• l’année dernière
De l’échelle nationale aux organismes internationaux

Intervenants :
• Frédéric VAGNERON, historien, maître
de conférences à l’université de Strasbourg
• Jean-Paul GAUDILLIÈRE, historien des sciences, directeur
de recherche à l’Inserm, directeur d’études à l’École des
hautes études en sciences sociales, Centre de recherche
médecine sciences santé mentale et société (Cermes3)
• Anne RASMUSSEN, historienne, directrice d’études à l’École des hautes
études en sciences sociales, directrice du Centre Alexandre-Koyré
Transcription
00:00:00 -Bien. Donc, j'ai le plaisir de modérer
00:00:05 cette dernière table ronde de cet après-midi.
00:00:08 Je vais d'abord vous présenter nos 3 intervenants
00:00:12 de cette fin de journée.
00:00:14 Donc, j'ai à ma droite Anras Mussen,
00:00:17 qui est directrice de recherche à l'École des hautes études
00:00:20 en sciences sociales
00:00:21 et directrice du Centre Alexandre Cueyry.
00:00:24 Après, je ne peux pas m'en empêcher, excusez-moi,
00:00:27 avoir travaillé pendant 20 ans à Strasbourg à mes côtés.
00:00:32 J'ai à ma gauche Jean-Paul Gaudière,
00:00:37 qui lui est également directeur de recherche
00:00:39 à l'École des hautes études en sciences sociales,
00:00:43 ex-directeur du CERMES, toujours membre du CERMES.
00:00:48 Je l'oublie. Directeur de recherche à l'INSERM, excusez-moi.
00:00:53 Et pour terminer, mon jeune collègue Frédéric Vagneron,
00:00:59 qui est maître de conférence à l'Université de Strasbourg.
00:01:03 Frédéric est spécialiste d'histoire contemporaine,
00:01:05 notamment des organisations sanitaires internationales,
00:01:09 de la grippe surtout, si vous l'avez entendu ces derniers temps,
00:01:13 c'était à ce titre-là.
00:01:15 Donc, cette dernière table ronde nous mène donc des légendes
00:01:20 aux organisations internationales.
00:01:22 Je ne sais pas si c'est un lien naturel.
00:01:24 On le questionnera peut-être,
00:01:27 en tout cas dans le domaine de la santé publique.
00:01:30 Et donc, le jeu va consister essentiellement à nous déplacer.
00:01:36 L'histoire n'est pas faite que de temps et de chronologie,
00:01:39 mais elle est faite d'espace aussi,
00:01:41 depuis un certain nombre de travaux d'historiens.
00:01:44 Et donc, on va se déplacer un peu du hexagone national
00:01:50 vers l'international, un espace plus international.
00:01:54 Donc, on est chronologiquement forcément
00:01:57 plutôt au XXe siècle,
00:01:59 avec peut-être un déplacement dans la période après 1945.
00:02:03 Et on va essayer donc de s'interroger
00:02:09 comment ces espaces et les circulations
00:02:12 en temps d'épidémie
00:02:15 ont pris une existence
00:02:18 qui ne s'est évidemment pas démentie
00:02:21 dans le cadre de la pandémie Covid,
00:02:23 bien qu'on ait quand même retombé un peu dans des travers,
00:02:27 on aurait presque pu dire, du début du XXe siècle,
00:02:30 de fermer nos frontières,
00:02:33 et autres, même si la santé publique considère,
00:02:35 visiblement, d'après le commentaire de ce matin,
00:02:38 que ça fait au moins deux semaines.
00:02:45 -Je vais me tourner donc d'abord vers Anne
00:02:48 pour te poser la question un tout petit peu.
00:02:51 Anne, quand tu regardes cette histoire
00:02:55 d'un passage d'une santé publique nationale
00:03:00 vers la santé publique internationale,
00:03:04 quelles sont les sources qui sont intéressantes
00:03:06 et quelles sont les thématiques
00:03:08 que tu vois émerger à cet endroit-là ?
00:03:14 -Merci.
00:03:15 Alors peut-être qu'avant de se déplacer
00:03:17 dans l'international et dans les espaces,
00:03:19 comme tu nous y as proposé,
00:03:21 quand tu nous l'as proposé,
00:03:23 en réfléchissant un peu au propos de cette table ronde
00:03:26 et aussi à savoir comment on faisait l'histoire, finalement,
00:03:29 de ces déplacements dans...
00:03:31 déplacement des objets, dans la définition de nos objets.
00:03:36 Et donc peut-être avant de parler vraiment de l'espace,
00:03:39 on a pensé que c'était peut-être utile aussi
00:03:40 de parler des déplacements, des frontières d'objets,
00:03:44 et pour la période que tu as évoquée,
00:03:46 donc au XXe siècle,
00:03:48 il y a notamment ce changement de paradigme
00:03:51 entre le passage des maladies infectieuses
00:03:55 aux post-infectieux ou non infectieux,
00:03:58 puisqu'il a été question d'épidémie
00:04:00 dans la table ronde précédente,
00:04:02 mais ce ne sont pas les seules maladies,
00:04:06 les seules pathologies auxquelles, donc,
00:04:09 les politiques de prévention sont confrontées.
00:04:12 Alors cette idée-là, elle a été...
00:04:14 Elle a été apportée notamment
00:04:18 par la notion de transition épidémiologique,
00:04:21 c'est-à-dire, vous savez,
00:04:23 cette période de baisse de la mortalité
00:04:25 qui accompagne la transition démographique,
00:04:28 qui s'accompagne d'une amélioration de l'hygiène,
00:04:31 de l'alimentation,
00:04:33 des transformations de services de santé
00:04:35 et d'une transformation des causes de décès
00:04:38 avec la baisse graduelle de la mortalité
00:04:41 par maladie infectieuse
00:04:43 et puis l'augmentation corrélative
00:04:46 du poids des maladies chroniques et dégénératives.
00:04:50 Alors ce mouvement-là, on peut en faire l'histoire,
00:04:53 par exemple, du registre épidémiologique,
00:04:57 de la science épidémiologique qui a permis de penser cela.
00:05:00 Je pense aux travaux de Luc Berlivé,
00:05:03 qui a très bien montré tout ça,
00:05:06 comment on est passé d'une science des épidémies
00:05:09 au début du XIXe siècle,
00:05:11 qui explorait les causes environnementales
00:05:14 des maladies infectieuses,
00:05:15 à une analyse mathématique
00:05:19 avec des maladies aux étiologies plus complexes.
00:05:23 Alors ce passage, c'est aussi le passage
00:05:26 de la configuration de maladies sociales,
00:05:28 et il en a été question tout à l'heure,
00:05:30 la tuberculose, la séphilis, l'alcoolisme,
00:05:35 souvent comprises au XIXe siècle
00:05:37 comme des maladies héréditaires,
00:05:40 et puis ensuite des maladies sociales comme le cancer,
00:05:44 à la notion de risque de santé,
00:05:47 là aussi de phénomène social complexe
00:05:50 à l'échelle des populations
00:05:51 et plus seulement à l'échelle des individus,
00:05:54 et là aussi avec des dispositifs d'enquête
00:05:56 qui sont fondés sur les mathématiques.
00:05:59 Et alors juste en deux mots pour dire,
00:06:01 finalement, quelle histoire peut-on faire de cela ?
00:06:04 Et il me semble que dans ce changement,
00:06:08 on voit que le moment des travaux sur les grandes épidémies,
00:06:12 c'est un peu essoufflé,
00:06:14 c'était les années 80, 90,
00:06:17 travaux sur la peste, le choléra,
00:06:20 et puis sur les fléaux sociaux, la tuberculose, la séphilis,
00:06:23 et ça a été relayé par des travaux sur le cancer, beaucoup,
00:06:28 des travaux quand même sur les épidémies,
00:06:30 mais davantage peut-être dans une perspective impériale,
00:06:34 internationale, ou dans les sud,
00:06:37 la malaria, la fièvre jaune,
00:06:40 ou alors une relecture des fléaux sociaux
00:06:43 qui a déplacé la période d'études,
00:06:46 et notamment, par exemple, l'après 1945,
00:06:48 la tuberculose que l'on re-regarde,
00:06:51 une thèse en cours, par exemple, aujourd'hui,
00:06:54 sur qu'est-ce que devient la tuberculose
00:06:59 d'après les antibiotiques, par exemple,
00:07:01 ou alors comme une maladie réémergente,
00:07:04 je pense aux travaux de Yannine Acker, par exemple,
00:07:06 pour l'étudier.
00:07:07 Et enfin, un tout dernier mot, c'est pour dire que,
00:07:10 finalement, les sources,
00:07:12 par rapport à ce qui a été dit tout à l'heure,
00:07:14 les sources administratives,
00:07:16 c'est quand même difficile de les utiliser, de les adapter
00:07:20 pour ce changement de paradigme,
00:07:23 parce que tout ce qui est démographie historique,
00:07:26 analyse populationnelle, sources administratives,
00:07:30 du dispensaire, des sanatoriums, de l'hôpital, etc.,
00:07:34 eh bien, c'est quand même difficile de les utiliser
00:07:36 pour saisir ce grain très fin
00:07:39 de l'expérience de la maladie, ces maladies chroniques.
00:07:43 Et donc, voilà, il y a 40 ans,
00:07:46 Roy Porter invitait à faire une histoire par en bas,
00:07:48 des patients, et finalement, c'est difficile
00:07:51 avec les outils de l'historien
00:07:52 et avec les sources dont on dispose.
00:07:55 Ça ne veut pas dire que c'est pas possible,
00:07:56 mais ça veut dire aussi qu'il faut travailler, il me semble,
00:07:59 avec, sur ces sujets, avec les anthropologues,
00:08:02 avec les sociologues, qui ont d'autres moyens d'entrer,
00:08:06 notamment par l'entretien, l'observation, etc.,
00:08:08 mais alors là, dans le plus contemporain.
00:08:11 -Anne, donc là, tu nous déplaces un peu
00:08:14 du point de vue des historiens
00:08:15 vers une démographie historique qui est datée de l'intant ?
00:08:21 -Alors, la démographie historique,
00:08:23 elle a plutôt justement été l'âge des grandes...
00:08:29 de l'analyse populationnelle,
00:08:30 c'était le grand moment des années 60, 1970,
00:08:34 cette démographie,
00:08:35 et qui, peut-être, ne propose plus vraiment
00:08:40 les grilles de lecture adaptées à ce changement
00:08:42 que vous venez d'évoquer.
