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La cour d’appel de Bruxelles a interdit temporairement le transfert de Salah Abdeslam en France, où le jihadiste a été condamné à la perpétuité incompressible pour les attentats du 13 novembre 2015. La cour motive sa décision par un “risque de conduire à une violation des articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme’, relatifs à l'interdiction de faire subir “des peines ou traitements inhumains ou dégradants” et au droit au “respect de la vie privée et familiale”. 

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Transcription
00:00 Vous vous rappelez qu'il a été condamné en France à la peine la plus lourde du code pénal français,
00:04 c'est-à-dire la perpétuité, avec une peine incompressible.
00:09 S'il reste en Belgique, il sortira plus tôt ?
00:14 Alors pas du tout. Rien ne dit que Salah Abdeslam sortira plus tôt.
00:18 Mais pourquoi vouliez-vous qu'il reste en Belgique et qu'il ne revienne pas en France ?
00:22 Alors une chose, peut-être faire un point sur la notion de perpétuité incompressible.
00:26 La perpétuité incompressible, ça veut dire qu'on reste en prison toute sa vie
00:30 et que toute sa vie durant, on nous interdit de demander une éventuelle remise en liberté.
00:37 Et c'est le principe de cette peine-là que nous remettons en cause.
00:40 Alors nous l'avons plaidé devant la...
00:42 Et dans le droit français depuis...
00:44 Qui est prévu par le droit français.
00:45 Depuis quelques années.
00:46 Nous avons plaidé le fait que selon nous, c'est une peine de mort morale.
00:50 Alors on a aboli la peine de mort physique en 81.
00:53 Et il est vrai qu'on trouve que c'est une hypocrisie du système français
00:57 de permettre qu'on enferme quelqu'un toute sa vie durant et de lui dire...
01:01 Il y a très peu de détenus dans ce cas-là en France.
01:04 Alors il y en a. Il y en a beaucoup plus qu'on le croit.
01:08 Et s'il y a une chose sur laquelle je veux insister,
01:10 c'est que ce recours a été introduit par mes confrères belges,
01:13 Harold Sachs et Delphine Pachi.
01:15 Et Martin Vette et moi, nous y sommes associés.
01:17 On a été le plaidé également, parce que c'est une question extrêmement importante,
01:21 savoir où est-ce que Salah Abdeslam va purger sa peine.
01:24 Si on a introduit ce recours devant un juge civil belge,
01:27 c'est parce qu'on considère que cette peine
01:29 peut constituer un traitement inhumain et dégradant.
01:33 Et la Belgique, l'État, en tout cas la justice belge,
01:37 nous a donné raison sur ce point-là, de manière provisoire,
01:40 parce que c'est un juge déréféré qui s'est prononcé,
01:43 qui a dit "Pour le moment, je ne peux pas dire si cette peine est correcte.
01:49 Je ne peux pas dire si elle correspond aux standards
01:51 qui sont posés par la Cour européenne des droits de l'homme.
01:54 Et tant que je ne peux pas le dire,
01:56 j'interdis à l'État belge de transférer Salah Abdeslam de la Belgique en France.
02:00 - Quand est-ce que la décision sur le fond sera prise ?
02:02 - Il y a une procédure sur le fond qui a été instaurée en parallèle
02:06 pour qu'on sache en fait, pour qu'on puisse avoir une décision de justice
02:10 dans quelques temps, parce que la justice prend du temps.
02:12 - Donc en attendant, il reste en Belgique ?
02:14 - Exactement.
02:14 - Ce que je ne comprends pas, c'est que la France a prêté,
02:17 c'est le terme, au Belge, Salah Abdeslam pour qu'il soit jugé
02:21 pour les attentats de Bruxelles,
02:22 mais c'était à condition qu'il rentre en France,
02:24 dès la fin du procès.
02:25 - Au plus tard une semaine après le procès.
02:27 - Donc si on se met du côté des victimes françaises,
02:29 c'est incompréhensible, cette histoire ?
02:31 - Alors si je peux permettre de l'expliquer un peu mieux,
02:34 j'aimerais bien que le message puisse passer.
02:36 L'idée n'est pas de faire échec à la sanction française.
02:40 L'idée n'est pas de faire échec à la justice.
02:42 La justice est passée, Salah Abdeslam a été condamné
02:44 pour les attentats du 13 novembre.
02:46 L'idée est simplement que la peine puisse correspondre
02:48 à nos standards fondamentaux.
02:50 Et ce qu'il faut se dire, c'est que ce n'est pas juste...
02:53 - Les standards français sont pas les standards belges,
02:54 mais c'est de quoi je me mêle.
02:56 - On n'est pas simplement...
02:57 - De quoi je me mêle ?
02:58 De quoi serait la Belgique vis-à-vis de la peine française et de la France ?
