SMART IMPACT - Le débat du lundi 3 juillet 2023

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Lundi 3 juillet 2023, SMART IMPACT reçoit Dominique Bourg (Philosophe, président du jury du prix du livre de l'environnement, Fondation Veolia) et Fanny Demulier (Directrice de la communication RSE, Veolia)

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Transcript
00:00 [Musique]
00:05 Comment rendre la transition écologique désirable ?
00:09 On en débat tout de suite avec Fanny Demulier. Bonjour.
00:11 - Bonjour.
00:12 - Bienvenue, vous êtes directrice de la Com RSE chez Veolia.
00:15 À vos côtés Dominique Bourg. Bonjour.
00:16 - Bonjour.
00:17 - Et bienvenue, philosophe, président du jury du prix de l'environnement
00:21 organisé par la fondation Veolia.
00:23 Vous êtes également en charge de la coordination du comité de pilotage de la raison d'être chez Veolia.
00:28 Ce prix, il s'inscrit dans ces engagements RSE ? Il y a une cohérence, j'imagine ?
00:33 - Oui, il s'inscrit dans ces engagements RSE.
00:36 L'objectif, c'est vraiment de donner les clés de compréhension de notre monde complexe.
00:41 Donc, c'est des questions de sensibilisation à l'écologie.
00:44 Donc, l'environnement, mais aussi ses dimensions sociales, économiques,
00:48 et donner envie d'agir parce que là, on est vraiment dans le temps de l'action.
00:51 Donc, il faut comprendre, mais il faut aussi susciter de l'engagement
00:54 parce qu'il y a une certaine urgence. Je pense qu'on sera tous d'accord sur ce point-là.
00:58 - Effectivement, l'urgence, tout le monde l'a intégrée, je crois, Dominique Bourg.
01:03 Vous avez remporté ce prix en 2015. - Absolument.
01:05 - Vous présidez aujourd'hui le jury, ça fait 4 ans, c'est ça que vous présidez le jury ?
01:09 - Oui, c'est la 5e année, je crois. - C'est la 5e année.
01:12 - À quoi il sert, ce prix ?
01:13 - Alors, il a servi sans doute de façon différente puisqu'il y a une quinzaine d'années.
01:17 Il y a une quinzaine d'années, on était encore beaucoup sur les questions de sensibilisation,
01:23 rendre connaissance un petit peu des défis, de la situation, etc.
01:27 Et puis, plus on avance dans le temps, plus l'idée d'indiquer des pistes, des voies concrètes,
01:32 comment on se débrouille, comment on peut faire dans de tels ou tels domaines,
01:36 l'accent est un petit peu mis là-dessus.
01:38 Mais attention, on a affaire aussi à un paysage qui évolue très vite.
01:43 Donc, si on avait par exemple un excellent livre "État des lieux",
01:47 mais indiquant quelques pistes, on ne le refuserait sans doute pas.
01:49 - Oui. Pistes et bonnes pratiques, c'est un terme que j'emploie souvent dans cette émission,
01:54 le partage des bonnes pratiques. Est-ce qu'il y a aussi cette idée-là ?
01:57 - Alors, bonnes pratiques, si vous voulez, ça renvoie quand même un peu au petit geste.
02:01 Alors, bien sûr, les bonnes pratiques, on peut y aller, si vous voulez.
02:04 Mais c'est pareil, même le mot "transition", on ne sait pas si vraiment...
02:08 - Moi, je dis souvent "transformation" maintenant.
02:10 - Oui, je pense qu'en fait, c'est plus de l'ordre d'une transformation profonde.
02:14 Et en fait, on est à un point de bascule en termes de civilisation.
02:18 Et c'est pour ça que le mot "transition" est un petit peu léger.
02:21 Et c'est ça qui est très difficile à comprendre,
02:24 parce qu'on sait très bien ce qu'on va devoir quitter.
02:28 On sait moins ce vers quoi on va.
02:30 Et puis, c'est pas décidé.
02:32 Ça va dépendre de beaucoup de choses encore.
02:35 Et surtout, quand on est angoissé, on a un peu tendance plutôt à rester vers le passé.
02:41 Et donc, en fait, la valeur première, si vous voulez, qu'il faut faire passer,
02:44 c'est la valeur de responsabilité.
02:47 On est à un moment donné capital, et on doit vraiment le comprendre et le sentir, je dirais.
