avec David Revoy (visio), Gee et Booteille
Écrire des livres, dessiner, faire de la musique sous licences libres. On peut vendre ses œuvres ou parfois il est possible de les télécharger pour les regarder, les transformer… On peut être auteur ou autrice à temps plein ? Cela peut être tellement étrange qu’il serait bon de se retrouver pour en discuter.
Conférence-débat dans le cadre de l'évènement "Entrée Libre #3" organisé par et au Centre des Abeilles de Quimper. Ces 3 jours de conférences et d'ateliers libres et gratuits ont eu lieu pour ne plus se sentir démuni.e avec le numérique.
https://www.centredesabeilles.fr/entree-libre3/
Écrire des livres, dessiner, faire de la musique sous licences libres. On peut vendre ses œuvres ou parfois il est possible de les télécharger pour les regarder, les transformer… On peut être auteur ou autrice à temps plein ? Cela peut être tellement étrange qu’il serait bon de se retrouver pour en discuter.
Conférence-débat dans le cadre de l'évènement "Entrée Libre #3" organisé par et au Centre des Abeilles de Quimper. Ces 3 jours de conférences et d'ateliers libres et gratuits ont eu lieu pour ne plus se sentir démuni.e avec le numérique.
https://www.centredesabeilles.fr/entree-libre3/
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 [Musique]
00:10 Alors, bienvenue à tout le monde, je crois qu'on s'est à peu près tous et toutes déjà vu durant ce week-end.
00:17 Durant la prochaine heure, on va tous les trois,
00:21 alors donc David revoit ici présent sur grand écran,
00:25 Simon Dji...
00:27 [Rire]
00:29 à ma gauche et moi bouteille... Gaëtan Bouteille.
00:34 [Rire]
00:36 On va discuter avec vous un petit peu autour de la notion d'auteur libre.
00:42 Qu'est-ce que ça signifie ? Qu'est-ce qu'on peut en dire ? Etc.
00:47 L'idée c'est que ce soit plutôt interactif, parce que si c'est juste discuter entre nous,
00:51 on peut le faire tout le temps.
00:54 [Rire]
00:55 Donc n'hésitez pas à vraiment prendre le micro, vous exprimer tout ça,
01:01 ou pas prendre le micro et souffler une question à quelqu'un à côté pour que la personne la pose à votre place.
01:06 [Rire]
01:07 Enfin voilà, on est sur une papote, on discute tranquillou et ça va être très bien.
01:13 Pour commencer, je propose à ce qu'on fasse juste une courte présentation pour que tout le monde puisse situer qui on est.
01:21 David, est-ce que tu veux commencer ?
01:26 Ah, d'accord. Si tu veux, je demande à Gilles.
01:31 Oui, je veux bien que tu demandes à Gilles, au premier que ça je copierai.
01:34 [Rire]
01:35 Alors, Gilles, qui es-tu ?
01:37 Bonjour, je m'appelle Gilles et je suis...
01:40 [Rire]
01:43 Alors je suis auteur sur Internet depuis longtemps, depuis 2009.
01:50 Donc je suis auteur de plein de choses, principalement de bandes dessinées à la base,
01:53 mais j'ai aussi écrit des romans, j'ai aussi fait de la musique, je fais des chroniques radio,
01:57 et j'ai publié un jeu vidéo pas plus tard qu'il y a 4 jours.
02:02 Et pendant assez longtemps, j'ai fait ça sur mon temps libre en étant salarié par ailleurs,
02:09 enfin même étudiant au début.
02:12 Et il y a deux ans de ça, c'est ça, c'était en 2021, j'ai tout plaqué pour faire auteur à plein temps.
02:19 Et voilà, pour le moment je creuse encore un peu dans mon épargne,
02:23 mais j'ai quand même espoir d'un jour réussir à en vivre, on sait jamais.
02:26 Voilà. David, du coup ?
02:28 [Rire]
02:30 Eh bien, je m'appelle David Revoy, je suis l'auteur de la bande dessinée Pepper et Carotte,
02:36 qui est un webcomic, c'est-à-dire une bande dessinée sur Internet à la base,
02:40 qui a la particularité de se faire publier sous licence libre,
02:47 et ça a donné lieu à des publications après-papiers.
02:52 Et puis voilà, ça fait 9 ans maintenant que je fais Pepper et Carotte,
02:57 je fais partie de la chambre des auteurs qui en vivent,
03:01 et voilà, en gros je suis là pour en parler de ça.
03:06 Très bien, merci.
03:11 Et moi, je suis Boutet, je ne suis pas auteur.
03:14 [Rire]
03:17 J'écris que dalle, j'ai aucun talent de dessinateur.
03:20 Par contre, je bricode, merci Yann pour le terme,
03:28 je bricode assez régulièrement, une fois de temps en temps,
03:32 des petits logiciels, dans ce moment c'est des extensions pour Firefox,
03:38 sous licence "what the fuck you want",
03:43 donc faites ce que vous voulez, c'est du domaine public.
03:46 Et en parallèle, je suis membre bénévole de l'association Framasoft,
03:52 et aussi je viens de créer une auto-entreprise pour faire de l'accompagnement
03:57 de structures, pour des structures, à leur transition vers du numérique éthique,
04:04 c'est-à-dire aider les structures à sortir de Google, Facebook, tout ça,
04:08 pour faire en sorte qu'il y ait de plus en plus de personnes
04:11 qui seraient appropriées de leurs outils.
04:14 Voilà, je ne sais pas si déjà il y a des questions sur ces trois présentations
04:18 qui vous viennent.
04:21 Non ? Ok.
04:24 On peut peut-être commencer par parler de, qu'est-ce qui,
04:30 je vais commencer par toi David, qu'est-ce qui t'a mené à Paper et Carrot ?
04:35 C'est-à-dire que tu as créé une BD qui aujourd'hui, tu l'as dit,
04:39 tu arrives à en vivre, mais c'est quelque chose qui est assez impensable
04:43 encore aujourd'hui pour beaucoup de personnes de se dire
04:45 "je vais faire une BD et en vivre", et comment est-ce que tu en es venu du coup
04:49 à ce point-là ? C'est-à-dire de faire Paper et Carrot.
04:53 Alors voilà, tout le monde est assis, tout le monde a un oreiller,
04:56 ça va être une longue histoire.
04:59 C'est un déroulement de processus qui n'arrive pas du jour au lendemain
05:04 et surtout de faire de la bande dessinée sur le net, en libre,
05:08 avec des outils libres, tout ça ce sont des pierres qui s'ajoutent
05:12 au fur et à mesure du temps.
05:14 Mon parcours vient en fait de la peinture, peinture de chevalet,
05:21 au tout début, j'ai commencé à faire des portraits de rue
05:24 et de la peinture de chevalet, je vais aller très vite dessus
05:27 dans mes jeunes années.
05:29 Ensuite j'ai eu la chance avec le début d'Internet de commencer
05:33 à faire des œuvres sur le numérique au début, c'est-à-dire avec
05:38 la tablette graphique, de rencontrer l'univers de la tablette graphique,
05:40 de faire des dessins par ce biais-là.
05:44 En faisant des dessins par Internet, j'ai commencé avec les outils
05:49 propriétaires, c'est-à-dire ce que je trouvais, les premières licences
05:54 qu'on appelait Photoshop Elements, c'était des choses qui venaient
05:57 avec la tablette, des logiciels qui venaient avec la tablette
06:00 de façon gratuite, qui m'ont poussé après avoir le Photoshop
06:03 à payer la licence complète.
06:05 Au fur et à mesure, mes travaux fantaisie se sont vus sur le net,
06:09 j'ai commencé à faire de la couverture de livres, du jeu de société,
06:12 un peu de jeux vidéo, j'étais freelance en mode peinture numérique
06:17 et je faisais aussi des tutoriels pour Photoshop, c'est des cours en ligne
06:22 toujours gratuits, et puis surtout en anglais parce que la géométrie
06:26 du net en français à cette époque-là n'était pas encore très grande,
06:29 c'était surtout les forums anglophones sur des questions comme
06:32 la peinture numérique qui rassemblait le plus de personnes.
