Lundi 26 juin 2023, BE SMART reçoit Françoise Gri (administratrice) , Julie de la Sablière (Fondatrice, Little Wing) et Bénédicte Tilloy (Fondatrice, 10h32 et Ask for the Moon)
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00:00 *Sonnerie de fin*
00:02 *Sonnerie de fin*
00:04 Bon en plus j'ai deux vraies expertes du monde du travail, Françoise Gris, bonjour Françoise.
00:09 Bonjour Stéphane.
00:10 Personnalité du monde des affaires, tu sais Françoise, sur ta page Wikipédia c'est comme ça.
00:14 Personnalité française.
00:15 C'est pas moi qui ai dû l'écrire.
00:17 Mais je sais bien que c'est pas toi.
00:18 Personnalité française du monde des affaires, j'ai trouvé ça très élégant.
00:21 Oui parce que c'est ce qui arrive quand on a un certain âge et qu'on a fait beaucoup de choses.
00:25 *Rires*
00:26 Bon voilà, donc administratrice, et maison du monde, présidente du conseil de surveillance de maison du monde.
00:36 Conseil d'administration.
00:37 Conseil d'administration de maison du monde.
00:38 Bénédicte Tillois, bonjour Bénédicte, ancienne DRH de la SNCF, aujourd'hui qui fait de la start-up large language model.
00:49 Enfin t'en faisais comme Monsieur Jourdain faisait de la prose.
00:53 Ne sois pas désagréable.
00:56 Je ne suis pas désagréable, tu vas nous raconter, mais au contraire.
00:58 Donc ça s'appelle "As for the moon".
01:00 Tu sais, enfin tu le sais, tu le sais mieux que moi, c'est toujours ce qui est très intéressant avec l'innovation.
01:06 C'est qu'en fait elle est partout, elle percole partout, elle gisque comme on dit les sources dans le sud.
01:12 Et puis à un moment il y a un truc qui fait émerger tout ça, le geyser.
01:17 Et on se dit en fait, moi j'en faisais, mais moi j'en faisais, mais moi j'en faisais.
01:20 Julie de la Sablière, salut Julie.
01:23 La patronne fondatrice de Little Wing.
01:27 Oui, non, je voulais, j'y pensais en pensant le cœur à l'ouvrage, donc le sens, du sens à l'ouvrage.
01:34 Et donc les DRH de grands groupes qui signent 10 engagements pour cultiver le sens au travail.
01:39 Il se trouve que, je vous raconte ça vite fait, mais vous allez voir c'est intéressant.
01:42 J'ai été voir mon banquier, comme on va voir, et puis on a tous le turnover quand même très très impressionnant des agences bancaires.
01:49 Et donc là je me retrouve avec deux jeunes gens, qui, enfin l'un était moins jeune que l'autre,
01:53 donc l'un se souvenait BFM Business, oui je vous écoutais et tout.
01:56 Et donc les gars ont envie de discuter, ils discutent, ils discutent, ils discutent.
01:59 Et puis je leur dis, mais vous savez le sujet en ce moment de toute façon c'est vous.
02:02 C'est le seul vrai capital de l'entreprise, c'est vous jeunes gens, c'est vous qui allez construire notre avenir.
02:09 C'est vous qui devez avoir, je ne dis pas du cœur à l'ouvrage, mais vraiment trouver un sens à ce que vous faites et tout.
02:14 Les gars se regardent et disent, ah ce serait bien que notre manager nous parle comme ça.
02:17 Et je lui dis, je vais le revoir jeudi le gars, et je lui dis écoute, tu vas aller voir ton manager, je ne sais plus comment il s'appelle,
02:23 tu vas lui poser la question, quel est le truc le plus important, quel est l'actif le plus important de la banque ?
02:28 S'il ne répond pas, c'est toi, alors tu peux partir.
02:32 Il t'a rappelé ou pas ?
02:33 J'ai raison ou j'ai raison ? Je ne sais pas, je vais le revoir là.
02:36 Tu as raison bien sûr.
02:37 En fait j'avais oublié un peu l'histoire et c'est vrai.
02:41 Absolument, mais derrière les mots c'est tellement compliqué de le faire vivre, de le faire ressentir, de le faire dire.
02:49 C'est ça l'art du management parce que je ne crois pas que ce soit une science.
02:55 D'accord mais au moins les trentenaires qui nous écoutent là, allez voir leur manager, leur poser cette question là,
03:02 quel est l'actif le plus important de la boîte aujourd'hui ? Il faut qu'il réponde, c'est toi.
03:06 Ce qui est marrant c'est qu'en fait on voit à quel point ça a bougé.
03:11 C'est à dire qu'il y a peut-être 20 ans, l'actif c'était la trésor, c'était l'argent.
03:15 Après ça a beaucoup bougé sur l'actif client.
03:18 On a dit ce qui est important, ce qui structure la boîte, son actif c'est les clients.
03:22 Et ça a muté et maintenant c'est les salariés.
03:25 Et je trouve que c'est intéressant comme histoire de voir comment progressivement,
03:28 mais ça a été la même chose d'ailleurs pour tous les outils.
03:31 On a mis des outils au service des capitaux, on a mis des outils au service des clients
03:34 et maintenant on met des outils au service de la marque employer et des salariés.
03:38 Et tout ce qu'on a pu inventer pour valoriser les finances, les clients,
03:43 aujourd'hui c'est mis à la disposition des salariés.