00:08:44 -Et quel est le lien entre cette démographie historique
00:08:48 et l'épidémiologie de la santé publique, par exemple,
00:08:52 ou les statistiques médicales ?
00:08:54 Il y en a, ou c'est vraiment deux champs qui n'ont rien ?
00:08:59 -La démographie historique,
00:09:02 il me semble qu'elle s'est tenue quand même
00:09:04 assez à distance de l'épidémiologie.
00:09:07 Elle n'a pas été uniquement centrée sur la santé.
00:09:11 Elle a été aussi la reconstitution
00:09:13 dans des grandes enquêtes qui ont été localisées
00:09:17 avec l'idée de faire des collectes
00:09:19 qui pourraient se compléter.
00:09:23 Donc, elle a été...
00:09:25 Elle a essayé de reconstituer des grandes séries
00:09:28 de mortalité, de natalité.
00:09:31 Donc, de donner des outils,
00:09:32 mais pas forcément véritablement centrés
00:09:35 sur une histoire de la santé telle qu'on l'envisage ici.
00:09:40 -On pourrait penser aussi que la démographie historique
00:09:43 s'intéresse en partie aussi sur la disparition des épidémies,
00:09:48 alors que l'épidémiologie est peut-être plus focalisée
00:09:51 sur le fait de scruter leur démarrage,
00:09:56 leur avertissement, l'alerte.
00:09:59 -Alors, ce thème de la naissance et mort des maladies infectieuses,
00:10:05 c'est une histoire ancienne,
00:10:06 puisque c'est pas seulement les démographes historiques,
00:10:09 mais c'est aussi toute une conception évolutionniste
00:10:12 des maladies.
00:10:13 C'était la formule de Charles-Nicolas,
00:10:16 le découvreur, le vecteur du typhus,
00:10:19 qui a travaillé à l'Institut Pasteur de Tunis
00:10:21 et qui voyait les maladies comme se succédant
00:10:25 avec une échelle individuelle, une échelle collective
00:10:29 et qui pouvaient être remplacées.
00:10:32 C'est aussi ce qu'après,
00:10:34 l'historien de la médecine Mirko Kremec
00:10:39 a proposé avec la notion de pathocénos,
00:10:42 c'est-à-dire notamment avec l'idée
00:10:44 que lorsque des maladies disparaissaient,
00:10:47 comme la lèpre en Europe, par exemple,
00:10:49 au milieu du XIVe siècle,
00:10:52 finalement, d'autres prenaient la place.
00:10:56 C'est quelque chose qui a été complètement retravaillé
00:10:59 par la notion de maladie émergente
00:11:01 dans les dernières décennies.
00:11:06 Et ça, il faudrait demander à Frédéric,
00:11:07 qui en est spécialiste.
00:11:09 -On y arrivera, on y arrivera.
00:11:11 Mais je vais encore te poser une question
00:11:13 avant de passer la parole à Frédéric.
00:11:17 Donc tu nous as dit qu'il y a une transition épidémiologique.
00:11:20 Est-ce que tu peux nous la dater un tout petit peu ?
00:11:23 Qu'est-ce qu'il y a, ce passage ?
00:11:25 Parce que je pense que ce matin,
00:11:26 on a sauté un peu au-dessus de ça.
00:11:28 On est passé des épidémies du début du XXe siècle
00:11:32 et on arrive au SIDA.
00:11:34 Et ensuite, on arrive comme si, en fait,
00:11:36 il n'y avait qu'une suite d'épidémies.
00:11:38 Mais ça, c'est vraiment une lecture de 2020 ou de 21.
00:11:41 C'est-à-dire, c'est le retour d'un infectieux.
00:11:45 Et entre les deux, il y a eu quand même autre chose.
00:11:47 -Alors ça dépend si on parle aussi
00:11:52 de l'histoire qui en est faite, en fait.
00:11:54 La transition démographique
00:12:02 date du XVIIIe siècle, de la fin du XVIIIe siècle.
00:12:06 Donc d'un nouveau moment, justement,
00:12:09 de cette baisse de la mortalité qui est fondamentale
00:12:11 pour comprendre la démographie européenne.
00:12:16 Historiquement, en revanche,
00:12:21 donc, on s'est intéressé...
00:12:23 Enfin, donc, c'est au cours du 1er-XXe siècle
00:12:27 qu'on voit vraiment une transformation,
00:12:30 donc, avec le primat...
00:12:32 Donc, d'après la théorie des gènes, en fait,
00:12:34 où on voit le centre...
00:12:38 des études qui se centrent sur...
00:12:42 Notamment sur l'étude des fléaux sociaux
00:12:45 qui deviennent, j'imagine,
00:12:47 on a parlé ce matin, en fait,
00:12:49 le grand moment de l'éducation sanitaire.
00:12:52 Donc, il prend le relais véritablement
00:12:55 de l'intérêt, de la préoccupation sanitaire
00:13:01 des politiques de prévention,
00:13:03 je dirais plutôt dans le 1er-XXe siècle,
00:13:06 après la Première Guerre mondiale, en particulier.
00:13:09 -Je pense que Jean-Paul voulait juste ajouter
00:13:11 un petit commentaire avant de...
00:13:13 -Sinon, j'en avais un aussi.
00:13:15 Sur la question des statistiques, finalement, sanitaires,
00:13:17 il y a des données de base qui permettent, en fait,
00:13:19 de construire ce que va être un espace
00:13:22 qui va être national ou international.
00:13:24 Et donc, ces questions de démographie,
00:13:26 d'épidémiologie, donc de discipline scientifique
00:13:28 et de savoirs scientifiques qui sont aussi construits
00:13:30 sur le type de données qu'on utilise
00:13:32 ou qu'on va reconstruire pour la démographie historique,
00:13:34 qui va être capable de reconstruire
00:13:37 au XVIIIe, enfin, du XVIIIe, du XVIIIe,
00:13:39 les tables de mortalité pour pouvoir avoir des tendances
00:13:42 et faire éventuellement des modèles.
00:13:44 Donc, le modèle de la transition épidémiologique,
00:13:46 c'est, je crois, 72, 73, Omran,
00:13:50 c'est le grand modèle qui est à la fois descriptif,
00:13:53 donc de transition dans certains pays,
00:13:55 donc baisse des maladies infectieuses
00:13:57 et puis maladies qu'on va appeler de civilisation
00:14:00 qui vont être plus liées à des modes de vie
00:14:02 dont des années 50, 60, 70,
00:14:05 maladies cardiovasculaires, chroniques, etc.
00:14:08 Mais il y a une dimension qui est descriptive
00:14:10 et une dimension qui est aussi politique
00:14:12 qui va décrire un modèle d'une certaine manière,
00:14:15 donc, le terme modèle est important,
00:14:17 de ce qui se développe dans les pays les plus riches
00:14:19 et de ce que l'on pourrait s'attendre
00:14:21 à voir s'opérer dans les pays du Sud, des Sud,
00:14:25 du Tiers-Monde à l'époque.
00:14:27 Ce qui pose la question de qui est-ce qui produit les données
00:14:31 et du coup des acteurs.
00:14:33 Et donc on revient un peu à la question
00:14:35 du national à l'international,
00:14:37 quelles sont finalement aussi les infrastructures de savoir
00:14:40 et les infrastructures politiques
00:14:42 qui vont pouvoir saisir des savoirs
00:14:44 pour en faire des mesures.
00:14:46 Et donc là, on revient sur une périodisation,
00:14:49 je pense, qui est assez importante d'avoir en tête,
00:14:52 c'est-à-dire autour du développement
00:14:55 de l'essor d'organisations internationales
00:14:58 qui vont se développer
00:15:00 et qui vont prendre en charge en particulier
00:15:02 la production de ces données
00:15:05 qui soit, d'une certaine manière, un peu standardisée
00:15:09 pour qu'on puisse aussi comparer
00:15:11 ce qui se passe dans certains pays,
00:15:13 y compris pour maîtriser l'apparition de telle ou telle maladie,
00:15:16 qu'on puisse alerter.
00:15:18 Et là, le cas classique,
00:15:20 c'est la classification internationale des maladies
00:15:23 qui vient donc, qui est développée
00:15:26 à partir de la fin du XIXe siècle.
00:15:28 A l'origine, c'est des débats scientifiques et controverses
00:15:32 entre les Britanniques, notamment, et les Français.
00:15:34 Donc c'est William Farr, qui en est l'inspirateur,
00:15:37 qui est un des grands statisticiens britanniques.
00:15:39 Et puis ça va être repris par Jacques Bertillon.
00:15:41 Et puis ensuite, ça va devenir un peu l'infrastructure de base
00:15:43 qui va se développer avec la 1re organisation internationale
00:15:47 qui va s'occuper des questions de santé,
00:15:49 qui est l'Office international d'hygiène publique
00:15:52 qui est créé en 1907, de mémoire.
00:15:54 Cette question-là, donc cette infrastructure de données
00:15:57 qui permet de se dire, oui, à temps de décès
00:16:00 de la tuberculose en Allemagne, en France ou ailleurs,
00:16:03 elle va être reprise dans l'entre-deux-guerres
00:16:05 par l'organisation d'hygiène de la Société des Nations.
00:16:09 Et puis c'est surtout l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé,
00:16:12 qui va être celle qui va essayer de détendre
00:16:16 avec différentes moutures
00:16:18 de cette classification internationale des maladies
00:16:20 qui permettent justement ensuite de produire des savoirs
00:16:23 et éventuellement de comparer différents modes d'intervention.
00:16:25 Donc là, on a une périodisation
00:16:28 du passage du national à l'international
00:16:30 qui est liée au développement
00:16:31 de ces organisations internationales
00:16:33 avec sans doute un moment assez fort
00:16:35 qui est celui de l'Organisation mondiale de la santé
00:16:39 créée en 1948, qui reste, on l'a bien vu avec la Covid,
00:16:43 une organisation qui est centrale,
00:16:45 mais qui est contestée, et pas simplement,
00:16:47 par Donald Trump, bien avant, puisqu'on va dire
00:16:51 qu'à partir des années 80, 90,
00:16:54 qui était l'organisation hégémonique
00:16:56 un peu dans le domaine sanitaire international,
00:16:59 elle est contestée par toute une autre série d'acteurs
00:17:02 sur lesquels des collègues, ou Jean-Paul, dans son ERC,
00:17:05 sur lesquels il travaillait, par exemple la Banque mondiale.