06:36 J'ai abordé ma carrière comme ça jusqu'au moment où j'ai eu des gros
06:41 problèmes avec mes licences logicielles, la licence Photoshop par exemple,
06:46 parce que je leur ai demandé, je voulais faire un tutoriel,
06:50 le publier dans un magazine, c'est un magazine qui me demandait
06:53 si je pouvais mettre un tutoriel dans leur magazine, mais il fallait
06:56 que les copies d'écran soient en anglais, et moi j'avais la version
06:59 de Photoshop en français, et en appelant Photoshop pour leur dire
07:02 "bon, mais je n'ai pas trouvé l'option pour mettre votre Photoshop
07:04 en anglais, est-ce que vous pouvez me le débloquer ?"
07:07 C'est pour faire des copies d'écran pour un magazine,
07:09 je pensais que ça allait leur plaire, et ils m'ont dit "mais rachetez
07:12 votre licence", savoir que ma licence que je l'ai achetée à l'époque
07:15 à 799 euros, donc pour un petit freelance, ça plombe déjà ça,
07:20 et surtout je vais avoir une anecdote, c'est qu'à un moment donné
07:23 je vais mettre une machine de supermarché dans mon caddie
07:26 pour changer mon ordinateur, parce que mon ordinateur il est un peu vieux,
07:32 et puis je vois une promotion comme ça, vous savez en pyramide
07:35 dans le hall de supermarché, et sur un coup de tête je me dis
07:38 "allez, là j'ai bien gagné, je vais m'en prendre un nouveau".
07:41 Et je n'avais pas vu que... si j'avais vu qu'il était livré
07:44 avec Vista cet ordinateur-là, mais moi j'avais ma licence XP Pro à l'époque,
07:48 donc je me suis dit "bon, quoi qu'ils me mettent là-dessus,
07:51 je le rentre à la maison, je nettoie le disque dur, je remets mon XP Pro
07:55 et comme ça tous mes logiciels je les remets".
07:57 C'est simplement qu'une machine qui a un meilleur processeur,
08:00 une meilleure carte graphique, voilà.
08:02 Et là je me suis aperçu que ça ne marchait pas du tout comme ça
08:04 parce que celui qui avait fait la carte mère de l'époque, le constructeur,
08:09 n'avait pas fait de driver pour XP Pro, c'était que pour Vista.
08:12 Donc j'étais un peu obligé avec cette machinade sous Vista
08:15 pour qu'elle fonctionne, et tous les logiciels que j'avais,
08:18 donc c'était Photoshop, CS2, Painter, Neuf, quelque chose comme ça,
08:22 n'étaient pas compatibles avec Vista.
08:24 Ils avaient des Upgrade Packs, c'était des packs un peu moins chers,
08:28 à peu près 300€ par pack, ça n'amenait aucune fonctionnalité nouvelle.
08:33 C'était simplement pour être compatible avec Vista, pour ne pas buguer.
08:37 Beaucoup de gens essayaient de bricoler,
08:39 à mettre ces versions XP sur Vista, dans des modes compatibilité,
08:42 parce que c'était un peu le truc de Microsoft,
08:44 d'essayer toujours d'être hétro-compatible, mais ça marchait mal,
08:47 ça buguait, c'était impenable.
08:50 Et je l'ai très mal vécu, parce que je me suis dit,
08:53 là vraiment, entre les copies d'écran et ça, j'ai l'impression de me faire traire.
08:57 Donc c'est à ce moment-là que je suis passé au logiciel libre,
09:00 qui était vraiment dans un stade, mais très, très, très...
09:04 Ce n'était pas professionnalisé du tout, il y avait plein de fonctionnalités qui manquaient.
09:08 Mais je me suis dit, je mets une machine sous Linux,
09:11 j'essaye de connecter ma tablette graphique.
09:13 Donc déjà, après une semaine à galérer, à comprendre que c'est que Xorg et compagnie,
09:17 parce qu'on est sur des Ubuntu, des versions Hardy et rond,
09:22 donc ça par là, pour les anciens, c'est du très vieux.
09:25 C'est 2007, 2008 par là !
09:29 Donc j'arrive à faire fonctionner la tablette,
09:31 et je me dis, il y a GIMP, il y a des petits logiciels, un MyPaint,
09:36 il y a un fork de GIMP en japonais, des choses que j'arrive à me débrouiller.
09:40 Et ça va attirer la Blender Fondation.
09:42 Alors je ne sais pas si vous connaissez la Blender Fondation.
09:45 Ils font des films en 3D, c'est le logiciel libre qui fait des images de synthèse,
09:50 gratuites, voilà.
09:52 Et pour pouvoir éprouver le logiciel année après année,
09:55 à cette époque-là, ils vont faire des films libres.
09:58 C'est-à-dire qu'ils vont prendre une petite équipe d'artistes de leur communauté,
10:02 les ramener à Amsterdam, et leur dire,
10:04 "Voilà, on est 6 ou 7, et on fait un film."
10:07 Et comment c'était financé ?
10:09 C'était les gens qui préachetaient le DVD du film,
10:12 qui faisait qu'on pouvait faire ce film-là.
10:15 Donc c'est là que je me familiarisais avec le système de crowdfunding,
10:19 c'est-à-dire de personnes qui vont donner de l'argent comme ça par les foules,
10:24 et faire qu'on a un budget pour pouvoir faire du libre.
10:27 Et puis aussi je vais devenir la personne qui va dessiner
10:30 entre le scénario et les modèles 3D.
10:33 C'est-à-dire que c'est un problème qu'on a souvent en 3D,
10:36 c'est que pour que toutes les personnes qui modélisent en 3D,
10:39 qui vont animer, accordent leur violon,
10:42 il faut quelqu'un qui donne une vision un peu,
10:45 et le dessin c'est très flexible pour faire des changements rapidement.
10:49 Donc sur 3 films, je vais travailler avec ça,
10:52 et ces films-là sont sous licence libre.
10:54 Je ne connaissais pas du tout avant ça les licences libres,
10:57 et ça me faisait un peu peur au début, je me suis dit,
11:00 "Tiens, les personnages de ce film libre, tout le monde pourra en faire ce qu'il veut.
11:04 Est-ce que ça veut dire qu'on pourra reprendre mon style ?
11:07 Est-ce que ça veut dire qu'on pourra faire des choses cochonnes avec mes personnages ?"
11:11 Ça m'inquiétait beaucoup au tout début,
11:14 et puis j'ai vu que ça n'apportait pas de mauvaise chose.
11:17 Au contraire, il y avait des fan-arts,
11:19 il y avait des gens qui reprenaient les personnages du film pour des jeux vidéo.
11:23 Dans l'ensemble, je trouvais ça vachement positif.
11:26 Ça a aidé à propager l'univers, les personnages.
11:29 Donc une fois que j'ai commencé à revenir chez moi,
11:34 et à être en dehors de ces films libres,
11:37 c'est sûr que j'avais toujours voulu faire de la bande dessinée,
11:40 j'avais toujours fait des dossiers d'édition que j'envoyais aux éditeurs qui ne marchaient pas,
11:44 et comme j'étais un peu en burn-out,
11:47 parce que je ne faisais pas vraiment ce qui me plaisait au fond,
11:50 ce qui était de faire de la bande dessinée,
11:53 je me suis dit "fais simplement de la bande dessinée en parallèle de ton travail alimentaire,
11:58 mais simplement poste-la sur ton blog,
12:00 et fais-la mais sans aucune concession,
12:03 c'est-à-dire ne calcule pas, il faut un business model, il faut ça."
12:07 Je me suis dit "je la mets en libre,
12:09 et puis je la fais que avec mes outils libres."
12:12 Et c'est ainsi que j'ai commencé,
12:14 quelques épisodes à droite à gauche,
12:16 j'ai tatillonné sur des formules,
12:18 jusqu'à avoir Pepper et Carotte,
12:20 un épisode d'une petite sorcière avec son chat,
12:22 et celui-là est devenu viral d'un seul coup.
12:25 Bonne synchronicité de l'époque,
12:28 les youtubeurs, les personnes sur Youtube,
12:30 commençaient elles à...
12:33 donc à avoir des revenus qui étaient en baisse avec la régie publicitaire,
12:39 donc il se créait un outil qu'on appelle Patreon,
12:42 qui permet comme ça à des personnes de donner une petite pièce par contenu ou par mois.
12:47 Et moi je vais dire "c'est génial ça pour les auteurs de vidéos,
12:50 mais ça pourrait marcher aussi pour la BD."
12:52 On fait des épisodes, et c'est par épisode ou par mois
12:55 qu'on va pouvoir soutenir un créateur ou une créatrice.
