Inflation et hausse des prix alimentaires : "On rentre dans un processus de baisse progressive", analyse Jean-Philippe André, président de l'Ania, qui espère le voir bientôt dans les rayons

  • l’année dernière

Category

🗞
News
Transcript
00:00 Bonjour à tous, vous ne l'avez sans doute pas encore constaté dans les rayons des supermarchés,
00:04 mais la hausse des prix se calme un peu, a tendance à s'atténuer.
00:08 En témoignent les derniers chiffres de l'inflation publiés par l'INSEE aujourd'hui.
00:11 Inflation à 5,1% en mai selon les chiffres provisoires publiés aujourd'hui.
00:17 Toujours 14% de hausse sur un an pour les prix alimentaires.
00:21 La progression s'arrête, mais cela ne veut pas dire pour autant que les prix baissent.
00:25 Bonjour Jean-Philippe André.
00:27 Bonjour.
00:28 Vous êtes le président de l'ANIA, l'association nationale des industries alimentaires.
00:32 Quand est-ce que les prix vont réellement commencer à baisser dans les rayons des supermarchés ?
00:37 Pour avoir la baisse, il faut qu'il y ait alignement de toutes les planètes.
00:41 C'est-à-dire que pour faire simple, vous entendez en ce moment parler de baisse de
00:45 coût mondiaux d'un côté, et après il faut que les coûts dans l'entreprise baissent.
00:49 Donc des baisses des matières premières.
00:52 Voilà, alors je vous explique.
00:53 Vous avez actuellement des éléments qui baissent.
00:54 Vous avez parlé de l'huile de tournesol, vous avez parlé du blé.
00:57 Vous pourriez parler du fret maritime, vous pourriez parler du beurre industriel.
01:01 Au même moment où ça, ça baisse, encore faut-il que dans les stocks des entreprises,
01:06 vous soyez arrivé à épuisement de l'utilisation de ces matières pour pouvoir les proposer
01:11 en fabrication à nos clients sur le niveau des nouveaux cours.
01:15 Donc ce que vous êtes en train de me dire, c'est que les prix ne vont pas baisser.
01:17 Prenons un paquet de pâtes.
01:19 Un paquet de pâtes, le cours mondial du blé a baissé de 40% en un an, sur un an.
01:24 Et c'est plus 20% pour le prix du paquet de pâtes sur un an.
01:27 Oui, et donc en ce moment, le prix du blé dur est en train de baisser de l'ordre de 20%.
01:33 Et si vous savez que le blé dur, c'est à peu près 50% de la composition d'une pâte,
01:38 je ne suis pas un spécialiste de la pâte, mais c'est à peu près ça les formats,
01:41 vous pouvez en déduire un peu arithmétiquement que vous devriez avoir une baisse de l'ordre de 10%.
01:47 Encore faut-il que vous ayez acheté ce blé à ce nouveau tarif,
01:50 que vous le fabriquez, que vous le proposez à votre client.
01:53 Et donc ça veut dire que le prix des pâtes ne va pas baisser dans les prochaines semaines ?
01:56 Non, mais ça veut dire que si, au contraire, ça veut dire qu'à partir de maintenant,
01:59 si vous achetez dans ces conditions, on peut espérer très rapidement voir les prix baisser en rayon.
02:04 Mais j'ajoute aussi, au risque de décevoir les gens qui nous écoutent...
02:07 C'est un peu le souci, c'est que vous risquez de décevoir beaucoup.
02:10 Non, je ne crois pas qu'on déçoit quand on explique, madame, je ne pense pas.
02:13 C'est-à-dire qu'au moment où il y a des choses qui vont baisser, il y a des choses qui augmentent.
02:16 Et oui, c'est paradoxal, il a invité, il dit qu'il y a des choses qui augmentent.
02:19 Oui, le sucre augmente, le cacao augmente, vous avez le porc qui continue à augmenter.
02:26 Et puis vous avez des éléments que nous avons achetés depuis très longtemps, je parle de l'électricité.
02:30 L'électricité aujourd'hui baisse, mais l'électricité que nous avons achetée,
02:34 je ne sais pas, il y a 8, 10 mois, on est couvert sans doute.
02:36 Donc tout ceci, simplement pour dire, c'est compliqué.
02:39 Alors c'est compliqué, mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a deux semaines, vous étiez reçu à Bercy,
02:42 que vous vous êtes engagé à revenir à la table des négociations d'ici la fin du mois de mai.
02:47 On y est à la fin du mois de mai.
02:49 Est-ce que ces négociations, elles ont commencé, Jean-Philippe André ?
02:52 Absolument, je crois que la réunion, c'était le 17.
02:54 C'est ça.
02:55 Donc voilà, pile, à peu près deux semaines.
02:56 On était dans une réunion où on a été en face d'un ministre qui a été très exigeant,
03:01 mais ce qui est à peu près normal, puisqu'il est en charge quand même du pouvoir d'achat de nous,
03:05 nous les citoyens, et nous on a une habitude qui a été d'être responsable et citoyen.
03:11 On a dit, on retourne.
03:12 On a trouvé ensemble un critère qui était le top 75.
03:15 Les 60 plus grands de l'entreprise.
03:18 Écoutez, nous aujourd'hui...
03:19 Avec une hausse de 10%, en gros, il faut faire partie des 75 plus gros.
03:24 Il faut avoir obtenu des hausses de 10% lors des dernières négo.
03:27 Est-ce que ces deux critères, ils ont été...
03:30 Et avoir un intrant, une matière qui aurait varié de 20%.
03:34 Et donc, je repose ma question, est-ce que des négociations commerciales ont repris ?