00:17:08 Ça, c'est un autre acteur,
00:17:10 une autre organisation internationale
00:17:11 qui va rentrer dans un champ
00:17:13 dans lequel elle était absente
00:17:15 jusqu'au début des années 70
00:17:16 quand elle crée un département
00:17:18 qui va s'occuper justement
00:17:19 de questions de population et de santé.
00:17:21 Ça, c'est la Banque mondiale, c'est un acteur,
00:17:23 mais c'est des organisations non gouvernementales
00:17:26 du type Fondation Bill & Melinda Gates
00:17:29 dont le budget, très rapidement,
00:17:31 créé en 98, de mémoire, en 1998,
00:17:33 dont le budget, très rapidement,
00:17:35 va être sans commune mesure avec celui de l'OMS.
00:17:38 Et donc, on a des changements d'acteurs
00:17:42 qui font que le champ de la santé publique
00:17:46 internationale aujourd'hui,
00:17:47 qu'on appelle souvent santé globale désormais,
00:17:50 en fait, correspond à un domaine
00:17:52 qui est très différent et sur lequel, j'imagine,
00:17:54 Jean-Paul peut donner plus de détail.
00:17:57 - Est-ce que tu peux juste revenir
00:18:00 un tout petit peu, avant qu'on passe
00:18:02 à Jean-Paul, sur la suite,
00:18:04 sur les sources et l'historiographie
00:18:07 de ces acteurs dont tu viens de nous égrener
00:18:10 un petit peu, une chronologie d'apparition
00:18:13 au XXe siècle ?
00:18:15 - Alors, d'un point de vue très, très,
00:18:17 par exemple, les archives de l'Organisation mondiale
00:18:19 de la santé, donc de l'OMS, sont à Genève.
00:18:22 Elles sont assez bien accessibles,
00:18:23 notamment pour aller jusqu'aux années 1990,
00:18:26 avec aussi un écart, un saut
00:18:29 entre ce qui va relever de Genève,
00:18:31 donc de l'Organisation sanitaire internationale
00:18:33 au niveau central, avec beaucoup moins de connaissances
00:18:36 sur les bureaux régionaux qui sont mis en place
00:18:40 au tout début des années 50.
00:18:41 Donc là, il y a un front,
00:18:43 d'une certaine manière, de recherche
00:18:45 qui fait que, ben, on ne sait pas forcément
00:18:47 la même chose entre ce qui se passe
00:18:49 au niveau de l'organisation dans son ensemble
00:18:51 et de ses différents départements,
00:18:53 et puis ce qui va se passer au niveau régional,
00:18:55 et puis il faudrait compléter,
00:18:56 et là, je redonne la parole à Jean-Paul,
00:18:59 au niveau national.
00:19:00 Dans quelle mesure le regard international,
00:19:02 quand on le regarde du point de vue
00:19:04 des archives nationales, il n'est pas un petit peu différent ?
00:19:06 Donc ça, c'est des archives qui sont mobilisables,
00:19:09 et puis ensuite, de plus en plus,
00:19:10 on se rapproche sur du contemporain
00:19:12 ou sur du très contemporain.
00:19:13 On va discuter de plus en plus avec des anthropologues,
00:19:15 comme le disait Anne tout à l'heure,
00:19:18 parce qu'ils ont aussi d'autres méthodologies,
00:19:19 donc il y a un jeu de discussions interdisciplinaires
00:19:22 parmi les sciences sociales,
00:19:24 et puis il va falloir aller voir
00:19:25 les archives de la Banque mondiale,
00:19:27 à Washington, DC.
00:19:29 Voilà, il va falloir voir d'autres acteurs,
00:19:34 d'autres organisations non gouvernementales,
00:19:36 par exemple, qui vont avoir d'autres sources,
00:19:38 faire des entretiens euros.
00:19:39 Donc il y a une diversité de sources qui...
00:19:42 On est dans la prolifération de sources
00:19:44 plus on se rapproche du contemporain.
00:19:46 Donc il y a une partie financière
00:19:49 qui apparaît très clairement,
00:19:51 surtout vers la fin,
00:19:52 quand tu dis Melinda Gates,
00:19:53 quand tu dis Banque mondiale,
00:19:55 OCDE peut-être aussi.
00:19:57 Jean-Paul, comment ça se décline ?
00:20:00 Et je pense que c'est important aussi
00:20:02 peut-être de reprendre déjà les fils qu'on a esquissés,
00:20:05 et puis de poser la question
00:20:07 de ce déplacement vers les Sud,
00:20:10 vers le global.
00:20:11 Il ne faut pas oublier qu'il y a aussi encore
00:20:13 dans cette période,
00:20:15 une question sur le colonial et le postcolonial, évidemment.
00:20:19 -Peut-être une première remarque
00:20:20 qui fait suite à ce que vous disiez
00:20:23 sur la transition épidémiologique.
00:20:26 Parce que ce qu'évoquait Frédéric
00:20:29 autour du travail d'Omran
00:20:32 et de la période de discussion des années 60-70,
00:20:35 quand ce modèle de la...
00:20:38 Parce que c'est vraiment un modèle
00:20:39 à dimension normative aussi.
00:20:40 C'est pas seulement pour décrire ce qui se passe,
00:20:43 c'est pour décrire ce qui doit se passer.
00:20:47 Et qui, du coup, doit...
00:20:50 part de l'expérience de l'Europe, de l'Amérique du Nord
00:20:53 pour dire qu'elle doit être le futur des Sud
00:20:56 et à l'époque de ce qui s'appelle le Tiers-Monde,
00:20:59 ce passage d'une domination,
00:21:01 d'une mortalité liée aux maladies infectieuses
00:21:03 à une mortalité liée à l'impact des maladies chroniques.
00:21:08 Et du coup, ça a des liens très, très forts
00:21:10 avec ce qui se joue dans la...
00:21:12 Ce qu'évoquait Frédéric autour
00:21:14 des nouvelles organisations internationales,
00:21:16 de la façon dont la santé est l'apanage de l'une d'entre elles,
00:21:19 donc l'OMS, mais irrigue aussi
00:21:22 toute une série de discussions sur le développement
00:21:24 qu'on va retrouver à la FAO, qu'on va retrouver
00:21:26 à la Banque mondiale, comme on le mentionnait,
00:21:29 en particulier sur le lien avec les questions de population.
00:21:32 Donc il y a un moment où c'est que...
00:21:36 Cette réflexion sur quels sont les sources de la mortalité
00:21:39 et quelles sont les formes de pathologies
00:21:42 et d'états de santé problématiques
00:21:45 participent d'une réflexion d'ensemble
00:21:48 sur l'avenir des sociétés
00:21:50 et sur les questions du développement.
00:21:54 Et paradoxalement, c'est que ce monde
00:21:58 de la santé publique internationale
00:22:00 qui problématise, qui aboutit à l'idée
00:22:03 de la transition épidémiologique
00:22:05 va se révéler incapable de prendre en charge
00:22:09 cette question des maladies chroniques.
00:22:11 C'est-à-dire que c'est aussi le moment
00:22:13 de ce qu'on peut appeler le renforcement
00:22:16 et la stabilisation du grand partage
00:22:19 entre Nord et Sud du point de vue de la santé,
00:22:21 c'est-à-dire le chronique au Nord, l'infectieux au Sud,
00:22:25 et où une bonne partie des politiques,
00:22:28 et en particulier des politiques d'aide,
00:22:30 vont s'organiser autour de ce grand partage-là.
00:22:34 Le cas de la tuberculose est un des plus emblématiques
00:22:38 où la tuberculose devient un problème des Suds.
00:22:43 Elle devient un problème des pays pauvres
00:22:47 à bas revenus, et du coup de formes d'intervention
00:22:50 qui aussi vont prendre une tournure particulière
00:22:53 du fait même qu'ils se déroulent dans ces pays-là.
00:22:56 Et du coup, ça me permet peut-être de dire un mot
00:23:00 sur la question postcoloniale.
00:23:03 Parce qu'il y a une périodisation classique
00:23:08 de ce qui s'est joué dans l'internationalisation
00:23:10 de la santé au XXe siècle,
00:23:12 tout particulièrement après la Deuxième Guerre mondiale,
00:23:16 qui est pratiquement par bloc de 20 ans.
00:23:20 Il y a une première période qui est identifiée
00:23:22 comme celle des années 50-60,
00:23:25 qui a été décrite par les historiens,
00:23:30 en particulier les historiens qui ont travaillé
00:23:32 sur la trajectoire de l'OMS,
00:23:35 comme Marcus Coetho, Elisabeth Fee, etc.,
00:23:38 qui a été identifiée un peu comme la période de continuité
00:23:40 avec le colonial.
00:23:42 Alors, c'est continuité avec le colonial,
00:23:45 non seulement parce qu'on est avant les indépendances
00:23:48 de toute une partie des territoires
00:23:52 qui sont encore sous domination britannique ou française,
00:23:56 mais c'est aussi continuité avec le colonial
00:24:00 dans le sens où la plupart des grandes initiatives
00:24:03 de la santé publique internationale
00:24:05 qui prennent pour cible des maladies infectieuses,
00:24:07 à commencer par le paludisme,
00:24:09 sont des initiatives qui viennent des Nords,
00:24:11 des grands programmes de lutte contre le paludisme.
00:24:15 La plupart des financements, ainsi que l'idée
00:24:17 qu'on peut éradiquer le paludisme
00:24:21 à partir de l'épandage massif de DDT,
00:24:25 c'est quelque chose qui est mis en avant par les Etats-Unis
00:24:28 très fortement à partir de l'expérience de la guerre
00:24:30 et qui va du coup être à l'agenda
00:24:33 de la santé publique internationale
00:24:35 pendant une bonne vingtaine d'années
00:24:37 avant qu'un constat d'échec relatif soit adressé
00:24:41 et qu'il y ait une reconfiguration des modalités
00:24:43 non plus d'éradication, mais de contrôle du paludisme.
00:24:47 Donc on a une première décennie autour de ça.
00:24:49 Il y a une deuxième qui est très intéressante
00:24:52 parce que dans les années 70-80,
00:24:54 c'est un peu l'effet des décolonisations.
00:24:58 C'est ça qui permet aussi d'interroger l'idée
00:25:01 d'une très grande continuité avec le colonial.
00:25:04 Ces années 70-80, c'est celles où, à l'OMS,
00:25:09 les nouveaux Etats décolonisés
00:25:12 vont tenter de proposer
00:25:17 et de mettre en application un modèle qui se veut alternatif
00:25:21 à ces grands programmes.
