L'autrice, compositrice et interprète belge Selah Sue est en tournée des festivals en ce moment. Elle est l'invitée d'Alexis Morel à 7h50. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-jeudi-27-juillet-2023-3053162
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00:00 Bonjour Célasso, et merci d'avoir choisi France Inter ce matin au beau milieu de votre
00:04 tournée des festivals.
00:05 On peut vous applaudir cet été sur scène, un an après la sortie de votre troisième
00:10 album Persona.
00:11 Persona qui a d'ailleurs été enrichi ce printemps d'une version deluxe.
00:15 Et donc on vous a vu ces dernières semaines à Jazz à Vienne, à Musilac, à Aix-les-Bains,
00:20 vous serez ce week-end notamment à Jazz in Marseille, on va en reparler.
00:22 Est-ce que vous aimez cette frénésie de la scène, cette tournée en accéléré cet
00:28 été, tous ces festivals ?
00:29 Oui j'aime ça, parce que c'est aussi bon pour le moral d'avoir un petit peu de structure,
00:34 pour moi c'est important d'avoir structure, mais c'est toujours l'extrême.
00:37 Ou je suis à la maison, une mère avec les enfants, faire les sandwiches, ou je suis
00:43 à tournée, et c'est facile parce que ton agenda est fait pour toi.
00:48 Il y a des rendez-vous ?
00:49 Oui, c'est facile, et c'est juste une heure et demie chaque jour sur scène, c'est pas
00:55 très difficile, donc j'aime cette vie.
00:57 Et qu'est-ce que ça change des festivals par rapport à un concert toute seule dans
01:00 son coin ? Est-ce que pour vous c'est aussi plus intéressant ?
01:04 Je pense que c'est totalement des autres univers.
01:08 Festival, c'est pas beaucoup de pression juste pour toi, parce que les gens ne viennent
01:13 pas juste pour toi.
01:14 Les gens viennent pour plusieurs artistes.
01:15 Oui, donc je suis un petit peu plus ouverte, et aussi les chansons, plus festival, plus
01:22 de up-tempo, quand tu fais un club et les gens viennent juste pour toi, tu fais plus
01:26 intimistique, juste avec la guitare, parler plus.
01:29 J'aime les deux, j'aime l'équilibre.
01:31 Parce que j'ai lu que vous étiez plus à l'aise finalement face à des milliers
01:35 de spectateurs sur une scène que dans une discussion avec deux, trois personnes.
01:39 Ça vous fait pas peur le public ?
01:40 Oui, c'est bizarre.
01:42 Oui, je suis une personne insécure, de social anxiety, comment tu dis ça ?
01:50 D'anxiété, d'angoisse sociale ?
01:52 Oui, oui, je sais un petit peu.
01:53 Et quand tu es sur scène, tu as un grand...
01:57 Ok, tu fais aussi connexion avec le public, mais chanter, c'est facile.
02:02 Parler, c'est plus difficile.
02:04 C'est plus facile de chanter face à des milliers de personnes que de parler à deux
02:08 personnes finalement pour vous.
02:09 Et donc vous défendez sur scène ce dernier album, Persona, sorti l'an dernier je le
02:14 disais, 24 millions de streamings cumulés en ligne.
02:17 Un album qu'on pourrait un peu qualifier de multi-style.
02:21 Il y a de la soul, du funk, du R&B, il y a un peu de tout ça dans cet album.
02:25 Il y en a un peu pour tout le monde.
02:27 Oui, c'est vrai, c'est parce que j'aime aussi beaucoup de style et j'écoute aussi
02:30 beaucoup de style.
02:31 Et c'est basé sur une thérapie que j'ai suivie avec mon psychologue, called Voice
02:39 Dialogue.
02:40 Et donc chaque chanson est écrite d'un autre côté de ma personnalité.
02:47 Parfois tu as le mélancolique, vraiment intimistique avec piano, keys et triste.
02:53 Ou tu as aussi l'indépendant et c'est hip hop, plus fort, hip hop beats.
03:00 Donc ça me donne les clés pour faire beaucoup de style parce que je suis une personne avec
03:05 beaucoup d'émotions.
03:06 Il y a différentes personnalités en vous et donc il y a différents styles qui correspondent
03:10 chacun à une personnalité.
03:11 Et il y a du rap aussi.
