• l’année dernière
François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, était l'invité du "8h30 franceinfo" le 11 juillet 2023.

Category

🗞
News
Transcription
00:00 Bercy envisage de freiner le rythme des baisses d'impôts.
00:03 Vous, vous estimez que c'est plus raisonnable ?
00:05 Vous aviez mis en garde contre les baisses d'impôts récemment ?
00:08 Je crois que nous avons, et pas seulement cette année,
00:10 Agathe Lambret, nous avons depuis longtemps un problème de dette publique qui est excessive.
00:14 Nous étions à peu près à la moyenne de la zone euro,
00:17 au niveau de l'Allemagne il y a 15 ans,
00:19 et aujourd'hui malheureusement la France est devenue
00:21 une des championnes d'Europe de la dette et du déficit.
00:24 Quasiment deux fois plus que l'Allemagne.
00:25 60% du pays est en Allemagne,
00:27 et ça c'est grave parce que ça veut dire que ça va nous coûter dans le budget,
00:32 la charge d'intérêt de la dette va énormément augmenter.
00:35 On estime qu'on passe d'un peu moins de 30 milliards par an,
00:38 ce qui était déjà pas mal en 2020,
00:41 à plus de 80 milliards en 2027.
00:43 Donc vous voyez une augmentation de plus de 50 milliards de la charge de la dette,
00:46 c'est autant qu'on ne pourra pas dépenser pour l'éducation, la défense ou le climat.
00:50 Et puis c'est très grave parce qu'on laisse aux générations futures la facture.
00:55 On ne peut pas indéfiniment faire par exemple des baisses d'impôts aujourd'hui,
00:59 qu'on fait payer par les jeunes demain.
01:02 Donc je crois, l'intention qui a été manifestée,
01:06 ce n'est pas encore des annonces,
01:09 mais de différer certaines baisses d'impôts me paraît sage
01:12 de la part du ministre de l'économie et des finances.
01:14 - Différer notamment à la baisse d'un impôt de production pour les entreprises,
01:18 ça aussi ça vous paraît sage ?
01:19 Vous vous dites que ce n'est pas bon pour la compétitivité ?
01:21 - Non, je n'ai pas à me prononcer sur tel ou tel impôt,
01:24 mais je crois que sur un plan général,
01:26 nous n'avons pas les moyens aujourd'hui de faire de nouvelles baisses d'impôts non financées.
01:31 Pas plus de l'autre côté que nous avons les moyens de faire beaucoup de dépenses supplémentaires.
01:35 Vous savez, on a déjà le niveau de dépense en France
01:38 qui est rapporté à la taille de notre économie,
01:41 le plus élevé d'Europe et même le plus élevé de toutes les économies développées dans le monde.
01:45 Donc il faut qu'on essaye d'être plus efficace.
01:48 - Vous êtes en train de dire, il faut le maintenir à ce niveau-là, à ce stade ?
01:51 - Je crois que déjà si on arrivait à stabiliser le niveau de nos dépenses,
01:55 ce qu'on appelle en volume, c'est-à-dire après inflation,
01:58 on pourrait commencer à réduire la dette publique.
02:00 Dans les calculs de la Banque de France,
02:02 si nous stabilisions ces dépenses publiques en volume,
02:05 nous pourrions dans les dix années qui viennent,
02:08 ramener la dette publique sous les 100%.
02:10 Alors c'est un seuil symbolique,
02:11 mais il est assez important parce que c'est là que nous étions avant le choc du Covid.
02:15 Au passage, la plupart de nos voisins européens
02:17 vont faire baisser leur dette publique dans les années qui viennent.
02:19 Donc il faut que nous y arrivions aussi.
02:21 - Et l'exécutif a identifié justement 10 milliards d'économies pour le budget 2024,
02:26 après avoir passé en revue la dépense publique.
02:29 Vous trouvez que ça ne va pas assez loin ?
02:31 - Alors la Banque de France, elle est en charge de ce qu'on appelle la politique monétaire.
02:35 - Oui mais vous parliez de transformation.
02:37 - Non, non, sa mission numéro un, c'est de combattre la maladie de l'inflation.
02:41 Je vous promets, tous les matins, quand on se réveille avec beaucoup d'énergie,
02:45 c'est avec cet objectif-là, presque cette obsession-là.
02:48 On n'est pas en charge de la politique budgétaire.
02:51 Mais je crois que ce qui va dans le sens de soigner d'autres maladies françaises plus durables,
02:56 notamment l'excès de dette publique, ce qui va dans ce sens-là est bienvenu.
03:00 Ayant dit ça, moi je crois profondément au modèle social français et européen.
03:04 Mais la question que nous avons, on parlait du niveau des dépenses.
03:07 C'est qu'en gros, regardons autour de nous, vous savez, je suis au Conseil des gouverneurs,
03:11 nous sommes 20 économies de la zone euro,
03:13 on partage tous à peu près le même modèle social
03:16 avec une lutte contre les inégalités avec des services publics.
03:19 Le seul problème qu'on a, c'est que chez nos voisins,
03:22 en moyenne, ils coûtent 10 points de PIB de moins que chez nous.
03:26 Donc on a une marge d'amélioration de l'efficacité.

Recommandations