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00:00 L'invité éco, Isabelle Raymond.
00:04 Bonjour à tous, la France en compte une multitude, au même titre que le fromage, le vin, c'est le deuxième contributeur à l'export
00:12 et pourtant le secteur connaît une année particulièrement difficile.
00:16 On va en parler ce soir avec vous, Bernard Farge, bonjour.
00:18 Bonjour.
00:19 Vous êtes le président du Comité national des interprofessions du vin, vous êtes vous-même viticulteur dans le Bordelais.
00:25 Cet été, avec les vagues de chaleur qui se sont succédées, les vendanges qui ont été avancées,
00:31 parfois le mildiou également qui a sérieusement endommagé les récoltes dans le sud-ouest.
00:36 Diriez-vous que 2023 est une année noire ou qu'elle est finalement dans la moyenne de ces dernières années ?
00:42 C'est une année difficile, très difficile dans certains secteurs, très difficile économiquement en termes de commercialisation,
00:48 sur les marchés exports et sur les marchés français avec un sujet de déconsommation, mais on en parlera un peu plus tard.
00:53 Puis sur l'aspect plus technique de production, c'est une année très difficile,
00:56 notamment dans les vignobles du sud de la France, du sud-ouest, mais aussi du sud-est, avec une vague de mildiou inédite.
01:02 Et donc les vendanges ont été avancées, vous-même, vous êtes en pleine vendange ?
01:05 Oui, dans le Bordelais et d'autres régions viticoles sont en vendange, d'autres vont démarrer très très prochainement.
01:11 Et puis dans 10 jours, nous y serons tous. Donc c'est un moment important le mois de septembre.
01:16 Alors le mildiou, on a commencé à en parler, c'est un parasite qui attaque les vignes.
01:19 Les vignerons étaient en conflit au début de cet été avec leurs assureurs, ces derniers disant que c'est une maladie et donc qu'ils n'indemnisent pas.
01:26 Les professionnels du vin, eux, demandent à être indemnisés au motif que le mildiou est dû à un événement climatique.
01:32 Est-ce que cette question est réglée ?
01:34 Toujours pas, toujours pas. Cette vague de mildiou, encore une fois inédite, dans tout le sud-ouest de la France, tout le sud-est, tout le sud et en Italie aussi,
01:42 ce n'est pas un problème technique d'un vigneron qui aurait raté son travail, qui aurait mal fait son travail, qui aurait fait de mauvais choix techniques.
01:48 C'est vraiment un aléa climatique, une humidité excessive pendant une longue période, des pluies importantes dans ces régions-là et avec une chaleur importante.
02:00 Donc le mildiou est évidemment ravi de ces conditions-là et ce sont évidemment des milliers de parcelles qui ont été ravagées par le mildiou, encore une fois dans tout le sud-ouest, tout le sud de la France.
02:10 Et c'est bien un aléa climatique qui est en jeu. L'État français a mis en place un dispositif pour assurer les viticulteurs.
02:18 Il y a une partie qui est de l'auto-assurance. Les viticulteurs assurent une partie de l'assurance jusqu'à 20% par leur propre fond propre.
02:24 Ensuite, les assureurs doivent garantir entre 20 et 50% de pertes pour évidemment les assurer, bien sûr.
02:30 Et au-delà de 50%, c'est la solidarité nationale qui intervient.
02:34 Or là, on voit bien que c'est vraiment un aléa climatique. Donc nous demandons que sur cette année 1 de l'évolution réglementaire de ces sujets d'assurance, les assurances prennent en compte cet aléa climatique-là.
02:45 - Et donc ce n'est pas le cas pour l'instant ? Est-ce que vous espérez que ça va évoluer ?
02:49 - Nous espérons que ça évolue. Il faut que ça évolue cette année. En tout cas, il faut que ça évolue aussi pour les années à venir.
02:57 Et l'État doit prendre sa part sur ce sujet qui est encore une fois inédit. Il y a un trou dans la raquette sur ce nouveau dispositif, nous le reconnaissons.
03:05 Mais en 2013, il y avait déjà eu des aléas climatiques inédits et les assureurs avaient couvert.
03:10 - Donc c'est un bon signe pour la suite ?
03:12 - C'est en tout cas ce sur quoi nous nous appuyons.
03:14 - Mais le problème finalement, est-ce que ce n'est pas la surproduction ? Au regard, vous avez commencé à en parler, d'une consommation de vin qui baisse en continu en France, -20% depuis 2015, -70% en 60 ans.
03:26 - Surproduction liée, vous l'avez expliqué, par une baisse de la commercialisation.
03:32 Pendant un certain nombre d'années, nous avons eu un relais à l'exportation de cette baisse de consommation en France.
03:39 Et depuis 2018-2020, évidemment, avec les événements de Covid, avec l'inflation aujourd'hui, la crise en Ukraine, l'export ralentit.