02:51 - "Faillis 2000, c'est ce prix", effectivement, il a été créé en 2006.
02:55 Est-ce qu'il y a de plus en plus de matière ?
02:57 Est-ce que ça devient de plus en plus difficile de choisir, finalement ?
03:00 - Alors, il y a une révolution depuis 18 ans, en effet.
03:03 En fait, on travaille avec les éditeurs francophones, puisque le prix est francophone.
03:06 Les livres qu'on reçoit, c'est des livres de tout format, romans, bandes dessinées.
03:11 On a même eu un dictionnaire, puisque Dominique a gagné avec un dictionnaire, "La pensée écologique".
03:15 Oui, on a de plus en plus de livres, et c'est plutôt bon signe,
03:18 puisqu'on était avant dans des livres assez techniques, assez académiques,
03:21 et nous, l'enjeu, c'est d'aller vers le grand public.
03:24 Donc, il y a un véritable effort à vulgariser, le mot n'est pas forcément joli,
03:29 mais à faciliter la compréhension de ces sujets-là.
03:32 Et on reçoit plus de 100 livres, dans deux catégories,
03:35 puisqu'on a aussi une mention jeunesse, je pense qu'il faut le signaler.
03:38 On a un prix adulte, mais on a une mention pour les jeunes,
03:40 et on sait très bien que les jeunes ont besoin de comprendre et d'agir.
03:44 Donc, pour les 8-12 ans, et un peu plus, en fonction de la sélection de l'année.
03:48 Et ce prix 2023, le jury va se réunir là, en ce début du mois de juillet.
03:53 Vous êtes en plein travail, c'est ça ?
03:55 Exactement, le jury se réunit le 13 juillet, il se réunira à la Recyclerie,
03:58 qui est un lieu très intéressant, parce qu'il montre l'engagement aussi,
04:02 dans les territoires, des collectifs, et ce lieu, ces tiers lieux éco-culturels,
04:06 ça incarne pour nous les valeurs de cette sensibilisation,
04:09 mais aussi de cette action collective.
04:11 Alors justement, Dominique Bourg, pourquoi la culture a un rôle important à jouer
04:15 dans cette transformation dont on parle ?
04:17 Et bien, en capital, puisque si on est confronté à une forme de bascule de civilisation,
04:22 évidemment, ça inclut la culture.
04:25 C'est-à-dire, il faut déjà comprendre, la première chose, c'est de comprendre ce qui nous arrive.
04:30 Alors, comprendre ce qui nous arrive, c'est comprendre les enjeux très concrets,
04:34 genre, dérèglement climatique, effondrement de la biodiversité,
04:37 tension sur les ressources, mais c'est comprendre aussi les raisons qui nous ont conduits à ça,
04:42 quelles sont finalement les valeurs auxquelles on est peut-être très attaché,
04:45 mais qui, au bout du compte, finissent, au bout d'un moment, par déboucher sur des effets négatifs.
04:50 Donc, c'est une question de compréhension.
04:53 Alors, on pourrait presque dire philosophique, si ce n'est que, encore une fois,
04:55 le prix, il est destiné au plus large public possible.
04:58 Et c'est ça qu'on essaie de faire, c'est comment avoir des livres, si vous voulez,
05:01 dont les auteurs manifestent cette compréhension,
05:06 mais aussi ce talent de faire comprendre le plus largement possible les enjeux et les pistes d'aujourd'hui et de demain.
05:12 Donc, ça démarre, si je vous entends bien, déjà d'une base commune d'informations, de compréhensions.
05:19 On parle souvent de la fresque du climat, ici.
05:21 Il y a cet enjeu-là, de départ, parce que, quand on parle, moi, quand j'entends la culture,
05:27 je vais penser à des films, je vais penser à des expositions.
05:30 Là, vous nous parlez d'informations, quand même.
05:32 Alors, ça va, si vous voulez, de l'information à la mise de l'information,
05:36 et plutôt des orientations qu'on peut en tirer, sous forme de récits.
05:40 Si on veut que les gens y aillent, en quelque sorte, et ont envie d'y aller,
05:44 et c'est un peu le Graal, tout le monde cherche le récit idéal qui va faire bouger les masses.
05:49 Bon, attendez les amis, ça va pas être simple.
05:51 Mais, en fait, c'est quand même ce vers quoi on doit aller.
