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Mardi 6 mai, Laurence Boone, secrétaire d’Etat en charge de l’Europe, se rend à Bruxelles pour parler sécurité économique. La veille, elle était invitée de l’éco sur franceinfo :

Laurence Boone, secrétaire d’Etat chargée de l’Europe : les entreprises et les entrepreneurs « sont complètement mêlés dans la bureaucratie bruxelloise comme une mouche dans une toile d’araignée ».

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00:00 *Générique*
00:05 Bonsoir à tous, la France fait face à un énorme défi, deux énormes défis en fait, les transitions énergétiques et numériques.
00:12 Tout cela va demander beaucoup, beaucoup de capitaux, des centaines de milliards d'euros à la fois public et privé.
00:19 Et qui plus est évidemment, dans une très vive concurrence internationale.
00:23 Alors question, comment et avec qui gagner le pari ?
00:27 Bonsoir Laurence Boone.
00:28 Bonsoir Emmanuel Kenny.
00:29 Vous êtes secrétaire d'État en charge de l'Europe auprès de la ministre des Affaires étrangères.
00:35 Demain vous serez à Bruxelles pour parler souveraineté et sécurité économique.
00:41 On va y revenir dans le détail, nous sommes vraiment au cœur du sujet.
00:43 Le rapport publié récemment par l'économiste Jean Pisaniferi sur l'impact économique de la transition énergétique chiffre à 66 milliards d'euros par an sur la décennie.
00:53 Les sommes qu'il va falloir mettre sur la table pour assurer cette transition.
00:57 Est-ce que la France peut assumer cela toute seule ?
01:01 Est-ce qu'elle a besoin d'alliés en l'occurrence de l'Europe ?
01:04 C'est tout l'objectif de l'Europe et c'est tout l'objectif de l'Europe depuis assez longtemps.
01:10 Donc ça veut dire quoi ?
01:11 Vous savez qu'avec le plan de relance après la pandémie, l'Europe a mis 750 milliards sur la table dont 250 milliards un tiers sont dédiés à la transition énergétique.
01:22 Quand la France met un plan de relance de 100 milliards, 40 milliards viennent de l'Europe précisément pour cette transition énergétique et numérique.
01:30 Donc en pratique c'est quoi ?
01:32 En pratique c'est l'usine ACC inaugurée par Bruno Le Maire et Agnès Pannier-Bellenacher.
01:37 La batterie électrique dans le nord de la France.
01:39 Voilà, la semaine dernière.
01:40 C'est aussi aujourd'hui même l'usine ST Microélectronique à Kroll près de Grenoble.
01:46 C'est un investissement de 3 milliards.
01:48 Donc oui, la France avec l'Europe a de quoi mettre sur la table les investissements nécessaires.
01:54 Est-ce qu'on fait assez ?
01:55 La réponse est non.
01:57 Nous la France, nous poussons boucler pour que l'Europe fasse beaucoup plus.
02:00 Et vous avez entendu parler du fonds de souveraineté.
02:04 Il a été demandé par le président dès décembre.
02:06 Il avait été annoncé par Ursula von der Leyen en septembre.
02:09 Nous on dit voilà il reste 70 à 100 milliards d'euros dans un fonds européen qui s'appelle Repower EU qui arrive à extinction.
02:18 On veut que cet argent là continue d'aller dans la transition.
02:21 Alors cela dit Laurence Boone, chaque pays n'est pas logé à la même enseigne.
02:25 Parce que chaque pays, on voit notamment l'Allemagne, débourse beaucoup, plus que d'autres d'ailleurs.
02:29 La France a moins de moyens.
02:30 Est-ce que ça ne crée pas finalement des distorsions de concurrence au sein même de l'Europe
02:34 entre les pays qui ont peut-être moins besoin de l'Europe et d'autres qui en ont réellement besoin ?
02:39 Alors je vous arrête, tout le monde a besoin de l'Europe.
02:41 Regardez l'Allemagne, c'est 80 millions de personnes.
02:43 Nous c'est 66.
02:44 Qu'est-ce qu'on pèse face à la Chine, à l'Inde et les Etats-Unis ?
02:48 En revanche en Europe, on est de 440 millions.
02:51 Et là on peut commencer à parler sur un pied d'égalité.
02:54 Ça c'est la première chose.
02:55 La deuxième chose c'est est-ce qu'il y a un risque d'inégalité ou de fragmentation ?
02:59 Mais oui, bien sûr que oui.
03:00 C'est d'accord pour ça que nous avons demandé le fonds souverain de souveraineté.
03:04 Mais c'est aussi pour ça que nous avons demandé, que je pousse, et ça sera aussi l'occasion demain,
03:09 pour plus de flexibilité dans l'utilisation des fonds.
03:12 Parce que des fonds, il y en a, il y en a beaucoup.
03:15 Mais les acteurs de terrain, ceux que je vois, les régions, les entreprises et les entrepreneurs...
03:19 Ils n'ont pas forcément l'argent nécessaire.
03:21 Mais ils sont complètement mêlés dans la bureaucratie bruxelloise,
03:24 comme une mouche dans une toile d'araignée.
03:26 Mais ça c'est pas nouveau.
03:27 Mais alors, deux choses.
03:29 La première, c'est qu'on a poussé Bruxelles à simplifier ses procédures,
03:32 à passer de procédures des années 90 à des procédures qui soient modernes, agiles, flexibles.
03:37 La deuxième chose, c'est qu'avec mon arrivée, on a mis en place,
03:40 dans l'administration européenne française, le Secrétariat général des affaires européennes,
03:44 une cellule dédiée à l'utilisation des fonds par les régions, par les collectivités.
03:50 Donc ça veut dire que ce sera plus efficace ? Vous visez l'efficacité ?
