Vidéo : « La maternité en prison », interview Sans Filtre avec Marie-Annick Horel

  • l’année dernière
Accouchement en prison, séparation à la naissance, il persiste de nombreux fantasmes dans l’imaginaire collectif, et pourtant. Le système d’accueil de l’enfant en milieu carcéral depuis la fin des années 90 permet une meilleure prise en charge des femmes enceintes incarcérées, améliore leurs chances de réinsertion et garantit à l’enfant un meilleur développement. Marie-Annick Horel, ancienne surveillante au Centre pénitentiaire de Rennes, et autrice de « Au cœur de la prison des femmes », nous présente ces lieux qu’on appelle les quartiers mère-enfant, ou nurserie. 

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Personnes
Transcription
00:00 accoucher en prison, dans une cellule, ou attachée, etc.
00:03 Tout ce que j'ai entendu, c'est absolument faux.
00:05 Bonjour, je m'appelle Marianne Correll.
00:10 J'ai travaillé 37 ans au centre pénitentiaire des femmes de Rennes.
00:15 Suite à ça, j'ai écrit un livre au cœur de la prison des femmes.
00:19 Dans ce livre, je parle de ma vie professionnelle,
00:23 de certaines rencontres que j'ai faites,
00:25 et je parle également d'un quartier qui s'appelle le quartier mère-enfant.
00:29 À savoir que dans certaines prisons de France,
00:32 certaines mamans gardent leurs enfants avec elles jusqu'à l'âge de 18 mois.
00:37 J'étais donc responsable du quartier mère-enfant,
00:40 et on avait un grand respect dans ce quartier,
00:44 puisque notre rôle n'est pas de garder des enfants,
00:47 mais de garder des adultes.
00:50 On avait une bienveillance pour ces enfants,
00:52 et vraiment un accompagnement d'une grande richesse.
00:55 Donc, concernant la prise en charge,
00:57 elle est calquée complètement sur le citoyen lambda,
01:00 une maman qui est incarcérée.
01:02 Au moment de son incarcération et est enceinte,
01:04 au bout de son septième mois,
01:06 elle intégrera le quartier mère-enfant.
01:08 Au même titre qu'une maman à l'extérieur qui travaille,
01:11 eh bien, on le fait la même chose en prison,
01:13 c'est-à-dire qu'on invite la détenue à venir au quartier mère-enfant
01:17 pour s'isoler des autres détenus,
01:20 et puis avoir une certaine tranquillité.
01:23 Donc, une grande pièce de vie,
01:24 cinq cellules,
01:26 une cuisine,
01:27 un beau jardin,
01:28 une buanderie,
01:29 ouverture des cellules le matin à 7h30,
01:32 fermeture des cellules à 19h.
01:34 Donc, pas d'enfermement H24 avec un enfant loin de là.
01:39 Comment se passe un accouchement en prison ?
01:41 Alors, j'ai tout entendu, là aussi.
01:43 Aujourd'hui, j'ai 62 ans.
01:44 En 37 ans de carrière,
01:46 je n'ai jamais vu une détenue accouchée en prison.
01:49 À partir du moment où la détenue est enceinte,
01:52 elle a des visites ponctuelles à l'hôpital,
01:55 avec une préparation, avec une sage-femme,
01:57 qui vient à l'établissement et qui est aussi à l'hôpital.
02:01 La personne détenue, lorsqu'elle sent qu'elle a les premières douleurs,
02:06 on réagit très vite,
02:08 on est en direct avec le 15, le SAMU.
02:11 Le 15 se déplace, accouchée en prison,
02:13 dans une cellule,
02:15 ou attachée, etc.
02:16 Tout ce que j'ai entendu, c'est absolument faux.
02:18 La différence, c'est que la détenue est surveillée
02:21 par du personnel pénitentiaire ou du personnel de police,
02:25 mais en aucun cas un pénitentiaire ou un policier
02:29 rentrera dans une salle d'accouchement.
02:31 L'administration pénitentiaire n'est pas seule
02:35 avec cette prise en charge.
02:37 Elle est épaulée à 100% par l'APMI.
02:41 Donc l'APMI délègue deux personnes
02:45 pour venir régulièrement ou ponctuellement,
02:48 à savoir une puéricultrice et une éducatrice jeune enfant.
02:53 Tous les mois, un pédiatre se déplace en ambulatoire
02:57 pour venir visiter les enfants.
02:59 Existe une assistante maternelle
03:01 qui, elle, vient trois fois semaine également
03:04 sortir les enfants.
03:06 Alors l'assistante maternelle est très disponible,
03:09 je dirais H24.
03:11 Concernant la prise en charge financière,
03:13 il faut savoir qu'il y a deux cas de figure.
03:15 Les mamans qui sont incarcérées
03:17 touchent, au même titre que les mamans dehors,
03:20 les allocations de la CAF.
03:21 Cet argent doit servir à l'enfant.
03:23 C'est-à-dire que la maman se prend en charge
03:26 et commande ce qu'elle a besoin pour son enfant,
03:29 les produits d'hygiène, les produits d'entretien
03:32 et bien sûr l'alimentation.
03:34 Sauf que nous avons, sur le territoire français,
03:37 des mamans qui ne sont pas françaises
03:40 et qui ne touchent rien,
03:41 qui ont à l'aide de l'État.
03:43 C'est-à-dire nos impôts,
03:44 le budget de l'État de l'administration pénitentiaire
03:47 prend en charge tout ce qui touche l'enfant.
03:50 Un enfant incarcéré avec sa mère,
03:52 on sait pertinemment qu'il ne va pas rester avec sa mère.
03:55 Il partira à 18 mois.
03:57 Donc il faut préparer ce départ.
04:00 Ce n'est pas un départ...
04:01 Ça ne doit pas être un départ violent.
04:03 D'ailleurs, ça ne l'est pas.
04:04 C'est un départ progressif.
04:05 Déjà, il commence à sortir avec l'assistante maternelle.
04:09 Il apprend à vivre sans sa maman tranquillement.
04:13 Donc bien sûr, avant 18 mois,
04:15 l'administration pénitentiaire, la PMI, les services sociaux
04:19 s'occupent du placement de cet enfant.
04:21 Soit il part dans sa famille, et tant mieux pour lui.
04:24 Soit il part dans une famille d'incules,
04:26 si famille toxique, déviante, je vous passe les détails.
04:31 Mais moi, ce que j'ai pu constater,
04:33 lorsqu'il commence à rentrer dans l'autonomie et de la marche,
04:36 un enfant se fait entendre.
04:39 Le départ se fait tranquillement.
04:43 Et presque chez certaines mamans,
04:47 ce n'est pas toujours un déchirement.
04:50 Ça peut être un soulagement
04:53 pour le bien-être de l'enfant.
04:55 Les personnes détenues,
04:58 pour la plupart, ont quand même été malmenées.
05:01 Malmenées par la vie, malmenées parfois par des hommes,
05:05 malmenées parfois par des familles, par des parents,
05:08 par des familles d'accueil.
05:10 Je pense que les groupes de parole,
05:11 ça pourrait être sympa avec des personnels de santé
05:16 pour qu'elles puissent reprendre confiance en elles
05:18 et se dire qu'elles aussi sont capables d'eux.
05:21 Elles sont capables de quelque chose.
05:23 Et je garde ce côté positif pour transmettre le message
05:27 qu'en prison, il se passe aussi des bonnes choses.
05:30 Mais je vous invite à lire mon livre
05:33 dans lequel je parle aussi de la maternité en prison.
05:36 Sous-titrage ST' 501
05:40 Sous-titrage ST' 501
05:43 [Musique]

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