12:58 Et je me mets là-dedans, après le troisième épisode,
13:02 je me mets aussi dans d'autres choses comme la traduction de Pepper et Carotte,
13:06 comme d'autres projets comme ça pour l'ouvrir au maximum,
13:10 et c'est ainsi que j'arrive avec une BD libre, Pepper et Carotte,
13:15 qui après se fera éditer par Glénat, mais ça c'est une autre histoire.
13:20 Voilà.
13:22 Désolé pour le long tunnel !
13:25 Donc la question c'était comment on est venu à faire du logiciel...
13:29 de l'art libre, pas du logiciel.
13:32 Je vous disais juste, est-ce qu'il y a peut-être une question avant ?
13:36 Histoire qu'on... Non ? Pas de question avant ? Ok.
13:40 Ouais, donc moi ça m'a aussi rappelé les trucs à Dalit,
13:43 parce qu'on a fait, pour la petite histoire, une interview à la radio tous les deux,
13:46 à la radio de l'april, il y a quelques mois,
13:49 et je pense qu'on va sans doute répéter un peu des trucs.
13:52 Moi, c'est le cliché classique, mais je dessine depuis que je suis tout petit.
13:57 Et pourquoi je suis venu à l'art libre ?
14:01 Je vais redire la même chose que ce que j'avais dit à la radio,
14:04 mais quand j'y avais réfléchi, j'avais identifié trois coupables.
14:07 Le premier, c'est Napster.
14:10 Ça, c'est quand j'étais jeune, j'avais une dizaine d'années,
14:13 mais c'était le début d'Internet, on commençait à avoir Internet,
14:16 et on a utilisé Napster, qui était, pour les gens qui ne connaissent pas,
14:21 c'était le tout premier logiciel qui a vraiment été populaire
14:24 pour partager de la musique, avec le format MP3 qui est devenu le standard de l'époque,
14:30 donc partager de la musique de manière complètement illégale,
14:33 mais à l'époque, il n'y avait vraiment aucun cadre législatif,
14:37 il n'y avait rien, et c'était la fiesta absolue.
14:40 Alors c'était rudimentaire, quand vous téléchargez une chanson à la fois,
14:44 de toute façon le débit n'était pas fou,
14:46 si le téléchargement coupait, vous aviez une chanson sans la fin,
14:48 et c'est tout, vous ne pouvez pas reprendre.
14:50 Mais moi, du coup, j'ai trouvé ça super,
14:54 on a téléchargé plein de trucs, on a découvert plein de choses comme ça
14:57 avec ma grande sœur à l'époque.
15:00 Et peu de temps après, il y a eu toutes les législations anti-téléchargement,
15:05 pas que les législations, il y a eu aussi toute la pub anti-téléchargement,
15:08 "Vous ne téléchargez pas une pizza", alors que si, en plus, si on pouvait, on le ferait.
15:13 [Rires]
15:15 Et moi déjà, à ce moment-là, ça ne me convaquait pas, ces trucs-là,
15:19 je me disais non, mais enfin, je trouvais ça chouette qu'on puisse avoir de la musique
15:24 de manière gratuite, de tout se partager sans aucune contrainte.
15:27 J'avais bien confiance que ça posait des soucis en termes de modèle économique,
15:31 mais pour moi, c'était un autre problème.
15:33 Donc déjà, c'était un premier truc qui m'avait mis sur la voie du libre, je pense,
15:37 même si c'était encore très loin.
15:40 Ensuite, le deuxième prépa, je pense, c'est pareil,
15:45 la deuxième fois qu'on m'a parlé de ça, c'était Windows Vista.
15:48 [Rires]
15:50 J'étais en classe prépa, c'était en 2007, je crois,
15:54 et j'ai eu mon premier ordi portable, c'était la première fois que j'avais un ordi à moi,
15:58 c'était super, qui était avec XP, et il y avait marqué "Vista compatible".
16:02 Du coup, je me disais "Je passerai peut-être sur Vista",
16:04 et en fait, il a commencé à y avoir tous les retours sur Vista qui étaient déplorables.
16:08 Et j'avais un copain en ce moment-là en prépa qui connaissait un petit peu Linux,
16:13 et qui me disait "Tu devrais essayer de mettre Ubuntu sur ta machine, c'est sympa aussi".
16:17 Et du coup, j'ai essayé, j'ai mis un dual boot, c'était fait, il se tifonne, c'était la 7.4.
16:22 Ce qui est pratique avec Ubuntu, c'est qu'on se souvient de l'année, du coup.
16:25 Je sais très bien que c'était 2007, en avril.
16:27 Et j'ai beaucoup aimé, je ne suis jamais passé sur Vista, du coup.
16:31 XP était mon dernier Windows.
16:33 Et donc, j'en viens du coup à la bande dessinée proprement dite.
16:39 Donc, après la prépa, je vais en école d'ingénieur.
16:44 Et en prépa, évidemment, j'avais pas mal arrêté toutes les activités un peu annexes.
16:48 Les gens qui ont fait une prépa savent que c'est un peu bourrin.
16:52 Et en école d'ingénieur, je me retrouve à avoir beaucoup de temps libre, finalement.
16:55 Et je retrouve cette vieille tablette graphique que j'avais eue quand j'étais ado aussi,
16:59 et je me dis, tiens, je vais la dessiner un petit peu, ça pourrait être sympa.
17:02 Donc, j'ai du temps et je me mets à faire un blog qui s'appelle le dictionnaire, à ce moment-là.
17:06 Et sur le moment, il n'y a absolument aucune licence.
17:09 En fait, je ne me pose pas la question.
17:11 Par contre, je suis déjà pas mal dans le logiciel libre.
17:15 Du coup, on est quelques années après.
17:17 Et je suis complètement sur Ubuntu.
17:20 Donc, ma tablette Wacom, j'ai mis aussi un petit peu d'éplombe à la configurée pour Ubuntu à l'époque.
17:25 Maintenant, ça marche tout seul.
17:28 Et en fait, au bout de quelques semaines où je fais le dictionnaire, c'est un blog quotidien,
17:32 je suis contacté par une asso, qui est le troisième coupable de tout ça, qui s'appelle Framasoft.
17:37 Et qui me disent, "Vous aurez bien que tu publies de temps en temps des dessins sur Framablog aussi",
17:44 que je connaissais à ce moment-là.
17:46 Donc, une fois par semaine, je crois que c'était.
17:49 Mais bon, si, par contre, juste une chose, si tu veux publier sur Framablog, il faut que ce soit sous licence libre.
17:54 Et j'y ai réfléchi, évidemment.
17:57 Mais pas si longtemps.
17:59 Parce que pour moi, c'était devenu un peu évident.
18:01 Et notamment, tout ce que je disais sur Napster et compagnie, plus le fait que j'étais maintenant éduqué au logiciel libre.
18:06 Pour moi, c'était logique que la culture soit disponible librement.
18:10 Et en plus, je trouvais ça assez hypocrite d'avoir passé des années à télécharger, pirater plein de machins,
18:15 et puis au moment de faire quelque chose, dire "Non, non, non, non, et moi par contre, c'est verrouillé".
18:18 Donc, c'est venu comme ça.
18:21 Et ça n'a jamais trop changé.
18:23 J'avais choisi la Baïessa, la Creative Commons Baïessa, qui est une licence...
18:28 Le terme a fait des baillères, mais une licence virale.
18:31 Notamment parce que j'avais quand même ce petit truc de venir...
18:35 Moi, je veux bien donner des trucs de manière libre et tout, par contre, je ne veux pas qu'on en fasse...
18:39 Je ne veux pas que ce soit récupéré par des gens qui ne font pas de libre.
18:42 Donc, c'est Baïessa, Creative Commons Baïessa.
18:47 Donc, "baï", ça veut dire "par quelqu'un", donc c'est l'attribution.
18:51 Et "sa", ça veut dire "share alike", donc c'est "partage dans les mêmes conditions".
18:55 C'est-à-dire que si quelqu'un utilise votre oeuvre, il ou elle en a parfaitement le droit.
19:00 Mais doit partager sous la même licence.
19:04 Donc, sous licence libre.
19:06 C'est-à-dire qu'on ne peut pas prendre une oeuvre en "sa" et la mettre sous copiarite classique,
19:11 ce qui est possible avec une cc-baï tout court, ce qu'utilise d'ailleurs David.
19:15 C'est pas une critique, hein !
19:18 Voilà.
19:21 Oui ?
19:23 Je rebondis là-dessus ?
19:25 Tu peux, vas-y.
19:27 Ah, oui, alors...
