• il y a 2 ans
Les formes d’organisation du travail des entreprises en Polynésie française : quel état des lieux ? La quête de productivité a été l’élément déclencheur de l’émergence de ces différentes formes d’organisation du travail.
Transcription
00:00 On va avancer sur la deuxième sous-thématique,
00:04 donc sur les formes d'organisation du travail.
00:06 Et progressivement, on va aller au coeur même,
00:10 tel un entonnoir des sujets plus pragmatiques
00:13 autour de l'emploi.
00:14 Donc on va rapidement faire un état des lieux
00:18 et se questionner aussi autour
00:20 des différentes formes d'organisation du travail.
00:23 Alors sur des sources, une fondation européenne
00:26 pour l'amélioration des conditions de travail,
00:29 donc Eurofound,
00:31 récemment a caractérisé,
00:34 a fait ressortir les quatre principales formes
00:37 d'organisation du travail en Europe.
00:39 Donc parmi ces différentes formes,
00:43 il y a l'organisation simple,
00:45 où on est sur ici
00:49 des tâches qui relèvent peu de l'intellectuel,
00:54 donc il y a peu de paraintellectuel,
00:56 où on est sur une autonomie qui est très très faible
01:00 accordée aux travailleurs,
01:01 et donc aussi avec un management
01:04 qui est très caractéristique ici, autoritaire.
01:08 On a aussi une deuxième forme d'organisation
01:10 qui est empruntée par 16% de la population européenne
01:13 d'après les chiffres d'Eurofound.
01:15 On a une deuxième forme également d'organisation
01:18 qui est prépondérante en Europe,
01:19 c'est l'organisation taylorienne.
01:21 Jean-Bernard en a fait un rapide topo.
01:25 -Donc les organisations tayloriennes,
01:28 ce sont des formes de structures
01:30 qui sont plus organisées, hyperdivisées.
01:34 Donc on a la division verticale, horizontale
01:37 qui est appliquée dans ce type de structure.
01:39 On met aussi en place la standardisation
01:45 même au niveau de la production.
01:48 L'idée, c'est de rendre les tâches plus simples,
01:50 plus spécifiques afin de développer l'expertise des ouvriers
01:54 pour qu'ils soient plus efficaces, plus productifs
01:56 et donc d'augmenter l'érodement.
01:59 Pour à peu près 37%
02:06 de cette population d'organisation,
02:10 il y a l'organisation apprenante qui est ici.
02:13 Finalement, l'organisation qui ressort de manière plus intense
02:18 dans les pratiques actuelles des organisations.
02:22 Ici, les caractéristiques fortes de cette forme d'organisation,
02:26 c'est qu'on est sur un management type participatif,
02:29 donc on laisse davantage de place aux initiatives privées,
02:32 donc des collaborateurs dans l'entreprise.
02:34 Ce sont des pratiques qui se sont renforcées
02:36 au cours de ces années,
02:38 qui fait écho d'ailleurs à ce que nous avons évoqué aussi dernièrement.
02:41 On a aussi ici le souhait de permettre aux salariés
02:46 d'exercer des activités un peu plus intellectuelles.
02:49 Donc c'est aussi les attraits caractéristiques
02:51 de cette forme d'organisation du travail
02:53 et qui ressort de manière prépondérante
02:56 dans les caractéristiques des organisations en Europe.
03:01 Enfin, on a aussi l'organisation de type Lean.
03:06 -Alors, ça ressemble beaucoup au modèle toyotiste
03:10 que vous connaissez, pour ceux qui l'ont étudié.
03:14 Enfin, l'idée, elle est relativement simple pour simplifier.
03:17 Autant les modèles, on va dire, historiquement établis
03:22 dans le 19e et début du 20e siècle
03:25 étaient une production de masse pour une consommation de masse.
03:28 Donc de ce point de vue-là, c'était l'offre qui déterminait la demande.
03:31 Ca, c'est l'analyse macroéconomique.
03:34 Et alors que les organisations plus contemporaines,
03:38 notamment le toyotisme et toutes ces variantes
03:40 qu'on a connues en Europe notamment,
03:42 c'est d'inverser le flux, c'est-à-dire...
03:44 C'est la demande qui détermine l'offre.
03:46 Et il y a un ajustement de l'entreprise
03:48 à la demande qui est de plus en plus diversifiée
03:52 pour des raisons d'évolution des comportements des consommateurs.