03:45 Ce qui est la preuve en fait que le monde du travail a changé.
03:48 Alors après est-ce que les salariés le perçoivent ? Je ne sais pas.
03:54 ERP, CRM et maintenant SIRH, mais en même temps on se rend bien compte qu'il n'y a pas le sales force du SIRH.
04:01 Moi je pense que c'est quand même balancier.
04:03 Parce que la réalité c'est qu'on a besoin d'un équilibre.
04:06 Pour que l'entreprise se développe, on a besoin quand même d'un équilibre sur ces trois.
04:10 Avoir que des employés et pas de clients c'est quand même très ambitieux.
04:14 Ça ne dure pas longtemps.
04:16 Ça ne dure pas non plus, c'est un moyen d'avoir l'autre.
04:19 Mais il y a quand même des modes.
04:21 Il y a des modes dans l'organisation et peut-être le fait d'avoir plutôt ma carrière derrière moi que devant.
04:28 J'ai quand même cette impression que ça a beaucoup bougé, que ça a muté.
04:33 Les années 80, c'était bon.
04:37 J'achète ton truc.
04:38 Et par le logiciel c'est intéressant.
04:40 C'est vrai qu'il y a eu la grande période des ERP.
04:42 Alors ça reste là évidemment.
04:44 Ensuite c'est vrai que ça a été beaucoup sales force, l'émergence de sales force, le CRM.
04:48 Et en parallèle.
04:50 Julie ?
04:52 En particulier dans les banques je trouve que c'est très juste.
04:54 Il y a eu cette phase de financiarisation où les banques faisaient de l'argent avec l'argent.
04:59 Et donc on oubliait qu'elles avaient des clients.
05:01 Elles se sont rappelées post 2008.
05:03 Mais c'est vrai que ce mouvement de balancier est assez évident.
05:06 Mais il va au gré des difficultés aussi.
05:08 Aujourd'hui il n'y a pas une seule organisation, une seule entreprise qui ne dit pas avoir des difficultés.
05:13 De recrutement.
05:15 De recrutement, dans son corps social, dans les liens à l'intérieur de l'entreprise.
05:19 Et donc du coup la priorité de comment faire que tous ces talents accumulés arrivent à faire un vrai asset pour l'entreprise.
05:29 C'est devenu le nouveau focus.
05:31 Est-ce que tu dirais François, donc 10 DRH de grands groupes.
05:33 Vous avez sans doute vu ça, c'était à la fin de la semaine dernière.
05:36 Partout dans les journaux.
05:38 10 DRH de grands groupes qui signent 10 engagements pour cultiver le sens au travail.
05:41 Très franchement beaucoup de ces engagements relèvent du pur bon sens.
05:44 Et pourtant je regardais tout ça et je me disais en fait.
05:48 Peut-être même comparable au carbone en termes de modification de process.
05:53 Oui parce que je pense qu'alors, je n'ai pas vu le détail complet des 10 engagements.
06:00 Il n'y a rien qui soit révolutionnaire.
06:02 Mais j'imagine.
06:04 Et ce qui me frappe moi c'est la difficulté qu'ont les entreprises aujourd'hui sur le sujet des liens.
06:11 Alors on parle du lien entre le collaborateur et le manager.
06:14 Mais le sujet du lien avec les autres, avec ceux avec qui on travaille au quotidien.
06:18 C'est-à-dire avec le collaborateur d'à côté.
06:20 Tout ça qui relève de bon sens, d'évidence, n'est plus un sujet de bon sens et d'évidence.
06:29 Et on a perdu cette envie de fabriquer du lien.
06:33 Et je le relis à quelques...
06:35 Il y a une enquête qui a été faite par Jérôme Fourquet il n'y a pas très longtemps.
06:39 Sur justement l'intérêt au travail etc.
06:42 Et qui est très frappante parce que les gens qui ont le moins envie de leur travail
06:47 sont les gens qui sont en plus en relation avec les autres.
06:50 C'est-à-dire avec les clients.
06:52 Et ça c'est terrible.
06:55 Or on pourrait imaginer que le lien, la connexion, ça donne du sens au métier du boursier bancaire par exemple.
07:03 Non, parce que cette relation est devenue difficile.
07:06 Et je pense qu'à l'intérieur de l'entreprise, aidée par le télétravail, les distances etc.
07:12 On a le même sujet.
07:13 C'est-à-dire le lien à l'autre est devenu un sujet très compliqué.
07:17 Et c'est pourtant ce qui donne du sens.
07:20 Dans la relation hiérarchique, dans la relation de collaboration etc.
07:24 Et ça c'est grave.
07:26 Mais je pense que tout est devenu transactionnel dans l'organisation.
07:31 Donc le relationnel passe après.
07:33 Et le transactionnel génère des micro-frottements qui sont difficiles à résoudre.
07:38 Et quand il faut résoudre ces micro-frottements, à ce moment-là, le lien devient un lien de négociation.
07:44 Il n'est pas naturel en fait.
07:47 Il devient un prétexte potentiel à agression verbale.
07:51 Je trouve que ça monte progressivement en puissance.
07:54 Et le fait qu'on ne se soit pas vu pendant toute cette période de confinement
07:58 qui a quand même accéléré le transactionnel,
08:00 ça ne contribue pas à ces liens.
08:04 Et puis il y a eu toutes les modes de management qui ont été empilés les unes derrière les autres.
08:08 Ce qui fait qu'on a perdu le bon sens.
