Dans son édito du 24/11/2023, Mathieu Bock-Côté revient sur [thématique de l'édito]
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00:00 J'ai rarement vu un tel écart, un tel écart entre les faits tels qu'ils se présentent
00:04 à nous et le récit médiatique et politique des événements.
00:08 Il suffit d'avoir, je dirais, des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, une capacité
00:14 minimale à comprendre ce qui se passe, on voit les faits et on a l'impression, pour
00:17 peu qu'on soit soucieux de l'exactitude des faits, d'être dans un moment de dédoublement.
00:23 Comme si on vivait dans deux univers parallèles, d'un côté la réalité et de l'autre la
00:28 manière dont on nous raconte la réalité pour ne pas nous raconter la réalité.
00:32 Alors, je donne certains faits qu'on a connus cette semaine, mais je veux les rappeler pour
00:36 voir ensuite comment on cherche à les oblitérer.
00:38 Charlotte va revenir sur le profil des délinquants en question, des agresseurs dans son édito,
00:44 donc je passe sur le détail, sachant qu'ils étaient pour la plupart identifiés par les
00:48 autorités.
00:49 Donc, nous savions que ces individus étaient à problème, nous les savions dangereux,
00:54 nous les savions menaçants, ce qui a empêché personne de les laisser en liberté.
00:58 Je garde ça à l'esprit.
00:59 Ensuite, certains des événements qui me semblent importants.
01:02 C'est Amory Brelet de Valeurs Actuelles qui nous dit, je le cite, à propos du profil
01:07 des individus, « Les sept individus interpellés à Toulouse sont de type nord-africain, certains
01:12 sont français, dont le principal suspect confie une source judiciaire à Valeurs Actuelles.
01:17 La question de l'origine n'épuise pas, évidemment, le dossier, mais c'est une
01:22 donnée pertinente à certains égards pour savoir ce qui s'est passé, pour comprendre
01:26 les tensions intercommunautaires en France.
01:28 Il faut vraiment lire certains journaux et suivre certaines chaînes télé pour le savoir.
01:32 Sinon, j'y reviendrai, c'est une information que l'on juge non pertinente parce qu'elle
01:36 n'est à peu près, on ne l'entend nulle part.
01:39 Ce n'est pas un détail.
01:40 Et si vous permettez, dès lundi soir, en passant deux coups de fil, on savait, un,
01:46 qu'ils étaient tous connus des services de police et deux, qu'ils étaient connus
01:49 des services de police et deux, qu'ils étaient, comme le dit là aujourd'hui, de type nord-africain,
01:55 mais français.
01:56 Et vous noterez, soit dit en passant, que lorsque Stanislas Rigaud a dit sur un autre
02:00 plateau, il a dit « je fais le pari », en question de ce type, on était scandalisés.
02:06 Apparemment, c'est un propos absolument inimaginable qu'avait lancé Rigaud.
02:09 Deuxième élément qui est important, on le sait, la formule a été utilisée, il y
02:13 avait le côté, c'était une expédition programmée, une expédition résolue.
02:19 Ce n'est pas seulement des gens qui sont rassemblés au hasard et qui portaient dans
02:22 leur poche, sans s'en rendre compte, un couteau, il y avait une dimension programmée.
02:26 Ça, nous le savons.
02:27 Donc, on n'est pas sur le mode « rix de village », on est, je me permets d'y revenir,
02:32 c'est important, c'est une expédition programmée pour cibler des gens, et on le
02:36 sait si on a lu le Dauphiné libéré, et on le sait si on écoute, si on regarde CNews
02:40 ou on écoute deux, trois autres choses, on sait qu'il y avait l'intention de planter
02:44 du blanc.
02:45 Ou alors, on devrait le savoir, parce qu'on en parle très peu ailleurs.
02:47 Autre élément, ils étaient armés de couteaux, et j'y reviens parce que c'est important,
02:52 le racisme anti-blanc est revendiqué dans les circonstances.
02:55 Mais si vous n'avez pas le souci des faits, et que vous vous contentez du récit médiatique
02:59 dominant qui est proposé, si je peux me permettre, un peu ailleurs que sur ce plateau,
03:03 eh bien on vous dira d'abord que c'est un fait divers qu'il ne faut surtout pas
03:08 surinterpréter.