03:00 - On a tous...
03:01 - La France comme la Belgique, comme 45 autres pays,
03:06 ont adhéré à la Convention européenne des droits de l'homme,
03:10 ce qui fait que chacun de ces États a dit "je suis d'accord"
03:14 pour dire que ces droits fondamentaux doivent être garantis dans mon pays.
03:18 - Oui, mais le Parlement français a voté cette loi.
03:21 - Oui.
03:21 - Donc ça veut dire que cette Convention est au-dessus de la volonté du peuple français,
03:26 puisque le Parlement exprime la volonté du peuple français.
03:28 - Le Parlement français peut se tromper.
03:30 Et c'est pour ça qu'on a des mécanismes qui prévoient
03:33 qu'il y ait des vérifications par le Conseil constitutionnel
03:36 ou par les cours européennes.
03:38 Ce qui fait que c'est pas venu par la France,
03:40 mais c'est venu par la Belgique,
03:41 parce que les droits fondamentaux sont au-dessus...
03:44 - Donc la Belgique fait la leçon à la France.
03:45 - Les droits fondamentaux sont au-dessus des rapports entre États.
03:48 C'est pas l'histoire de faire la leçon, pas faire la leçon.
03:51 C'est le fait de se dire "si je remets une personne à un pays,
03:56 je dois être sûre que dans ce pays, ses droits sont respectés".
03:59 - Pourquoi voulez-vous qu'il reste en Belgique ?
04:00 Parce que vous dites "il s'en tirera pas forcément plus tôt".
04:02 Qu'est-ce qu'il y a de mieux, entre guillemets, dans les prisons belges ?
04:05 Il serait pas l'isolement dans une prison belge, c'est ça ?
04:07 - S'il y a peut-être une chose aussi, une autre chose,
04:09 sur laquelle j'aimerais que les choses soient claires...
04:11 - Non mais répondez !
04:12 - Je vais répondre, je vais répondre, mais...
04:13 - Qu'est-ce qu'il y a de mieux, la différence de traitement ?
04:15 C'est ça qu'on veut s'entendre.
04:15 - J'ai entendu que mon confrère, Chemla, entretient la confusion,
04:19 et je trouve que c'est grave, d'entretenir la confusion
04:21 entre être libérable et être libéré.
04:24 Ce sont deux choses différentes.
04:26 Ce qui fait que peut-être qu'en Belgique,
04:27 s'il purge sa peine là-bas, Salah Adeslam pourrait demander sa liberté,
04:31 ça veut pas dire du tout, comme l'a dit justement Dominique Rizet,
04:34 qu'il l'obtiendrait.
04:34 - D'accord, mais sur le traitement en prison...
04:36 - Sur le traitement, les conditions de détention en Belgique...
04:39 - Elles sont très strictes en France, on le sait avec cet isolement.
04:42 - Elles ont été très strictes, elles ont même été,
04:44 je peux le dire moi-même, inhumaines.
04:45 - Et donc il ne sera pas placé à l'isolement en Belgique.
04:47 - Elles ont été exceptionnelles.
04:48 Il est à l'isolement, il est à l'isolement en Belgique.
04:51 C'est un isolement qui est plus souple que l'isolement français,
04:54 et c'est surtout un isolement qui n'est pas filmé,
04:57 24 heures sur 24, qui est la mesure exceptionnelle
05:00 et unique qui a été infligée à ce matin.
05:01 - Donc il n'est pas filmé, et quand vous dites "c'est plus souple",
05:04 qu'est-ce qu'il y a de différent ?
05:06 - Avec plus de sorties, avec plus d'accès à des activités,
05:09 beaucoup plus de choses que d'être enfermé dans une cellule
05:12 quasiment 24 heures sur 24, comme c'était le cas en France.
05:14 - Combien de temps peut-il rester maximum en Belgique, selon vous ?
05:17 - Jusqu'à la décision...
05:20 - 20 ans.
05:21 - C'est-à-dire ?
05:22 - S'il reste en Belgique, il restera 20 ans,
05:25 et ensuite il sera libéré.
05:26 - Ah non, pas du tout, mais ça a vraiment ce genre de considération,
05:30 c'est bien qu'on puisse s'expliquer aujourd'hui,
05:32 parce que ce n'est pas du tout comme ça que ça fonctionne, la Belgique.
05:34 Et une perpétuité, ça a du sens, en fait.
05:36 Donc s'il a été condamné à la perpétuité,
05:39 et cette sanction sera appliquée en Belgique,
05:42 il peut rester et mourir en prison.
05:44 - Addit à l'éternel en Belgique, donc ?
05:45 - Il peut rester...
05:46 - Parce que M. Chamblain dit "non, il pourra sortir".
05:47 - Oui, mais ça c'est une fausse vérité.

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