03:52 Oui, on veut aider tous les acteurs de terrain à pouvoir utiliser ces fonds.
03:56 C'est d'ailleurs ce qui va être annoncé, je vous le dis à vous, en avant-première,
04:01 jeudi soir à Marseille, par Renaud Muselier et le gouvernement.
04:04 Qu'est-ce qui va être annoncé précisément ?
04:06 La flexibilité des fonds et de pouvoir les utiliser plus longtemps dans le temps,
04:09 ce qui n'était pas possible avant et ce que les régions nous demandaient.
04:11 Alors justement, Laurence Boone, secrétaire d'Etat en charge de l'Europe auprès de la ministre des affaires étrangères,
04:15 quand vous vous rendez à Bruxelles, quels sont les arguments utilisés par la ministre française
04:20 pour défendre ses intérêts ? Finalement, vous êtes là pour ça, quelque part ?
04:24 Je suis là...
04:26 Défendre les intérêts de la France, bien sûr.
04:28 Absolument, mais je suis là aussi pour que l'Europe avance plus et fasse plus,
04:31 pour que nous puissions en bénéficier plus.
04:33 Donc là, je vous l'ai dit, il y a le fonds de souveraineté, c'est une idée de la France.
04:37 Nous demandons maintenant que les fonds arrivent dans ce fonds de souveraineté pour qu'ils puissent être utilisés.
04:42 Je répète, c'est 70 à 100 milliards qui sont bientôt disponibles.
04:45 Ensuite, on parle aussi beaucoup de sécurité économique.
04:49 C'est quoi la sécurité économique ? C'est la souveraineté ? C'est le protectionnisme ?
04:53 C'est la souveraineté. C'est que les États-Unis ne nous disent pas ce qu'on doit faire
04:58 comme relation commerciale en nous opérant d'exporter des puces ou des semi-conducteurs.
05:02 C'est aussi que face à la Chine, on puisse dire "vous faites des subventions énormes
05:09 et ça ne passera plus sinon".
05:11 Très concrètement, qu'est-ce qu'on fait par exemple face à la Chine ?
05:15 Dès le 1er juillet de cette année, on va pouvoir utiliser des outils anti-subvention,
05:20 anti-dumping sur tous les véhicules électriques qui sont sur-subventionnés par la Chine.
05:25 On mettra des quotas ou on mettra des tarifs pour rééquilibrer les relations de concurrence.
05:32 Après, ce n'est pas que ça. Est-ce que c'est aux Américains de nous dire ce qu'on doit exporter
05:37 ou où on peut investir ? Pas du tout.
05:39 C'est ce qu'ils font jusqu'à présent ?
05:40 C'est à l'Europe. Ils pourraient être tentés de nous empêcher d'exporter ci ou ça ou d'investir en Chine.
05:45 Franchement, ils le font si vous lui déloquez, Laurence Baud.
05:48 Non, ils ne le font pas. Ils sont tentés, je vous le dis.
05:52 Mais c'est pour ça que nous, nous construisons cette doctrine de sécurité économique avec Roland Lescure,
05:56 avec Jean Noël, avec Olivier Bescht.
05:59 On a mis en place justement un groupe de travail qui va faire des propositions
06:03 pour qu'on puisse décider quels investissements on veut faire à l'étranger,
06:06 quels investissements on veut chez nous, en Europe comme en France
06:09 et quel type de contrôle aux exportations on veut mettre pour garder aussi ce lead technologique
06:15 et puis pour ne pas ouvrir nos infrastructures critiques à n'importe qui.
06:19 Donc contrôler encore plus les investissements étrangers en France et en Europe ?
06:23 Oui, parce que vous savez maintenant, quand on parle de cyber,
06:26 quand on parle de protection des données, je vais vous donner un exemple très concret.
06:30 Vous êtes dans un aéroport, vous passez la sécurité.
06:33 Vos données sur la sécurité, quand vous passez là et que ça fait bip
06:36 parce que vous avez gardé vos clés dans votre poche, vous voulez qu'elles restent.
06:39 Vous voulez qu'elles restent en France, qu'elles restent en Europe.
06:41 Vous ne voulez pas qu'elles soient absorbées par la Chine, par exemple.
06:44 C'est exactement de ça dont il s'agit.
06:46 Alors Twitter, Elon Musk, le patron de Twitter, va sortir,
06:50 annoncer qu'il sortait du code de bonne conduite européenne
06:53 pour la transmission vraie de l'information.
06:57 La vice-présidente de la Commission européenne dit tout à l'heure
07:00 qu'elle déplorait en tout cas qu'Elon Musk choisisse la confrontation dont acte.
07:05 Pour l'instant, ce sont des mots, on ne va pas plus loin.
07:07 D'abord, je déplore, je ne crois pas qu'il veuille se couper du reste de l'Europe.
07:12 Le ministre Jean-Noël Barrault a été très clair là-dessus.
07:15 Il faut jouer avec les règles européennes.
07:17 Donc c'est absolument ce qu'on va lui redemander.
07:20 Un dialogue va s'engager.
07:21 Twitter et le marché européen pour Twitter, c'est quand même quelque chose d'énorme.
07:24 On sait maintenant que c'est dangereux, que les enfants peuvent suivre n'importe quoi,
07:29 qu'on sait qu'il y a beaucoup de mésinformations, de désinformations.
07:32 Vous savez, j'étais en Europe de l'Est.
07:33 Dans tous les pays d'Europe de l'Est, il y a de l'ingérence russe via les réseaux sociaux.
07:38 On ne veut pas vendre notre démocratie à la Russie.
07:41 Merci beaucoup Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe, invité de l'Éco ce soir sur France Info.

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