Au lendemain d'un remaniement sous forme d'ajustements. Le politologue au CEVIPOF, Bruno Cautrès, est l'invité de Stéphane Carpentier pour décrypter les choix d'Emmanuel Macron et Élisabeth Borne pour ce nouveau gouvernement.
Regardez L'invité de RTL du 21 juillet 2023 avec Stéphane Carpentier.
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00:02 RTL Matin
00:06 Merci de nous rejoindre à 7h46. L'invité de RTL Matin est donc le politologue, professeur à Sciences Po, Bruno Cotteres, et au bout de son téléphone, bonjour à vous.
00:14 Bonjour. Merci d'être en direct pour nous aider à comprendre le pourquoi du comment de ce mini remaniement gouvernemental.
00:20 Remaniement qu'on a attendu quand même longtemps, entre mercredi, jeudi matin, jeudi après-midi, finalement le communiqué est tombé un peu avant 20h hier soir.
00:27 C'était un peu jusqu'au bout du suspense.
00:30 Oui, c'est un peu chronique d'un remaniement attendu, avec une journée d'hier assez incroyable en fait,
00:36 assez unique même, me semble-t-il, dans les annales des remaniements,
00:40 avec des ministres qui entraient au gouvernement, qui annonçaient eux-mêmes leur arrivée, des ministres qui quittaient, qui annonçaient eux-mêmes leur départ,
00:47 et on n'a pas eu l'annonce officielle sur le perron de l'Elysée, visiblement, du côté d'Emmanuel Macron. On a eu envie
00:55 d'innover, peut-être de surprendre, sur la manière dont l'annonce a été faite.
01:00 - Oui, huit nouvelles têtes donc. Elisabeth Borne et Emmanuel Macron se sont beaucoup vus, Bruno Cotteres entretenu sur ses modifications et nouveautés.
01:07 La première ministre était désireuse de changement, le président plus enclin à la stabilité. Qui a gagné selon vous ?
01:13 - Un bon compromis entre les deux, j'irais. Il y a huit entrées nouvelles, il y a cinq ministres qui ont
01:19 quitté le gouvernement, et trois ministres qui ont glissé d'un poste à l'autre.
01:23 Donc on voit qu'on a quand même globalement
01:25 joué à l'intérieur d'un périmètre assez restreint.
01:29 Celui de la Macronie, et surtout ce qui marque ce remaniement, c'est la fin de la société civile. Des ministres emblématiques
01:36 issus de la société civile, on pense en particulier au ministre de la Santé, on pense en particulier à Pape Ndiaye,
01:42 qui était ministre de l'Éducation, eh bien, sont quittés leur fonction et sont remplacés par des profils beaucoup plus politiques,
01:50 beaucoup plus macronistes, pur sucre, des macronistes du début des députés. On voit qu'on est un gouvernement
01:56 qui est un gouvernement qui s'apprête peut-être à un gros combat à partir de l'automne. En tout cas un gouvernement
02:02 beaucoup plus politique. - Et ça vous le traduisez comment ? C'est l'avenir qu'on prépare ? L'avenir très proche ?
02:07 - Oui bien sûr, il y a d'abord des échéances électorales,
02:10 élections sénatoriales, mais surtout des élections européennes l'an prochain, des élections locales qui vont arriver
02:17 aussi à terme. Donc on voit effectivement une majorité qui d'abord n'a toujours pas réglé son problème numéro un,
02:24 l'absence de majorité absolue à l'Assemblée
02:27 nationale, qui n'a pas réussi à conclure un accord jusqu'à présent avec d'autres formations politiques pour faire majorité,
02:33 les Républicains en particulier, et donc on se resserre entre macronistes. - C'est ça, c'est faire monter des parlementaires dans ce gouvernement,
02:40 c'est un peu la volonté pour l'exécutif de renouer le contact avec ce parlement, avec l'Assemblée nationale,
02:45 pour les futurs chantiers, les futures échéances ? - Oui, il me semble qu'il y a deux idées, il y a effectivement celle-là de renouer avec
02:51 les parlementaires, avec le groupe parlementaire, faire la promotion de personnalités qui sont directement issues des rangs
02:58 du groupe parlementaire, mais il y a peut-être aussi la volonté de montrer
03:01 qu'Emmanuel Macron finalement n'aurait pas de problème de bande-touche. Vous savez, on disait souvent le problème d'Emmanuel Macron, c'est qu'il a vite
03:08 utilisé les principales personnalités emblématiques qui l'ont accompagné depuis 2016-2017,
03:14 mais qu'il n'y a pas vraiment d'équipe B, d'équipe de remplacement. Et bien là, hier, il nous a montré
03:19 qu'il y avait du côté de la Macronie des ressources humaines et des personnalités nouvelles
03:24 dont il s'agit aussi un peu de faire la promotion pour assurer peut-être à terme la pérennité du projet Macronisme.