00:25:23 Un modèle qui se veut alternatif
00:25:25 dans le sens où il s'agirait d'une médecine sociale
00:25:28 définie et faite par et pour les pays du Tierron.
00:25:34 Ce qui passe par toute une série d'inflexions,
00:25:38 c'est-à-dire d'insister par exemple sur les liens
00:25:40 entre la santé et tous les autres enjeux du développement.
00:25:43 Il ne faut pas d'intervention qui prenne pour cible
00:25:46 une seule maladie avec une seule technique
00:25:49 ou un seul moyen,
00:25:50 mais il faut des interventions
00:25:54 qui soient beaucoup plus intégratives,
00:25:56 beaucoup plus larges dans leurs périmètres
00:25:59 et qui n'isolent pas le curatif
00:26:02 ou les technologies préventives.
00:26:06 Ou encore l'insistance qui est mise dans cette période-là
00:26:09 sur les ressources locales.
00:26:11 Les ressources locales voulant dire, par exemple,
00:26:14 les savoirs médicaux traditionnels.
00:26:18 Ce qui va être mis à l'agenda, c'est l'idée d'intégration.
00:26:21 C'est l'idée que ces savoirs médicaux traditionnels
00:26:24 constituent des ressources pour les nouveaux Etats
00:26:27 qu'ils doivent être confrontés, mis en rapport
00:26:30 avec la biomédecine
00:26:33 et que, du coup,
00:26:36 la priorité accordée aux soins de santé primaire
00:26:39 va aussi passer par leur mobilisation.
00:26:42 Et puis alors, on a une dernière période
00:26:46 qui correspond un peu à la...
00:26:49 on va dire l'érosion ou la marginalisation
00:26:53 voire l'échec relatif de ce programme
00:26:57 de soins de santé primaire qui était porté
00:26:59 dans les années 70-80,
00:27:02 qui est celle de l'émergence de la santé globale
00:27:03 à partir des années 90,
00:27:05 qui a été décrite par les historiens
00:27:07 comme étant fortement liée à la mondialisation,
00:27:11 à la nouvelle phase de mondialisation,
00:27:13 en particulier de mondialisation économique,
00:27:16 et qui va être associée à l'émergence
00:27:19 des nouveaux acteurs dont parlait Frédéric,
00:27:22 la Banque mondiale,
00:27:25 toute une partie des grandes ONG sanitaires internationales,
00:27:28 mais qui va être associée aussi
00:27:31 à des formes d'intervention
00:27:32 qui renouent avec la première période,
00:27:36 qui renouent avec l'idée des programmes verticaux
00:27:40 centrés sur une pathologie.
00:27:42 Et les 3 plus importants
00:27:44 seront autour de la malaria,
00:27:47 de la tuberculose et du HIV/AIDS/SIDA.
00:27:50 Et c'est des programmes qui renouent aussi
00:27:53 avec la priorité accordée à l'innovation technique,
00:27:57 dans la mesure où c'est des programmes
00:28:00 dont la base est la question de l'accès,
00:28:02 non pas aux soins dans toute leur généralité,
00:28:05 mais l'accès aux médicaments.
00:28:07 Et du coup, ça m'amène au paradoxe
00:28:10 dont je parlais au tout début,
00:28:12 qui est celui de la difficulté
00:28:15 de la relation de l'infectieux et du chronique
00:28:17 dans ces arènes internationales
00:28:21 et le renforcement du grand partage,
00:28:24 puisque cette santé globale
00:28:28 va construire toute une série de nouveaux outils épidémiologiques,
00:28:30 et en fait, ce sont des outils
00:28:32 qui, à l'initiative de l'OMS et de la Banque mondiale,
00:28:36 mettent en rapport les données épidémiologiques
00:28:40 avec les données économiques,
00:28:42 les évaluations de coûts et de bénéfices,
00:28:46 ça dans une perspective
00:28:48 qui est celle de la priorisation.
00:28:52 C'est-à-dire, partant de l'idée
00:28:55 que pour beaucoup de pays à bas revenus,
00:28:58 l'enjeu, et ça entre en résonance aussi
00:29:01 avec un certain nombre de discussions
00:29:03 qui ont lieu dans les Nords à partir du moment
00:29:06 où le problème du financement des systèmes de santé
00:29:11 est très fortement mis sur la table,
00:29:13 c'est cette idée qu'il faut faire des choix,
00:29:16 il faut prioriser,
00:29:18 et un des moyens de prioriser, c'est effectivement
00:29:21 de faire l'évaluation médico-économique.
00:29:24 Et c'est ce qu'on va avoir autour de cette conjonction
00:29:26 d'épidémiologie et d'évaluation économique.
00:29:31 Et un des effets de cela,
00:29:34 c'est un nouveau calcul de l'impact
00:29:37 des différents types de maladies,
00:29:40 dont la manifestation la plus spectaculaire
00:29:46 a été de rendre visible à partir du début des années 90
00:29:51 l'impact majeur des maladies chroniques au Sud.
00:29:54 C'est-à-dire le fait qu'on n'avait pas
00:29:56 la transition épidémiologique
00:29:58 comme on l'avait imaginé et envisagé
00:30:01 au milieu des années 70.
00:30:04 Au Sud, on a la juxtaposition des deux.
00:30:07 On n'a pas la disparition des grandes maladies infectieuses,
00:30:11 mais par contre, on a l'arrivée massive
00:30:13 des maladies chroniques,
00:30:15 diabète, maladies cardiovasculaires,
00:30:19 cancers, etc.
00:30:20 Et du coup, c'est double fardeau.
00:30:22 C'est la double peine.
00:30:24 Or, cette santé globale,
00:30:27 avec cette connaissance nouvelle
00:30:30 et cette visibilité nouvelle de ces maladies,
00:30:32 va, entre 1990 et encore aujourd'hui,
00:30:37 ne mettre en place aucun grand programme
00:30:40 ciblant les maladies chroniques.
00:30:42 C'est-à-dire que les grandes cibles d'investissement,
00:30:45 ça reste, et ça, on a du coup
00:30:48 cette longue durée historique qui se dessine là,
00:30:50 ça reste les maladies infectieuses.
00:30:53 C'est 95 % des financements de la santé globale.
00:30:57 -Ce qui renoue un tout petit peu avec tes questions
00:31:00 qu'on a discutées dans un échelle beaucoup plus individuelle
00:31:02 ce matin, c'est-à-dire la question confinée
00:31:05 pour moi ou pour les autres,
00:31:07 investir dans la santé des Suds
00:31:09 pour eux ou pour ne pas récupérer
00:31:12 de l'infectieux dans le Nord qui est difficile à soigner.
00:31:16 C'est toute la question d'uberculose multirécidivante
00:31:20 et d'autres organisations de ce type-là.
00:31:24 Donc on voit que ça se décline au macro et au micro
00:31:27 d'une certaine manière.
00:31:29 Donc on va avancer un tout petit peu
00:31:31 dans notre questionnement, notre table ronde.
00:31:33 Donc on a fait un premier tour
00:31:35 autour des chiffres du chiffrage,
00:31:39 des acteurs de ce chiffrage, des organisations.
00:31:42 Et on va revenir un petit peu sur la question
00:31:46 de la santé publique, la prévention
00:31:48 et des pratiques peut-être aussi.
00:31:50 Anne ?
00:31:52 -Alors sur la politique de santé publique,
00:31:57 on va peut-être repartir du Covid
00:32:00 et des enseignements du Covid.
00:32:01 Finalement, qu'est-ce qu'on a dit beaucoup ?
00:32:03 Que Covid était un révélateur d'un certain nombre de choses
00:32:05 ou remettait en valeur des choses bien connues.
00:32:08 Sur ce sujet, je vois deux qui, d'une part,
00:32:12 qui a été souvent qualifié
00:32:14 et qui l'a été à nouveau pendant le Covid
00:32:16 par des grands dirigeants de la santé publique.
00:32:19 Donc ce qui a été qualifié
00:32:21 comme la faiblesse institutionnelle
00:32:23 de la santé publique en France,
00:32:25 au moins depuis un siècle,
00:32:27 malgré la force politique
00:32:32 du mouvement hygiéniste sur la longue durée
00:32:35 qui a été notamment au XIXe siècle,
00:32:37 tant politiquement que sur le plan intellectuel,
00:32:42 scientifique de ce mouvement,
00:32:45 et aussi d'un ensemble de dispositifs
00:32:47 qui ont été mis en place au XIXe siècle
00:32:51 dans des cadres locaux,
00:32:54 dans des cadres d'expérimentation
00:32:57 et notamment contre les fléaux sociaux.
00:33:00 Mais malgré tout,
00:33:02 cette faiblesse qui a été très souvent
00:33:06 sur laquelle il y a eu un certain nombre d'études,
00:33:09 c'est l'idée qu'elle va encore plus se pérenniser
00:33:14 après la Seconde Guerre mondiale,
00:33:16 avec la domination du modèle biomédical
00:33:19 et finalement des marginalisations
00:33:22 de structures de médecine sociale.
00:33:25 Donc ça, c'est un premier point.
00:33:27 Et puis la deuxième, je dirais,
00:33:29 la deuxième grande évidence
00:33:32 sur laquelle le Covid a mis l'accent,
00:33:35 c'est les inégalités sociales de santé.
00:33:38 C'est quelque chose de bien connu,
00:33:41 mais qui a été quand même là
00:33:44 auquel tout le monde pouvait se confronter.
00:33:48 Alors peut-être là encore,
00:33:50 pour essayer de voir comment on peut saisir historiquement
00:33:53 et quels ont été les facteurs de renouvellement
00:33:57 de la saisie historique de ces problèmes,
00:34:01 peut-être juste quelques pistes
00:34:03 pour des travaux qui existent aujourd'hui.
00:34:06 D'abord, je voudrais souligner la réflexion
00:34:09 sur l'ancrage spatial,
00:34:12 la spatialisation d'un certain nombre d'études,
00:34:15 la réflexion sur les interactions sociales,
00:34:19 leur ancrage spatial,
00:34:21 la territorialisation des phénomènes sanitaires.
00:34:25 C'est la définition de la maladie
00:34:27 comme à la fois sociale et spatiale,
00:34:31 socio-spatiale.
00:34:33 Et il ne s'agit pas seulement de spatialiser des faits sociaux,
00:34:38 mais le territoire, par exemple l'espace urbain,
00:34:43 devient un acteur à part entière de l'évolution sociale.