03:56 Et du coup, l'exemple, un des exemples typiques, c'est Ikea,
04:00 qui ne produit pas directement des meubles,
04:03 mais qui les assemble en fonction des besoins des gens.
04:06 C'est un exemple parmi bien d'autres.
04:07 Voilà. Et donc, là, on rentre dans des process de production
04:12 qui sont beaucoup plus flexibles, moins rigides,
04:15 et bien sûr, beaucoup plus exigeants, finalement,
04:18 du point de vue de la production et donc des collaborateurs.
04:21 On va dire que c'est des choses symboliques. Voilà.
04:24 -Alors, ça n'a pas été évoqué par Eurofound,
04:30 mais on entend de plus en plus parler des entreprises libérées.
04:33 C'est un sujet aussi qui fait débat, c'est clair,
04:39 qui a pour attrait d'être sur une forme d'organisation
04:42 plutôt aplatie.
04:44 C'est quelque chose d'assez innovant,
04:47 parce que, finalement, on essaye de gommer
04:50 toutes les formes de représentation de la hiérarchie,
04:53 de permettre à tous les collaborateurs
04:55 d'avoir la sensation d'être évalués,
04:58 mais surtout de travailler à part égale,
05:02 et donc surtout de pair à pair,
05:03 sans avoir la pression de la hiérarchie,
05:07 mais en étant, on va dire,
05:09 tous partie prenante aussi de son fonctionnement,
05:12 et en effaçant toutes les formes de représentation de la hiérarchie.
05:15 Donc on voit ces signes de plus en plus
05:18 dans des entreprises connues,
05:20 telles que Michelin en métropole.
05:22 Sur le territoire, j'en ai peut-être pas ma connaissance,
05:27 mais si vous en connaissez, pourquoi pas,
05:29 pour réagir sur le sujet.
05:31 Mais c'est bien de noter que ça fait partie
05:33 des nouvelles formes aussi d'organisation
05:36 qui, aujourd'hui, sont sujet à débat
05:38 et qui questionnent sur le niveau de performance
05:42 de ces formes d'organisation,
05:43 où tout le monde...
05:45 Où on a un effacement vraiment de cette relation de hiérarchie
05:49 et de ces niveaux hiérarchiques,
05:53 et donc tout le monde, finalement,
05:55 travaille au mode projet,
05:57 mais évolue à part égale sur les différentes activités
06:01 qui leur sont confiées.
06:03 Ce qui nous amène donc à se questionner sur un élément phare,
06:07 et on vous donne la parole aussitôt.
06:10 -Donc, on aimerait avoir vos réactions,
06:14 les professionnels, par rapport à ce qui vient d'être dit.
06:19 Donc, on aurait une question.
06:20 Quelle forme d'organisation vous mettez en place,
06:23 vous, dans vos entreprises ?
06:24 Et est-ce que l'application de ce type d'organisation
06:28 vous paraît satisfaisante ?
06:30 -De plus en plus,
06:39 et ça fait longtemps au sein du Medef
06:41 qu'on prône vers ces approches-là,
06:42 c'est une organisation apprenante.
06:45 On a beaucoup souffert, ces dernières années,
06:51 de l'écrasement qui s'est fait de l'apprentissage
06:56 par des dispositifs,
06:57 soi-disant, d'intégration d'emploi, création d'emploi.
07:01 Nos fameux amis des CAE,
07:03 qui ont créé des effets domaines extrêmement négatifs,
07:07 et surtout qui ont écrasé la machine en apprentissage,
07:12 qui est probablement la plus vertueuse
07:14 et la plus pertinente pour pouvoir faire rentrer
07:17 dans le monde du travail des jeunes polynésiens
07:19 de manière d'emploi,
07:21 en mixant, apprendre et mettre en oeuvre.
07:25 Donc, c'est, je pense, clairement ce qu'on vise le plus.
07:30 Après, on ne pouvait pas empêcher
07:31 que dans les petites entreprises, toutes petites entreprises,
07:34 il y a cette approche très verticale d'organisation simple,
07:38 voire même un peu taylorienne encore.
07:41 Ca amène même une réflexion plus large.
07:44 Et d'ailleurs,
07:46 la ministre a sûrement dû trouver sur son bureau
07:49 un rapport de l'Anacte
07:52 que nous avions beaucoup demandé à l'équipe précédente,
07:57 rapport qui avait pour objet de faire un diagnostic
08:00 du travail en Polynésie française.