03:48 Et évidemment, la consommation continue de baisser en France. Donc maintenant, c'est un vrai sujet de surproduction.
03:52 - Et donc la surproduction, elle persiste, c'est-à-dire au fur et à mesure des années, vous n'avez pas regagné ces parts à l'international ?
03:58 L'export ne permet pas de compenser la baisse de la consommation en France ?
04:02 - L'export est important, encore une fois, cette filière qui représente 500 000 emplois, à temps plein en France, 92 milliards de chiffres d'affaires, c'est pas rien.
04:10 C'est le deuxième, vous l'avez dit en introduction, le deuxième filière en termes d'exploitation.
04:15 Toutefois, l'exploitation est très volatile. Les marchés sont volatiles.
04:20 Nous avons des sujets d'accords commerciaux qui peuvent être très difficiles.
04:24 Lorsque la filière 20 est impactée par les suites d'un différent Airbus-Boeing dans le contexte international,
04:30 vous voyez que c'est vraiment des sujets de géopolitique qui peuvent pénaliser fortement nos exportations.
04:34 - Alors c'est quoi votre Airbus-Boeing, vous ? Il y a des pays où c'est plus compliqué aujourd'hui ?
04:38 - C'est compliqué aujourd'hui en Chine, parce que la Chine a souffert beaucoup du Covid, parce que la Chine redémarre lentement.
04:43 L'économie chinoise, évidemment, est dans une situation très différente de ce qu'on a connu depuis 10 ans.
04:48 Les Etats-Unis, aujourd'hui, après des belles années post-Covid, nous avons un ralentissement de nos exportations.
04:55 L'inflation vient pénaliser nos ventes et à l'exportation, et en France.
05:00 Donc c'est une filière qui est en difficulté en ce moment, et nous devons restructurer cette filière.
05:04 - Alors en même temps, l'idée d'une taxe sur l'alcool a été évacuée.
05:08 Ça a été un temps évoqué dans le cadre du projet de loi sur la Sécu.
05:12 Donc cette surproduction, aujourd'hui, vous l'estimez à comment ?
05:15 Vous parliez de 3 millions d'hectolitres en début d'année. Est-ce que ce chiffre, aujourd'hui, il est au-dessus ?
05:20 - Ce chiffre de 3 millions, ça correspond aux 3 millions qui vont être distillés avec des fonds européens pour détruire une partie du stock.
05:27 - Donc c'est en trop ? - Cela, c'est en trop, bien sûr.
05:29 Et au-delà de ces chiffres globaux, il y a des situations qui sont, évidemment, différentes.
05:33 Aujourd'hui, sur les productions de vin blanc, sur les productions de pétillant, d'effervescent, de champagne, de crément, il y a moins ce problème-là.
05:41 On a vraiment ce problème de différence entre commercialisation et production sur le rouge.
05:46 Et sur toutes les régions de rouge, nous avons cette difficulté parce que la baisse de consommation est plus importante sur le rouge que sur les autres vins.
05:52 Et parfois, à l'intérieur d'une même région impactée par ces crises-là, des entreprises se comportent mieux que d'autres.
05:59 - Et donc, aujourd'hui, quelle est la solution ? On voit qu'il y a un plan arrachage qui concerne le Bordelais.
06:04 Plus de 9000 hectares de vignes doivent être arrachés dans le Bordelais. Est-ce que ce sera suffisant ?
06:10 - Ce sera probablement un début à Bordeaux et probablement un début de ce qui va se passer en France.
06:15 Nous avons besoin de restructurer, de recalibrer notre potentiel de production.
06:19 Nous travaillons à trouver des dispositifs qui permettent d'accompagner des viticulteurs qui veulent arrêter le métier,
06:24 parce qu'ils ont l'âge d'arrêter le métier, qu'ils n'ont pas de repreneurs.
06:28 Et des vignes qui sont abandonnées sont, évidemment, des sources de contamination pour différentes maladies.
06:32 Donc, nous devons restructurer notre minimum.
06:34 Nous devons aussi repenser la façon dont nous présentons nos vins, dont nous offrons nos vins, dont nous parlons de nos vins.
06:40 Parce qu'il faut conquérir de nouveaux consommateurs, absolument.
06:42 - Et donc, privilégier la qualité à la quantité, ça passe par moins de production ?
06:48 - C'est moins de production, mais aussi conquête de nouveaux consommateurs.
06:51 Nous avons des nouveaux consommateurs jeunes qui boivent beaucoup moins de vin que précédemment.
06:56 Donc, il faut aller chercher ces consommateurs-là.
06:59 Ces jeunes consommateurs consomment d'autres boissons alcoolisées que le vin.
07:03 Il faut absolument aller les conquérir.
07:05 - Merci beaucoup.
07:06 Bernard Farge, président du Comité national des intaprofessions du vin, invité Echo de France Info ce soir.