19:29 J'adore la cc-baï "sa", et d'ailleurs c'est là où est mon cœur.
19:33 Simplement en ayant travaillé dans le jeu de société et la couverture de livres avant,
19:39 je savais qu'il y avait un impératif, c'est que quand on fait une couverture de livres,
19:43 il va y avoir l'éditeur qui va y mettre son logo, forcément, dans le pied de page,
19:47 ou qui va y mettre une titre aille qui lui est propre, ou un style qui est propre à sa collection.
19:53 Et je me suis dit que dès le début, si je mettais en cc-baï "sa",
19:58 j'aurais des problèmes dans la façon que la "sa" demanderait que sa maquette,
20:05 vu que c'est un dérivé de la couverture, devienne aussi quelque chose qu'il doit partager,
20:12 qu'elle, en tant qu'éditeur ou éditrice, sous licence cc-baï "sa".
20:17 Ce qui me semblait complètement irréaliste par rapport au marché de l'édition,
20:22 et une chose que je ne voulais pas m'interdire,
20:25 c'était que Pepper & Carrot puisse devenir comme ça,
20:30 quelque chose de pas éditable par le mainstream éditeur du moment.
20:35 Par exemple, je pense que la cc-baï "sa" aurait contraint les éditions Glénat
20:42 à avoir leur logo considéré comme du cc-baï "sa".
20:46 Parce qu'il y a des règles d'encapsulation, je sais, qui sont assez détonnées,
20:54 mais c'est difficile de communiquer dessus.
20:58 Donc il y avait ça, et je voulais aussi que des créateurs de jeux vidéo indépendants
21:02 puissent vendre leurs jeux Pepper & Carrot sans avoir forcément à ouvrir.
21:07 Parce que je sais que le monde du jeu vidéo est très difficile quand c'est open source.
21:11 Donc je me suis dit que ça va peut-être encourager des mini-jeux vidéo.
21:15 Donc ça a été en connaissance de cause que je l'ai mis qu'en cc-baï.
21:18 Et donc en cc-baï, ça veut dire que je ne demande que l'attribution.
21:22 C'est-à-dire que pour réutiliser Pepper & Carrot, je demande à ce qu'on me dise
21:26 "C'est quelque chose que j'ai réutilisé de Pepper & Carrot,
21:29 et ça a été fait par David Revoix, et voilà, c'est ma dérivation."
21:33 Les personnes peuvent le faire comme ça. Il faut simplement qu'ils puissent ne pas dire
21:37 "Ah tiens, c'est Pepper & Carrot, en fait, c'est moi qui l'ai fait."
21:40 Simplement garder l'attribution des personnes qui l'ont fait.
21:44 Tu viens de parler de jeux vidéo, et ça me fait marrer, parce que justement,
21:48 je voulais parler du jeu vidéo que Djee vient de sortir.
21:52 Et évidemment, on parle de licence, tu parles du fait qu'il y a une difficulté
21:57 à vendre un jeu vidéo, à récupérer du contenu s'il n'est pas totalement libre
22:05 pour pouvoir vendre le jeu vidéo. Et justement, Djee, j'ai envie de te poser
22:09 des questions autour de ton jeu vidéo. Tu ne l'as pas sorti sous licence libre.
22:13 Est-ce que c'est pour des raisons similaires à celles décrites par David ?
22:16 Explique-nous.
22:18 Oui, c'est exactement ça. Et du coup, moi aussi, ça m'a fait sourire quand David m'a dit
22:21 "Ah oui, pour le jeu vidéo indépendant, pas vrai ?"
22:24 Donc, oui, le jeu vidéo que j'ai publié, quand j'ai commencé à imaginer le faire,
22:30 pour moi, c'était évident que ce serait un jeu vidéo libre.
22:34 Et ce qui a changé entre-temps, c'est le fait que je suis passé à 100%
22:38 comme auteur, comme je le disais, et que j'avais plusieurs plans pour essayer
22:42 de financer mes activités d'auteur, notamment faire du dessin à la commande.
22:47 Je vends des bouquins, j'en ai plein ici, si vous voulez m'en acheter
22:50 on s'en hésitait pas. Et j'ai du financement participatif.
22:54 Donc David parlait de Patreon, moi j'étais sur Tipeee, Utip,
22:58 qui malheureusement a fermé, Libérappé, tout ça.
23:02 Et il se trouve que le bilan après presque deux ans est plus positif,
23:08 si on va voir le verre à moitié plein. Mais négatif au sens où pour le moment,
23:12 si ça continue comme ça, il y a quand même un moment où le livret A va atteindre
23:15 le niveau zéro, et qu'il va falloir que je trouve un moyen de financer ma vie.
23:21 Et du coup c'est vrai que j'ai eu un peu une peur, je sais pas si elle est justifiée,
23:29 mais de me dire que si je sortais le jeu vidéo comme ça, en publiant tout,
23:32 sous licence libre, il y allait quand même avoir pas mal de monde du milieu du livre
23:36 qui l'achèterait juste part et qui le compilerait, même si je me doute
23:40 qu'il y en aurait qui me ferait des dons, mais je me dis pas forcément tout le monde.
23:44 Et je me suis dit, je vais faire en sorte quand même d'inciter au maximum à l'achat.
23:48 Et c'est vrai que je me suis dit, de fait, je vais pas publier les données
23:51 sous licence libre pour le moment. C'est-à-dire que dans ma tête,
23:54 ça va forcément finir par être libre. Donc j'ai pas donné de date,
23:58 mais raisonnablement, je pense que ce sera fin de l'année.
24:01 Je pense que ce sera le cadeau de nouvelle de fin d'année.
24:04 Par contre, le moteur du jeu est libre, donc vous pouvez acheter le jeu,
24:08 choper les données dans le jeu, recompiler le moteur si vous voulez être sûrs
24:12 que je n'abîme pas de bitcoin avec le code. Mais je ne le fais pas.
24:16 Mais c'est discutable, j'en suis bien conscient.
24:21 C'est vraiment la toute première entorse que je fais à la licence libre.
24:25 Je pense que c'est une entorse qui est valable dans ce que tu dis juste après.
24:33 Et je pense que c'est tel quelque chose qu'il faudrait que tu communiques
24:36 autour de Superfluo Returns, ton jeu. C'est que de montrer une sorte de barre,
24:41 de progression, en disant qu'à partir d'un certain nombre de ventes,
24:44 j'aurais estimé avoir un retour sur ce que j'ai investi comme développement dedans
24:50 et il deviendra libre. Je pense que c'est ce qu'avait fait aussi la Blender Foundation
24:55 quand ils ont libéré Blender, une sorte de crowdfunding pour dire
24:58 on va libérer le code propriétaire, mais pour le rendre solvable,
25:01 la compagnie qui l'avait fait.
25:04 On m'avait suggéré ça aussi, j'aimais moins quelque part,
25:07 j'ai un peu l'impression de prendre le jeu en otage en faisant ça.
25:10 "Tant que j'ai pas eu tant de pognon, il est... "
25:13 [Rires]
25:16 Et du coup, le côté temporel me paraissait un peu moins conditionné.
25:22 Et en plus plus raccord avec la réalité qui est que soit le jeu a bien marché,
25:26 auquel cas c'est cool, j'aurai assez de fonds pour continuer mes activités,
25:31 soit il a pas marché, auquel cas de toute façon j'en aurai pu assez,
25:34 autant le libérer.
25:37 - D'accord.
25:40 Mais justement, en communiquant sur le fait que peut-être à Noël tu vas le libérer,
25:45 enfin à terme forcément tu vas le libérer,
25:48 est-ce que t'as pas peur que ça encourage certaines personnes à se dire
25:51 du coup on va attendre que le code soit libéré pour jouer ?
25:55 - Alors si peut-être, mais c'est aussi pour ça que j'ai pas mis un délai trop court.
26:02 C'est-à-dire que là il faut quand même attendre Noël,
26:05 il y aura plein de gens qui vont jouer, il va y avoir des streams,
26:08 et en vrai si tu veux pas te faire spoiler, il faut quand même mieux le prendre bientôt.
26:12 Et autre chose, c'est que j'ai principalement communiqué sur le fait que les données seraient libérées
26:16 auprès de la communauté qui me suit sur Greaseboy, c'est-à-dire les libristes,
26:20 les gens qui sont ici, et que j'espère vraiment toucher une communauté bien plus large
26:25 avec le jeu vidéo, et je pense qu'une communauté qui pour le coup
26:29 probablement ne sait pas ce que c'est que l'art libre et s'en fout.
