Laure Maestrello, cadre de santé à Montpellier et référente violences à l'Ordre des infirmiers de l'Hérault

  • l’année dernière
Les violences contre les soignants sont au coeur d'un coloc organisé le jeudi 22 juin 2023, au sein de la gendarmerie Lepic à Montpellier. Professionnels de santé, institutions mais aussi associations sont notamment conviés. Le but ? Echanger autour d'une problématique grandissante : la sécurité du personnel médical, de plus en plus remise en cause. On en parle avec Laure Maestrello.
Cadre de santé à Montpellier, elle est aussi élue et référente violences à l'ordre des infirmiers dans l'Hérault.

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Transcription
00:00 7h46, l'invité du 6/9 de France Bleu Hérault ce matin, Bartrand Cunlute, c'est Laure Maestrello,
00:05 c'est les cadres de santé à Montpellier, élue et référente de violences à l'ordre des infirmiers dans l'hérault.
00:10 Oui, bonjour Laure Maestrello.
00:11 Bonjour.
00:12 Les violences contre les professionnels de santé augmentent dans le public comme dans le privé partout en France.
00:17 Les agressions contre les médecins par exemple sont en hausse de 23% en 2022 par rapport à 2021,
00:23 chiffre publié récemment par l'Ordre des médecins.
00:25 Ont-elles augmenté dans les mêmes proportions chez vous, chez les infirmiers et la violence fait-elle désormais partie de votre quotidien ?
00:32 Elles ont sensiblement augmenté de la même manière, nous notons une hausse de 30%.
00:37 L'Ordre des infirmiers a réalisé une consultation inédite durant laquelle 31 000 infirmiers ont répondu
00:46 et montrent que deux tiers d'entre eux ont déjà été victimes de violences.
00:50 Il est vrai que les infirmiers sont particulièrement exposés à des brutalités physiques et verbales.
00:56 66% d'entre eux déclarent avoir été victime de violences dans leur exercice professionnel, ce qui est considérable.
01:03 38% des infirmiers victimes n'ont effectué aucune démarche après des violences subies.
01:12 Ces violences font partie de notre quotidien, ce qui est considérable en termes de vie, de prise en charge pour ces victimes.
01:24 On en parle aujourd'hui parce que vous organisez un colloque spécial autour de la sécurité des soignants, des violences qu'ils subissent.
01:33 C'est à la gendarmerie Lepic à Montpellier, toute la journée, dans un contexte très tendu
01:39 puisqu'on se souvient de cette actualité dramatique il y a un mois avec le 22 mai,
01:44 la mort et le meurtre d'une infirmière de 37 ans tuée à coups de couteau à Reims.
01:50 Absolument, mère de famille.
01:52 Comment vous l'expliquez cette montée de la violence ?
01:55 Est-ce que c'est la qualité de l'accueil, de la prise en charge notamment, qui se dégrade
01:59 et qui entraîne des situations explosives dans les hôpitaux, dans les cliniques, mais également à l'extérieur des établissements ?
02:08 Oui, dans le libéral notamment.
02:10 C'est vrai que c'est dû à des phénomènes structurels liés à la montée globale de la violence dans notre société.
02:17 On peut noter l'agacement dû à la problématique de l'accès aux soins
02:22 et puis d'autres problématiques plus difficiles à appréhender,
02:28 tels que des facteurs organisationnels et les charges de travail aussi excessives
02:34 qui participent de cette montée en violence dans nos services.
02:40 Sur les 31 000 infirmiers et infirmières qui ont été interrogés dans le cadre de la consultation,
02:44 il y en a quasiment la moitié qui tentaient d'expliquer les violences par la prise en charge,
02:49 près d'un tiers l'expliquaient par le temps d'attente trop long,
02:52 souvent dans les services que ce soit d'urgence ou ailleurs.
02:56 On parle de la violence des patients, de leurs proches aussi.
02:59 Doit-on aussi pointer la violence des collègues, entre collègues et de la hiérarchie ?
03:04 On vient de dire que c'était structurel, donc il doit y avoir dans les organisations
03:10 quelque chose qui participe de nourrir cette violence.