00:34:47 Prendre un exemple concret,
00:34:49 je pense à notre collègue de Strasbourg,
00:34:51 Célia Miralles,
00:34:53 dans son grand travail sur la tuberculose
00:34:56 dans l'espace social barcelonais,
00:34:59 dans les années 30 du XXe siècle,
00:35:02 où elle prend en compte la multiplicité
00:35:04 des exceptions savantes de la tuberculose,
00:35:07 des expériences des patients
00:35:09 et leur parcours de soins dans les dispensaires,
00:35:12 les hôpitaux, les sanatoriums gratuits.
00:35:15 Donc là, on repart de toute une série de sources
00:35:18 qui croisent des données démographiques
00:35:20 qu'on évoquait tout à l'heure,
00:35:22 par exemple les données du recensement municipal,
00:35:24 l'histoire sociale, territoriale, médicale,
00:35:28 des réseaux de sociabilité.
00:35:30 Et ça produit quelque chose de nouveau
00:35:33 en montrant, par exemple,
00:35:35 comment le lien entre la notion de densité
00:35:39 et la maladie,
00:35:41 qui était fondamental dans la conception contagioniste,
00:35:45 est mis en doute à l'échelle de la ville.
00:35:49 Par exemple, on voit que les malades
00:35:51 ne vivent pas dans les zones les plus denses,
00:35:53 mais en revanche, qu'à l'échelle de l'habitat,
00:35:56 la densité redevient une caractéristique
00:35:59 du logement des tuberculeux.
00:36:01 Ce qu'on voit bien dans ce type de travaux,
00:36:03 c'est que chaque source va offrir,
00:36:07 va mettre en valeur des différences spatiales
00:36:11 et qui sont perceptibles.
00:36:13 Par exemple, la manière dont on recrute les patients
00:36:16 dans les différents éléments du système de santé.
00:36:20 Donc il me semble que, par exemple,
00:36:22 on a là des façons de reposer le problème
00:36:26 de la question de la causalité sociale,
00:36:29 la pauvreté, au XIXe siècle,
00:36:31 et la causalité environnementale,
00:36:35 donc l'insalubrité attachée à la maladie.
00:36:39 Voilà une manière, pour un exemple,
00:36:42 je peux en prendre d'autres,
00:36:43 mais je ne sais pas très bien de quel temps je dispose.
00:36:47 -T'as un peu de temps,
00:36:48 mais juste une question à interjeter.
00:36:50 Ce que tu nous dis, c'est que la répartition spatiale
00:36:54 dans une ville est à la fois une traduction
00:36:59 d'inégalités socio-économiques
00:37:03 qui, à la fois, traduisent et sont,
00:37:06 au leur compte propre, des facteurs
00:37:09 qui vont influencer l'état de santé
00:37:12 ou la dissémination ou la non-dissémination
00:37:14 ou la protection de l'épidémie quand elle arrive,
00:37:17 comme ça a été le cas dans la pandémie
00:37:19 et comme c'est le cas pour le choléra au XIXe siècle
00:37:22 et comme c'est le cas de la peur bleue
00:37:25 des faubourgs de Paris
00:37:27 et pour la tuberculose
00:37:28 ou d'autres maladies infectieuses au début du XXe.
00:37:32 -Oui, je pense que ce que je voulais dire,
00:37:35 c'était qu'il y avait,
00:37:36 puisqu'on est dans une journée de réflexion
00:37:39 sur les archives nationales,
00:37:40 il y avait des manières de se saisir des sources
00:37:42 qui peuvent insister, par exemple,
00:37:45 sur l'espace et sur une lecture spatiale.
00:37:51 Je pense par exemple aussi aux travaux
00:37:53 dans la mouvance, dans le sillage
00:37:55 des travaux d'histoire urbaine de Jean-Luc Pinol,
00:37:58 qui utilise les systèmes d'information géographique
00:38:01 et qui a remis la cartographie
00:38:03 au cœur véritablement de l'histoire sociale.
00:38:07 Et je pense que ça produit aussi
00:38:09 des effets en histoire de la santé
00:38:13 parce qu'on peut, par exemple,
00:38:16 sur la fièvre typhoïde, qui est une maladie
00:38:18 qui, par excellence, engage des interactions
00:38:21 entre des déterminants sociaux, environnementaux,
00:38:25 et puis le facteur humain,
00:38:27 notamment les porteurs de germes de la fièvre typhoïde.
00:38:31 On a des travaux d'un collègue sur Oxford,
00:38:36 Klaas Kierschel, qui montre des études
00:38:40 extrêmement fines à partir de ces cartes
00:38:44 et comment cette spatialisation de la maladie
00:38:50 met à l'épreuve, d'abord, l'évolution
00:38:53 des stratégies de lutte contre la typhoïde
00:38:55 et puis comment cette articulation
00:38:58 entre le social et l'espace éclaire finalement
00:39:02 ces recompositions entre des savoirs,
00:39:06 l'intervention médicale, le social, le culturel,
00:39:13 parce que ça rejoue aussi beaucoup
00:39:15 avec les représentations médicales qui en ont.
00:39:18 Donc voilà, si je réponds à ta question,
00:39:23 un exemple historiographique à partir de lequel
00:39:28 on peut faire retravailler cette histoire,
00:39:33 cette saisie, disons, de cette catégorie d'analyse
00:39:38 d'inégalité sociale de santé.
00:39:40 Donc la pandémie et les épidémies
00:39:44 sont souvent facteurs révélateurs
00:39:48 de ces inégalités dont elles participent
00:39:52 et qu'elles expliquent et elles expriment.
00:39:56 Un autre mot qui est évidemment important
00:40:00 dans le cadre de ces épidémies,
00:40:03 prise en considération à échelle nationale
00:40:06 puis internationale,
00:40:08 c'est un terme qui est vraiment forgé
00:40:11 dans les années 80, 90,
00:40:13 dans le monde anglo-saxon,
00:40:15 qui est celui d'être préparé,
00:40:17 la preparedness d'un cas, de quelque chose qui arrive.
00:40:22 Alors les épidémies avant la pandémie Covid
00:40:26 nous ont montré qu'on peut être préparé
00:40:28 et en fait ça finit par être très mal perçu
00:40:32 d'avoir été préparé,
00:40:33 puisqu'il y a une ministre qui a quand même payé cher
00:40:36 pour pouvoir acheter des masques et des vaccins.
00:40:39 Et puis on se dit que ça ne sert à rien
00:40:42 et puis on n'est plus préparé
00:40:44 et puis ça se joue autrement.
00:40:46 Comment on situe ça historiquement Frédéric ?
00:40:51 Sur la question de la préparation,
00:40:54 preparedness en anglais,
00:40:55 je pense qu'effectivement
00:40:56 on a quelque chose qui est assez intéressant
00:40:57 parce que la Covid a été un peu
00:40:59 un moment de surprise.
00:41:00 Comment est-ce qu'on avait pu,
00:41:02 en tout cas parmi les pays les plus riches,
00:41:04 développer des schémas, des systèmes,
00:41:07 renouveler ou développer la prévention
00:41:10 en direction d'un nouveau système
00:41:12 qui serait la préparation
00:41:13 et être autant surpris et finalement
00:41:16 et d'en arriver à des mesures
00:41:17 telles que le confinement au début de 2020.
00:41:19 Plein d'éléments d'analyse,
00:41:21 mais c'est sûr que ce motif de la préparation
00:41:25 il est intéressant parce que c'est un nouveau,
00:41:28 une nouvelle manière de travailler
00:41:30 au sein de la santé publique
00:41:31 qui apparaît dans les années,
00:41:32 on va dire 80, 90
00:41:33 et qui correspond aussi
00:41:35 dans la foulée de ce qu'on disait tout à l'heure
00:41:37 à un retour des menaces
00:41:39 et de l'inquiétude des pays
00:41:40 les plus riches de la planète
00:41:41 et en particulier des Américains
00:41:43 face au retour de maladies infectieuses.
00:41:45 Le VIH-SIDA c'est un cas classique
00:41:47 mais pour un autre cas
00:41:48 qu'on a travaillé aussi avec Anne,
00:41:49 le cas de la grippe,
00:41:50 cette maladie virale
00:41:52 dont on apprend dans les années 50, 60
00:41:54 qu'elle est zoonotique
00:41:56 donc elle arrive des animaux
00:41:57 et en particulier des oiseaux migrateurs
00:41:59 fait qu'on ne peut pas espérer la contrôler
00:42:01 à brève échéance
00:42:02 sauf à vacciner tous les oiseaux migrateurs
00:42:05 ou tous les abattre
00:42:06 ce qui est relativement compliqué.
00:42:08 Donc on a une nouvelle modalité,
00:42:11 la prévention c'est finalement
00:42:13 on a un risque qui est calculable
00:42:15 et on va mettre en oeuvre des mesures
00:42:17 pour s'en prémunir,
00:42:18 la vaccination étant le cas le plus classique.
00:42:21 Preparedness ça va être des mesures
00:42:23 qui se développent dans les années 90
00:42:24 aux Etats-Unis
00:42:25 aussi avec l'appui
00:42:27 de l'Organisation mondiale de la santé
00:42:29 pour avoir des plans,
00:42:31 des plans c'est quoi ?
