc, tu es vraiment bouleversé de l'intérieur.
40:43 Tandis que ceux qui ont un état d'esprit de développement,
40:47 loin de moi l'idée de dire que la défaite les amuse,
40:49 pas du tout,
40:51 mais elle est constructive.
40:53 Peut-être que la défaite peut être un plus gros moteur
40:55 Peut-être que la défaite peut être un plus gros moteur
40:57 que l'envie de regagner,
40:59 parce que ça fait mal.
41:01 Quand ça fait mal et que ça touche un endroit,
41:03 je pense que ça peut des fois être un plus gros moteur.
41:05 je pense que ça peut des fois être un plus gros moteur.
41:07 Je pense qu'il faut,
41:09 pour alimenter son feu personnel,
41:11 il faut un peu jongler entre les deux.
41:13 il faut un peu jongler entre les deux.
41:15 De temps en temps,
41:17 te dire que tu vas vivre des émotions fortes
41:19 et des émotions de fou,
41:21 ça veut dire que tu n'as pas envie de laisser ça aux autres,
41:23 tu n'as pas envie de connaître cette douleur.
41:25 Carrières, de temps en temps, on s'appelait,
41:27 il m'a laissé tranquille, je pense qu'il a bien analysé la situation.
41:29 Et un jour, au téléphone,
41:31 il sent qu'à ma voix, ça va un peu mieux.
41:33 Il sent qu'il y a un peu plus de pep sans doute.
41:35 Je lui dis "c'est bon Louis, je suis prêt,
41:37 dis-moi ce qu'il faut que je fasse, avec qui ou comment ?"
41:39 Et il me dit "tu pars demain à Saint-Pétersbourg."
41:41 Donc déjà dans ma tête,
41:43 je me dis "putain, je vais reprendre l'entraînement,
41:45 le mec il m'envoie en Russie."
41:47 Et à ce moment-là, je me dis "bon Brim,
41:49 mais vraiment, ferme ta gueule,
41:51 ferme ta gueule, ferme ta gueule."
41:53 Et deux jours après, je me retrouve,
41:55 certes en Floride, car Saint-Pétersbourg
41:57 c'est à côté de Tampa en Floride.
41:59 Et là je me retrouve seul, aux Etats-Unis,
42:03 à ne pas bien parler la langue,
42:05 avec des gens que je ne connais pas,
42:07 et à repartir à zéro.
42:09 Et là je te jure, tous les jours que du FH
42:11 je me suis insulté, tous les jours, tous les jours,
42:13 tous les jours, je suis resté un mois tout seul
42:15 dans son petit motel. Le pire c'est que l'entraîneur
42:17 ne montait même pas dans mon motel, dans mon appart,
42:19 il klaxonnait dans le parking.
42:21 J'étais comme un chien qui remuait la queue,
42:23 comme ça, qui était content de sortir.
42:25 Dans quel état d'esprit j'étais ?
42:27 Et tous les jours je me dis "putain Brim, où est-ce que t'as merdé ?
42:29 Où est-ce que t'as merdé ? Où est-ce que t'as merdé ?
42:31 T'as bien dû merder quelque part." En fait j'ai accepté à ce moment-là,
42:33 c'est un petit déclic, d'aller dans des sphères
42:35 que je n'imaginais même pas, de dureté.
42:37 Moi je pensais que j'étais max.
42:39 Donc là j'ai compris qu'il fallait que j'aille
42:41 dans des sphères que je ne pouvais pas imaginer.
42:43 Et en fait, à partir du moment où je l'ai accepté,
42:45 et bien là j'ai commencé encore à passer des caps.
42:47 Et j'ai accepté après d'aller
42:49 au Panama tout seul, en Argentine tout seul,
42:51 avec mon petit baluchon,
42:53 et à lever la main genre "vous avez besoin d'un partenaire d'entraînement,
42:55 je suis champion olympique,
42:57 mais personne ne savait qui j'étais,
42:59 donc je venais, je levais le doigt,
43:01 vous avez besoin de quelqu'un, et je me frottais à tout le monde,
43:03 et en fait il fallait que je reprenne la confiance.
43:05 Et à la fin, au moment où je dois partir,
43:07 j'ai l'entraîneur en chef
43:09 argentin
43:11 qui me dit "écoute, nous on n'a rien à t'apprendre en fait,
43:13 boxer tu sais,
43:15 mais par contre il faut que tu sois plus méchant sur le ring".
43:17 Et en fait c'est eux qui me l'ont vraiment fait comprendre,
43:19 c'est simple, c'est ou tes adversaires
43:21 t'arrachent la tête ou c'est toi qui leur arraches la tête.
43:23 On ne joue pas.
43:25 Et moi j'ai commencé la pratique de la boxe
43:27 pour du plaisir.
43:29 Tu vois, pour moi la boxe
43:31 c'est un sport, eux vont te dire
43:33 c'est un métier.
