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00:00 [Musique]
00:07 Bonjour, moi c'est Stéphanie Bertrand, je suis installée avec mon père et ma mère.
00:10 Nous avons 600 brebis viande.
00:12 Je fais partie du Groupe Pastoral de l'Alpe.
00:15 Nous sommes quatre éleveurs qui embauchons un berger à la saison pour garder nos brebis à la montagne.
00:22 C'est Benoît Rosan, je suis éleveur au veille.
00:25 Voici mon exploitation.
00:27 Je suis trésorier du Groupe Pastoral et j'ai deux chiens de protection.
00:31 Hier je suis allée voir le film au cinéma pour me rendre compte des propos de M. Bertrand.
00:36 Il dit qu'on n'a pas eu d'attaque depuis quatre ans.
00:39 En vérité, on n'a pas eu d'attaque depuis dix ans sur la période que Pascal est depuis 23 ans sur l'alpage en train de garder.
00:46 Alors comment ça peut s'expliquer ?
00:48 On est en zone un peu tampon, on est entre deux secteurs de meute.
00:53 Et puis le relief de la montagne ne se prête pas aux attaques de loups.
00:57 Il y a deux zones avec deux falaises où ils ne peuvent pas passer.
01:01 La cime de la montagne est vachement dégagée, donc ils ne peuvent pas arriver cachés.
01:05 Où on a eu les attaques, c'est vraiment les deux premiers quartiers, en bas dans le bois,
01:09 où ils peuvent se cacher et arriver à prélever des animaux pour se nourrir.
01:13 M. Bertrand dit qu'une petite partie des éleveurs sont des extrémistes.
01:17 Et quand je vois mes brebis à l'image avec mon berger, il fait passer l'image qu'on est pour le loup,
01:23 qu'on veut cohabiter avec le loup, ce qui n'est pas du tout vrai.
01:27 Quand on voit que toutes les montagnes aux alentours se font attaquer avec les chaînes de protection,
01:33 les parcs de nuit, et qu'ils se font encore attaquer, ce n'est pas du tout vrai.
01:40 Pour moi, la cohabitation, le loup et le pastoralisme sont impossibles.
01:46 Ça détruit le travail d'une année. On s'en occupe toute l'année, on les fait manger,
01:52 et quand on les monte là-haut, on dirait que c'est juste pour aller faire nourrir le loup.
01:56 Donc moi, je ne suis pas du tout d'accord avec le loup et le pastoralisme.
02:01 Pascal, c'est notre berger qui est dans le film. Nous l'embauchons en l'été pour garder nos brebis.
02:07 Il reste jour et nuit avec le troupeau en alpage. Ça fait 23 ans qu'il garde pour nous.
02:13 C'est un berger très motivé, qui est près de la nature, qui aime bien regarder les oiseaux, les chamois, tout ça.
02:21 Et c'est vrai que maintenant qu'il a eu les deux grosses attaques, il a changé son mode de garde.
02:28 Il faut qu'il les ramène tous les soirs au pied de la cabane, ils ne peuvent plus dormir où elles veulent.
02:34 Il ne peut plus les lâcher une journée, une demi-journée ou quelque chose.
02:39 Il faut toujours qu'elles soient au parc, au filet ou qu'ils soient avec elles.
02:43 Le loup a vraiment compliqué le gardiennage des brebis en montagne.
02:48 Et même que Pascal soit vraiment motivé, des fois, quand il voit nos brebis comme ça égorgées, ça le démoralise.
03:00 Ce n'était pas évident. Des soirs, après, tout seul là-haut à la montagne, il entendait les chiens aboyer dans le parc de nuit.
03:07 C'était juste peut-être un chamois ou un sanglier qui passaient, mais il était stressé, il ne dormait plus.
03:14 Ce n'était pas évident, c'était un cap difficile à passer.
03:18 M. Bertrand prend un peu la parole de Pascal, il parle à sa place.
03:24 On ne sait pas vraiment le ressenti de Pascal, on n'entend pas sa voix, on ne sait pas ce qu'il pense.
03:29 Il a pris parole pour lui.
03:32 Ça me dérange qu'il prenne position pour mon berger, pour Pascal.
03:37 Je faisais partie du CDJA, je connais plein d'éleveurs dans le département.
03:42 Et franchement, sur tous les collègues que je connais, il y en a plein qui sont pour la cohabitation avec le loup.
03:49 Ils ont tout essayé aussi, les chiens de protection, les parcs de nuit, les bergers.
03:53 Et tout le monde vous dira ici, dans le département, que c'est impossible de vivre avec le loup.
03:59 Même bien protégé, on a toujours eu des attaques.
04:03 Parce que le loup est très malin et arrive à dévier tous les systèmes de protection.
04:09 Les chiens, les filets, tout ça.
04:11 Et ici, dans le département, si vous demandez à tous les éleveurs, est-ce que vous voulez du loup,
04:16 ils vous diront non et ils vous diront qu'ils voudraient juste faire leur métier comme ils aiment.