00:42:32 C'est une autre prise sur le futur,
00:42:33 sur un futur qu'on ne peut pas contrôler
00:42:35 et donc il va falloir assurer
00:42:37 et c'est toute une série
00:42:39 de documents administratifs aussi
00:42:40 des plans de continuité d'activité
00:42:42 par exemple dans les entreprises
00:42:43 ça ça va être se dire
00:42:45 qu'on ne peut pas calculer forcément le risque
00:42:47 par contre on sait qu'il va y avoir
00:42:48 des mutations de virus grippaux par exemple
00:42:50 et j'insiste sur la grippe
00:42:52 pas parce que c'est mon sujet de thèse
00:42:53 à l'origine mais aussi
00:42:54 parce que ça a été le grand modèle
00:42:55 1999, première organisation
00:42:59 enfin premier atelier international
00:43:02 à l'OMS pour développer des plans
00:43:04 "preparedness plan"
00:43:05 au niveau national
00:43:06 ça va être sur la grippe
00:43:07 et donc la grippe
00:43:08 notamment dans les années 2000
00:43:09 ça va être le grand modèle
00:43:10 la grande maladie dont on s'attend
00:43:11 notamment avec H5N1
00:43:13 la grippe aviaire
00:43:14 que ce soit la prochaine grande pandémie
00:43:16 et on va rappeler le précédent
00:43:17 la grippe de 18
00:43:18 pour faire des estimations
00:43:19 et des évaluations
00:43:20 du nombre de morts
00:43:21 qui pourraient arriver
00:43:23 et donc ce système de préparation
00:43:25 qui est différent de celui
00:43:26 de la prévention dont je vous parlais
00:43:28 il est intéressant parce que
00:43:30 par exemple il se décale un peu
00:43:32 en termes de responsabilité
00:43:34 administrative et politique
00:43:35 en France par exemple
00:43:36 la préparation
00:43:37 les politiques de préparation
00:43:38 elles jouent au niveau interministériel
00:43:40 le ministère de la santé
00:43:42 est plutôt l'organe technique
00:43:44 qui va en accord avec
00:43:46 les autres pays européens
00:43:47 ou l'OMS
00:43:48 monter le plan de préparation
00:43:49 c'est à déclinaison
00:43:51 au niveau local
00:43:52 mais le ministère de l'intérieur
00:43:53 va avoir une importance
00:43:54 le ministère de l'armée
00:43:55 va avoir une importance
00:43:56 parce qu'il va faire
00:43:58 il va falloir par exemple
00:43:59 non pas protéger
00:44:00 toute la population
00:44:01 mais avoir des stocks
00:44:02 d'antiviraux par exemple
00:44:05 pour pouvoir tenir le temps
00:44:07 dans le cas de la grippe
00:44:08 qu'on puisse
00:44:09 créer un nouveau vaccin
00:44:11 selon des processus
00:44:12 qu'on connaît depuis les années 70
00:44:13 donc vous voyez qu'on a
00:44:14 une responsabilité politique
00:44:17 qui est différente
00:44:18 des techniques, des mesures
00:44:19 qui sont différentes
00:44:20 des applications qui vont être
00:44:21 par exemple des plans de continuité
00:44:22 d'activité dans les entreprises
00:44:24 qui vont se dupliquer
00:44:25 dans les pays notamment
00:44:27 les plus développés de la planète
00:44:29 la France est un exemple
00:44:30 les Suisses ont eu un très bon
00:44:31 tous les pays en fait
00:44:33 vont développer ces plans
00:44:34 de préparation
00:44:35 donc on a la grippe porcine
00:44:37 dont vous vous rappelez mexicaine
00:44:39 qui n'est pas exactement
00:44:40 celle qu'on attendait
00:44:41 dans la mesure où elle arrive
00:44:42 aux Etats-Unis
00:44:43 ou à la frontière mexicaine
00:44:44 et pas où on regardait
00:44:45 avec les épisodes de grippe aviaire
00:44:47 qui étaient l'Indonésie
00:44:48 et le Vietnam par exemple
00:44:49 et puis ce que disait tout à l'heure
00:44:51 Christian
00:44:53 tout est une controverse
00:44:54 qui va rapidement arriver
00:44:56 sur la nouveauté d'un virus
00:44:58 de fait le H1N1 de 2008-2009
00:45:00 c'est un nouveau virus
00:45:01 mais il ne va pas avoir
00:45:02 les conséquences
00:45:03 telles qu'on les a attendues
00:45:04 donc on va déclencher
00:45:05 à partir d'une alerte de l'OMS
00:45:07 de sa directrice
00:45:08 qui était une chinoise
00:45:10 Margaret Chan
00:45:11 on va développer les plans
00:45:12 de préparation
00:45:13 et les plans de préparation
00:45:15 au niveau des Etats
00:45:17 et puis finalement
00:45:18 la gravité de la pandémie
00:45:19 ne va pas être telle
00:45:20 du coup toute une série
00:45:23 de controverses
00:45:24 y compris aussi
00:45:26 la manière dont l'alerte
00:45:28 est lancée
00:45:29 sur les éventuels
00:45:31 liens d'intérêt
00:45:32 entre l'Organisation mondiale
00:45:33 de la santé
00:45:34 et des groupements pharmaceutiques
00:45:36 etc.
00:45:38 Ce qui est sûr
00:45:39 c'est qu'après dans les années 2000
00:45:40 on a une forme de désarmement
00:45:42 si on reste sur une métaphore
00:45:43 militaire
00:45:44 mais la métaphore de la préparation
00:45:45 elle est quand même aussi
00:45:46 en partie militaire
00:45:48 avec moins de masques
00:45:50 des masques qui vont être périmés
00:45:51 qui vont disparaître
00:45:52 et puis de fait
00:45:53 au début des années
00:45:56 aussi des institutions
00:45:57 il y avait les Prusses
00:45:58 dont je n'avais pas réussi
00:45:59 à m'en rappeler l'acronyme
00:46:02 c'était donc un établissement public
00:46:04 qui devait préparer justement
00:46:06 l'action en cas de survenue
00:46:08 de la pandémie
00:46:09 qui disparaît au milieu
00:46:11 des années 2010
00:46:12 alors que c'était dans ce système
00:46:13 de préparation
00:46:14 l'organe clé
00:46:15 qui à mon avis dépendait
00:46:17 du ministère de l'armée
00:46:18 en tout cas pas en tout
00:46:19 ça il faut vérifier
00:46:20 mais pas simplement
00:46:21 du ministère de la santé
00:46:22 et dans tous les cas
00:46:23 ce qu'on voit
00:46:25 au début de 2020
00:46:25 c'est une surprise aussi
00:46:27 parce que comme toute préparation
00:46:29 on se prépare à un ennemi particulier
00:46:31 et c'était plutôt calqué
00:46:32 sur la grippe
00:46:33 et par exemple
00:46:35 en termes de délai
00:46:36 pour mettre en oeuvre
00:46:37 un vaccin
00:46:38 sur la grippe
00:46:39 c'est une technologie
00:46:40 qui est assez connue
00:46:41 puisque on connaît
00:46:42 ces systèmes de mutation
00:46:43 de grippe
00:46:44 depuis les années 50-60
00:46:45 il y a un système
00:46:46 justement organisé
00:46:47 par l'OMS
00:46:48 de circulation de souches
00:46:49 qui sont ensuite
00:46:51 qui permettent d'identifier
00:46:52 quel est le virus en circulation
00:46:54 et ensuite on peut l'envoyer
00:46:55 aux groupes pharmaceutiques
00:46:56 qui vont faire le vaccin
00:46:57 qui est celui
00:46:58 sur la souche en circulation
00:46:59 sur la Covid
00:47:00 il a fallu tout découvrir
00:47:01 à commencer par le virus
00:47:03 ceci étant
00:47:05 sans doute
00:47:06 je termine là-dessus
00:47:07 on n'aurait pas été aussi honds
00:47:09 l'un des entreprises pharmaceutiques
00:47:11 n'aurait pas pu développer
00:47:12 un certain nombre
00:47:13 les vaccins
00:47:14 s'ils n'avaient pas bénéficié
00:47:15 des réseaux
00:47:16 de circulation d'informations
00:47:17 entre les virologistes
00:47:18 qui ont été développés
00:47:19 au début des années 2000
00:47:20 dans le cadre de la préparation
00:47:23 parce que ce n'est pas du tout évident
00:47:24 il y a des controverses
00:47:25 ce n'est pas du tout évident
00:47:27 que des scientifiques
00:47:30 à un endroit de la planète
00:47:31 isolent des virus hautement pathogènes
00:47:34 de telle ou telle maladie
00:47:35 et qu'ils les partagent
00:47:36 donc il y a tout un travail
00:47:38 de réseau
00:47:40 qui est très important
00:47:41 et qui est politique
00:47:42 qui est évidemment scientifique
00:47:44 mais qui est politique
00:47:45 et qui est aussi économique
00:47:47 Est-ce qu'il y a un lien
00:47:49 avec ce phénomène
00:47:52 puisque on vient de situer
00:47:53 la preparedness
00:47:54 dans les années 80-90
00:47:56 avec la mise sur agenda
00:47:58 des sociologues
00:47:59 des historiens
00:48:00 de la notion d'e-risque
00:48:01 vivre dans une société d'e-risque
00:48:03 ou le RIFPEC
00:48:04 toutes ces choses-là
00:48:05 ou pas plus que ça pour toi ?
00:48:09 Ça c'est des anecdotes de l'histoire
00:48:11 mais pour avoir travaillé
00:48:13 sur la grippe espagnole
00:48:14 le terme de préparation
00:48:16 donc grippe espagnole
00:48:17 c'est 1918-1919
00:48:19 le terme de préparation
00:48:20 moi je l'ai vu dans les archives
00:48:21 des années 20
00:48:22 pour le coup à Madagascar
00:48:24 où on prévoyait
00:48:26 dans le cas
00:48:27 des services de santé coloniaux
00:48:29 prévoyait éventuellement
00:48:30 la réapparition d'une épidémie
00:48:32 du type de la grippe espagnole
00:48:33 et réfléchissait en termes
00:48:34 de préparation par rapport à
00:48:35 finalement des questions
00:48:37 il n'y avait pas de médicaments
00:48:38 ou de vaccins contre la grippe
00:48:40 et donc on voyait ponctuellement
00:48:41 1938-1939
00:48:43 il y a un plan de préparation
00:48:45 contre les pandémies de grippe
00:48:46 qui est signé du Jaric de la Rivière
00:48:48 qui est un médecin
00:48:49 surtout en bactériologie
00:48:51 de l'Institut Pasteur
00:48:52 qui a été un de ceux
00:48:53 qui a découvert
00:48:55 tous les débats de paternité
00:48:57 que la grippe n'était pas
00:48:59 une bactérie
00:49:00 comme on le pensait avant 1918
00:49:01 mais qui était a priori
00:49:02 ce qu'on appelait un virus filtrant
00:49:03 donc le terme de préparation
00:49:04 il existe auparavant
00:49:05 si on suit le travaux
00:49:07 d'historiens anthropologues américains
00:49:09 notamment Collier et Lakoff
00:49:11 mais je pense aussi à un autre
00:49:12 qui s'appelle Lyle Fearnley
00:49:13 qui est un anthropologue
00:49:14 on voit que cette question
00:49:15 de la préparation
00:49:17 elle est aussi liée
00:49:18 dans les années 50
00:49:19 au travail des
00:49:21 épidémiologistes américains
00:49:23 et en particulier d'un
00:49:24 qui s'appelle
00:49:25 Alexander Langmuir
00:49:27 qui est le chef
00:49:28 du département d'épidémiologie
00:49:30 du Center for Disease Control
00:49:32 et dans le cadre de la guerre froide
00:49:34 et dans les années 50
00:49:35 il y a la question
00:49:36 des armes bactériologiques
00:49:37 notamment en Corée
00:49:39 avec des allégations croisées
00:49:41 d'utilisation par les américains
00:49:43 enfin donc
00:49:44 évidemment plutôt des soviétiques
00:49:46 comme quoi les américains
00:49:48 auraient utilisé
00:49:49 des armes bactériologiques
00:49:50 en tout cas les américains
00:49:51 vont développer un système
00:49:52 de surveillance
00:49:53 puisque la préparation
00:49:54 a un autre élément très important
00:49:55 c'est la surveillance
00:49:56 dans les années 50
00:49:57 le CDC va développer
00:49:58 un système de surveillance
00:49:59 tout azimut
00:50:01 avec la formation
00:50:04 de...