26:33 Donc voilà.
26:35 - Et ce qui est pas aussi que c'est Noël 2025.
26:38 - Juste, du coup, je te passe le coup juste après.
26:43 Je pense aussi que ce qui est intéressant, c'est que dans les communautés
26:47 à la fois libristes et du jeu indépendant, je pense que beaucoup de personnes vont acheter,
26:52 enfin si elles ont les moyens, vont acheter le jeu, ne serait-ce que pour soutenir l'auteur qui est derrière,
26:57 ou l'autrice, et du coup,
27:01 je pense que les gens qui n'achètent pas le jeu là, c'est juste qu'ils n'ont pas les thunes,
27:06 et puis tu peux rien leur vendre.
27:09 - J'avais juste une autre question, parce que j'ai vu que tu le diffuses sur le Play Store et sur Steam.
27:17 Est-ce que... alors Play Store, il y a des applications libres, open source sur le Play Store,
27:24 donc je sais que ça te pose pas de soucis, mais au niveau de Steam par exemple,
27:27 est-ce que Steam pose problème ou non avec le...
27:32 - Alors Steam pose problème si tu publies, ils veulent pas que tu publies quelque chose
27:38 qui utilise des bibliothèques, justement, ils veulent que le code source soit fermé, me semble-t-il.
27:44 Donc tu n'utilises pas de logiciel qui soit sous GPL en tout cas, pour pas que ce soit contaminant.
27:49 Là où c'est pas un souci pour moi, c'est que je suis le seul et unique auteur du code,
27:54 et que de fait, la version que je mets sur Steam, elle a une licence propriétaire.
27:57 C'est tout. C'est un code qui est sous double licence.
28:00 Par contre, ça poserait problème si je commençais à accepter des contributions,
28:03 parce qu'il faudrait que les personnes soient d'accord pour avoir une version fermée.
28:07 Enfin, je connais assez bien ce truc-là, parce que le boulot que j'avais avant de venir en Terra Plaintemps,
28:13 c'était une petite boîte qui faisait du logiciel de géométrie.
28:16 Pourquoi tu rigoles ?
28:18 - Je pensais à "Auvach".
28:20 - "Auvach" ?
28:22 - J'ai l'impression que tu avais fait un truc pour "Auvach".
28:24 - Ah oui, ok.
28:26 Non, je vais pas parler de ça, ça serait trop compliqué.
28:29 Et on publiait un logiciel qui s'appelait "Sigal",
28:34 qui est dans les dépôts de plein de distributions des biens des compagnies.
28:37 C'est un logiciel libre, mais il a aussi une licence propriétaire qu'on vendait à d'autres entreprises,
28:43 qui ne voulaient pas, parce qu'il est sous GPL sinon,
28:45 pour les logiciels qui ne voulaient pas ouvrir leur code, puisque GPL est contaminante,
28:49 on leur vendait une version propriétaire.
28:51 Donc c'est pas un souci d'avoir un logiciel avec des licences.
28:54 Par contre, Bouteille, tu n'as absolument pas fait ta présentation.
29:01 On a tellement...
29:03 Pourquoi tu es venu au Libre ?
29:05 - Comment j'en suis venu au Libre ?
29:07 Je crois que c'est un choix purement politique.
29:14 J'ai toujours grandi en piratant les trucs, parce que je n'avais jamais la thune pour acheter.
29:19 Donc déjà, l'accès à la culture était conditionné par le fait de pouvoir y accéder,
29:24 donc je devais pirater pour pouvoir accéder aux choses.
29:26 Donc j'ai toujours eu cette culture du "c'est bien que la culture au sens large soit accessible à tout le monde".
29:38 Et en grandissant après, j'ai appris à programmer quand j'étais adolescent sur un site qui s'appelait "Le site du zéro".
29:46 Qui s'appelait "Le site du zéro".
29:48 On le regrette beaucoup.
29:51 Et en fait, ce site, c'est ce qui m'a permis de faire le gros de ma culture numérique.
30:01 C'est ce qui m'a permis de prendre à développer à 14-15 ans,
30:04 d'avoir un site internet qui me rapportait de l'argent grâce à Google,
30:08 merci les publicités, quand j'en avais 17.
30:11 Quand plus tard, j'ai commencé à me politiser sur les enjeux du numérique,
30:22 notamment m'apercevoir du capitalisme de surveillance, de ce que faisait Google,
30:27 des problématiques de la publicité, et tout ce genre de choses.
30:31 Non seulement je ne pouvais plus vivre de la publicité, donc j'ai fermé mon site,
30:34 et en parallèle, à chaque fois que j'avais envie de bidouiller quelque chose,
30:38 je me disais qu'en fait ça peut servir à d'autres personnes,
30:41 donc autant le proposer en ligne.
30:44 Et c'est ce qui est arrivé il y a à peu près 5 ans, je crois.
30:48 Je me boycottais de YouTube depuis une dizaine d'années à peu près,
30:56 c'est-à-dire que je n'utilisais jamais YouTube.
30:59 Non, du coup ça faisait 5 ans que je boycottais YouTube à l'époque.
31:02 Et en fait, j'en avais marre de recevoir des liens YouTube en permanence
31:08 qui m'emmenaient vers de la musique, je ne les ouvrais jamais,
31:12 jusqu'à ce que je découvre un loger en service qui s'appelle Invidius,
31:15 qui permet d'accéder à YouTube sans subir ni la publicité ni le pistage de Google,
31:20 enfin le gros du pistage de Google.
31:22 Et là je me dis génial, je peux enfin réaccéder à YouTube
31:27 d'une manière qui me convienne.
31:29 Elle n'est pas parfaite la méthode, mais au moins je me sens moins sale.
31:33 Sauf que ce n'était jamais automatique.
31:38 Tout le monde m'envoyait des liens YouTube,
31:40 j'allais sur un site, c'était la vidéo YouTube qui se chargeait automatiquement.
31:44 Et ça créait à chaque fois des connexions avec YouTube qui me gênaient.
31:50 Et donc je me suis dit, je vais chercher une petite extension Firefox
31:54 qui va permettre de faire la redirection automatiquement.
31:56 Et je n'en trouve pas.
31:58 Je trouve des extensions qui essaient de faire ça,
32:02 mais qui le font à mon sens mal,
32:04 c'est-à-dire qu'elles envoyaient encore des données à Google,
32:07 elles ne marchaient pas très bien, etc.
32:10 Et donc je me dis, je vais faire moi-même une extension Firefox,
32:15 je vais découvrir comment ça fonctionne.
32:17 Et je crée une extension qui s'appelait à l'époque Invidition,
32:20 et qui permettait de rediriger automatiquement YouTube vers Invidius.
32:26 Et je l'ai mise en sous-licence "Do what the fuck you want",
32:31 parce que je m'en foutais, je voulais juste partager ce qui me servait à moi.
32:35 Et en fait l'extension est devenue vachement populaire
32:40 et a vachement contribué à rendre connus les services de type Invidius.
32:47 Depuis, il y en a plein qui sont arrivés,
32:50 il y a Neater, une alternative pour accéder à Twitter,
32:53 sans compter Twitter et sans se faire salir par Elon Musk, etc.
32:59 Il y en avait pour Instagram à une période,
33:02 il y en a pour Medium, pour Reddit,
33:06 il y en a plein des services comme ça aujourd'hui.
33:09 Et bref, grosso modo, je me suis dit, si ça peut servir à d'autres,
33:14 il n'y a aucun intérêt à ce que je le garde pour moi,
33:16 et autant le publier, et en plus, ça m'a permis d'améliorer le logiciel,
33:20 ça m'a permis d'avoir des retours.
33:22 Par contre, il y a un truc que je n'avais pas anticipé,
33:24 et c'est ça qui était aussi intéressant,
33:26 c'est que ça a commencé à me poser la charge mentale assez forte.
33:30 C'est-à-dire que quand il y a 5000 personnes qui utilisent au quotidien le logiciel,
33:35 notamment dans une communauté où il y a beaucoup de libris,
33:38 de développeurs, de développeuses,
33:40 il y a beaucoup de personnes qui me faisaient des retours
33:43 de "là ça ne marche pas exactement comme j'aimerais,
33:45 là ça bug, là j'aimerais cette fonctionnalité".