04:21 Alors des fois on entend, oui vous avez des attaques, mais de toute façon vous êtes remboursé, vous touchez des sous.
04:27 Pour moi, ce n'est pas la méthode de toucher des sous.
04:31 Après une attaque, tu montes sur l'alpage, tu vois ta brobie, des fois agonisante,
04:36 qu'il faut que tu sortes même ton couteau pour l'assainir parce que la porc, elle n'arrive plus à respirer.
04:41 Moi j'élève des brobies, ce n'est pas pour sortir le couteau et les tuer.
04:45 C'est pour m'en occuper.
04:48 Il y en a certains qui disent qu'on fait porter le chapeau au loup parce que la filière ne va pas bien,
04:55 que les prix ne se tiennent pas et qu'on va se casser la gueule.
04:59 Ce qui n'est pas vrai.
05:01 Ici, on est en circuit court, on a une petite association, on vend nos agneaux dans le département.
05:09 Donc ça marche très bien, mais c'est vrai que quand on a une attaque de loup et qu'après derrière il y a des avortements,
05:14 donc il n'y a pas d'agneaux qui naissent, on n'arrive pas à produire,
05:17 là après oui, ça gendrerait des pertes financières.
05:21 S'il n'y a pas d'agneaux, il n'y a pas de vente.
05:24 Donc là, ça serait à cause du loup si la filière va mal.
05:28 On se situe sur l'exploitation de Benoît.
05:33 Notre alpage est situé derrière nous à 2400 m d'altitude.
05:39 On peut voir qu'il y a une grosse falaise de ce côté, au milieu il y a un cirque et de l'autre côté il y a une grosse falaise.
05:45 C'est pour ça que nous n'avons pas d'attaque à la cime là-haut,
05:50 parce que c'est déboisé et qu'on n'a pas eu d'attaque dix ans en arrière.
05:54 Dans le film, on entend M. Bertrand qui dit qu'on a exterminé le loup et le gipalette barbu
06:03 parce qu'il y a eu des croyances, ce qui est faux.
06:05 Le gipalette barbu n'a jamais été exterminé parce qu'il avait à enlever des enfants.
06:11 Par contre, le loup a été exterminé par nos anciens, brûlé des forêts,
06:15 parce qu'ils avaient déjà beaucoup de problèmes d'attaque, qu'ils n'arrivaient pas à se protéger.
06:20 Même avec les moyens qu'on a aujourd'hui, on n'arrive quand même pas à se protéger.
06:23 Les anciens avaient trouvé que la seule solution, c'est de faire brûler les forêts pour arriver à les tuer quand ils sortaient.
06:29 Donc ça n'a rien à voir avec les croyances ou les histoires d'avant.
06:34 C'est vraiment une vérité vraie.
06:36 Les anciens avaient déjà ce problème et avec le retour du loup, maintenant on a encore ce problème en ce moment.
06:43 Sur l'alpage, ils ont réintroduit des gipalettes barbus et il n'y a aucun impact sur le troupeau.
06:49 Ils nettoyent même les bêtes qui meurent en montagne, ils mangent les os.
06:55 Monsieur Bertrand dit aussi que le loup régule tout seul le nombre de chamois, de chevreuil.
07:04 Sur les alpages que je connais, sur les gens que je connais, ce qu'ils me disent surtout,
07:08 quand il y a du loup, il n'y a plus de chamois, il n'y a plus de chevreuil, il n'y a plus de gibier.
07:12 Donc le loup qui régule, je n'y crois pas trop.
07:15 A part tout manger, c'est tout ce qu'il fait.
07:18 Après, s'attaquer aux brebis, c'est vrai que c'est le plus facile.
07:20 Ça court moins vite, ça fatigue moins et c'est une garde-manger facile d'accès.
07:26 Aujourd'hui, on a pris la parole avec Benoît pour s'exprimer au nom de tous les éleveurs du département
07:33 qui ont eu des attaques, qui ne sont pas évidentes à vivre et les subir, c'est très contraignant.
07:39 On n'est pas là pour faire de la pub ou quelque chose, mais on n'est pas d'accord avec le film de M. Bertrand.
07:44 Pour lui, le loup est nécessaire à la nature et tout ça, pour nous, non, pas du tout.
07:49 Pour notre métier, le loup, c'est juste une contrainte et une horreur à vivre.
07:55 M. Bertrand fait passer les antiloups pour des antitous, sauf que nous, on est peut-être antiloups,
08:00 mais on n'est pas antitous.
08:02 On est pour la nature, on est pour le gipalette barbu, pour les renards, pour les sangliers, les chamois.
08:08 On respecte la nature, on a des cahiers et des charges à respecter, des dates de pâturage,
08:14 des zones où on peut aller, des zones où on ne peut pas aller.
08:17 On ne fait pas ce qu'on veut, on respecte ce qu'on nous dit, c'est le parc des écrins qui nous le dit.
08:22 Donc on est peut-être antiloups, mais on n'est pas antitous.
08:25 On est pour la nature, autrement on ne ferait pas le métier qu'on fait.
08:28 [Musique]