00:50:08 epidemiological investigators
00:50:10 je ne sais plus comment ça s'appelle
00:50:11 donc des spécialistes d'épidémiologie
00:50:13 qui sont formés à Atlanta
00:50:15 et qui vont permettre
00:50:16 une couverture
00:50:17 de tous les événements
00:50:18 qui seraient un peu louches
00:50:19 d'un point de vue épidémiologique
00:50:21 et qui pourraient être liés
00:50:22 par exemple
00:50:23 à des attaques bactériologiques
00:50:24 donc on a une autre histoire
00:50:25 historicité
00:50:26 qui va être aussi
00:50:27 c'est un souci intéressant
00:50:28 conceptuellement
00:50:29 on peut avoir des termes
00:50:31 qui apparaissent
00:50:32 et qui vont être adoptés
00:50:33 massivement dans les années 90
00:50:34 mais des histoires
00:50:35 ensuite particulières
00:50:36 liées à des événements
00:50:38 par exemple
00:50:39 parmi les premiers pays
00:50:40 qui mettent en oeuvre
00:50:41 des plans de préparation
00:50:42 il y a la Suisse
00:50:43 parce que la Suisse
00:50:44 ils avaient aussi
00:50:45 des politiques
00:50:47 et une tradition
00:50:49 de stockpiling
00:50:53 de garder des médicaments
00:50:56 dans le cadre d'une offensive
00:50:58 avec tous les systèmes
00:50:59 des bunkers
00:51:00 en cas d'offensive
00:51:01 de pays étrangers
00:51:02 pendant la guerre froide
00:51:03 et ça va être
00:51:04 parmi les premiers
00:51:05 à mettre en oeuvre
00:51:06 ces politiques de préparation
00:51:07 parce qu'ils ont la capacité
00:51:09 il y a une mémoire nationale
00:51:10 il y a un travail national
00:51:11 qui a été tenu
00:51:12 dans la longue durée
00:51:13 qui leur permet finalement
00:51:14 de mettre en oeuvre
00:51:15 ce genre de choses
00:51:16 mais voilà
00:51:17 Très bien
00:51:18 donc on revient quand même
00:51:20 à une forme de gestion
00:51:22 du risque
00:51:23 dans cette période
00:51:24 après-guerre
00:51:25 de la guerre froide
00:51:27 il y a la guerre bactériologique
00:51:28 mais il y a aussi
00:51:29 évidemment la guerre nucléaire
00:51:31 qui est partie prenante
00:51:34 de cette représentation-là
00:51:36 et donc on est un peu
00:51:37 un chassé-croisé
00:51:39 entre une lutte
00:51:42 et radication
00:51:43 qui touche largement
00:51:46 la santé
00:51:47 mais aussi l'environnement
00:51:48 par la mise en évidence
00:51:50 massive de campagnes
00:51:53 par avions de DDT
00:51:55 qu'on se prend sur la Sicile
00:51:57 sur des paysages antilles
00:51:59 etc.
00:52:00 Le risque nucléaire
00:52:02 et les contaminations environnementales
00:52:05 qui vont avec
00:52:06 et sanitaires
00:52:07 et donc on voit
00:52:08 qu'arrive à cet endroit-là
00:52:10 aussi après une longue période
00:52:12 de réduction
00:52:14 où le bactériologique
00:52:15 c'est la bactérie
00:52:16 a quelque chose
00:52:18 qui réouvre
00:52:19 un domaine
00:52:20 qui est plus large
00:52:21 et qui pense aussi
00:52:22 en termes de santé
00:52:24 pas encore trait d'union
00:52:25 mais santé et environnement.
00:52:27 Tout à fait.
00:52:30 Ce que je trouve intéressant
00:52:34 dans l'enchaînement
00:52:36 de ce que Frédéric a dit
00:52:38 et de ce que tu évoques
00:52:39 c'est que santé et environnement
00:52:42 d'abord
00:52:44 mais ça c'est le geste habituel
00:52:46 de l'historien
00:52:47 c'est une vieille histoire
00:52:49 mais surtout
00:52:51 il y a des modalités
00:52:52 très très différentes
00:52:53 autour desquelles
00:52:55 le lien entre santé et environnement
00:52:57 a été fait
00:52:58 et s'est décliné
00:53:00 et des modalités très différentes
00:53:02 de concevoir
00:53:04 qu'est-ce qui fait problème
00:53:06 de santé en lien
00:53:07 avec l'environnement
00:53:08 et quel genre de réponses
00:53:10 sont nécessaires
00:53:12 ou sont à promouvoir.
00:53:15 Ce que Frédéric évoquait
00:53:16 autour de la préparation
00:53:18 on est autour d'un environnement
00:53:21 qui est des écosystèmes
00:53:23 qui est en lien
00:53:25 avec les zoonoses
00:53:26 qui va inclure
00:53:27 de la faune sauvage
00:53:29 des animaux d'élevage
00:53:31 et l'état des écosystèmes
00:53:34 d'une certaine manière
00:53:36 la lutte contre le paludisme
00:53:40 la malaria dont on parlait tout à l'heure
00:53:43 on est dans une autre lignée
00:53:44 qui est celle de la médecine tropicale
00:53:46 et des maladies à vecteurs
00:53:48 et du coup
00:53:49 c'est cette circulation-là
00:53:51 qui est la cible
00:53:52 et puis il y a une autre modalité
00:53:53 qui a pris beaucoup d'importance
00:53:55 à partir des années 60
00:53:56 qui est santé environnementale
00:53:58 au sens strict du terme
00:54:00 qui est celle des expositions
00:54:02 des toxiques
00:54:03 du rôle des chimiques
00:54:04 le nucléaire tombe un peu
00:54:06 dans la même escarcelle
00:54:08 mais des expositions
00:54:09 et des contaminations
00:54:12 et je voulais juste évoquer
00:54:14 rapidement avec vous
00:54:16 en termes d'historiographiste
00:54:18 qui s'est joué autour de
00:54:19 cette santé environnementale
00:54:21 parce qu'on a eu
00:54:23 une floraison de travaux
00:54:25 pas seulement de sociologues
00:54:27 mais aussi d'historiens
00:54:28 portant sur cette dimension-là
00:54:30 de l'histoire environnementale
00:54:32 et qui ont
00:54:34 de façon très intéressante
00:54:35 je trouve pour nous
00:54:37 ont sérieusement brouillé
00:54:38 les frontières entre agriculture
00:54:41 et santé ou agriculture
00:54:43 et médecine
00:54:44 je prendrais un exemple majeur
00:54:47 ce qui est la question des antibiotiques
00:54:49 et des résistances aux antibiotiques
00:54:52 la montée de l'antibioresistance
00:54:56 a été mise en relation
00:54:59 et là c'est à la fois de l'épidémiologie
00:55:01 des travaux de chercheurs biomédicaux
00:55:06 mais aussi des historiens
00:55:08 a été mise en rapport
00:55:10 avec l'ampleur et les modalités
00:55:12 de la prescription des antibiotiques
00:55:13 à la fois en médecine
00:55:16 donc en clinique
00:55:18 et dans les pratiques agricoles
00:55:20 en élevage
00:55:22 et je mentionnerais
00:55:24 deux travaux de nos collègues
00:55:27 Delphine Berda s'est intéressée
00:55:30 aux relations entre vétérinaires
00:55:31 et industriels
00:55:33 et en particulier
00:55:35 a essayé de retracer
00:55:36 comment on est passé
00:55:39 dans les années 40 en particulier
00:55:41 pour l'Europe
00:55:42 à une situation de pénurie d'antibiotiques
00:55:45 où l'enjeu c'est effectivement
00:55:47 d'en importer
00:55:49 et puis d'essayer de les faire produire localement
00:55:51 et ça a tellement bien réussi
00:55:53 qu'en 15 ans on passe à une situation
00:55:55 de surproduction
00:55:57 et du coup de construction
00:56:00 de nouveaux marchés
00:56:02 de nouveaux usages
00:56:04 pour les antibiotiques
00:56:05 qui vont inclure
00:56:07 leur statut d'accélérateur de croissance
00:56:10 pour les animaux d'élevage
00:56:12 d'une part
00:56:13 et la prévention
00:56:14 des maladies infectieuses
00:56:16 dans les grands élevages
00:56:18 où à la fois le nombre des animaux
00:56:21 la façon dont ils sont logés
00:56:25 et dont ils vivent ensemble
00:56:26 vont favoriser les épisodes
00:56:29 donc elle retrace un peu
00:56:32 cette mise en place
00:56:35 des élevages de masse
00:56:37 et le degré élevé
00:56:40 de dépendance
00:56:41 que ce registre de production agricole
00:56:44 avait avec la mobilisation
00:56:45 des antibiotiques
00:56:47 Autre exemple de ces travaux
00:56:51 Klaas Kershelaen
00:56:53 qui lui s'est intéressé
00:56:54 à des choses plus en amont
00:56:56 qui est ce paradoxe
00:56:58 qui tient
00:57:00 en une juxtaposition
00:57:03 d'un côté le problème de la résistance
00:57:05 il est connu dès les années 40
00:57:09 et il ne devient un enjeu fort
00:57:12 de régulation que 20 ans plus tard
00:57:15 dans les années 60 à 70
00:57:17 c'est-à-dire que pendant toute une période
00:57:19 d'une part il n'est pas considéré
00:57:22 comme dramatique
00:57:25 et urgent
00:57:28 mais d'autre part
00:57:30 la plupart des praticiens
00:57:34 considèrent que la solution est connue
00:57:36 la solution c'est
00:57:37 d'inventer des nouveaux antibiotiques
00:57:40 pour répondre à l'accumulation
00:57:42 des résistances des anciens
00:57:44 et cette manière de gérer
00:57:47 sans gérer le problème
00:57:49 va se heurter à la multiplication
00:57:52 des résistances
00:57:54 et il y a toute une série de débats
00:57:56 qui vont opposer médecins et vétérinaires
00:57:59 sur qui est responsable
00:58:02 sur qui est responsable
00:58:04 qui en fait utilise mal les antibiotiques
00:58:07 et favorise les résistances
00:58:09 et ce qu'a fait Klaas Kierschelet
00:58:11 c'est de regarder deux situations
00:58:13 assez contrastées
00:58:15 c'est un exemple très joli
00:58:17 des bénéfices du comparatif
00:58:19 il prend les Etats-Unis
00:58:20 et il prend la Grande-Bretagne
00:58:22 et le résultat de ces débats
00:58:24 les résultats de ces débats
00:58:26 et de ces controverses
00:58:27 sont opposés dans les deux pays
00:58:29 c'est-à-dire qu'aux Etats-Unis
00:58:31 ce qui va faire l'objet
00:58:32 des tentatives de régulation
00:58:34 c'est la pratique médicale
00:58:36 essentiellement
00:58:37 et c'est donc le statut
00:58:39 des antibiotiques en médecine humaine
00:58:42 par contre en Grande-Bretagne
00:58:44 ça va être exactement l'inverse
00:58:46 et on peut mettre ça en rapport
00:58:48 avec l'histoire du système de santé britannique
00:58:51 et du système de santé américain
00:58:53 je pense que je n'ai pas besoin de faire
00:58:55 un dessin sur le genre d'interprétation
00:58:57 qui se joue
00:58:59 voilà donc c'est une illustration
00:59:02 de la fécondité disons
00:59:04 de ce brouillage des frontières
00:59:06 entre la culture et médecine
00:59:09 alors peut-être si j'ai le temps
00:59:12 juste un mot sur la question
00:59:14 des sources dans cette histoire
00:59:16 du point de vue des archives
00:59:23 si on s'intéresse par exemple aux régulations
00:59:26 vous avez une abondance
00:59:28 classiquement de sources
00:59:31 administratives, institutionnelles
00:59:34 étatiques
00:59:36 mais mettre en rapport
00:59:39 de cette manière-là
00:59:40 agriculture et santé
00:59:42 ça a posé au moins
00:59:44 deux types de difficultés
00:59:46 la première c'est ce que j'appellerais
00:59:49 le fonctionnement en silo
00:59:51 c'est-à-dire que
00:59:53 vous avez une séparation très forte
00:59:55 au plan institutionnel
00:59:56 entre agriculture et santé
00:59:59 entre les ministères
01:00:00 entre leur personnel
01:00:02 et du coup aussi
01:00:03 entre la façon dont vont être constituées
01:00:06 les archives et les corpus d'archives
01:00:08 la conséquence de...