05:54 Donc, vous avez la compréhension de la culture au sens scientifique,
05:57 mais aussi, je vous l'ai dit, les raisons, les causes, elles sont pas scientifiques.
06:00 Elles sont culturelles, elles sont de l'ordre de la civilisation, du fonctionnement d'une société.
06:05 Et puis, tout ça, effectivement, il faut le traduire dans des propositions et dans un récit
06:09 qui donne sens et qui emporte. Pas simple.
06:11 - Oui, évidemment, c'est pas simple. Fanny Demuliez, on peut...
06:14 Il y a un baromètre de la transformation écologique que Veolia...
06:18 C'est un baromètre mondial que Veolia organise. C'est chaque année ?
06:21 - C'est une enquête d'opinion internationale qui va être menée, effectivement, chaque année,
06:26 avec Elabe, pour mesurer l'engagement des citoyens et leur envie de se mobiliser,
06:32 leur compréhension de ces sujets-là.
06:34 - Qu'est-ce qui en ressort ?
06:35 - Alors, ce qui en ressort, c'est peut-être trois choses dans les chiffres.
06:38 C'est qu'une grande majorité de ces citoyens, à l'échelle internationale,
06:43 est convaincue que la transformation écologique va apporter une meilleure qualité de vie,
06:48 une meilleure santé, une manière de consommer plus sobre et plus éthique, certainement.
06:53 Il y a un deuxième chiffre intéressant, c'est que 67% de cette opinion internationale
06:57 pensent que le coût de l'inaction sera plus cher que le coût de l'action.
07:02 Donc on voit bien qu'il y a une nécessité d'agir, et ça, je pense qu'il faut le dire et le répéter.
07:07 Et il y a, en revanche, aussi un certain flou sur les pistes d'action.
07:11 C'est en ça que la question de la sensibilisation,
07:14 mais pour aller vers des pistes, effectivement, un peu concrètes de mobilisation,
07:17 chacun à son niveau, parce qu'il s'agit que ça soit collectif.
07:20 Donc on voit que l'opinion est prête, mais qu'elle a besoin d'être guidée et orientée.
07:24 - Mais il y a une sorte de conscience mondiale, c'est ce que vous nous dites,
07:28 pourtant on voit qu'en fonction des continents, des pays, des niveaux de développement,
07:33 il y a une relation aux enjeux de la transformation environnementale qui ne sont pas forcément les mêmes.
07:38 Quand on veut vendre, par exemple, une marque comme Jeep qui veut passer au tout électrique,
07:44 elle le fait en Europe, elle ne le fait pas encore aux États-Unis,
07:46 parce qu'elle se dit "mes clients américains, ils ne sont pas prêts à ça".
07:48 Vous voyez ce que je veux dire ?
07:50 - Exactement. Et chez Velia, c'est exactement aussi notre sujet.
07:52 Nous, on est un grand groupe international, mais on travaille dans les territoires,
07:56 puisque quand on produit de l'eau, de l'énergie, on travaille localement, évidemment.
07:59 Il faut que la mobilisation parte des territoires et des acteurs du territoire,
08:03 et que chacun à son niveau agisse.
08:05 Donc c'est donner les clés, aussi, de la compréhension des interactions,
08:08 des interdépendances, pour que chacun soit à sa bonne place,
08:11 et chacun puisse, en fonction de son engagement,
08:14 je parlais tout à l'heure de la programmation agriculturelle,
08:16 il y a des piments jaunes, orange, enfin, vert, orange, rouge, pardon,
08:21 et en fonction de l'envie de se mobiliser, de ses compétences,
08:24 chacun peut trouver son espace.
08:26 Donc je pense qu'il ne faut pas imposer, mais surtout susciter l'envie d'agir.
08:30 - Est-ce qu'il faut créer de nouveaux imaginaires, Domingo ?
08:33 Est-ce que c'est ça l'enjeu, finalement ?
08:35 - C'est en cours. On voit beaucoup de choses.
08:38 Jérémie, si vous voulez, nos sociétés restent sur leurs tendances,
08:43 leurs trends actuels, ne serait-ce qu'en termes d'émissions de gaz à effet de serre.
08:47 Ça ne bouge pas très lentement, mais en revanche, dans les têtes et dans les esprits,
08:52 ça bouge beaucoup plus vite.
08:54 Ça ne se traduit pas encore dans les institutions,
08:56 mais c'est là, et donc ces imaginaires, si vous voulez,
08:59 ils sont en cours de gestation, c'est très clair.
