Le thérémine, comment ça marche ? Par Grégoire Blanc

  • l’année dernière
C'est l'un des rares instruments dont le son se fait entendre sans aucun contact direct avec le musicien. Le thérémine, inventé en 1920 par l'ingénieur russe Léon Thérémine, fascine par son timbre proche de la voix humaine... ou parfois des moustiques

Les partitions pour thérémine ont longuement été des transcriptions du répertoire classique. Mais dès les années 1940, l'instrument connaît son heure de gloire à Hollywood, tant pour faire atterrir un vaisseau spatial que pour accentuer les moments de suspense.

Grégoire Blanc, un théréministe français, retrace le parcours de son instrument de prédilection et nous explique comment jouer avec ces deux antennes.

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Transcript
00:00 Quand j'ai entendu l'instrument pour la première fois, je ne peux pas vraiment dire si c'est
00:09 le son qui a retenu mon attention ou juste la manière dont on interagit avec l'instrument.
00:14 C'est tellement exotique, c'est tellement bizarre, on ne sait pas trop ce que c'est,
00:19 on ne comprend pas comment ça marche, personne ne connaît.
00:21 Je pense que c'est ça vraiment qui m'a intéressé.
00:23 J'ai pris ça comme un défi.
00:24 Je m'appelle Grégoire Blanc, je suis musicien et entre autres je joue du thérémine.
00:30 Le thérémine est composé simplement de deux antennes et d'un boîtier dans lequel
00:40 il y a tous les composants électroniques.
00:42 L'antenne droite va permettre de contrôler la hauteur du son.
00:45 Plus je m'en approche, plus le son va être aigu.
00:47 Et l'antenne gauche permet de contrôler le volume.
00:51 Toute la difficulté va être d'essayer de maîtriser ces deux champs électromagnétiques
00:59 distincts.
01:00 A la main droite, on va vraiment imaginer une corde invisible qui serait tendue ici.
01:06 On vient glisser dessus.
01:07 Et donc si je cherche une note dans l'absolu, il faut que je la cherche.
01:15 Une technique, ça va être d'accorder l'instrument pour avoir globalement toutes les notes devant
01:22 moi et pour avoir une octave quand je déplie ma main.
01:24 On a à peu près 7 à 8 octaves.
01:31 Le son le plus aigu est vraiment très aigu et le son le plus grave, on va arriver même
01:38 à des battements.
01:39 Pour ce qui est des sonorités étranges et inattendues, des bruits d'oiseaux, des trucs
01:44 qui font penser à des insectes, moustiques.
01:46 D'un point de vue technique, pour expliquer simplement, c'est un phénomène capacitif.
01:55 Chaque antenne joue le rôle d'électrode.
01:57 Moi-même, devant l'instrument, je suis une électrode.
02:00 Quand je vais m'approcher de l'antenne, je vais perturber un champ électromagnétique
02:05 et faire varier la fréquence d'un oscillateur qui est ensuite amplifié par le haut-parleur.
02:11 C'est un instrument récent.
02:23 On est à Saint-Pétersbourg en 1920, dans un grand laboratoire de recherche.
02:29 Ce brillant jeune chercheur, Léon Thérémine, travaille sur un appareil qui permet de mesurer
02:34 la densité des gaz.
02:36 Dans les grandes lignes, son appareil était extrêmement sensible.
02:39 Lui-même, quand il s'approchait de son appareil, il perturbait la mesure.
02:42 Finalement, il a vraiment bifurqué dans son objectif.
02:45 Il s'est dit qu'il allait contrôler du son.
02:46 Et donc, il en arrive à ce premier appareil.
02:49 Le répertoire de Thérémine est presque inexistant, du moins en musique classique,
02:59 en musique contemporaine un peu plus.
03:00 Il faut jouer des transcriptions.
03:02 La première à l'avoir vraiment fait, c'était Clara Rockmore, qui était la première grande
03:06 virtuose de l'instrument.
03:07 Elle avait commencé par tout le répertoire des instruments à cordes, le violon, le violoncelle.
03:12 On dit que le son se rapproche un peu de la voix humaine.
03:25 Dans les années 40-50, Thérémine était extrêmement populaire à Hollywood, dès
03:30 qu'on avait besoin de faire atterrir un vaisseau spatial ou de mettre un peu de suspense.
03:35 Je pense que là, il y a eu un certain regain d'intérêt avec Internet, YouTube, les réseaux
03:43 sociaux.
03:44 Mon premier contact avec l'instrument, c'était il y a un peu plus de dix ans.
03:50 J'étais au lycée.
03:51 C'était en marge d'un cours de physique.
03:53 Ça m'a fasciné, l'idée de se dire qu'on pouvait jouer sans aucun contact.
03:59 L'instrument, c'est moi, c'est le musicien.
04:05 Une petite anecdote qui met en relief la difficulté de l'instrument, c'était un de mes premiers
04:11 concerts avec orchestre.
04:13 On était tous un peu serrés sur la scène.
04:14 Il y avait une violoniste qui était vraiment devant moi, plein dans le morceau.
04:19 Cette violoniste se baisse pour ramasser une partition par terre.
04:22 Et là, le son de mon instrument baisse d'une octave complète.
04:26 C'était la honte absolue, mais ce n'était pas de ma faute.
04:28 On a un instrument qui est extrêmement sensible à tout ce qu'il y a autour.
04:30 Je pense que le thérémine, à apprendre, il y a des côtés qui sont extrêmement simples
04:40 et intuitifs.
04:41 La vraie difficulté, ça va être de donner vie à un son électronique.
04:46 De la part du public, il y a toujours la fascination, de l'étonnement.
04:50 Et moi, mon rôle en tant que musicien, c'est aussi d'aller contre cet effet « wow »
04:54 du thérémine.
04:55 Mon objectif maintenant, c'est d'amener l'instrument à un certain niveau musical,
05:00 à avoir de l'exigence.
05:01 C'est ça l'ambiance en fait.
05:02 [Musique]

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