01:00:10 juste un commentaire par rapport à ça
01:00:12 le seul qui pense à bien ensemble
01:00:14 c'est les producteurs commerçants
01:00:16 qui produisent ces produits
01:00:17 l'industrie pharmaceutique
01:00:18 parce qu'elle justement
01:00:19 elle joue sur les deux tableaux
01:00:20 elles vont la même chose
01:00:21 de part et d'autre
01:00:22 pas de tout pour le même prix évidemment
01:00:24 bien que ce soit exactement la même chose
01:00:26 avec des quantités différentes
01:00:28 et quand ça marche moins bien dans un secteur
01:00:30 on peut toujours se replier sur l'autre
01:00:32 donc là il y a quand même des endroits
01:00:34 où ça se pense bien ensemble
01:00:35 je pensais y venir
01:00:38 donc du coup il y a ces silos
01:00:41 qui sont aussi des silos archivistiques
01:00:44 et les conséquences de la séparation
01:00:47 en silo sur le plan de la documentation
01:00:49 possibles etc...
01:00:50 elles sont énormes
01:00:51 parce que ça veut dire par exemple que
01:00:53 si on prend la question des pesticides
01:00:55 qui est un autre des objets qui a été
01:00:57 énormément investi récemment
01:00:59 par les historiens
01:01:00 dans les archives de la santé
01:01:02 vous trouvez quasiment rien sur les pesticides
01:01:04 parce que c'est pas eux
01:01:06 qui étaient en charge de la régulation
01:01:08 c'est pas eux qui étaient responsables
01:01:10 ils ne sont jamais consultés
01:01:11 quand il va être question
01:01:13 des effets sanitaires
01:01:15 d'un de ces produits
01:01:18 mais de l'autre côté
01:01:19 vous n'avez pas grand chose non plus forcément
01:01:22 parce que
01:01:23 et ça c'est ce que Nathalie Jass
01:01:25 a très bien retracé dans ses travaux
01:01:27 sur la longue durée de l'usage des pesticides
01:01:29 depuis les années 40
01:01:30 vous avez tout un phénomène
01:01:31 d'invisibilisation des effets
01:01:34 d'invisibilisation qui passe par exemple
01:01:36 par le très peu de remontées de cas d'intoxication
01:01:40 ou par le fait que la régulation
01:01:42 est en fait pensée
01:01:44 comme une régulation professionnelle
01:01:46 qui va être envoyée
01:01:47 aux techniciens de l'agriculture
01:01:49 et donc du coup
01:01:51 le rôle du ministère là-dedans
01:01:53 va être minime
01:01:54 donc le silo c'est une grosse difficulté
01:01:57 et ça impose d'aller essayer d'inventer
01:01:59 de chercher des nouvelles sources etc
01:02:00 et parmi celles-là
01:02:01 il y avait évidemment la question de l'industrie
01:02:04 et de l'accès aux données des industries
01:02:06 et des industriels
01:02:07 mais là aussi
01:02:08 c'est un enjeu
01:02:10 c'est un véritable enjeu
01:02:11 dans la mesure où il s'agit d'archives privées
01:02:13 donc dont les propriétaires
01:02:16 ce sont les entreprises
01:02:18 et dont elles font ce qu'elles veulent
01:02:20 et j'épiloguerai pas longtemps
01:02:22 mais je veux juste signaler
01:02:24 que du point de vue de l'archive d'entreprise
01:02:25 et de l'archive industrielle
01:02:27 la France est un pays sinistré
01:02:30 par exemple par rapport à l'Allemagne
01:02:33 non seulement parce qu'il y a les problèmes d'accès
01:02:37 si vous prenez une très grande entreprise
01:02:40 qui jouait sur les deux tableaux
01:02:41 comme Rundpulink
01:02:43 on peut compter sur les doigts d'une main
01:02:45 les historiens qui ont pu avoir accès
01:02:48 aux archives de Rundpulink
01:02:50 qui ne sont pas
01:02:52 qui représentent
01:02:53 je ne sais plus combien de kilomètres
01:02:54 1,5 kilomètre d'archives
01:02:56 non classées
01:02:57 donc il y a ce problème là
01:03:00 mais il y a aussi
01:03:01 et c'est particulièrement aigu
01:03:03 dans le contexte français
01:03:05 un problème de culture
01:03:07 de ces entreprises
01:03:09 dont la conséquence
01:03:10 c'est que
01:03:11 bon, moi j'ai relativement travaillé sur la pharmacie
01:03:14 et que le moyen
01:03:16 de travailler sérieusement sur la pharmacie
01:03:18 sur les pratiques des industriels
01:03:21 les choix qu'ils ont pu faire
01:03:22 ça a été de travailler sur la Suisse
01:03:24 et sur l'Allemagne
01:03:25 parce que
01:03:26 dans la situation française
01:03:28 soit elles ont été détruites
01:03:30 en particulier dans la série
01:03:31 des fusions, acquisitions etc.
01:03:33 donc il n'y en a pas
01:03:34 c'est le cas par exemple
01:03:36 d'une grande entreprise comme Bruxelles
01:03:38 soit il n'y a pas d'accès
01:03:40 et on revient sur le problème en fait
01:03:42 alors il y a des
01:03:46 voies potentielles de sortie
01:03:50 pour à la fois
01:03:51 contourner en partie
01:03:53 ou même imaginer
01:03:54 ce que pourraient être des solutions
01:03:56 dans le cas de la Suisse par exemple
01:03:58 en fait l'accès a été
01:04:01 très très facilité
01:04:02 par toute la discussion
01:04:04 sur le rôle de la Suisse
01:04:05 pendant la deuxième guerre mondiale
01:04:06 et le rôle de l'industrie de la chimie
01:04:07 pendant la deuxième guerre mondiale
01:04:09 et a été énormément facilité
01:04:11 par la mise en place
01:04:12 d'une commission historique nationale
01:04:14 qui devait donc faciliter
01:04:17 enfin impulser
01:04:19 une série de travaux d'historien
01:04:20 sur cette question
01:04:21 et où le fait
01:04:23 qu'il s'agisse d'une commission
01:04:25 historique nationale
01:04:26 voulait dire que
01:04:27 les entreprises ne pouvaient
01:04:29 pas refuser l'accès
01:04:31 c'est juste pour
01:04:34 évoquer
01:04:35 quelques pistes
01:04:37 de changement imaginable
01:04:39 donc on termine notre table rendre
01:04:42 sur cette note
01:04:44 à la fois d'ouverture sur les sources
01:04:46 les archives, celles qui sont collectées
01:04:48 celles qui le sont moins
01:04:50 aussi sur le fait que
01:04:53 il y a une de nos collègues
01:04:55 qui pense qu'il faut lire
01:04:57 les archives contre leurs grains
01:04:59 ce qui est une bonne manière
01:05:00 de ne pas se laisser guider par elles
01:05:02 mais d'imposer un questionnement
01:05:04 on a vu que la Covid
01:05:05 en impose un aussi
01:05:07 ou qui nous permet de retourner
01:05:08 poser des questions autrement
01:05:10 à des sources qu'on a déjà vues
01:05:12 et puis bon, décloisonner
01:05:15 les classements naturels
01:05:17 des archives en fonction
01:05:19 des déposants pour mettre
01:05:21 des croisements qui
01:05:23 de par la fonctionnalité
01:05:25 des dépôts et des productions
01:05:27 de ces archives ne sont pas
01:05:28 nécessairement liés
01:05:29 [BIP]

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