43:35 J'avais cette image dans ma tête de Nico, indestructible.
43:37 Le seul joueur qui n'a pas raté une campagne,
43:41 qui a toujours été là, à chaque titre, à chaque médaille.
43:43 Quand ça arrive à ce moment-là,
43:45 c'est dur
43:47 et t'es pas forcément sûr de revenir.
43:49 Il y a deux mois des champions du monde
43:57 et on m'avait dit "ce type de blessure déjà dans le Langres,
43:59 il n'y en a pas beaucoup, c'est une des seules
44:01 que je crois qui a été
44:03 des seules que je connaisse.
44:05 C'est entre 4 et 6 mois
44:07 mais on ne sait pas trop.
44:09 Ça peut même être beaucoup plus, ça peut te mettre
44:11 en péril la fin de ta carrière.
44:13 Et le médecin m'avait dit
44:15 "le jour de l'opération tu peux ressortir tout de suite
44:17 et marcher avec des chaussures spéciales
44:19 mais tu peux marcher sur tes fractures".
44:21 Donc j'avais 5-6 fractures, on m'avait réduit un os
44:23 et donc je lui avais demandé
44:25 "quelle est la limite ?
44:27 Je peux marcher tout de suite, je peux courir ?"
44:29 Il m'avait dit "la limite c'est la douleur".
44:31 C'est très vague, la limite c'est la douleur
44:33 parce qu'en tant que sportif de haut niveau
44:35 et moi dans ma carrière,
44:37 j'ai joué énormément de fois blessé,
44:39 on va aux limites de la douleur,
44:41 on apprend aussi
44:43 à connaître son corps,
44:45 comment il réagit,
44:47 quand on se fait une entorse,
44:49 on a ce type de douleur-là,
44:51 tu peux jouer et se frapper
44:53 parce qu'en serrant les dents ça passe,
44:55 tu échauffes l'adrénaline.
44:57 Quand la douleur est un peu plus forte,
44:59 c'est quelque chose d'un peu plus grave
45:01 et donc tu vas devoir t'arrêter.
45:03 C'est pareil avec toutes les articulations,
45:05 je connais maintenant toutes les sensations de mon corps,
45:07 je sais quand c'est une douleur que je peux surmonter,
45:09 avec laquelle je peux jouer,
45:11 et quand c'est une douleur plus grave
45:13 et où là il faut que je fasse attention
45:15 et qu'il y a besoin de temps de repos,
45:17 de temps de récupération.
45:19 On apprend tout ça quand on est sportif de haut niveau
45:21 et athlète, et surtout dans des sports
45:23 comme le nôtre, des sports de contact,
45:25 on a toujours quelque chose.
45:27 C'est important et si on veut durer
45:29 et marquer l'histoire de nos sports,
45:31 il faut aussi apprendre à jouer avec la douleur
45:33 et à aimer un peu la douleur.
45:35 C'est la résilience,
45:37 le concept de la résilience et de la stabilité mentale.
45:39 Il faut aussi développer
45:41 une sorte de grotte,
45:43 il faut développer une stabilité mentale
45:45 pour dire non,
45:47 mais je veux continuer,
45:49 je sais mes objectifs clairs.
45:51 Si vous pouvez gérer cette douleur
45:53 peut-être mieux que quelqu'un d'autre,
45:55 vous serez plus stable et vous pourrez faire mieux.
45:57 Si vous pouvez gérer quelque chose
45:59 et que vous avez des objectifs clairs,
46:01 vous pouvez exécuter parfaitement,
46:03 vous pourrez être plus fort dans cette situation.
46:05 Je pense que c'est ce qui fait la différence
46:07 entre le meilleur du meilleur
46:09 et des gens qui auront une bonne carrière,
46:11 mais il faut avoir
46:13 une vraie volonté
46:15 et une vraie grotte
46:17 pour devenir le meilleur.
46:19 Si je voulais respecter mon contrat
46:21 avec mon ancien diffuseur,
46:23 il fallait absolument que je fasse un championnat
46:25 avant la fin de l'année.
46:27 Le problème c'est qu'il n'y avait aucune opportunité
46:29 qui se présentait.
46:31 Au départ je lui ai dit non,
46:33 je lui ai dit que ce n'était pas possible.
46:35 Déjà à 50 kg, 820 g,
46:37 je suis rempli de muscles avec
46:39 à peine 6-7 % de masse grasse,
46:41 je ne vois pas ce que je peux faire
46:43 pour descendre dans la catégorie en dessous.
46:45 Je dois passer de 50 kg, 820 g à 48 kg.
46:47 Mes 48 cours je les ai faits
46:49 quand j'avais 20 ans pour les Jeux Olympiques.
46:51 On décide d'aller faire un stage
46:53 de nutrition et de mise en forme.
46:55 On fait des tests avec Louis,
46:57 on part sur une folie.
46:59 On se dit on a une semaine,
47:01 je te dis comment ça s'est passé.