09:03 - Ça passe par la pub, notamment ?
09:05 - Pour le moment, pas trop.
09:07 - Je pense que c'est un vrai défi, embarquer la publicité dans cette promotion.
09:12 - C'est pas simple. La publicité, c'est quand même un moteur d'accroissement
09:18 d'une consommation qui n'est pas tout à fait décaire.
09:21 - À sauf si elle fait la promotion de l'économie circulaire.
09:23 - Oui. Après, tout dépend de comment on entend l'économie circulaire.
09:27 En tout cas, pub, pourquoi pas ?
09:30 Moi, ce n'est pas tellement ma tasse de thé.
09:32 Je préfère l'information, je préfère la fiction.
09:36 Il y a beaucoup de choses qui passent au travers de la fiction.
09:39 Il y a des documentaires qui sont absolument géniaux, etc.
09:42 On voit qu'il y a tout un mouvement culturel.
09:45 Le problème, c'est que la publicité, elle a été faite pour vendre et vendre plus.
09:49 On a quand même un problème aujourd'hui, c'est-à-dire que la Terre ne se dégrade pas
09:54 par l'effet de nos esprits directement, mais ça passe par nos flux de matière
09:58 et nos flux d'énergie. Donc, ça, on doit quand même le réduire.
10:02 Comment réduire ces flux sans non plus se ruiner et sans déstructurer nos sociétés ?
10:08 C'est l'énorme défi face auquel nous sommes.
10:10 Il y a aussi un défi d'intelligence collective.
10:12 Je voudrais qu'on parle d'un dispositif qui existe chez Veolia, le dispositif +1.
10:17 Expliquez-nous ce que c'est et comment il participe finalement à ce défi collectif.
10:21 C'est +1 même pour une écologie en action.
10:23 Je pense que l'intention, elle est vraiment importante.
10:26 Le 1, c'est pour dire l'union.
10:28 Il va falloir, même s'il y a des divergences dans des projets,
10:31 entre des enjeux financiers, des enjeux sociaux, des enjeux environnementaux,
10:36 entre nous, des investisseurs, des clients, des collaborateurs,
10:39 il faut se mettre au tour de table sur des projets concrets dans les territoires
10:42 et mieux comprendre les intérêts des uns et des autres
10:46 plutôt que de s'opposer à aller trouver des terrains d'entente communs
10:49 pour agir et accélérer la transformation écologique.
10:52 On a déployé cette initiative qui est un prototype,
10:56 qui est d'ailleurs proposé en open source, puisqu'il a été validé aujourd'hui,
10:59 pour partager cette méthode et faire en sorte de travailler davantage ensemble,
11:04 de davantage coopérer sur des enjeux concrets, territoriaux, écologiques.
11:08 - Je voudrais qu'on revienne au prix du livre "Environnement".
11:11 Dans les exemples des années précédentes,
11:13 vous ne pouvez pas encore nous dire qui font partie,
11:16 quels livres seront sélectionnés cette année,
11:18 mais il y a quoi comme exemple de livres qui ont pu participer à ce défi collectif ?
11:24 - Je vais peut-être donner un exemple avec Sébastien Boller,
11:26 parce que c'est quand Dominique a pris la présidence du prix du livre,
11:29 alors en 2016, je ne vais pas dire de bêtises.
11:32 Ça s'appelle "Le bug humain", et là on parle du cerveau, du striatum,
11:36 qui fait en sorte qu'on va être conditionné sur notre cerveau
11:42 pour obtenir du plaisir, et que la consommation remplit cette fonction-là
11:48 de donner du plaisir, et qu'en éduquant assez jeunes et moins jeunes les publics,
11:54 on peut reconditionner un peu ce striatum pour aller vers des reconnaissances
11:58 qui vont passer par plus d'altérité, plus de conscience et d'action responsable.
12:04 Donc on voit que ça n'est pas perdu, et ce livre-là, c'est un bel emblème,
12:08 je pense, des messages qu'on veut faire passer,
12:10 et de la manière dont il faut agir et se mobiliser collectivement.
12:15 - Merci beaucoup à tous les deux. A bientôt sur Bismarck.
12:18 Donc le 13 juillet, le prix du livre en direct de la Fondation.
12:21 Véolie, on passe tout de suite à notre rubrique consacrée aux startups éco-responsables.

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