03:09 C'est un fait divers tragique, un fait divers abominable, un fait divers absolument terrifiant,
03:14 mais il ne faut d'aucune manière chercher à l'inscrire dans une perspective plus
03:18 large.
03:19 Et si vous cherchez à le faire, vous êtes déjà coupable de crimes pensés, comme aurait
03:24 dit Orwell.
03:25 Deuxième élément, vous savez, et on nous dit ça de façon, on doit attendre l'enquête,
03:30 on doit attendre l'enquête, comme on l'a fait bien évidemment pour Nael, comme on
03:33 l'a fait pour George Floyd, comme on l'a fait chaque fois que les systèmes médiatiques
03:36 considèrent que attendre l'enquête est superficiel, superflu secondaire.
03:40 Deuxième élément, nous sommes devant des jeunes, Charlotte nous le rappelait je crois
03:44 hier avant-hier, qu'on a d'abord présenté, je crois c'était l'AFP, j'espère ne pas
03:47 me tromper, comme des troubles faites.
03:49 Vous savez, le choix des mots est important, l'AFP n'aime pas le mot terroriste pour
03:53 parler du Hamas, on a compris pourquoi, ils nous ont expliqué.
03:56 De la même manière, ils n'aiment pas le mot « bande raciste capable d'agression
04:01 au couteau », ils préfèrent le mot « troubles faites ». Est-ce que ça voudrait dire que
04:05 l'AFP est une ligne éditoriale?
04:06 Je ne saurais l'imaginer, mais certains pourraient le croire.
04:09 Ensuite, autre élément, on nous a répété sans cesse qu'il s'agissait d'un événement
04:13 parmi tant d'autres parce que les tensions dans les fêtes populaires sont si nombreuses.
04:16 Donc c'est une bataille comme il y en a tant en France.
04:19 Donc circuler, il n'y a rien à voir.
04:20 Soit dit en passant, soit dit en passant, si c'est vrai, c'est assez inquiétant.
04:23 Si on nous explique, comme l'ont fait certains députés de gauche ou de la gauche radicale,
04:27 que ça arrive tout le temps des gens qui se promènent avec des couteaux pour poignarder
04:30 des gens à la fin d'une fête, c'est encore plus inquiétant que je ne le pensais.
04:33 Et dernier élément, on a appris évidemment qu'au cœur de la semaine, le véritable
04:37 danger, c'est la récupération dite par la dite extrême droite.
04:40 Trois dernières petites notes avant la suite.
04:43 Dupont-Moretti, le ministre Dupont-Moretti, a considéré que l'utilisation du mot « rasia
04:48 » était un mot condamnable.
04:49 Donc voilà un nouveau terme qu'il ne faut pas utiliser.
04:52 Mme Borne a considéré que la décence exigeait de s'en tenir à une interprétation sous
04:57 le signe du fait divers.
04:59 Et M. Véran considère que tout relève de la récupération dès lors qu'on se demande
05:02 si ça ne s'inscrit pas dans un contexte plus large.
05:04 Donc il y a un désaccord interprétatif, un désaccord politique, un désaccord de
05:09 fond entre ce que l'on voit et le récit, les événements tels qu'ils nous sont racontés.
05:14 Donc une marche blanche est tolérée si elle est silencieuse, décente, c'est-à-dire
05:18 qu'elle ne nomme pas ce qui s'est passé.
05:20 Mais si vous voulez vous mobiliser de manière plus militante pour condamner ce qui s'est
05:25 passé, alors là, là, là, ça ne sera pas permis.
05:27 Alors dans un instant, je vais aussi vous demander de réagir à ce qu'a dit l'avocat
05:32 de 4 des mis en cause qui dit qu'ils étaient à une soirée pour essayer de passer un peu
05:36 de bon temps.
05:37 Je vous repose la question dans un instant.
05:38 Peut-être aussi le passer du bon temps de leur point de vue.
05:41 D'accord, d'abord la manifestation d'hier à Lyon qui a été interdite.
05:46 Qu'est-ce que ça vous évoque ?
05:47 C'est très intéressant, non ? Donc une manifestation interdite.
05:51 Alors je le précise, vous savez, moi je suis contre l'interdiction des manifestations
05:53 en général.
05:54 Je dis sur ce plateau, j'étais contre l'interdiction des manifestations pro-palestinienne, pro-amas.
05:59 Donc qu'on se comprenne bien.
06:00 Moi je suis très libéral en la matière.