03:15 Je crois qu'aujourd'hui les établissements, au-delà de l'affaire de notre consoeur Karen Mezino,
03:21 ont pris conscience que ces organisations doivent permettre la sécurité des infirmiers, des soignants,
03:32 des aides-soignants, des médecins, de toutes les équipes paramédicales
03:35 qui travaillent dans les établissements de santé,
03:37 pour que notre mission première, qui est le soin, soit la priorité.
03:43 Pour lutter contre ces violences, Laura Maestrello,
03:46 plusieurs pistes ont été évoquées dans le rapport aussi rendu il y a 15 jours
03:50 au ministre de la Santé, mieux former les étudiants et les soignants
03:54 déjà en poste à gérer des situations de violence.
03:57 Ça fait partie des réponses éventuelles qui ont été apportées dans ce rapport.
04:02 Est-ce que c'est nécessaire ?
04:04 Le rapport Masseron-Nyon fait état effectivement de 44 mesures.
04:09 Je pense que toutes ces mesures sont intéressantes et pertinentes.
04:15 Dans la formation des étudiants infirmiers, évidemment, de manière transversale,
04:20 ils sont formés dans les soins relationnels à faire face notamment à l'agressivité.
04:27 Mais pour autant, quand on embrasse cette profession,
04:29 ce n'est pas l'idée première qu'on se fait pour réaliser notre métier au quotidien.
04:39 Équiper des libéraux, médecins ou infirmiers aussi d'un appareil d'alerte portatif
04:44 afin qu'ils puissent prévenir les forces de l'ordre en cas de situations difficiles à gérer,
04:49 c'est une bonne idée là aussi ? Ça fait partie des mesures dans le rapport que vous évoquez ?
04:54 Le déploiement des dispositifs d'alerte portative pour les professionnels isolés.
04:58 Donc il sera nécessaire de préciser et de caractériser ce qu'on appelle infirmiers isolés ou professionnels isolés
05:06 puisque les infirmiers libéraux, même en zone urbaine, sont isolés lorsqu'ils sont au domicile des patients.
05:13 Ce qui veut dire qu'il faudra des moyens humains, des moyens matériels
05:17 et évidemment les moyens financiers.
05:20 J'imagine que c'est ce que vous attendez du plan d'action qui doit être dévoilé par le gouvernement au début du mois de juillet.
05:28 Laura Maestrello, la durée de vie professionnelle d'une infirmière,
05:31 vous me l'avez dit en préparant cette interview, est aujourd'hui de 7 ans.
05:34 7 ans seulement. Est-ce que la violence que subissent les soignants est une explication majeure
05:39 à ce qu'on peut appeler une désertion rapide ou précoce de la profession ?
05:43 Je pense que ça y participe évidemment. C'est pour ça que l'Ordre s'engage et se mobilise
05:50 pour sécuriser évidemment les patients dans leur prise en soin
05:55 mais aussi nous devons assurer la sécurité des infirmiers et faire respecter le code de déontologie.
06:03 Il y a sans doute un parallèle à faire entre la situation des soignants et celle des enseignants.
06:07 C'est la raison aussi pour laquelle aujourd'hui au colloque vous invitez une membre de l'académie.
06:11 Une inspectrice, oui.
06:12 Seulement 18% - dernière question, Laure Maîtrello - des infirmiers,
06:15 18% seulement conseillerait à leur enfant de s'engager dans cette voie. Et vous ?
06:21 Je les amènerai à réfléchir par eux-mêmes et à faire leur propre choix.
06:25 Mais aujourd'hui, en l'état actuel des choses, c'est peut-être pas la profession première que je conseillerai.
06:33 C'est pour ça que je m'engage avec le conseil départemental de l'Hérault
06:37 pour que notre profession soit reconnue et qu'elle devienne attrayante pour les générations à venir.
06:45 Vous êtes en effet référente violence à l'ordre des infirmiers dans l'Hérault.
06:48 Avec Damien Lacroix.
06:49 Il y a un protocole qui est mis en place et il faut absolument vous solliciter quand on est victime ou témoin de violence.
06:56 Oui, effectivement.
06:57 Et vous êtes cadre de santé à Montpellier, élu. Merci beaucoup, Laure Maîtrello.

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