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L'édito de Mathieu Bock-Côté : «La créolisation, l'avenir selon Jean-Luc Mélenchon».

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Transcription
00:00 Mathieu Pocoté, Jean-Luc Mélenchon a lancé hier une vive accusation contre les Français
00:07 en affirmant que "notre pays est travaillé en profondeur par une absurde xénophobie à l'endroit des peuples du Maghreb et de l'Afrique,
00:15 et en particulier des musulmans", et c'est sur cette déclaration que vous aviez envie de terminer.
00:19 Oui, d'ailleurs je vais la reprendre parce qu'elle est exceptionnelle, c'est du grand art.
00:23 "Notre pays est travaillé en profondeur par une absurde xénophobie à l'endroit des peuples du Maghreb et de l'Afrique, et en particulier des musulmans".
00:30 Donc c'est une accusation de Jean-Luc Mélenchon à l'endroit des Français.
00:34 Il nous dit d'ailleurs que ce n'est pas une xénophobie de surface, c'est une xénophobie qui travaille en profondeur le peuple français.
00:41 Donc au fond de lui-même, le peuple français serait corrompu par des sentiments aussi odieux.
00:46 Je dirais de Jean-Luc Mélenchon qu'il n'a pas une grande estime pour le peuple français lorsqu'il parle ainsi.
00:51 Par ailleurs, il nous dit qu'on est capable d'accueillir. C'est quoi sa preuve par contraste?
00:56 Il dit "Regardez les Ukrainiens, ça fonctionne très bien quand ce sont les Ukrainiens, alors pourquoi ça ne fonctionne pas avec les autres?"
01:02 On pourrait lui répondre poliment qu'on était devant des réfugiés, devant un pays, lui, véritablement en guerre,
01:07 qui ne débarquait pas de manière avec un récit officiel rédigé par des passeurs à Lampedusa.
01:11 On pourrait lui répondre ça, par exemple.
01:14 On pourrait aussi noter que le propre du réfugié, c'est de vouloir retourner chez lui quand la guerre est terminée.
01:18 Je ne suis pas certain qu'on pourrait dire cela des migrants de Lampedusa.
01:21 Cela dit, je constate donc que pour Jean-Luc Mélenchon, ne pas vouloir que la France devienne un pays africain ou un pays musulman,
01:28 ce serait de la xénophobie, un pays qui veut demeurer lui-même, dans les circonstances, la France,
01:34 qui veut demeurer "française" culturellement, c'est une marque de xénophobie.
01:39 Voilà le regard que porte Jean-Luc Mélenchon sur son propre peuple.
01:42 Est-ce qu'il a raison ou pas selon vous?
01:44 Jean-Luc Mélenchon a cherché à rassurer les Français en disant qu'entre l'universalisme et les différences,
01:49 il y a un moyen terme, ce qu'il appelle la créolisation.
01:53 Est-ce qu'il a profité pour préciser le sens de ce mot?
01:56 C'était passionnant ce moment-là.
01:57 C'est passionnant parce que chez Mélenchon, il nous dit qu'il y a une différence.
02:00 Vous savez, il y a l'universel, c'est loin, c'est l'individu désincarné, et il y a les différences.
02:04 Et il y a un entre-deux.
02:05 Il y avait un entre-deux, on appelait ça jusqu'à tout récemment la nation.
02:08 La nation était l'intermédiaire, la médiation qui permettait de participer à l'humanité.
02:13 Et Mélenchon dit non, non, non, c'est plus ça.
02:15 La créolisation sera cette médiation.
02:17 Et il donne un exemple, c'est assez fascinant, c'est l'anglais.
02:20 Il dit regardez, on se créolise, l'anglais nous pénètre de toutes parts.
02:23 Et moi qui croyais Jean-Luc Mélenchon plutôt sceptique à l'endroit des Américains,
02:27 je constate que l'impérialisme américain qui américanise mentalement les Français et les Européens,
02:32 il l'accueille positivement puisque ça sert sa thèse de la créolisation.
02:36 C'est original quand même.
02:38 Par ailleurs, lui qui est si français, si je peux me permettre,
02:40 Jean-Luc Mélenchon est inimaginable partout ailleurs dans le monde.
02:42 On est devant une figure très particulière de la gauche révolutionnaire, incandescente et rhétorique.
02:47 Ça n'existe pas ailleurs.
02:48 Jean-Luc Mélenchon souhaite la disparition des conditions de sa propre possibilité.
02:52 Je précise toutefois que Jean-Luc Mélenchon nous a fait deux derniers commentaires qui sont intéressants.
02:56 Mais un, c'est plus ancien, je me permets de le citer, il a déjà donné une autre idée,
03:00 une autre idée, une autre définition de la créolisation.
03:02 C'est en 2020.
03:03 Je cite.
03:04 « Les États-Unis, que vous avez sous les yeux, pas sûr que dans 100 ans ils soient encore là.
03:09 Parce que la moitié du territoire a été pris de force au Mexique,
03:12 que la population hispanophone va devenir majoritaire,
03:15 et que si elle est majoritaire, elle amènera avec elle une culture, une grammaire, une science, une technique,
03:21 la poésie des lettres, une langue porte plus qu'un échange. »
03:25 Donc il nous explique, Jean-Luc Mélenchon, que lorsqu'une population change,
03:29 le pays change d'identité et qu'une culture est remplacée par une autre.
03:34 Je ne sais pas de quelle manière nommer ce concept.
03:36 Lui, il appelle ça la créolisation.
03:37 Mais c'est intéressant, il reconnaît l'existence de la chose.
03:39 Mais Jean-Luc Mélenchon veut nous rassurer.
03:41 Parce qu'il nous dit, vous savez, la créolisation c'est le destin de l'humanité.
03:44 Et il dit, ça c'est formidable.
03:46 C'était l'argument auquel je ne m'attendais pas.
03:47 C'est comme le Joker, la carte miracle.
03:49 Il nous dit, quand il s'agit d'aller dans l'espace,
03:52 parce qu'on est dans l'époque où on va conquérir l'espace,
03:54 on va conquérir l'univers, le multivers peut-être, une nouvelle planète.
03:58 Il nous dit, quand on va conquérir l'espace, l'humanité entre dans un nouvel âge
04:02 et dans la conquête de l'univers.
04:04 Quand il s'agit d'aller dans l'espace, tout le monde est créole.
04:08 Il nous dit Jean-Luc Mélenchon.
04:09 Quand il s'agit d'aller dans l'espace, tout le monde est créole.
04:13 Voilà qui est rassurant.
04:14 Donc nous pouvons sacrifier nos maisons, nos peuples, nos pays, nos cultures, nos langues.
04:19 Parce que lorsque nous allons enfin conquérir un satellite de Jupiter
04:23 ou un satellite de Mars, ou pourquoi pas Mars directement,
04:26 nous serons tous créoles quand nous créerons la première colonie humaine quelque part dans l'univers.
04:32 C'est formidable comme projet politique.
04:34 [Musique]
04:38 [SILENCE]

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