33:48 Et moi, comme je le disais tout à l'heure, je bricote,
33:51 je fais que coder une fois de temps en temps aussi,
33:54 je n'ai pas beaucoup de temps pour coder,
33:57 et le temps de maintenance de cette extension est devenu vraiment problématique dans le livre.
34:03 Donc, deux ans après ça, quand une autre extension qui faisait le même taf est sortie,
34:09 j'ai dit "ok, je lève le pied, allez sur l'autre extension,
34:13 moi je ne maintiens plus, débrouillez-vous,
34:15 il y a quelque chose qui me convient à côté".
34:18 Mais c'est un vrai questionnement que je me suis posé,
34:22 que je me pose encore aujourd'hui autour du logiciel libre,
34:25 c'est la charge mentale que ça peut poser sur une seule personne,
34:30 ne serait-ce que parce qu'on essaie de bien faire.
34:34 Et voilà.
34:36 Oui, totalement.
34:39 Quand on commence à avoir plein de petites repositories,
34:41 ces petits projets comme ça,
34:44 moi j'avais par exemple un décorateur de fenêtres pour XFCE,
34:48 j'ai eu aussi un ensemble d'icônes pour KDE,
34:52 plein de petites repositories,
34:55 et puis on se dit "allez, c'est fait maintenant",
34:58 et il commence à y avoir des bug reports qui arrivent,
35:01 c'est-à-dire des personnes qui font des rapports d'erreurs,
35:03 et qui disent "ça serait bien qu'il y ait une nouvelle icône dedans,
35:06 ou que la décoration de fenêtres déconne avec cette nouvelle technologie".
35:11 Ça devient très difficile de tout maintenir.
35:14 Donc ouvrir des nouveaux services,
35:17 c'est toujours beaucoup plus facile que les maintenir à long terme.
35:21 Ça m'a aussi fait beaucoup cette réflexion-là,
35:23 maintenant quand j'ai des petits morceaux de code que j'aimerais partager,
35:27 je sais que ça vient avec une maintenance à long terme.
35:30 Il y a Marien, un membre bénévole de Fromasoft aussi,
35:36 avec qui on avait discuté un petit peu de ce sujet-là,
35:39 et qui lui disait qu'il publiait son code,
35:42 mais il n'acceptait pas les retours des gens
35:45 pour justement ne pas s'imposer la charge mentale,
35:48 de devoir maintenir le code et ce genre de choses.
35:51 Je trouve que c'est un entre-deux intéressant,
35:54 quand on a juste envie de partager ce qu'on a fait,
35:56 mais qu'on ne se sent pas en capacité, dans l'énergie,
35:59 de gérer tout l'aspect communautaire,
36:01 qui est au final l'un des aspects les plus prenants
36:03 dans toute action de culture libre.
36:08 Ça me rappelle aussi ce que tu me disais il y a quelques jours, David,
36:13 sur les traductions, le temps que te prend la gestion des traductions
36:18 de Pepper & Carrot, tu peux peut-être nous en dire un peu plus ?
36:22 Le projet Pepper & Carrot a été pensé à partir de l'épisode 6
36:29 avec un système de traduction.
36:31 C'est quelque chose que je ne voyais pas dans la bande dessinée,
36:34 à chaque fois les personnes remaquillaient les planches
36:36 et ajoutaient du texte au-dessus.
36:38 J'ai voulu que la planche graphique et la couche de texte
36:41 soient complètement séparées, afin que les personnes puissent éditer
36:45 la couche de texte de façon séparée.
36:49 En mettant tout à disposition, avec une méthode assez facilitée au début
36:55 pour pouvoir traduire, ça fait qu'il y a eu pas mal de langues
36:58 qui sont arrivées.
37:00 Actuellement le projet en est à 65 langues,
37:03 mais je dirais qu'il y en a entre une vingtaine et une trentaine
37:06 qui sont traduites complètement.
37:08 Il peut y avoir entre 80 et 100 personnes qui gravitent autour du projet
37:13 Pepper & Carrot pour la traduire.
37:15 Ça va créer beaucoup de problèmes au niveau jardin, responsabilité.
37:22 Parce qu'une langue, tant qu'on a un traducteur ou une traductrice
37:25 qui est dédiée à plein temps dessus, c'est-à-dire qu'à chaque fois
37:29 qu'il y a un nouvel épisode, elle ne va pas le faire,
37:31 c'est encore facile à gérer, parce que c'est quelqu'un qui peut le faire
37:34 dans son coin.
37:35 Mais dès qu'on va avoir par exemple quelqu'un qui va venir
37:37 pour contredire la traducteur ou la traductrice,
37:41 là ça devient difficile parce qu'il va falloir créer un environnement
37:45 de collaboration pour les deux personnes.
37:47 Et ça peut être jusqu'à trois ou quatre personnes à des fois
37:49 sur cette traduction qui vont carrément avoir besoin de se faire
37:52 des sous-forums pour pouvoir déjà échanger sur comment telle blague
37:56 ou telle chose, ils vont pouvoir la traduire.
37:58 Donc pour arriver à des consensus, c'est très difficile.
38:01 Et ça, ça arrive, comme j'ai dit, par langue, en fonction de l'intérêt
38:05 et des communautés qui gravitent autour.
38:07 Et puis il va y avoir aussi le problème de certaines langues
38:10 qui n'existent que pour des moyens de pression politique,
38:14 pour faire reconnaître des territoires ou des choses comme ça.
38:17 Donc c'est très difficile aussi de leur donner en fait porte ouverte.
38:22 Moi je m'aligne simplement sur les langues que Wikipédia accepte.
38:26 Donc quelque part je botte en touche, je remets un peu ce boulot-là
38:30 de modération à Wikipédia et ça me permet de savoir
38:35 quelles langues peuvent être ajoutées à Paper et Carotte ou pas.
38:38 Et puis bien sûr des langues libres, des langues comme le Klingon de Star Trek,
38:43 qui est une langue propriétaire des studios Universal,
38:45 je ne pourrais pas. Des langues inventées pour des fictions.
38:48 - Et question du coup, c'est quoi comme langue qu'on t'a demandé
38:53 et qui était là pour des rec... Enfin je vois vraiment pas de quoi tu parles en fait du coup.
38:57 - Pour les langues par exemple politisées, par exemple c'était une langue
39:02 qui s'appelait le Sibérian, dernièrement, qui est une langue,
39:07 qui est un mélimélo de dialectes de culture russophone,
39:14 alors là je vais peut-être pas employer des mots très très...
39:17 pour un linguiste très précis.
39:20 Donc en fait, qui vont simplement revendiquer une culture nationaliste sibérienne
39:27 qui est avant l'URSS, le bloc de l'Union Soviétique ou quelque chose.
39:32 Mais qui par rapport aux linguistes, ils vont simplement dire
39:36 "non non non, ça c'est un patchwork" qui essaye en fait d'unir certaines provinces
39:41 qui eux-mêmes ont leur propre dialecte, qui là est reconnu par les linguistes,
39:46 mais qui va essayer de l'unir pour faire une sorte de force politique
39:50 afin de faire une sorte de mouvement politique nationaliste au sein de la Russie actuelle.
39:55 Donc voilà, c'est une sorte d'instrumentalisation linguistique de certaines dialectes,
40:00 de les rassembler, et ça c'est très difficile à voir,
40:03 parce que quand quelqu'un arrive avec une nouvelle langue,
40:06 se renseigner sur tout ce background-là, bon ben heureusement qu'il y a Wikipédia
40:10 qui vont eux savoir, qui ont des linguistes qui vont dire "attention, là non non non,
40:15 ce n'est pas une langue qui est reconnue par les linguistes,
40:18 c'est un patchwork récent collé de ça et ça et ça".
40:22 Si par contre ce patchwork, avec le temps, il commence à y avoir pas mal de locuteurs,
40:26 qu'il commence à y avoir une littérature qui se fait dans ce patchwork-là,
40:29 forcément ça deviendra une nouvelle langue.
40:32 Mais quand on voit que c'est une langue qui est une sorte de récupération politique
40:36 pour agréger des territoires et agréger une culture pour en faire une sorte de pouvoir politique,
40:42 c'est là que ça devient difficile.
40:45 Et on a ça aussi dans les langues hispaniques, on a ça aussi dans pas mal de langues.
40:49 Moi j'ai découvert un monde avec l'ouverture de la traduction de Pepper et Carotte,
40:53 heureusement que j'ai cette fibre un peu geek au niveau linguiste qui se développe,
40:58 contre toute attente, donc ça ne me dérange pas, j'en apprends beaucoup.