03:13 Et ça c'est assez nouveau chez vous Selassou, notamment dans le morceau Kingdom.
03:17 C'est assez nouveau dans cet album là.
03:20 Oui, c'est la première fois que je fais moi-même le rap.
03:23 Et j'aime le rap parce que je fais aussi beaucoup de features avec des rappeurs.
03:28 Dame So notamment.
03:30 Pour faire ça moi-même, c'est une grande étape.
03:33 Mais dans cette chanson, je suis la confiante.
03:37 Donc voilà, je suis confiante quand je chante cette chanson.
03:40 Donc c'est possible de faire aussi le rap.
03:42 Et j'aime ça.
03:43 I feel really strong quand je fais le rap.
03:45 Vous vous sentez forte quand vous chantez du rap.
03:48 Ça n'a pas toujours été le cas ? C'est nouveau ça, le fait que vous vous sentiez
03:52 forte quand vous osiez aller sur du rap par exemple ?
03:57 Non, non, je suis la confiante juste 1% du temps.
04:03 Oui, je dois aussi.
04:05 Mais ça c'est plus facile parce que ça c'est le but du voice dialogue, de la thérapie
04:11 et d'accepter, embrasser tous les aspects.
04:14 Mais c'est plus facile d'accepter la confiante.
04:17 Mais c'est plus difficile d'accepter le mélancolique ou la critique.
04:23 Donc ça c'est le but.
04:25 Les aspects plus sombres de nos personnalités.
04:28 Alors oui, parce que cet album revient aussi sur vos épisodes dépressifs.
04:31 Vous vous en parlez depuis le début finalement.
04:33 Depuis le début de votre carrière, depuis votre tout premier album.
04:36 Ce n'est pas le cas de tous les artistes.
04:39 Pourquoi ?
04:40 Est-ce que ça reste un tabou dans votre milieu alors qu'on en parle aujourd'hui dans la
04:44 société ?
04:45 On en parle chez les sportifs, chez les artistes, chez les interprètes.
04:48 Ça reste un sujet très sensible ?
04:50 Pour moi, pas.
04:52 Parce que j'étais toujours ouverte.
04:54 Pour moi, c'est vraiment dans ma famille.
04:57 Je ne sais pas, c'est génétique.
05:00 Parce que mes grands-parents, à les deux côtés, ont des problèmes psychologiques
05:06 ou c'est aussi les facteurs externes.
05:09 Je ne sais pas.
05:10 Mais chez moi, c'est une très grande partie de ma vie.
05:14 Et à la maison, avec ma mère, j'étais toujours ouverte.
05:17 Ce n'était jamais un grand tabou parce qu'on n'a pas un autre choix.
05:20 Donc c'est naturel d'en parler aussi dans vos albums ?
05:23 Pour moi, oui.
05:24 Parce que pour moi, quand j'écris, c'est comme un journal intime.
05:28 Et ça m'aide beaucoup à exprimer mes émotions.
05:32 Ça n'aide pas pour la dépression.
05:34 La dépression, c'est une maladie.
05:36 J'ai besoin du sport, des antidépresseurs et des thérapies.
05:40 Mais aussi la musique, ça m'aide beaucoup.
05:43 Votre compatriote belge Stromae a dû arrêter sa tournée cette année.
05:47 Lui aussi parlait de la dépression dans son dernier album.
05:49 Il a dit "il me faut plus de repos, je ne peux pas continuer".
05:52 C'est quelque chose qui vous touche ? Vous avez des nouvelles de Stromae ? Vous êtes
05:56 proche de lui ? Oui, je connais Stromae un petit peu.
06:00 C'est son histoire.
06:02 Mais je comprends totalement.
06:06 Et tu penses que tu vis une vie incroyable, les stars, et c'est toujours…
06:13 Mais c'est pas facile la vie.
06:16 C'est aussi pas facile pour aucune personne.
06:21 La vie, c'est une lutte, c'est chercher l'équilibre pour tout le monde.
06:27 Mais avec nous, c'est beaucoup de pression, d'exposition, et aussi la balance est difficile
06:36 avec la famille, et avec être sur scène, et où tu es à la maison, tu dois faire ton
06:43 propre agenda, ou les extremes.
06:47 C'est pas toujours facile.
06:48 La vie privée, la vie publique aussi.