03:38 Absolument.
03:39 Vous voyez, nous, on a à peu près 50 entreprises qui adhèrent à l'Agnat sur ces 75.
03:46 La très grande majorité a déjà repris contact.
03:48 Est-ce que vous pouvez donner quelques exemples ?
03:50 Non, c'est pas mon rôle, parce que je représente,
03:53 je ne peux pas donner, nommer les entreprises.
03:55 Il y a même des entreprises, vous voyez, comme quoi ça devient intéressant ce sujet.
03:59 Il y a même des entreprises qui ne sont pas dans les deux critères que vous avez formulés,
04:03 qui se remettent à la table de négociation.
04:05 Vous allez me dire, tiens, pourquoi ?
04:06 Simplement parce que dans la période qui vient de s'écouler,
04:10 il y a aussi des entreprises qui ont perdu des volumes,
04:12 qui ont vu leur volume s'effriter au bénéfice...
04:16 Parce que les gens ont moins acheté.
04:17 ...ont moins acheté, au bénéfice des MDD, etc.
04:19 Et on a dit d'ailleurs dans cette réunion...
04:20 Les marques distributeurs.
04:21 Les marques distributeurs, et on a dit d'ailleurs dans cette réunion
04:23 qu'on va aussi réactiver l'outil de la promotion,
04:26 parce que l'objectif du gouvernement, mais de nous aussi par rapport aux gens qui nous écoutent,
04:30 c'est de baisser les prix moyens.
04:31 Donc il y a des gens, des sociétés, qui ont cet intérêt à revenir à la table de négociation.
04:35 Est-ce que vous pouvez nous dire quels sont les produits
04:38 qui vont baisser dans les rayons des supermarchés ces prochains mois ?
04:41 Je pense que...
04:42 On sait qu'il y a certains industriels qui ont refusé d'ouvrir des négociations.
04:47 Coca-Cola, pour les nommer, voilà.
04:49 Qui refusent d'ouvrir des négociations aujourd'hui, alors qu'ils remplissent ces deux critères.
04:53 Je pense que, objectivement, on peut penser effectivement au secteur des huiles,
04:57 l'huile de tournesol, on peut penser aux pâtes,
04:59 et après, au cas par cas, chaque entreprise qui coche les deux cases
05:03 s'est engagée vis-à-vis du ministre, mais aussi vis-à-vis de nous, collectivement,
05:07 parce qu'on a cette responsabilité vis-à-vis des consommateurs d'y aller,
05:11 et après, il faut négocier, il faut être dans quatre figures.
05:15 Qu'est-ce que vous allez dire à ces industriels qui refusent de retourner à la table des négociations
05:18 alors qu'ils remplissent les deux critères que vous avez discutés avec Bruno Le Maire ?
05:24 Nous, on n'a pas le pouvoir de dire ou de faire une injonction à un...
05:27 Qu'est-ce que vous préconisez ?
05:28 Mais nous, on préconise fortement de jouer la carte de la transparence.
05:30 Il n'y a rien à cacher.
05:31 Si je ne suis pas concerné par des baisses, etc., je vais voir mon client, je l'explique.
05:36 Hier soir, j'entendais Thierry Cotillard, pour ne pas le nommer patron de Intermarché,
05:41 en me disant "Tiens, il y a des gens qui reviennent me voir".
05:43 Il y a des sociétés qui sont dans ces critères, ils vont le faire,
05:47 mais vraiment de bonne foi.
05:49 Parce que vous avez entendu Bruno Le Maire aussi ce matin.
05:52 Il dit que si vous ne jouez pas le jeu, il brandit la menace de l'instrument fiscal.
05:56 Est-ce que ça vous fait peur ?
05:57 Est-ce que vous êtes prêt à payer une taxe sur les super-profits comme les énergéticiens avant vous ?
06:01 Oui, en plus, il ne nous prend pas à découvert,
06:03 puisque c'est un sujet qu'on avait sur la table dans cette fameuse réunion.
06:06 Et nous, on a dit "On ne veut pas de ça et on n'aura pas besoin de ça".
06:08 On ne veut pas d'ailleurs être le seul pays à faire ça, on n'aura pas besoin de ça.
06:11 Je répète constamment, l'inflation, c'est un poison.
06:16 D'abord pour les gens qui nous écoutent en termes de pouvoir d'achat.
06:18 Mais c'est un poison pour les industriels de l'agroalimentaire.
06:21 Parce que ceux qui font des marques régionales ou des marques locales ou même nationales,
06:27 l'immense majorité, c'est les PME, l'immense majorité,
06:30 aujourd'hui, personne ne peut faire le développement de leur entreprise sur le compte de l'inflation.
06:35 On ne l'a jamais fait, on ne le fera pas.
06:37 Plus vite nous sortons de ce cycle, plus vite on se portera de nouveau mieux pour l'ensemble des personnes.
06:43 Pour résumer, pour conclure, on peut s'attendre à des baisses de prix sur certaines huiles,
06:48 l'huile de tournesol, sur les pâtes aussi.
06:50 Et Bruno Le Maire pourra ranger son instrument fiscal, il n'aura pas à le sortir.
06:56 Les industriels de l'agroalimentaire vont jouer le jeu.
06:59 Si vous m'aviez interviewé il y a un mois, l'inflation alimentaire était à 16%, aujourd'hui elle est à 14%.
07:04 Les gens me vont dire "14, c'est encore beaucoup trop".
07:06 Mais je dis simplement qu'on rentre dans un processus de baisse progressive de ce trend.
07:10 Merci beaucoup Jean-Philippe André, président de l'AIA, Association Nationale des Industries Alimentaires.
07:15 Invité Echo de France Info ce soir.

Recommandée