03:30 - Alors justement, celui qui incarne parfaitement la Macronie, et c'est une étoile montante, c'est Gabriel Attal. Il a 34 ans, je voudrais bien le rappeler à tous les auditeurs.
03:38 Il a 34 ans, il a été porte-parole du gouvernement, il s'est chargé du budget, le voici propulsé à l'éducation nationale.
03:44 Ça veut dire qu'Emmanuel Macron compte sur lui ?
03:47 - Oui, bien sûr, il va occuper une place tout à fait essentielle, les Français l'identifient parfaitement.
03:52 Il est très connu, il a occupé des millions de fonctions déjà dans le gouvernement.
03:58 Et bien là, maintenant, il est catapulté effectivement sur un des plus gros postes ministériels.
04:02 Rappelons que l'éducation, c'est le tout gros poste de dépense du budget de l'État, donc une place au sein du gouvernement tout à fait stratégique.
04:11 D'autant que la question de l'éducation, de la formation en général, a toujours occupé une place de choix dans le discours d'Emmanuel Macron, dans son projet politique.
04:20 Donc incontestablement, Gabriel Attal, c'est l'histoire d'une affirmation progressive et très rapide d'une carrière politique qui, pour le moment, n'a pas un seul nuage.
04:29 - Et vous savez quoi ? La semaine dernière, il était dans le studio RTL pour répondre à nos questions, justement, et il défendait donc le budget et demandait aux Français de faire des efforts.
04:36 Et là, il récupère donc ce fameux dossier de l'éducation nationale.
04:39 Dans une discussion que j'avais hier avec des amis, on me disait "mais qu'est-ce qu'il y connaît en termes d'éducation nationale ?"
04:45 Comment on arrive à un tel ministère, peut-être sans avoir tout le bagage nécessaire ?
04:50 - Alors vous savez, il n'y a pas forcément de corrélation entre être spécialiste d'un domaine et être un bon ministre de ce domaine.
04:58 On a même parfois eu des exemples en fond ce contraire.
05:01 Donc Gabriel Attal, ce qui est sûr, c'est qu'il avait une sensibilité sur la question de l'éducation.
05:05 Il avait, en 2018, été nommé déjà au ministère de l'Éducation sur un autre poste.
05:11 Donc il a une sensibilité à ces questions.
05:14 Et par contre, ce qu'il peut avoir d'intéressant, c'est qu'il connaît extrêmement bien les comptes publics.
05:19 Il sort du poste de ministre des comptes publics.
05:22 Et les comptes publics, vous savez, en matière d'éducation, c'est très important parce que les profs, l'éducation nationale,
05:27 c'est un gros but, j'en ai dit.
05:29 Et puis il y a beaucoup d'attentes.
05:30 Les augmentations de salaire qui ont été décidées.
05:33 Et puis peut-être rendre le métier davantage attractif.
05:36 On sait qu'il y a un problème de recrutement, d'attractivité des métiers de l'enseignement.
05:42 - Bruno Cotteres, ce remaniement estival, selon vous, en annonce un plus important plus tard, peut-être à l'automne.
05:48 Cette version d'hier, ça colle mat temporairement ?
05:51 - Peut-être pas à l'automne tout de suite.
05:53 Parce que le gouvernement va d'abord partir en vacances avec les dossiers sous le bras, bien évidemment.
05:59 Puis à la rentrée, il va arriver.
06:01 Par contre, ce qui est certain, c'est que ça ne règle pas la question fondamentale de l'absence de majorité à l'Assemblée nationale.
06:08 Qui, sans aucun doute, appelle un jour un autre remaniement.
06:13 - J'avais préparé une question vous demandant, mais quand est-ce qu'il va parler le président Macron ?
06:17 On a appris qu'il allait prendre la parole tout à l'heure avant le Conseil des ministres.
06:20 Il était temps qu'il s'exprime le chef de l'État, non ?
06:23 - Oui, il était temps qu'il s'exprime.
06:25 Mais alors, pas seulement sur le remaniement.
06:27 Surtout, le chef de l'État doit essayer de nous expliquer ce qui arrive dans le pays.
06:30 Pourquoi on a vécu toutes ces crises ?
06:32 Pourquoi nous avons eu ces émeutes dans un certain nombre de quartiers ?
06:37 Mais peut-être plus fondamentalement, où est-ce qu'on en est ?
06:39 Où est-ce qu'il veut aller le chef de l'État ?
06:41 Autant son premier mandat, il n'y avait pas de problème, c'était directement lisible.
06:45 On avait élu un très jeune président de la République venu pour moderniser le pays.
06:49 Le deuxième mandat, on voit que pour le moment, répondre à cette question, c'est beaucoup plus difficile.
06:53 Donc il doit nous dire où est la principale direction vers laquelle il veut aller d'ici 4 ans.
06:58 - Ce sera avant 11h, tout à l'heure, avant le Conseil des ministres.
07:01 Merci de nous avoir expliqué les choses, Bruno Cotteres, politologue et professeur à Sciences Po, en direct sur RTL ce matin.
07:06 !