08:10 Parfois ça me fait penser au peintre Miro qui à la fin de sa vie disait
08:13 "Moi j'aimerais bien redessiner comme quand j'étais enfant."
08:15 "Moi j'aimerais bien remanager comme quand j'ai commencé."
08:18 - Qu'est-ce qui t'en empêche ? - Je fais, je fais d'ailleurs.
08:21 - Ah ben voilà, oui, rien ne t'en empêche. - Je fais, bien sûr que oui.
08:23 Mais oublier le fatrat de trucs et revenir à des choses de bon sens en fait.
08:27 Parce que quand on parle de sens, on a aussi la volonté qu'ont les salariés de bien faire leur travail.
08:34 Et bien faire son travail, ça a été parfois empêché par plein de trucs en fait.
08:39 On parlait des ERP, quand t'es traversé comme...
08:42 Quand t'es dans une chaîne, c'est pas la chaîne à l'usine, mais c'est le même genre de chaîne en fait.
08:48 Avant toi et après toi, il y a des gens qui font des trucs
08:51 et dont tu ne perçois pas la valeur ajoutée par rapport à la tienne.
08:55 Tu ne sais pas à quoi tu sers dans une organisation, tu ne sais pas le raconter.
08:58 - Mais tu sais, c'est là où... Enfin c'est vieux comme la crise chez Orange par exemple.
09:04 C'est quelle année ? 2008, 2009, quelque chose comme ça.
09:09 C'est exactement ça qu'il racontait finalement, le travail inutile.
09:16 - Oui mais toi pour régler le problème... - Oui, oui, mais au fond c'est "mais à quoi je sers dans cette histoire ?"
09:24 Et malheureusement, on a compris qu'il fallait s'occuper de la santé mentale,
09:29 mais en même temps on met des applis pour gérer ça.
09:31 C'est-à-dire qu'en fait, la réponse qui est apportée par les organisations,
09:36 elle est toujours processée, alors que ce qui est attendu c'est quelque chose de simple et de relationnel.
09:43 Et ça je trouve ça très douloureux en fait, vraiment.
09:46 - Julie ?
09:47 - Moi je sature un peu, j'avoue, de tous les conseils de management, du leadership du CAIR
09:53 en fait tous les jours, on regarde, il y a des conseils tout le temps, il faudrait tout changer, etc.
09:59 Et c'est vrai que du coup j'ai regardé, je ne sais pas si vous l'aviez vu,
10:03 mais l'étude de l'Institut Montaigne qui est sortie en février, qu'a fait Bertrand Martineau.
10:06 - Mais il sera là demain, ce cher Bertrand, on va y revenir.
10:09 - Avant, après Covid, en fait il n'y a pas eu tant de ruptures que ça dans les facteurs de la satisfaction au travail.
10:14 - Absolument.
10:15 - Rémunération, perspective d'évolution et reconnaissance, respect, reconnaissance du travail, de mon travail.
10:22 - C'est dit par Dominique Méda aussi d'ailleurs.
10:24 - Avec le manager, et ça c'est assez clair, la seule rupture forte c'est le télétravail.
10:28 Effectivement on est passé de 7% des salariés à 40% qu'ils font de manière occasionnelle.
10:33 C'est une aspiration très forte, du coup il y a quand même 60% de gens qui n'ont pas accès au télétravail dans ce pays
10:38 et donc ça crée aussi un peu une inéquité entre les jobs.
10:41 Et je pense que ce mouvement du télétravail, effectivement c'est une aspiration qui en même temps n'a pas fait que du bien,
10:46 sur les relations, sur la situation psychologique, émotionnelle, que ce soit des jeunes en formation qui se retrouvent à distance sans avoir les conditions nécessaires.
10:55 - Je ne crois pas qu'on est en train de...
10:56 - Mais je pense que ça va se roder.
10:57 - Oui c'est même pas mal rodé quand même là, j'ai l'impression.
11:00 - Ça va se roder et sans doute se normaliser, mais ça crée quand même un...
11:04 Entre des jobs télétravaillables et des trucs...
11:06 - Voilà, la distorsion elle est là.
11:08 - Et moi je pense que les trois éléments que je...
11:10 En tout cas moi je perçois assez fort, c'est...
11:12 La première c'est tant choisi, tant subi.
11:14 C'est-à-dire que quand on arrive à redonner des marges de manœuvre aux salariés
11:18 et à un sentiment qu'il peut maîtriser,
11:20 avoir cette flexibilité ou cette autonomie qui fait qu'il a le sentiment de maîtriser son temps,
11:24 ça je pense que c'est un facteur très important.
11:26 La relation au manager qui reste hyper importante,
11:28 et c'est vrai qu'on voit bien la crise du middle management qui est entre toutes les injonctions paradoxales
11:33 et le fait qu'en fait ils font plus envie à personne, au middle manager, c'est un peu un des problèmes.
11:38 - Et le groupe Bézieux commence à en parler maintenant.
11:40 Que ne l'a-t-il fait plus tôt ?
11:42 - Oui, parce que c'est... Alors là pour le coup c'est un problème identifié depuis très très longtemps.
11:47 - Mais qui se cristallise avec les crises de recrutement, le téléphone...