06:50 Vous en parliez dans ce troisième album.
06:52 Il y a cette chanson "Peels" dans laquelle vous revenez sur cette prise d'antidépresseurs
06:55 qui a accompagné une grande partie de votre vie, avec un rapport un peu paradoxal.
07:00 Parce que ces traitements, ils vous ont aidé, vous le dites d'ailleurs, mais il fallait
07:04 aussi s'en éloigner maintenant.
07:06 C'est un peu ce que vous racontez dans cette chanson.
07:08 Oui, c'est vraiment double.
07:10 J'ai écrit cette chanson parce que j'ai pris les antidépresseurs depuis mon 18 ans.
07:17 Et à un certain moment, pendant le confinement, j'ai arrêté.
07:20 Parce que je me sens un petit peu, comment tu dis, "drugged" ?
07:27 Un peu dépendante ? Pas vous-même ?
07:31 Oui, peut-être.
07:32 Et dans le début, quand j'ai arrêté, c'était haut.
07:36 Et j'étais totalement, extrêmement contente.
07:42 J'ai écrit cette chanson "Peels", mais après quelques mois, que bang ! Dépression
07:47 dans mon visage, patate !
07:48 Après la chanson ?
07:49 Après la chanson.
07:50 Donc maintenant, je suis en antidépresseur et ça m'a encore une fois sauvé ma vie.
07:55 Donc c'est double pour chanter cette chanson.
07:57 Mais ça aussi, ce n'est pas tabou.
08:00 Vous le reconnaissez, vous dites "j'ai arrêté de les prendre, j'ai repris" et je vous le
08:05 dis.
08:06 Oui, parce que je dois être honnête, je pense.
08:08 Parce que je dis "ça ne m'aide pas, je n'aime pas les autres".
08:12 Mais je dois dire la vérité parce que beaucoup de gens m'entendent.
08:16 Dans cette chanson, vous dites "j'aimerais ressentir les choses, mais les médicaments
08:20 parfois m'en empêchent".
08:21 Et maintenant, je suis contente que les médicaments m'en...
08:24 Oui, régulent tout cela aussi.
08:26 Alors, il y a des paroles dures dans cet album, mais les tempos, les rythmes ne sont pas tristes.
08:32 Il peut y avoir des paroles sombres, mais sur des rythmes qui sont presque joyeux.
08:36 L'un n'empêche pas l'autre.
08:38 Oui, j'aime ça parce que ça attracte...
08:41 Comment tu dis ça en français ? Ça attire beaucoup de gens quand tu fais un up-tempo.
08:49 Mais quand tu entends les paroles, tu penses "ouf, c'est quoi ça ?"
08:52 Donc j'aime vraiment le contraste.
08:55 Alors, notamment dans la chanson que vous avez accepté de nous chanter ce matin, "When
08:59 it all falls down", c'est une chanson sur la dépression, où vous dites "je n'ai plus
09:04 peur désormais, je traverse le feu, je l'ai fait, la dépression ne m'appelle pas, je
09:08 n'ai plus honte quand ma lumière s'estompe".
09:10 Vous allez pouvoir nous la chanter, vous avez accepté de nous la chanter.
09:13 Alors je vous laisse prendre votre guitare, c'est la sou, c'est à vous.
09:16 Merci beaucoup.
09:18 Yes.
09:21 I'm not afraid anymore, no. I walked through the fire and I made it, I made it. I got myself
09:40 up off the floor. I was locked in a cage of my own damn state of mind. Depression don't
09:50 you call. You get a busy tone, yeah. The darkness tries taking over. Be at night, ooh, no
10:05 warning when it all falls down. Yeah, yeah, yeah, yeah, yeah, yes. The darkness tries
10:20 taking over. Be at night, ooh, no warning when it all falls down. Yeah, yeah, yeah, yeah,
10:35 yeah, yes. When it all falls down, down, down.
10:41 « When it all falls down », c'est la sou dans le studio d'Inter ce matin. Merci
10:47 beaucoup et vous continuez cette tournée des festivals. On vous applaudit notamment
10:51 ce week-end à Jazz in Marseillac, un festival France Inter. Vous serez aussi à Marseille
10:56 mais aussi en Bretagne dans quelques jours. Vous êtes un peu partout dans France cet
11:00 été, c'est la sou. Merci beaucoup. Bonne journée.