41:03 - Ah oui c'est pas toi qui t'attends à devoir pleurer effectivement.
41:07 - Et oui, on peut partager l'écran, je peux montrer un petit peu ce que ça va donner.
41:14 - Et du coup, la gestion de tout ça, de toute la communauté de traduction,
41:20 ça te prend combien de temps ? Est-ce que tu arrives à estimer à peu près le temps que ça te prend,
41:25 ne serait-ce que la gestion des communautés de traduction de Pepper et Carotte ?
41:31 - Alors ça va charger énormément, beaucoup, par exemple à la création de l'épisode.
41:37 Parce qu'à la création de l'épisode, je dois déjà faire toute la bande dessinée
41:41 en couches graphiques séparées et couches textes séparées.
41:45 Et pour l'occupation du texte dans les bulles, ça demande un grand effort de storyboard,
41:50 c'est-à-dire d'anticipation, là je fais une liste simplement de toutes les langues,
41:54 mais je vais pouvoir aussi montrer un répertoire de Pepper et Carotte.
41:59 Donc là, c'est tous les épisodes, ils sont synchronisés, c'est la petite flèche verte qui le montre.
42:04 Et puis je vais prendre un des derniers épisodes, par exemple.
42:09 Donc voilà, je vais avoir toutes les pages qui sont simplement des couches graphiques,
42:14 où là, vous allez voir, il n'y a pas de bulles du tout.
42:18 Et elles vont être toutes à la base de mon dossier, comme ça, toutes ces pages.
42:22 Et elles vont être mariées avec un dossier langue, où dedans il va y avoir,
42:27 en format ISO à deux lettres, toutes les langues qui vont être là.
42:32 Donc à chaque fois qu'une langue va devoir se rajouter, ça va être un nouveau dossier.
42:35 Et ces langues vont marier Pepper et Carotte, la couche graphique avec du texte.
42:43 Donc je vais en ouvrir un, par exemple, la version finlandaise de Kari Letto, pour le citer.
42:50 Ça s'ouvre sur le mauvais écran, voilà.
42:54 Et là, vous allez voir les bulles et le texte qui se rajoute.
42:59 Donc il a fallu faire un système, ça s'est fait avec le temps,
43:04 où le texte peut être bien sûr édité à la volée comme du texte normal.
43:08 Je suis désolé pour la version, je vais rajouter quelque chose pour montrer qu'on peut éditer le texte.
43:12 Et quand le texte déborde, que tout ce qui est les bulles aussi se redimensionne,
43:16 sans perdre de qualité.
43:18 C'est une expérience que j'ai faite par Inkscape, et c'est un logiciel vectoriel.
43:21 Il y a la queue aussi de la bulle, qui est complètement indépendante de la bulle.
43:24 Ça c'est parce que, en bougeant la bulle à certains endroits, des fois, pour les besoins de la traduction,
43:29 on doit pouvoir faire une petite rotation de la queue pour bien qu'elle pointe toujours vers la bouche des personnages.
43:35 - Du coup, tu as un regard sur toutes les versions traduites qui sont faites ?
43:46 Je veux dire, tu repasses derrière toutes les versions ?
43:49 Ou est-ce qu'il y a certaines communautés qui sont suffisamment, en qui tu as suffisamment confiance,
43:54 qui sont suffisamment débrouillardes sur ces aspects-là,
43:58 qui vont toutes seules redimensionner les bulles, remettre les textes à la bonne taille, etc. ?
44:07 - C'est ça qui se passe. Moi, je vais simplement détecter les erreurs graphiques.
44:12 C'est-à-dire, quand il y a du texte qui dépasse d'une bulle, même si je ne comprends pas le langage,
44:16 c'est quelque chose que je peux fixer ou demander à fixer au traducteur ou à la traductrice.
44:22 Mais cette charge, à la création de l'épisode, ça va me ralentir comparé à un auteur normal, mais de beaucoup.
44:30 Parce que je vais aussi gérer une version accessible qui va permettre un extracteur de tous ces textes-là,
44:37 pour que des lecteurs, pour des personnes qui ont des déficiences visuelles,
44:41 puissent l'entendre avec un lecteur sur leur navigateur.
44:45 C'est-à-dire qu'on peut voir la case, mais on peut aussi entendre qui parle.
44:49 Je suis obligé aussi de rentrer, par exemple, qui parle quand je fais une bulle.
44:52 Ce n'est pas seulement une bulle comme un auteur qui va marquer dans la bulle de Pepper quelque chose,
44:58 je dois marquer moi-même dans du code, en identifiant que c'est Pepper, cette bulle, qui va parler.
45:03 Les bulles sont aussi dans un ordre précis, qui sont référencées dans un fichier XML.
45:08 Il y a énormément de travail en supplément.
45:10 Et après, une fois que la traduction est lancée, ça va dépendre des semaines.
45:15 Il y a des semaines où je vais avoir un nouveau traducteur indonésien, par exemple,
45:18 qui va arriver avec toute la traduction en entière.
45:22 Et là, il va falloir que je bosse pour regarder si tout va bien.
45:25 À des fois, je vais avoir... Là, je peux vous montrer quelques langues comme ça.
45:29 Je peux les faire défiler, c'est ça qui est rigolo.
45:35 Voilà, sur cette partie-là.
45:38 J'ai un logiciel qui me permet de vérifier pour un épisode toutes les langues.
45:47 Je peux le faire comme ça, très vite.
45:49 Je fais défiler toutes les langues et ça me montre si jamais il y a un texte qui va en cacahuète.
45:55 Parce que là, sur cet épisode-là, vous avez vu, si je sélectionne, on n'en est à que 12 langues.
46:02 Ce qui est ridicule comparé à l'épisode 1 où là, si je mets langue, on va en avoir les 65 normalement.
46:10 Donc, si je fais la même expérience...
46:13 Avec ce logiciel-là.
46:18 C'est simplement un petit visualiseur d'images,
46:22 mais qui permet de garder le zoom quand on met images d'après et images d'avant.
46:26 Ce qui me permet de zoomer dans une partie de la bande dessinée.
46:29 Il faut que les images aient la même géométrie par exemple.
46:32 Par contre, ça montre qu'il y en a qui changent la géométrie à des fois.
46:35 Mais voilà, on peut voir...
46:38 Ah, ça saute avec la géométrie qui change, je suis désolé.
46:41 Non mais ok.
46:43 Je pense qu'on se rend bien compte qu'il y a un boulot monstrueux
46:46 qui est juste sur le fait de rendre accessibles au final les traductions à tout le monde.
46:54 Est-ce que tu as documenté les méthodes, tout le processus que tu emploies pour pouvoir...
47:03 Ah oui, il y a un onglet "contribuer" sur le site de Pepper & Carrot.
47:09 Et puis bon, il y a la documentation pour la traduction qui est là.
47:12 Et puis on va avoir tout ça.
47:15 Comme ça, elle ne paraît pas très longue, elle paraît sympa, illustrée.
47:19 Mais en fait, avec le temps, ce qu'on a fait,
47:22 c'est surtout qu'il y a des boutons "more info" qui permettent de déplier les placards.
47:28 Comme ça, parce que l'installation des polices d'écriture,
47:31 c'est en anglais parce que c'est un peu la langue franca du projet,
47:34 c'est la langue d'échange qu'on utilise en tous ces traducteurs.
47:38 Et par exemple, pour la police d'écriture,
47:40 ça ne servait à rien de continuer à avoir la méthode pour Windows,
47:43 la méthode pour Mac et la méthode pour Linux complètement dépliées.
47:46 Ça rendait la documentation imbuvable.
47:49 On avait fait une version pour Windows, Mac et puis la version Linux.
47:54 Donc c'est à peu près comme ça.
47:56 Ça permet, si quelqu'un connaît déjà l'étape,
47:59 de dire "je passe à l'étape suivante".
48:01 Et puis voilà, si on déplie tout, ça peut la rendre un peu difficile.
48:07 Et ça, par exemple, "avoid duplicate effort",
48:10 donc éviter l'effort en double,
48:14 c'est quelque chose aussi qui est arrivé sur le projet et qui demande beaucoup de temps.
48:17 C'est-à-dire qu'il y a deux traducteurs qui vont arriver en même temps,
48:20 le même jour, avec la même traduction, mais un style différent.
48:23 Parce qu'ils l'ont fait dans leur coin, séparément.
