• l’année dernière
La première commission de terminologie pour la féminisation des noms de métiers a été créée en France en 1984 et en 2019, l’académie s’est inclinée. Entre les deux, elle en a dit des bêtises… Référence : « L’Académie contre la langue française », sous la direction d’E. Viennot.

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Amusant
Transcription
00:00 La Elia Veyron est doctoresse en stylistique et langue française.
00:04 Et donc elle soigne la langue française.
00:06 Elle est prof à la fac aussi et surfeuse pendant les vacances.
00:10 Sachez-le.
00:11 Et on attend toujours avec joie votre chronique langue, ma chère La Elia.
00:16 Alors j'ai une devinette.
00:18 Quand un politique ne sert à rien et que les autres ont déjà pris le créneau immigration
00:22 islam, il propose de faire une loi sur quoi ?
00:23 Sur quoi ?
00:24 Qu'est-ce qu'il reste ?
00:25 Le drapeau et l'empereur.
00:26 Non, un petit indice.
00:28 Sur l'écriture inclusive enfin ! Ça a été encore le cas avec Roger Schudo du Rassemblement
00:33 National et Gilles Platrait des Républicains qui ont proposé d'interdire l'écriture
00:37 inclusive.
00:38 Et c'est reparti, et péril mortel, et au secours l'Académie.
00:41 Bon, l'écriture inclusive, ça pose la question des liens entre genre et langue.
00:46 C'est des liens qui sont complexes.
00:47 Mais aujourd'hui, je vais vous proposer quelque chose de pas trop complexe.
00:50 Grâce à qui ? Grâce à l'Académie.
00:52 Avec nos pseudo-sages qui parlent de ce qu'ils ne connaissent pas puisqu'il n'y a pas
00:55 de linguiste à l'Académie française hormis Barbara Cassin.
00:57 Alors nous maintenant, quand on parle d'écriture inclusive, on pense surtout au point médian.
01:02 Mais pendant longtemps, la bataille a porté sur la féminisation des noms de métier.
01:06 Sujet qui a obsédé l'Académie pendant des années.
01:09 La première commission de terminologie pour la féminisation des noms de métier a été
01:13 créée en France en 1984.
01:15 Et en 2019, l'Académie a reconnu le bien fondé du principe.
01:20 Mais pendant 35 ans, ils nous ont quand même promis la fin de la langue française et plus
01:26 ou moins de la civilisation.
01:27 Si on disait une chancelière, une présidente ou une autrice.
01:30 Et c'était social parce que bizarrement, dire une caissière ou une institutrice, ça
01:34 leur posait pas de problème.
01:36 Donc je vous propose un petit voyage dans le temps parmi les meilleurs conneries ou
01:39 perles de l'Académie sur ce sujet.
01:41 Et pour ça, j'ai demandé de l'aide à un spécialiste de la connerie, Guillaume
01:44 Meurice.
01:45 On va entendre Guillaume qui va prêter voix aux perles des académiciens de 1984 à nos
01:50 jours.
01:51 Ces perles sont citées dans l'ouvrage collectif « L'Académie contre la langue française
01:54 » dirigé par Eliane Biennot.
01:56 Mais je précise bien que ce sont censés des arguments, souvent écrits dans des tribunes,
02:00 des académiciens contre la féminisation des noms de métier.
02:03 Perle numéro 1.
02:05 Écoutez Guillaume interpréter l'académicien Guyton.
02:07 « Chacun sait que la femme a plus de pouvoir sur l'homme lorsqu'elle s'efface et
02:14 qu'elle paraît disparaître.
02:17 Leur force est de tirer les fils des marionnettes mâles.
02:22 »
02:23 Citation authentique, vous avez compris.
02:25 Pourquoi vouloir être visible et fille quand vous pouvez inspirer un homme ? Pourquoi vouloir
02:29 être autrice quand on peut être muse ?
02:30 Allez, perle numéro 2.
02:33 L'argument c'est « la féminisation c'est moche » alias « la phonétique, mais
02:37 quand ça m'arrange ». L'académicien Eric Orsenna avait dit, très sérieusement,
02:41 que le mot « écrivaine » était laid car il contenait « vaine ». Sauf que ça marche
02:45 aussi pour « écrivain » qui contient « vain » et n'y avait pas pensé.
02:48 On retrouve ce genre de réflexion dans la bouche de Marc Fumaroli, toujours interprété
02:56 par Guillaume.
02:57 « Noteresse, meresse, doctoresse, chefesse, rime fâcheusement avec fesse ».
03:05 C'est subtil, c'est beau la science le savoir.
03:09 Attention, Fumaroli disait aussi qu'avec la féminisation des noms de métier, le français
03:13 allait devenir, je le cite, « un artificiel créole » et qu'on allait finir par dire
03:18 « y'a bon ma capitaine ». Ne cherchez pas à la logique, il n'y en a pas, c'est
03:22 juste raciste.
03:23 Allez, perle numéro 3, le sexisme cache.
03:26 Pourquoi s'embarrasser de détour quand on peut dire avec l'académicien du Tour
03:29 que tout ça « ce sont les effets de la polygamie de Jospin qui pour faire plaisir à son harem
03:36 relance une vieille idée ». Et on peut conclure avec Druon « essayons de retrouver un peu
03:42 de virilité pour voir ». Voilà, alors que conclure de tout ça ? Que ce n'est pas parce
03:48 qu'on a des beaux costumes et de belles épées qu'on dit des choses plus intelligentes
03:51 que du tout que Roger.
03:52 Et on pourrait arrêter avec l'académie et écouter les linguistes.
03:56 C'est un joli mot épicène, c'est-à-dire qu'il prend la même forme aux masculins
03:59 et aux féminins.
04:00 - Les féminins, bien sûr.
04:01 Là, Elia Veyron, merci.
04:02 Bah dites donc, c'est vous qui avez le sabre.
04:04 - Vous avez l'air attirée.
04:05 - Mais non, oui, bien sûr, évidemment.
04:06 Mais c'est vous qui avez le sabre, là.
04:08 Vous avez mis un t-shirt qu'on va décrire pour nos auditeuristes.
04:12 C'est un t-shirt du youtubeur Linguisticae qui fait de très bonnes vidéos linguistiques,
04:16 dont une sur l'académie française.
04:18 Et donc son t-shirt, c'est marqué « Académie de ses morts », avec un académiciard, bah
04:22 mort.
04:23 Et c'est un peu vrai, vous savez, ils sont censés être 40 et là ils sont 35 parce
04:25 qu'ils meurent plus vite qu'ils se cooptent.
04:27 - Aïe, aïe, aïe, d'accord.
04:28 - C'est vrai, c'est pas une blague.
04:30 Allez, on embrasse toutes les momies.
04:31 Merci beaucoup, là, Elia Veyron.
04:36 Avec tout le respect, bien sûr.
04:37 Tout le respect qu'on doit...
04:38 - Faut bien le rajouter parce qu'on l'avait pas senti.
04:40 Excusez-moi de commenter encore une fois mais je me mets à la place de l'auditeur.

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