L'édito de Jérôme Béglé : «Les critiques de Justine Triet totalement injustifiables ?»

  • l’année dernière
Dans son édito du 30/05/2023, Jérôme Béglé revient sur les critiques véhémentes de la réalisatrice Justine Triet, lauréate de la Palme d'or à Cannes, contre le gouvernement.
Transcript
00:00 C'est News 7h52, Jérôme Béglé avec nous. Bonjour Jérôme.
00:03 Bonjour Romain.
00:04 Vous revenez sur les critiques véhémentes de Justine Trier,
00:08 la réalisatrice de cinéma contre le gouvernement français.
00:11 Les trouvez-vous justifiées ou déplacées ?
00:14 On a vécu samedi soir un moment gênant et choquant
00:16 lorsque Justine Trier, au moment de recevoir sa palme d'or,
00:20 a dénoncé le gouvernement français qui, je la cite,
00:23 "nit de façon choquante le mouvement contre la réforme des retraites".
00:26 Elle a également fustigé, je la cite encore,
00:28 "un schéma de pouvoir dominateur de plus en plus décomplexé
00:32 qui éclate dans plusieurs domaines et auquel le cinéma n'échappe pas".
00:35 Alors la réalisatrice ne parle pas de cinéma ou d'institutions politiques iraniennes,
00:39 turques ou hongroises, mais des mécanismes français politiques
00:43 et de financement du septième art,
00:45 qui permet quand même chaque année à notre cinéma
00:47 de porter sur les fonds baptismaux 270 films,
00:50 dont une soixantaine de premières oeuvres.
00:52 C'est des chiffres absolument uniques en Europe.
00:54 Les obligations d'achat des chaînes s'élèvent
00:56 à entre 2,5 et 9 % du chiffre d'affaires par chaîne de télévision
01:00 et celles-ci doivent diffuser environ 40 % d'oeuvres françaises sur leurs écrans.
01:04 Pour Canal+, l'investissement dans la production
01:06 se monte à 200 millions d'euros annuels.
01:09 Nous en vaut sans doute le régime le moins néolibéral du monde
01:13 en matière de financement de cinéma.
01:15 Et si l'on regarde de près le financement d'Anatomie d'une chute,
01:18 le film donc de Justine Trier,
01:20 elle a beaucoup de chance cette réalisatrice.
01:22 Le budget de son film était de 6,2 millions d'euros,
01:24 900 000 proviennent de France Télévisions, de France 2,
01:27 500 000 de l'Avance sur E7, du CNC,
01:30 270 000 de la région Auvergne Rhône-Alpes
01:33 et 1,2 million de Canal+.
01:36 La moitié du financement provient donc de Laurent Wauquiez,
01:39 Vincent Bolloré et Rima Boulmalac.
01:41 Elle ne le dira jamais sans doute,
01:44 elle en a évidemment honte,
01:45 mais cracher dans la soupe de cette manière
01:47 est insultant et méprisant à l'égard du contribuable.
01:51 Du contribuable et du public.
01:53 Avant tout du public Jérôme d'ailleurs.
01:55 Non Romain, du contribuable.
01:56 Car le public ne connaît pas Justine Trier.
01:59 Anatomie d'une chute est son huitième film,
02:01 court, moyen et long métrage inclus.
02:03 Et il manque à cette dame de 44 ans
02:05 la chose la plus importante,
02:07 d'avoir été reconnue, adoubée, plébiscitée par le public.
02:11 Car il est définitivement le public et sans conteste le seul juge
02:15 pour accorder un droit de suite, un droit de continuer,
02:17 si j'ose dire, aux artistes.
02:18 Que vous soyez comédien, danseur, chanteur, peintre ou réalisateur,
02:22 votre seul graal est celui de connaître un sucre populaire.
02:27 Et pas de courir le cacheton,
02:29 les financements publics et parapublics,
02:30 de hurler que c'est au gouvernement, à l'État,
02:33 au pouvoir, au pluriel, de financer vos oeuvres,
02:37 vos lubies et vos combats politiques, souvent en toque.
02:40 Non seulement Madame Trier est mal élevée,
02:42 mais ignorante et insultante,
02:44 mais en plus elle fait partie de cette petite caste
02:46 qui méprise le public,
02:47 qui vit au crochet des contribuables
02:50 et détourne l'exception culturelle
02:52 et le généreux mode de financement de notre cinéma
02:54 pour en faire des oeuvres soit médiocres,
02:56 soit qui poursuivent une idéologie d'extrême gauche.
02:59 Non seulement le financement du cinéma public
03:01 ne produit pas assez d'artistes qui rencontrent le public,
03:03 la seule chose qui vaille donc,
03:05 mais il alimente un discours nauséabond de petits marquis,
03:08 ivres de leur succès, de leur importance,
03:10 d'une importance que leur donnent en tout cas
03:11 quelques institutions et camarillas.
03:13 En vérité, il faudrait tout revoir,
03:15 éviter que ces enfants gâtés aux talents discutables
03:18 ne viennent nous cracher à la figure.
03:20 Le mécanisme de financement du cinéma français
03:22 nous coûte cher, pécunièrement et idéologiquement,
03:25 et nous devrions le revoir de fond en comble.
03:27 (Générique)
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