06:01 Mais je le suis aussi lorsqu'on parle d'une manifestation comme celle d'hier.
06:05 Interdite pourquoi ? À Lyon.
06:06 Alors c'était donc les organisateurs qui étaient liés à la mouvance identitaire
06:10 et se présentaient comme un collectif citoyen contre l'enseauvagement de nos villes et
06:14 villages qui lancent un rassemblement pour la mémoire de Thomas assassiné ce week-end
06:17 par les racailles.
06:18 Les autorités ont décidé de l'interdire.
06:20 Et hier, des forces de police nombreuses, plusieurs dizaines de policiers, étaient
06:24 mobilisés pour interdire cette manifestation scandaleuse.
06:27 Et je vous rappelle à quel point les forces policières en ont fait bon usage en ce pays.
06:30 Pour être capable d'interdire une manifestation de gens qui veulent protester contre le sort
06:34 réservé à Thomas, n'oubliez pas de mobiliser le plus de policiers possible.
06:38 Ils sont alors essentiels.
06:39 Absolument.
06:40 C'est ce que je comprends.
06:41 Pourquoi a-t-elle été annulée ? Parce que la préfecture d'Auvergne-Rhône-Alpes avait
06:47 ses raisons.
06:48 Je cite le tweet en question où on explique pourquoi.
06:51 « Face aux tentatives de récupération, aux slogans xénophobes et provocations à la
06:57 haine, susceptibles d'être prononcées, mais aussi aux risques de confrontations violentes,
07:05 le rassemblement prévu ce soir à 19h à Lyon est interdit par arrêté préfectoral.
07:10 »
07:11 C'est absolument passionnant.
07:12 On va juste relire ensemble.
07:13 Donc, aux tentatives de récupération.
07:14 On aurait compris que si on dit que ce n'est pas un fait divers, un fait de civilisation,
07:18 un fait de sécurité globale, c'est de la récupération.
07:21 Interdit de le dire.
07:22 Aux slogans xénophobes.
07:23 On comprend que c'est faire le lien entre immigration et délinquance.
07:25 Aux provocations à la haine.
07:27 Je cherche encore où est la provocation à la haine lorsqu'on se désole du fait que
07:30 quelqu'un a été poignardé.
07:31 Le mot important là, « susceptibles d'être prononcés ». Donc, rien ne s'est passé.
07:36 Aucune action condamnable n'a eu lieu.
07:38 Mais puisqu'on redoute que des propos condamnables soient tenus, on interdit d'avance l'événement.
07:44 Et on redoute des confrontations violentes.
07:46 De quelles confrontations parle-t-on ?
07:47 Des bandes de racailles qui décideraient d'attaquer les manifestants en question ?
07:51 Je devine qu'encore une fois, ce serait une réaction, les attaquer.
07:54 Mais c'est intéressant.
07:55 Donc, parce qu'on redoute que des propos soient tenus dans un événement, on décide
07:59 de l'interdire.
08:00 Et ça, ça s'inscrit dans une trame de fond.
08:02 Je vais aller plus assez brièvement ici.
08:05 C'est l'interdiction de plus en plus visible de ce qu'on appelle la mouvance identitaire.
08:09 Mouvance identitaire, on peut aimer ou non, la question n'est pas là.
08:11 La question est que c'est une mouvance qui existe dans la société française et ces
08:15 événements sont de plus en plus fréquemment interdits parce qu'on la soupçonne toujours
08:19 de déviation idéologique.
08:21 Donc, ça fait référence à la dissolution de génération identitaire, le sort réservé
08:26 à Argos, réellement la manifestation, rappelez-vous, contre l'installation d'un camp de migrants,
08:32 et bien on a dit qu'on interdit parce que c'est l'extrême droite qui veut organiser.
08:35 Au nombre de gens qu'on accuse d'être d'extrême droite dans ce pays, ça va être compliqué,
08:38 on va commencer à interdire beaucoup de choses.
08:39 Le colloque Dominique Vellaire qu'on avait annulé il y a quelques mois parce que pourrait
08:43 assister des discours contraires à la loi Pleven.
08:47 Donc là, c'est rendu, on est dans cette espèce d'environnement mental où la possibilité
08:51 que se tiennent des discours qui contreviennent à l'idéologie dominante telle qu'elle s'est
08:55 codifiée juridiquement, justifie désormais l'interdiction d'événements.