08:03 Pas un diagnostic sur le plan des valeurs des chiffres,
08:04 parce qu'on en a quand même beaucoup.
08:06 Un diagnostic sur la...
08:07 Tout est parti, en fait, d'une difficulté du dialogue social.
08:11 Et on a voulu vraiment essayer d'avoir un éclairage
08:14 sur l'approche du travail en Polynésie.
08:17 Parce qu'on pense qu'il y a une relation forte
08:19 avec une approche ethno-sociologique
08:22 qu'il faut considérer.
08:23 On ne peut pas approcher le travail
08:25 et l'envie de travail en Polynésie
08:27 comme on peut l'avoir en métropole.
08:29 C'est totalement différent,
08:30 encore moins quand on raisonne dans les îles.
08:32 Et donc, nous avons sollicité cette mission
08:34 qui s'est faite l'année dernière
08:36 et qui avait pour objet de faire une forme d'éclairage
08:39 sur l'approche du travail pour les Polynésiens.
08:42 Et dans cette approche du travail,
08:43 vous avez cette notion d'organisation hiérarchique
08:46 quand même qui est très présente.
08:48 Il y a souvent ce rappel de nos collaborateurs
08:51 qu'ils ont...
08:52 Ils sont intéressés d'être amenés à réfléchir à une décision.
08:56 Mais à un moment donné, encore une fois,
08:58 il y a une forme de hiérarchie
09:00 qui est peut-être issue de la culture polynésienne,
09:04 cette notion de "monde est du chef".
09:06 Et ça, c'est très intéressant.
09:08 Et ça peut se faire aussi dans l'apprenante.
09:11 On est peut-être encore très telloriens,
09:14 mais il y a une mouvance qui se fait
09:17 sur le fait de partager sa connaissance avec l'autre.
09:19 Et ça, c'est l'apprentissage qui l'amène
09:21 et on tend vers ces organisations apprenantes.
09:23 C'est encore trop peu en Polynésie.
09:28 Et si ça l'est trop peu, c'est parce que depuis trop longtemps,
09:30 on a mis en place des dispositifs
09:33 qui n'étaient pas avec cette vocation-là,
09:35 qui étaient de vocation de faire croire qu'on créait de l'emploi,
09:38 qui n'étaient pas des emplois, puisque les CAE, c'est des stagiaires,
09:42 et qui ont détourné le côté, je dirais,
09:45 extrêmement intéressant de l'apprentissage.
09:48 -Je voudrais insister sur cette notion de hiérarchie,
09:53 sur ce que c'est la hiérarchie aujourd'hui.
09:55 Parce que là aussi, on a l'idée caractéristique
09:57 de la hiérarchie, c'est un chef dans son bureau
09:59 qui a la science infuse, qui décide tout et qui donne des ordres.
10:04 En fait, on n'en est pas là du tout.
10:05 Aujourd'hui, le principal rôle d'un responsable,
10:09 en fait, c'est d'arbitrer.
10:10 C'est pas de décider au sens... C'est d'arbitrer.
10:13 C'est-à-dire qu'on a des organisations
10:15 où la plupart des idées viennent des collaborateurs
10:17 parce que c'est eux qui ont souvent l'expertise pour ça.
10:20 Mais à un moment donné, comme c'était dit plusieurs fois,
10:23 il y a un risque à prendre. Une entreprise,
10:24 c'est pas comme en mathématiques.
10:26 1 + 1, ça fait jamais 2.
10:27 C'est-à-dire qu'on est tout le temps dans un univers
10:29 qui est bouvant, qui est inconstant.
10:31 On n'a jamais toutes les données pour décider.
10:33 Et à un moment donné, quelqu'un doit prendre la responsabilité.
10:36 Alors ce chef, ça peut pas nécessairement être toujours le même.
10:39 C'est-à-dire tout à l'heure, on a parlé de gestion par projet.
10:42 Quand on est en projet, il y a nécessairement
10:44 un chef de projet aussi.
10:46 Mais ça sera pas nécessairement la hiérarchie de l'entreprise.
10:48 Ça peut être dans un groupe de projet
10:50 où un collaborateur peut prendre la responsabilité.
10:52 Mais à un moment donné, il faut que quelqu'un décide.