11:52 - Et pour moi le troisième c'est le sujet de la santé mentale,
11:54 parce qu'effectivement Covid l'a fait exploser, mais pareil il était là depuis longtemps,
11:59 sous-évalué, maltraité dans notre pays,
12:02 et que là il s'invite au bureau dans toutes les sphères
12:06 avec 44% d'arrêt maladie, il y a une part énorme chez les jeunes et les cadres,
12:10 et très souvent sur des motifs psychologiques,
12:12 et on l'a bien vu aussi avec la réforme des retraites,
12:14 c'était le sentiment qu'à un moment il faut que je fasse attention dans ma relation au travail,
12:18 à ne pas me laisser happer, ou en tout cas que ça pourrait faire sortir des fragilités
12:22 qui sont maintenant beaucoup plus prises en compte,
12:24 parce qu'on en parle aussi beaucoup plus dans la société,
12:26 et donc à ce côté un salarié qui est un peu fatigué,
12:29 ou on voit d'épuisement, il relie tout de suite ça à un symptôme qui pourrait être plus grave,
12:33 et sans doute pour le mieux pour beaucoup de gens,
12:35 et je pense que ça c'est aussi un facteur très bon.
12:37 Tu vois ça fait depuis 15 ans que je discute très régulièrement avec quelqu'un que vous devez connaître,
12:41 Eric Albert, fondateur de Youcide, vraiment sur le management,
12:46 et Eric est psychiatre, et quand j'ai commencé à faire des interviews avec lui,
12:50 il était hors de question que je dise qu'il était psychiatre,
12:52 et un jour il m'a fait la réflexion, pourquoi tu ne dis pas que je suis psychiatre ?
12:55 Je suis interdit, et lui-même fait la réponse,
12:57 il me dit "ah parce que tu crois qu'on n'est pas chez les fous"
12:59 Et donc je dis oui c'est un peu ça,
13:02 et là maintenant, je n'ai plus aucun problème quand je l'interview à dire qu'il est psychiatre.
13:06 Donc effectivement on a eu une évolution,
13:09 peut-être hommage aussi à Jean-Charles Samuelian, le fondateur d'Alan,
13:11 la mutuelle qui a mis la santé mentale au cœur de toute sa politique de remboursement,
13:19 parce que c'était des éléments par exemple qui n'étaient pas pris en charge
13:22 par les mutuelles et par les mutuelles d'entreprise.
13:24 Donc oui ça c'est intéressant.
13:26 Alors juste, point de vue pour parler aussi syndicats etc,
13:34 point de vue assez récent de l'économiste Thomas Breda,
13:38 je crois que c'est l'école d'économie de Paris, si je ne m'abuse,
13:42 la démocratie ne s'arrête pas aux portes de l'entreprise.
13:44 Il a fait le point autour de la réforme de 2008,
13:47 qui a donc mis fin au monopole de représentation des cinq syndicats,
13:51 en ouvrant les élections à tous,
13:53 avec comme critère de représenter au moins 10% des suffrages pour pouvoir négocier.
13:57 Les résultats sont une amélioration de la perception des employeurs à l'égard des syndicats,
14:03 confiance accrue aussi du côté des salariés,
14:06 avec une augmentation de la syndicalisation pour les entreprises qui sont passées au nouveau système,
14:11 malgré, c'est là que c'est super intéressant,
14:14 une intensification des conflits sociaux de faible intensité,
14:18 donc débrayage de quelques heures, des choses comme ça,
14:21 dans les entreprises qui sont passées au nouveau système.
14:23 Donc, pas d'affaiblissement des revendications ou de création de syndicats maison,
14:27 et néanmoins, des salariés qui se retrouvent mieux représentés,
14:30 et des patrons qui trouvent que les syndicats font mieux leur boulot.
14:34 - Toi qui a, autour de cette table, géré plus de syndicats que personne...
14:40 - En fait, on est sorti de la rhétorique, et on est entré dans le monde réel.
14:44 Pour moi, c'est ça l'expérience.
14:46 Puisque les 5 syndicats qui étaient irréfragables,
14:51 ils avaient une pratique du dialogue social qui était devenue, je ne sais pas comment la qualifier,
14:56 enfin politique, et plus directement proche des attentes des salariés.
15:02 Les cahiers revendicatifs étaient hors sol,
15:04 et puis on présidait des réunions qui étaient, en fait, moi j'ai déjà dit,
15:08 en fait les chaises auraient pu discuter ensemble, on n'avait plus besoin d'être là en fait.
15:12 - Tu ne me l'avais jamais dit !
15:14 - La logique, enfin il y avait une rhétorique qui était établie,
15:18 c'était un dialogue de théâtre,
15:21 et connu de tout le monde d'ailleurs.
15:24 On faisait la réunion, puis après on allait boire un café,
15:26 et d'ailleurs on réglait les problèmes pendant le café ou pendant la clope,
15:30 malheureusement il n'y en avait plus après.
15:32 Toujours est-il qu'à partir du moment où on commence à donner la possibilité à des gens
15:38 qui sont capables de représenter pour de vrais les salariés,
15:42 et bien ils s'occupent des gens, tant mieux, moi je trouve que c'est une bonne nouvelle.
15:46 Et le fait qu'il y ait des conflits de faible intensité, je le vois aussi comme une bonne nouvelle,
15:50 parce que ça permet, enfin il y a toujours de la violence, quelque part,
15:54 enfin il y a toujours, il n'y a aucune raison qu'il y ait un alignement parfait
15:57 entre ce que veulent les salariés et ce que veulent les employeurs.
16:00 Donc s'il n'y a pas un moment, un lieu, des opportunités pour les régler, on les retrouve ailleurs.