48:25 Et ça, ça arrive et c'est assez dramatique à ce moment-là.
48:28 Donc d'avoir un forum où tout le monde déclare
48:31 qu'il va commencer à travailler sur quelque chose, c'est primordial.
48:34 Et après, on va collaborer à tout ce monde-là, c'est difficile.
48:38 J'ai une question complémentaire.
48:43 Il y a des questions.
48:44 Ouais. T'as commencé à y répondre avant.
48:47 Là, t'as évoqué la partie graphique, on va dire contrôle qualité graphique de la traduction.
48:52 Comment tu gères ou ne gères pas la partie contrôle qualité de la traduction en elle-même, du texte,
48:59 dans des langues que j'imagine, sur les 65, il y en a certaines que tu ne parles pas.
49:04 Et c'est là que tu te trompes ! Je maîtrise les 65 langues parfaites !
49:12 Non, non, non, non, non, non, non, bien sûr.
49:14 On va voir qu'il y a des langues.
49:16 D'ailleurs, je crois avoir connu dans la voix et dans la silhouette que c'était Lapinège.
49:20 Coucou !
49:21 Non, non, il y a des langues magnifiques.
49:26 Par exemple, celle-là, j'adorerais pouvoir la lire.
49:28 Le Simala, voilà, c'est superbe.
49:33 Ça a été la mise à pour trouver une police d'écriture libre
49:37 parce que c'est aussi ça que je demande aussi aux personnes qui vont l'utiliser.
49:41 J'adorerais, mais ça, là, je ne peux pas savoir.
49:44 Si ça se trouve, ce ne sont que des insultes.
49:46 Regarder quel auteur paumé, regarder quel machin...
49:53 Il pourrait y avoir ça.
49:55 Je ne pourrais pas dire...
49:57 Je vais avoir confiance aux lecteurs qui relisent
50:00 et qui vont me dire "Attention, là, ça peut déconner".
50:03 J'allais dire, c'est vrai que tu as l'avantage d'avoir pas mal de gens qui vont relire.
50:08 Parce que moi, la question commence un peu à se poser pour le jeu vidéo.
50:11 Parce qu'il se trouve que j'ai quelqu'un qui me le traduit en italien.
50:16 Ce qui est super cool.
50:18 Et je me suis déjà dit que je ferais un truc,
50:22 c'est quand il m'aurait envoyé cette traduction,
50:24 je la ferais passer dans un traducteur automatique, verdu français.
50:27 Pas pour l'utiliser, mais juste pour vérifier qu'il n'y a pas des trucs vraiment...
50:31 Voilà, qu'il n'y ait pas un message nazi dedans, ou quelque chose comme ça.
50:34 Après, que ce soit grammaticalement correct, ça, je verrais.
50:37 Mais plus pour ce côté-là, vérifier que c'est bien une traduction,
50:40 que c'est pas un mec qui essaie de mettre des conneries dans...
50:43 Mais c'est vrai que pour toi, ça serait encore un boulot monstrueux.
50:47 Donc je comprends que tu le fasses pas,
50:49 et que tu fasses confiance aux gens qui lisent, effectivement.
50:52 Il y a aussi quelque chose, c'est que...
50:54 Si t'as vu, le nom, je le mets en grand en dessous.
50:57 Donc déjà, si c'est des bêtises, je pense que...
51:00 Voilà.
51:02 À moins d'utiliser un pseudo que je ne comprenne pas, ou quelque chose.
51:06 Bon, voilà, il y a le nom de traducteur ou de traductrice
51:09 qui est bien marqué en avant.
51:11 D'ailleurs, ça peut être des fois des équipes.
51:14 Sur le dernier épisode, je crois que le nombre en français ou en anglais...
51:19 C'est parce que maintenant, je fais mes épisodes,
51:22 j'ai la chance de pouvoir les faire en français,
51:25 et ils sont en anglais après, retraduits.
51:27 Pendant longtemps, j'ai fait les épisodes directement en anglais, pour le net.
51:31 Donc, je crois que c'est la nation française.
51:34 Non, la traduction d'Aide Revoir, bien sûr.
51:37 (Rires)
51:40 Facile, hein ?
51:42 Et "English", et on va passer au "Lat".
51:45 Et là, sur la traduction en anglais du dernier épisode,
51:48 il a fallu un sacré consensus de la part de toutes ces personnes-là,
51:54 pour les répliques.
51:56 Parce que...
51:58 Je vais vous montrer un exemple en français,
52:00 qui est très difficile à traduire pour un anglais.
52:03 Ça va être sur la fin de cet épisode.
52:07 (Rires)
52:09 Allez, voilà.
52:11 "Nommer quelle casserole ?"
52:13 Traiter quelqu'un de casserole,
52:15 ça, traduire pour les autres langues, c'est difficile.
52:18 Parce que tout le monde a une expression pour dire
52:22 "Mais qu'est-ce que c'est que ce truc qui fait du bruit ?"
52:25 Mais il y a quelque chose en plus.
52:28 Il y a une réduction à l'objet.
52:30 Il y a quelque chose qui fait qu'une casserole,
52:33 c'est péjoratif en même temps que d'être quelque chose qui sonne mal.
52:37 Mais c'est pas "quelle casse-oreille".
52:40 C'est quelque chose qui chante faux, ça c'est dur.
52:43 Et ensuite, petite blague,
52:45 allez, je vais lui faire avaler son sifflet, moi.
52:48 Si vous faites une traduction littérale de "avaler un sifflet",
52:51 là, les personnes ne le savent pas.
52:54 Donc oui, en anglais, vous allez voir,
52:56 on a quelque chose que je trouve un peu plus plat,
52:59 mais qui leur a convenu en consensus
53:02 et qui va pouvoir continuer à évoluer avec le temps.
53:05 Pour ceux qui connaissent un tout petit peu l'anglais,
53:08 vous allez voir, "what a rucus",
53:10 donc c'est un peu "c'est quel bordel", en gros, dans ce cas-là.
53:13 Et voilà, couvrez-moi, je vais lui donner silence pour de bon.
53:17 Voilà, traduction littérale.
53:20 Ah oui, c'est...
53:23 La traduction littéraire est aussi complètement différente
53:27 d'une traduction automatisée, bien sûr,
53:30 pour que les personnages aient une tonalité,
53:33 qu'ils aient un vocabulaire, qu'ils aient...
53:36 Tu veux peut-être dire un dernier truc, Tissot, celui-là ?
53:39 Oui, c'était juste que j'ai aussi fait la traduction du jeu vidéo en anglais,
53:43 et le problème, c'est qu'effectivement, moi, j'utilise beaucoup d'argot,
53:46 parce que c'est un jeu où il y a beaucoup d'humour sur le dialogue,
53:49 et il se trouve qu'en fait, les parties où telle langue va faire beaucoup d'argot
53:53 ne sont pas forcément elles-mêmes d'une langue à l'autre,
53:56 et il y a pas mal de fois, pour moi, qu'il y a des trucs
53:59 où il disait quelque chose de manière très argotique en français,
54:02 et qui était devenu extrêmement "I'm going to silence it for good",
54:05 un truc très descriptif en anglais, parce que juste, il n'y en a pas l'argot qu'il faut pour...
54:08 Donc, ouais, ça arrive.
54:11 C'était le gros problème que j'ai eu avec Pepper
54:14 quand il y a eu l'édition de Glenna,
54:17 et qu'il y a eu la retraduction en français,
54:20 elle était déjà sur le net, mais quand c'était moi qui la faisait,
54:23 je me permettais des écarts, et à partir du moment où on a commencé
54:26 à faire une traduction beaucoup plus proche de la version anglaise,
54:29 je trouvais que Pepper, elle ne sonnait plus comme la campagne,
54:34 et c'était important pour moi que Pepper garde un côté Franche-Mouliard,
54:37 très campagne, pas sophistiqué.
54:40 En étant guidé par des relecteurs qui me corrigeaient mon anglais,
54:44 ils avaient eu tendance à la faire plus sophistiquée,
54:47 à la faire plus personnage parfait, lisse,
54:52 alors que je voulais qu'elle ait des imperfections,
54:57 même linguistiques.
55:00 Alors, l'heure tourne, il est déjà presque la demi,
55:04 et avant qu'on mette fin à la table ronde,
55:07 je pense que ça pourrait être chouette qu'on parle de modèle économique,
55:11 et il y a Maïwenn qui justement va souffler l'idée,
55:17 et je vais lui passer le micro.
55:20 [Musique]