09:00 Alors, en la matière, je dirais que, encore une fois, c'est bien la preuve que la diversité,
09:04 telle qu'on la connaît, est une richesse du point de vue de la liberté d'expression.
09:07 Le contexte est aussi à l'antisémitisme, on parle ainsi d'une flambée d'insultes
09:12 antisémites dans les taxis parisiens.
09:15 Est-ce que ces phénomènes sont liés, selon vous?
09:18 Je crois que oui.
09:19 Alors, en gros, je cite l'article, ça vient du canard enchaîné, comme quoi de temps
09:22 en temps, il peut faire quelque chose.
09:23 Alors, il raconte une scène qui se passe dans les suites du 7 octobre.
09:28 Donc, quand arrive leur tour, c'est une famille qui arrive de Tel Aviv à Orly.
09:33 Quand arrive leur tour, le chauffeur du van qui leur est attribué refuse de les faire
09:37 monter.
09:38 Sale juif aurait-il lancé au père de famille.
09:40 Je devine que c'est explicitement antisémite ou peut-être qu'on va nous dire que finalement,
09:43 il ne faut pas exagérer.
09:45 Avant d'ajouter, comme si cela ne suffisait pas, « si je ne t'avais pas pris, je t'aurais
09:49 égorgé, toi, ta femme et tes enfants ». Ça, on appelle ça, mes amis, le vivre ensemble.
09:54 Alors, ce qui est intéressant là-dedans, c'est qu'on apprend ensuite que les cas
09:57 se sont multipliés.
09:58 Je ne pense pas que c'est le cas de tous les taxis, évidemment.
10:01 Mais les cas se sont suffisamment multipliés pour que ça devienne inquiétant.
10:04 Alors, moi, j'ai deux hypothèses et vous me direz laquelle vous retenez.
10:06 Mais je suis honnête, je pose les deux hypothèses.
10:09 Première hypothèse, il y a eu une embauche massive récemment dans les taxis de Paris
10:13 de chauffeurs néo-morassiens.
10:14 Ça m'apparaît tout à fait évident.
10:16 Ou des fidèles tardifs du maréchal Pétain qui sont embauchés dans les taxis et qui
10:20 ne peuvent pas s'empêcher d'insulter les juifs qui y entrent.
10:22 C'est une hypothèse, il faut la prendre au sérieux.
10:25 Il y aurait une autre hypothèse qui voudrait dire que ce soit une flambée d'antisémitisme
10:29 islamiste tel qu'on l'a connu ces derniers temps.
10:32 Mais on nous a dit que cette hypothèse-là n'était pas sérieuse parce qu'il ne fallait
10:34 pas caractériser l'antisémitisme.
10:36 J'en viens donc à l'hypothèse qu'il s'agit d'un antisémitisme néo-morassien
10:40 dans les taxis de Paris.
10:41 C'est évident, non?
10:42 Ça va de soi.
10:43 Mais si ce n'était pas le cas, si mon hypothèse n'est pas la bonne, ça voudrait donc dire
10:47 que l'antisémitisme qui frappe la France aujourd'hui n'est pas sur le mode d'une
10:50 vague indifférenciée qui marquerait certaines communautés en particulier.
10:56 Pas tous les membres de ces communautés, évidemment, mais ça serait davantage présent
10:59 dans ces communautés, comme l'a déjà dit Georges Bensoussan.
11:02 De ce point de vue, et là c'est là que se croisent les deux éléments, du racisme
11:05 antifrançais à l'antisémitisme tel qu'on le connaît aujourd'hui, les deux se croisent
11:10 et il est difficile de nommer les deux.
11:12 Dernier détour par la question que vous avez posée sur le propos de l'avocat qui disait
11:17 que les quatre jeunes étaient là simplement pour s'amuser.
11:19 Essayer de passer un peu de bon temps.
11:23 Oui, peut-être pour certains d'entre eux, une manière de passer un peu de bon temps,
11:25 s'étabasser du français lorsque c'est possible.
11:27 Je devine que c'est une activité qui est permise dans leur état d'esprit.
11:31 Ils sont plus joyeux lorsqu'ils tabassent que lorsqu'ils ne tabassent pas.
11:33 C'est une interprétation qui n'est probablement pas la bonne, mais je m'en serais voulu de
11:36 ne pas l'avancer.
11:37 [Musique]
11:40 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]