16:04 Et d'ailleurs, regarde, la crise des gilets jaunes, elle aurait très bien pu arriver dans l'entreprise aussi.
16:09 Si elle n'arrive pas, c'est sans doute à cause de ça.
16:12 Il y a besoin, on n'est pas, c'est pas parce que...
16:15 Je suis tout à fait d'accord avec toi.
16:17 Oui bien sûr, sinon les conflits s'accumulent, et tout d'un coup ils ressortent
16:21 avec l'accumulation de ce qui a été mis sous le tapis pendant un certain temps.
16:26 Je crois qu'on parle de collection de timbres dans ces cas-là.
16:29 Voilà, j'ai une image de mon adresse web.
16:31 Voilà, collection de timbres, absolument.
16:33 Tout d'un coup, le carnet est complet, et là du coup on se retrouve face à une réaction
16:37 qui est complètement démesurée par rapport au fait, mais parce qu'en fait,
16:40 tous ces petits conflits, qui ne sont pas sortis à un moment donné,
16:43 ressortent en même temps.
16:45 Mais ce qui est intéressant, c'est que les chefs d'entreprise admettent que,
16:49 comme tu le disais, les intérêts des uns et des autres ne sont pas alignés.
16:55 Non, chacun veut essayer de tirer de l'autre le maximum.
17:00 Enfin, c'est tout à fait normal, et ça peut se faire dans une entente...
17:04 Pardon, c'est pour ça que l'alignement stratégique dont on parle tant,
17:11 il est possible, mais il est parfois inaccessible.
17:15 Il faut accepter qu'il le soit.
17:17 Et donc il y a des salariés qui peuvent être en désaccord stratégique
17:21 et continuer à bien faire leur travail, ce qui n'est pas toujours bien compris.
17:25 Du coup, comment on relie ça au fait que, on entend là un dialogue social
17:30 plus vivace et plus intéressant, et moins dans le jeu de rôle, etc.
17:35 Dans les entreprises qui ont organisé ces élections, parce que toutes ne l'ont pas fait.
17:39 Je n'ai pas noté la proportion de celles qui l'avaient fait.
17:42 Et le fait d'avoir autant de mouvements aujourd'hui qui ne sont plus contrôlés par les syndicats,
17:45 et qui peuvent faire des mouvements spontanés, et donc moins maîtrisables.
17:48 Il n'y en a pas tant que ça.
17:50 Non, c'est pas tant.
17:51 Tu te souviens des contrôleurs de la SNCF ?
17:53 Oui, TF, TFI aussi.
17:54 Benedict nous avait fait le film sur les contrôleurs de la SNCF.
17:57 Les contrôleurs de la SNCF ?
17:58 Ils sont très particuliers.
17:59 Ils ont dirigé pendant 6 ans.
18:00 Donc, c'est des gens qui se sentent nomades au milieu d'un monde sédentaire.
18:06 Donc déjà, ils ont une identité qui est particulière.
18:08 Et cette identité, il y a une espèce de pression permanente pour la nier,
18:13 et les faire être comme les autres.
18:15 Donc, chaque fois qu'on cherche à les rendre comme les autres, ça fait des bulles.
18:20 Et puis, le Covid avait amené un truc qui était la différence,
18:25 comme je parlais tout à l'heure, entre les gens qui étaient obligés en première ligne de faire le travail
18:29 et ceux qui étaient en télétravail.
18:31 Et je pense que le fait de travailler dans les trains tout seul,
18:34 d'être au milieu des voyageurs pendant le Covid,
18:36 et de tenir la boutique dans une organisation qui était plutôt centrée sur chacun chez soi,
18:43 ça a augmenté la pression qu'ils pouvaient ressentir,
18:48 plus le fait que cette identité était potentiellement niée,
18:51 les demi-bouts à bout,
18:53 ça colle là-dessus, je ne sais plus ce que c'était,
18:55 et ça finit par faire un embrasement.
18:57 Et ils n'ont pas sollicité les organisations syndicales,
19:00 parce qu'ils les ont sollicitées uniquement pour avoir le droit de poser un préavis,
19:05 mais sinon, les organisations syndicales, à l'époque,
19:08 n'étaient pas plus intéressées que ça par les contrôleurs,
19:11 parce que c'est une population, en fait, qu'ils ne comprennent pas très bien.
19:14 Et tu m'avais dit, Bénédicte, ce qui va aller tout à fait dans le sens de ce qu'on disait au début,
19:18 ils sont en contact du client sans avoir les réponses.
19:21 Ils ont 20%. Ils ont à peu près 80%.
19:24 A l'époque, je ne sais pas si c'est toujours vrai,
19:26 mais à l'époque, c'était 80% des questions, 20% des réponses.
19:30 Et donc le lien avec le reste de l'entreprise pour apporter les réponses,
19:34 alors on a beaucoup cherché à les connecter, à mettre à leur disposition mille choses,
19:39 mais il n'en demeure pas moins que quelqu'un qui est, entre guillemets,
19:43 prisonnier dans un train pendant un moment de panne ou de difficulté,
19:49 il a immédiatement de l'agressivité manifestée envers le contrôleur.
19:52 Et le contrôleur, il est là pour réguler la vie à bord.
19:55 Et quand il n'a pas les éléments, en fait, il encaisse.
19:58 Et c'est les timbres. Et là, pour le coup, la collection de timbres chez les contrôleurs,
20:01 elle se fabrique à grande vitesse.