10:55 Et il décide en arbitrant.
10:57 C'est pour ça que cette notion de hiérarchie a beaucoup évolué
10:59 quand même depuis aussi un certain nombre d'années.
11:01 Et il faut l'avoir sous un oeil de prise de responsabilité
11:04 et pas sous un oeil de quelqu'un qui, dans son bureau,
11:08 prend les décisions tout seul.
11:09 C'est ça qui est important aujourd'hui.
11:11 Aujourd'hui, tout à l'heure, on parlait d'avoir
11:13 la responsabilité de l'entreprise.
11:15 L'idée, c'est que sous forme de projet,
11:17 chacun puisse, à un moment donné, gérer un projet
11:20 et être finalement investi d'une prise de décision
11:23 sur un type de projet.
11:25 Et c'est ça qui peut faire réaliser
11:27 le collaborateur dans l'entreprise.
11:29 -Pardon, je veux bien réagir rapidement.
11:34 Moi, en écoutant les interventions de chacun,
11:37 j'ai un peu l'impression que dans le mode de gouvernance,
11:40 les chefs d'entreprise, comme les professeurs et les élèves,
11:45 semblent penser à mener une évolution
11:50 dans le mode de gouvernance.
11:54 Mais on n'a toujours pas les clés, j'ai l'impression.
11:58 Ensuite, ces différentes organisations,
12:02 elles s'adaptent aussi par rapport au public
12:05 des salariés de sa société.
12:08 Je pense qu'au sein même d'une société,
12:12 on peut avoir des organisations différentes.
12:15 On ne va pas gérer les équipes de cadres
12:19 et d'agents de maîtrise de la même façon
12:21 que les équipes d'ouvriers ou d'employés.
12:26 Donc résumer une société à une organisation telle ou rien
12:30 ou à une organisation emprunante,
12:32 ça peut être assez limitatif,
12:34 sauf dans le cadre de sociétés de TPE
12:38 qui emploient peu de salariés, effectivement.
12:42 Mais je pense qu'il peut y avoir plusieurs modèles d'organisation
12:46 au sein même d'une société.
12:51 - Parmi les enseignants, certains souhaiteraient
12:54 prendre la parole.
12:55 Oui, nous avons Ambre Hollman à ce sujet.
12:59 - Je vais rejoindre l'idée de notre collègue professionnel
13:05 qui dit que dans une entreprise,
13:06 on peut justement avoir plusieurs types d'organisations du travail.
13:10 Et effectivement, je pense qu'une entreprise,
13:13 elle est quand même animée par des objectifs.
13:16 Elle a des objectifs et justement, avec ces objectifs,
13:20 elle va devoir déterminer une stratégie
13:23 pour atteindre justement ces objectifs.
13:26 Eh bien, des fois, dans la vie d'une entreprise,
13:29 tout n'est pas lisse, c'est-à-dire qu'à un moment donné,
13:32 on va avoir des pics vers le haut, des pics vers le bas.
13:35 Et donc à chaque fois, il va y avoir un décideur
13:38 qui va arbitrer.
13:39 Donc je rejoins mon collègue professionnel
13:40 qui va arbitrer et qui va décider.
13:43 Donc aujourd'hui, à partir d'aujourd'hui,
13:45 on va prendre cette stratégie d'organiser
13:48 de cette façon le travail.
13:50 Et donc il y a aussi ensuite la question de la polyvalence,
13:55 c'est-à-dire que dans certains types d'organisations du travail,
14:00 on va donner plus ou moins d'autonomie
14:04 à nos collaborateurs.
14:06 Mais il faut s'assurer aussi de la possibilité
14:10 de ces collaborateurs à assurer justement,
14:15 à assumer des responsabilités
14:17 qui vont être déléguées par ces décideurs.
14:20 Parce qu'il faut aussi, à un moment donné,
14:21 être réaliste.
14:26 Voilà, c'est ça, être réaliste.
14:28 Et donc voir dans notre vivier de salariés,
14:30 est-ce que nos salariés sont capables
14:35 de justement prendre des décisions également
14:40 auprès de la hiérarchie,
14:44 de ceux qui vont organiser ces équipes ?
14:48 Voilà.
14:49 Oui, et aussi, est-ce qu'ils ont l'audace également,
14:55 justement, de travailler ?
14:57 Exactement, oui.
14:58 [SILENCE]

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