47:03 Il me dit bien vrai, on a une semaine, on tente.
47:05 Elle est ok.
47:07 Il me dit pendant une semaine,
47:09 on essaie de perdre le poids le plus possible
47:11 en une semaine.
47:13 En fait, on allait dans l'hypothèse
47:15 la plus violente possible.
47:17 Il fallait que je choque mon corps
47:19 pour savoir s'il était capable de réagir.
47:21 C'est un peu fou sur le papier,
47:23 mais en fait il fallait que moi
47:25 psychologiquement je sois prêt.
47:27 ♪ ♪ ♪
47:31 ♪ ♪ ♪
47:35 ♪ ♪ ♪
47:39 ♪ ♪ ♪
47:43 ♪ ♪ ♪
47:47 ♪ ♪ ♪
47:51 (applaudissements)
47:53 On est tous des humains,
47:55 on a les mêmes structures dans le cerveau,
47:57 on a les mêmes...
47:59 On a tous deux jambes.
48:01 Bien sûr, ils sont des humains normaux.
48:03 Ils ont plus ou moins le même cerveau
48:05 que nous.
48:07 Mais en essence, vous savez,
48:09 on est tous des humains,
48:11 mais ça se déroule dans les détails.
48:13 Est-ce que tu peux, toi,
48:15 me donner la définition de ce qu'on appelle aujourd'hui un gôte ?
48:19 (rire)
48:21 Euh...
48:23 Pour moi, c'est quelqu'un
48:25 qui a gagné beaucoup de choses,
48:29 qui a su être décisif,
48:31 mais aussi qui a su le faire sur la durée.
48:33 Pour moi, ça reste quelque chose...
48:35 Ça montre un côté exceptionnel.
48:39 C'est des personnes à part
48:41 qui sont capables de...
48:43 de ne pas se reposer sur des acquis,
48:47 de ne pas être en train de se complaire
48:51 dans ce qui a déjà été fait,
48:53 mais qui regardent toujours devant,
48:55 qui... Voilà, qui cherchent toujours
48:57 et en permanence de nouveaux objectifs
48:59 et de nouveaux titres à gagner.
49:01 Je suis...
49:03 J'arrive même pas à le dire.
49:05 (rire)
49:07 Je suis fière, je pense. Je suis contente.
49:09 Je suis... Je me dis que c'est cool.
49:11 Est-ce que j'ai été le meilleur boxeur français ?
49:13 Je ne pense pas.
49:15 J'ai fait ce que personne n'a fait.
49:17 Ça, c'est factuel.
49:19 Mais là où j'ai le plus réussi,
49:21 c'est que j'ai toute ma tête.
49:23 Et les entraîneurs avec qui j'ai eu
49:25 toutes ces aventures sont mes amis.
49:27 Et ma réussite, elle est là.
49:29 Je me dis que j'ai fait des trucs super
49:31 et que je peux déjà être contente, c'est tout.
49:33 Mais...
49:35 Mais j'en veux plus.
49:37 Parce que j'en veux...
49:39 Pour moi, tout ce que j'ai fait aujourd'hui
49:41 peuvent me permettre d'aller encore plus loin.
49:43 Il y a tellement de talent autour de moi
49:45 et des personnes.
49:47 Une fois qu'on est sur le terrain,
49:49 bien sûr, j'essaie de montrer
49:51 que je suis le meilleur, et peut-être le meilleur
49:53 de tous les temps, mais en dehors, non, jamais
49:55 je ne dirais ça.
49:57 C'est le Gauth...
49:59 Le Gauth ++. C'est le Gauth
50:01 avec 5G devant. Franchement, il y a...
50:03 C'est... Il y a...
50:05 Enfin... Ouais, ouais, j'ai...
50:07 Maintenant, lui et moi, on est vraiment une relation
50:09 d'égal à égal. Mais ça ne m'empêche pas
50:11 d'avoir de l'admiration pour ce qu'il fait,
50:13 pour ce qu'il représente
50:15 en tant que français, mais aussi dans le sport.
50:17 Quand tu vois toutes les générations qui arrivent
50:19 aujourd'hui en équipe de France, qui sont hyper forts,
50:21 qui font des trucs de fous, et tu vois que...
50:23 Lui, il est aussi pour quelque chose dans ça,
50:25 parce que c'est quelqu'un qui a inspiré
50:27 plein des milliers de jeunes,
50:29 et qui a contribué
50:31 et qui va contribuer parce qu'il a créé des vocations
50:33 à ce que le monde français
50:35 continue de se porter au mieux.
50:37 Je pense que je fais partie des joueurs qui ont marqué l'histoire
50:39 de mon sport, mais...
50:41 J'essaie de garder ça comme une quête
50:43 personnelle.
50:45 (musique)
50:47 (musique)
50:49 (musique)
50:51 [Musique joyeuse]
51:06 [Legendes traduits en français par de la musique joyeuse]
51:08 [Musique]
51:34 [Musique]