20:04 Et clairement, l'agressivité que l'on constate chaque fois qu'on voyage,
20:10 l'agressivité immédiate des passagers,
20:14 on a quand même un vrai sujet sociétal sur notre façon d'interagir avec des gens
20:20 dont on comprend bien qu'ils sont dans le train avec soi-même,
20:23 donc ils ne sont pas responsables de la panne machin chose, etc.
20:28 Et néanmoins, ils encaissent ça aussi.
20:31 Parce que sinon, je n'ai pas eu l'impression qu'il y ait eu tellement de conflits qui échappent au syndicat.
20:36 En plus, l'intersyndical s'est reformé, alors que Bertrand nous le dira demain aussi,
20:42 ils appellent ça l'interpro, tu pensais qu'il n'y avait vraiment plus rien à faire.
20:47 Et bon, voilà, ils se sont reformés, on verra combien de temps ça va durer.
20:50 Tiens, puisqu'on en parle,
20:53 donc on va voir Marie-Lise Léon.
20:58 Je vais être franche avec vous, mesdames, je ne sais pas si Sybille peut nous montrer la photo.
21:05 Il y a quelque chose avec cette photo, non ?
21:10 C'est quand même un peu glamour, quoi.
21:12 Donc la nouvelle dirigeante, il y a deux choses qui m'ont intéressé.
21:16 Quand je le regarde sur le prisme féminin, évidemment, c'est d'abord quand même un côté un peu glamour.
21:20 Et puis, mais ça, à la limite, une fidèle à la tête de la CFDT,
21:25 enfin l'idée qu'elle soit dans la continuité de Laurent Berger.
21:30 Mais ça, je pense, homme comme femme, c'est un peu un truc qu'on voit assez régulièrement.
21:34 Donc Marie-Lise Léon, Sophie Binet, donc à la CGT.
21:38 Ça change quelque chose ? Ça ne change rien ?
21:40 Pour moi, ça change.
21:41 Dominique Carlac, peut-être ?
21:43 Pour moi, ça change tout.
21:44 Alors, vas-y.
21:45 Pourquoi ça change tout ? Parce que quand on introduit de la rupture,
21:48 quelle qu'elle soit, en fait, on casse les codes.
21:51 Et je pense que c'est des organisations qui n'ont pas été refondues,
21:55 refondées dans leur fonctionnement depuis très, très longtemps.
21:59 Et puisqu'on parlait des contrôleurs, le fait, je me rappelle très bien que j'avais été mise là
22:06 parce que j'étais une femme et que l'idée, c'était de casser les codes extrêmement masculins.
22:11 Le système, en fait, se reproduisait tout seul parce qu'il y avait des habitudes.
22:16 Et à partir du moment où on met des gens qui sont décalés,
22:19 le système ne peut plus se reproduire tout seul.
22:22 Il est obligé de se réinventer.
22:23 Mais le fait qu'elle soit femme suffit à les décaler ?
22:25 Je pense que oui. Je pense que oui.
22:27 Parce que ce n'est pas habituel du tout.
22:29 En plus, les organisations syndicales historiques,
22:32 elles sont quand même issues du monde industriel.
22:35 Sophie Binet, elle est conseillère d'orientation dans l'éducation nationale.
22:40 Elle a donc un logiciel personnel différent.
22:44 Elle est féministe.
22:45 Elle est écolo.
22:47 Et donc, ce n'est pas naturellement des...
22:52 Ce n'est pas le profil type du secrétaire général de la CGT.
22:55 Non, ce n'est pas le profil type.
22:56 On est d'accord. Absolument.
22:57 Et quant à la CFDT, qui est sans doute plus...
23:01 qui a un logiciel de plus grande ouverture...
23:03 Qui a été dirigé historiquement par Nicole Notta.
23:05 Qui a eu Nicole Notta.
23:06 La question est moindre.
23:08 Mais Sophie Binet plus Marie-Lise Léon,
23:12 ça fait un paysage syndical qui est complètement renouvelé.
23:14 Et je trouve que c'est vraiment intéressant.
23:16 Alors après, je ne sais pas si au MEDEF, ça va aussi...
23:19 Et là encore, le MEDEF a aussi été dirigé par une femme,
23:23 Laurence Parizeau, qui a été une illustre patronne du MEDEF.
23:26 Donc, ça ne serait pas la première fois.
23:28 Mais là où ce serait la première fois, c'est dans la table ronde.
23:31 J'imaginais des réunions à Matignon avec Elisabeth Borne.
23:38 Ça serait amusant.
23:41 Enfin, quand je dis amusant, je ne devrais pas dire amusant,
23:44 parce que je me tire une balle dans le pied en disant ça.
23:46 En tout cas, ce serait une réinvention.
23:53 Françoise, t'es d'accord ?
23:54 Oui et non.
23:56 C'est vrai que quand les gens changent,
23:59 quand la configuration change,
24:01 ça peut amener des dynamiques différentes de groupe.
24:03 C'est vrai dans les équipes de management.
24:05 On sait, des équipes où il y a plus de femmes,
24:07 ça change la dynamique du groupe.
24:09 Après, je dois dire que je me méfie un peu des discours genrés sur ce sujet-là.
24:17 Je pense que ce qu'elles apportent, c'est quand même un regard
24:20 et une histoire personnelle différentes sur les métiers.
24:23 Elles sont issues d'un monde très particulier de l'éducation nationale.
24:31 A voir.
24:33 Elle est diplômée de philosophie surtout.
24:36 On l'a dit, conseillère de l'orientation,
24:38 elle n'a pas été très longtemps.
24:40 Elle est permanente de la CGT depuis un bon moment.
24:42 Elle est diplômée de philosophie.
24:44 Ces métiers-là sont quand même très particuliers.
24:46 Oui, c'est un parcours très loin de l'industrie.
24:50 Après, c'est une vision plus service qui s'impose,
24:54 qui correspond à la réalité du marché du travail.
24:56 Je pense que ça, ça peut être très intéressant.
24:58 Parce que c'est quand même plus en phase avec la réalité du marché du travail en France.
25:04 Et tu votes, toi, Françoise, pour le BDF ?
25:07 Non, je n'ai aucune...
25:09 Non, comme tout ça, des fois je me penche dessus, mais j'ai un peu de mal.
25:13 Si, je pense qu'au-delà du discours et du part par là,
25:17 je me dis quand même que les deux sont dans leur genre très fortes,
25:21 de ce que j'entends.
25:23 On n'a pas encore vu Marie-Lise, mais Sophie Binet, je dois avouer que je suis bluffé.
25:27 On peut dire qu'elle va imprimer fort, c'est sûr.
25:34 Donc, on a des fortes personnalités.
25:37 Et je traquais, je regardais en préparant les premières interviews
25:42 où on sent que les journalistes font très attention de ne pas poser des questions, etc.
25:46 Tu ne sais pas comment prendre le sujet.
25:48 J'ai jusqu'à Quotidien qui a été le seul à dire à Marie-Lise Léon
25:52 "Vous êtes bonne en bras de fer ?"
25:54 L'air de dire "Tu ne peux pas être bonne, tu es une femme."
25:57 Et elle dit "Mais le sujet, ce n'est pas le bras de fer, c'est le dialogue."
26:00 Donc, moi, ce n'est pas mon sujet et on est dans la continuité, etc.
26:03 Elle s'en est pas mal tirée, mais c'est vrai que je trouve que c'est assez intéressant.
26:06 Et c'est là où je suis d'accord.
26:08 Si ça ne décale pas la posture des syndicats, et ça la décalera forcément,
26:12 parce qu'effectivement, elles ne viennent pas du même monde,
26:14 elles vont changer quand même la posture des observateurs de manière assez forte.
26:17 Et ça, c'est plutôt positif.
26:18 Et tu penses que le MEDEF enverrait un signe fort en élisant...
26:22 Ça paraît mal barré, a priori,
26:24 mais enverrait un signe fort en élisant aussi Dominique Carlac ?
26:28 Je trouve que cette élection MEDEF, vraiment tout le monde...
26:31 Pour moi, elle passe assez inaperçue, en fait.
26:34 Je trouve que le MEDEF a du boulot pour revenir dans le débat, apporter quelque chose.
26:39 Ah, tu trouves ?
26:40 Donc, le sujet sera moins "femme-homme" que...
26:42 Quand il y aura un élu, je pense qu'on va le voir à peu près autant
26:46 qu'on a vu Marie-Lise Léon et Sophie Binet, non ?
26:50 Je ne sais pas.
26:51 Le discours et les messages, aujourd'hui, du côté des syndicats,
26:56 il est très lourd, très fort, pour toutes les raisons qu'on a évoquées au début de cette discussion.
27:00 Donc, à côté de ça ou en face de ça, c'est vrai que le MEDEF a des sujets
27:06 qui devraient être tout aussi forts, mais qu'ils ont du mal à articuler.
27:10 Donc, pour le moment, il y a un petit sujet de message.
27:13 Je trouve que le sujet de Patrick Martin, qui est de dire qu'il faut retrouver un consensus sur la croissance...
27:22 Je sais, par exemple, Julie, un sujet comme ça, c'est un vrai sujet de patron, tu vois ?
27:27 C'est un sujet sur lequel tu seras sans doute en désaccord, et tout.
27:30 Et c'est un vrai sujet de patron, là-dessus, je pense.
27:33 Mais le sujet, ce n'est pas de savoir quels sont les...
27:36 Enfin, il y a matière.
27:37 La question, c'est comment le MEDEF les exprime et est représentatif de la problématique qu'il porte.
27:45 Aujourd'hui, il y a plein d'endroits où on discute du sujet de la croissance.
27:50 Le MEDEF n'est pas un point... Enfin, moi, de ce que je vois, je trouve que le MEDEF est assez peu un point de référence
27:56 dans le débat public, de manière générale.
27:58 C'est-à-dire qu'on ne sait plus d'où il parle et ce qu'il représente, vraiment.
28:01 Il y a eu un gros brouillage, je trouve, avec tout le débat sur les retraites.
28:05 C'est-à-dire qu'en fait, les syndicats ont fait face au gouvernement.
28:08 Et c'est comme si le MEDEF était à côté.
28:10 C'était relativement peu exprimé.
28:12 Donc, en fait, il n'a pas apporté de voix très singulière sur la question.
28:16 Il n'avait peut-être pas à le faire.
28:18 Mais il n'avait peut-être pas à le faire.
28:19 Parce qu'au fond, voilà, ce n'était pas son intérêt.
28:22 Et au fond, même s'il ne le dira jamais, il jugeait la réforme inutile.
28:26 Tout ça pour ça, en fait, je pense qu'ils étaient...
28:29 L'assurance chômage, c'était leur vraie priorité.
28:32 Mais en fait...
28:35 En revanche, un débat sur la croissance, c'est absolument bienvenu.
28:39 Parce qu'on voit bien que c'est le nouveau clivage, la question de la croissance.
28:42 Puisqu'on parlait des organisations syndicales.
28:45 Aujourd'hui, elles ne se sont pas du tout emparées des questions d'écologie.
28:49 Pas du tout.
28:50 D'ailleurs, elles ont laissé la voie libre à des jeunes...
28:53 Plutôt des jeunes ingénieurs ou des jeunes diplômés dans les organisations
28:59 qui ont des postures assez radicales, qui sont dans leur couloir de nage
29:02 à côté de celles des organisations syndicales.
29:04 Ces gens-là ne se côtoient pas, ne s'ajustent pas, ne se réunissent pas.
29:09 Et le patron, à côté de ça, il a finalement une stéréo qui lui est en face de lui.
29:16 Et la question de la croissance n'est pas traitée en tant que telle.
29:19 Et en tant que citoyenne, moi, je trouverais évidemment très intéressant
29:23 que le Medef porte le débat de la croissance.
29:26 Parce qu'il faut qu'on l'ait.
29:28 Aujourd'hui, on est quand même dans une espèce de "no man's land"
29:32 dont on ne sait pas très bien comment on va sortir.
29:35 Il y a beaucoup de porte-parole de la décroissance
29:39 qui aujourd'hui tiennent des discours qui sont tendus.
29:44 On en parlera jeudi.
29:46 Jeudi, le patron de Nexen sera avec nous.
29:48 Il écrit un bouquin intéressant.
29:52 Par certains côtés, je lui dirais d'ailleurs exaspérant, mais intéressant.
29:56 Il dit qu'il a mis en place un modèle où on est plus profitable, mais on produit moins.
30:01 Et c'est une volonté de moins produire, d'avoir moins de clients.
30:07 De prioriser la bonne croissance.
30:09 Toute l'entreprise est organisée comme ça.
30:11 Enfin, il explique ça.
30:13 Et comment est-ce que je peux réconcilier finalement cette idée de planète finie.
30:18 Alors, dans le cuivre, elle est particulièrement finie à très court terme.
30:22 Et néanmoins, le profit, parce que ça reste le cœur de la mécanique de l'économie de marché.
30:28 Il y en a de façon besoin, parce que si on veut avoir de la protection sociale, il faut bien faire ça de quelque part.
30:33 Je termine avec les sujets genrés avant la pause.
30:36 Non, c'est juste pour le dire quand même.
30:38 Parce que donc, inégalité de genre qui perdure sur le marché du travail, nous dit l'OCDE.
30:43 En 2021, 64% des femmes en âge de travail étaient sur le marché du travail.
30:48 Contre 55% en 2000.
30:52 Donc ça s'arrange, mais c'est encore loin des hommes.
30:54 75% des hommes en âge de travailler étaient sur le marché du travail.
30:58 C'est tout l'OCDE, tout le monde développé.
31:00 24% d'entre elles travaillent à temps partiel contre 10% des hommes.
31:04 Et les cas salarials sont de 12% en moyenne contre 18% en l'an 2000.
31:10 Bon ben voilà, petit à petit.
31:12 Oui.
31:14 Non, mais ce qu'on disait au début.
31:16 C'est-à-dire de toute façon, le rapport de force, la transformation du rapport de force
31:20 entre le candidat et le recruteur, va faire que tout ça quand même à un moment va voler en éclat.
31:25 Je pense qu'on progresse, on progresse par contre extrêmement lentement.
31:29 Extrêmement lentement, oui.
31:31 Et sans que, enfin, il va falloir qu'on voit l'impact.
31:35 C'est-à-dire qu'il faudrait qu'on ait à un moment donné une certaine accélération.
31:39 Par exemple, plus de femmes dans les comités de direction et dans les comex.
31:43 Qu'est-ce que ça change à l'accélération de la diversité à l'intérieur de l'entreprise, mesdames ?
31:48 C'est toi qui as la réponse, Françoise.
31:50 Moi je ne suis plus, mais oui, bien sûr, il faut qu'elle est là.
31:54 Et chacune doit...
31:55 Ah, tu veux dire que c'est celles qui sont aujourd'hui en charge de faire de l'affirmative action.
32:00 Les conseils d'administration ont un rôle sur ces sujets-là, c'est évident.
32:03 C'est pour ça que je revenais en arrière.
32:05 Et j'espère jouer ce rôle-là.
32:07 Mais là, maintenant, il faut que ça accélère.
32:10 Il faut qu'on ait un premier niveau.
32:14 Et puis après, il faut que...
32:16 Parce que sinon, le recruteur, le manager, etc., tout ça ne servira à rien.
32:21 Remarque.
32:22 Non, non, vas-y, Julie.
32:24 Sans doute que la féminisation est aussi une des parties de ce qui explique le nouveau rapport au travail.
32:28 C'est-à-dire qu'on a toujours dit, l'idée ce n'est pas que les femmes travaillent comme les hommes,
32:31 c'est que tout le monde ajuste aussi son rapport au travail.
32:36 Parce que les hommes n'étaient pas forcément plus heureux aussi d'avoir aucune flexibilité, etc.
32:42 Et donc, je pense qu'il y a aussi un effet de nouveau rapport au travail qui est lié par des femmes
32:47 et des hommes qui s'autorisent peut-être aussi parfois à revoir un peu leur rapport au travail.
32:52 Notamment dans la nouvelle génération.
32:54 On marque une pause.