SMART IMPACT - Une transition écologique territoriale

  • l’année dernière
L’ADEME est un acteur clé dans l’accompagnement des territoires qui investissent dans la transition écologique. Généralisation des solutions, modélisation des ETP, mesure de l’efficacité carbone de l’argent investi, tout est passé en revue. Avec des milliers de projets proposés, la France avance mais la mise en place des solutions dans chaque collectivité est plus lente.
Transcript
00:00 (Générique)
00:06 L'invité de Smart Impact, c'est Sylvain Waserman. Bonjour.
00:09 Bonjour.
00:09 Bienvenue. Vous êtes donc le nouveau président de l'ADEME.
00:11 Vous avez pris vos fonctions au mois de juillet dernier.
00:14 Tiens, quel bilan pour démarrer au fait de ces premiers mois ?
00:17 Vous avez commencé par quoi ?
00:18 J'ai commencé par un tour de France.
00:20 J'ai commencé par un tour de France parce que, vous savez,
00:23 dans ma philosophie de vie, dans mon parcours de vie de chef d'entreprise ou d'élu local,
00:26 je me suis toujours dit qu'il ne faut pas trop qu'on décide tout depuis Paris
00:28 et que c'est important de voir réellement ce qui se passe sur les territoires.
00:32 Donc j'ai rencontré mes équipes, bien sûr.
00:34 J'ai rencontré tous les préfets de région qui ont un rôle particulier sur la transition écologique,
00:38 une mission particulière.
00:39 Beaucoup d'élus, président de région, vice-président.
00:42 Beaucoup de partenaires économiques aussi.
00:44 Donc voilà, j'avais besoin de commencer par me nourrir de ces belles expériences,
00:49 de ces belles réalités et de comprendre un peu les situations,
00:51 ce qui m'a permis d'ailleurs de définir six axes prioritaires
00:54 qu'on travaille maintenant avec l'ensemble des collaborateurs de l'ADEME.
00:57 On peut les lister rapidement ?
00:59 Oui absolument, rapidement.
01:01 Le premier, c'est assez interne, mais ça concerne la modélisation de nos ETP.
01:05 Vous savez, dans l'État, il y a un truc qui s'appelle la justification au premier euro.
01:09 Nous, on doit rentrer dans cette logique de justification au premier effectif.
01:11 L'ADEME, c'est 1000 personnes, c'est des fonds publics,
01:13 donc il faut justifier de nos ressources et les travaux.
01:17 Le deuxième, c'est l'efficacité carbone de l'euro investi.
01:20 L'État nous confie 4 milliards.
01:22 Il faut qu'on regarde, comme un financier regarderait son retour à investissement,
01:25 nous il faut qu'on regarde le retour d'investissement climat
01:27 et l'impact carbone de l'argent public qui est injecté dans des entreprises, dans des collectivités.
01:32 Ça c'est le deuxième.
01:33 Je vais aller un peu vite sinon je vais vous prendre le temps d'émission.
01:35 Non non allez-y, c'est très bien, trois.
01:36 Le troisième concerne la généralisation massive des solutions qui fonctionnent.
01:41 J'étais en Normandie, il y avait une laiterie à Isigny,
01:44 qui a une technologie avec qui on a travaillé avec eux,
01:47 sur une technologie de PAC haute température,
01:48 donc pompe à chaleur haute température,
01:50 qui réinjecte la chaleur fatale dans le processus industriel.
01:52 Je me dis, il doit y avoir 150 laiteries en France qui ont le même problème.
01:55 Donc notre rôle de l'ADEME c'est aussi d'être l'observatoire de ces bonnes pratiques
01:59 et puis de les essaimer rapidement pour être efficace dans la transition écologique.
02:04 Et puis aussi d'autres sujets sur cette diffusion massive,
02:07 comme par exemple le fonds chaleur, les réseaux de chaleur.
02:09 On a 500 millions, l'an prochain 800 millions des montants très importants
02:14 pour aider les collectivités à investir dans ces infrastructures de chaleur
02:18 au cœur des villes mais aussi au cœur des territoires.
02:21 Donc là on doit gérer cette croissance.
02:22 Donc le troisième chantier c'est sur cette gestion de la croissance.
02:26 Le quatrième c'est sur nos valeurs.
02:28 Vous savez c'est la première fois que je dirige une organisation
02:31 dans laquelle vous avez des ingénieurs CDI dans une boîte privée
02:37 qui gère le développement durable, qui quittent leur CDI
02:40 pour venir prendre des intérims chez nous,
02:42 parce que nous on a des financements difficiles parfois avec des intérimaires,
02:45 des intérims de 18 mois ou des CDD,
02:47 parce qu'ils se disent c'est là que ça se passe, c'est à l'ADEME que ça se passe.
02:50 Ça donne du sens et c'est là que ça se passe.
02:52 Et donc on a un fort pouvoir d'attraction et je crois qu'il n'est pas usurpé,
02:57 mais ça nous donne aussi des responsabilités d'arriver à gérer ça
03:00 en termes de valeurs, d'organisation.
03:01 Il en reste deux, la cinquième.
03:03 Il en reste deux très rapidement.
03:05 Le troisième c'est la mobilisation.
03:07 On sait qu'aujourd'hui la transition écologique ne fonctionnera pas
03:10 si on n'a pas une forte mobilisation des citoyens, des entreprises,
03:13 des acteurs économiques et des élus.
03:15 Et là on invente beaucoup de solutions assez originales et audacieuses sur ça.
03:18 On pourra y revenir si vous voulez.
03:20 Et puis la dernière, c'est vraiment la logique de prospective,
03:22 notamment sur la place de l'intelligence artificielle et du numérique
03:26 dans la transition écologique.
03:28 On a beaucoup étudié tous l'impact du numérique sur le climat
03:32 et notamment cette notion de numérique responsable qu'on doit construire,
03:35 mais assez peu finalement la façon dont ces nouvelles technologies
03:38 vont aider à la transition écologique.
03:40 Donc voilà ces six axes.
03:41 J'ai lancé un grand appel à idées pour que tous les salariés de l'ADEME
03:44 puissent s'exprimer en proposant des idées sur ces six axes.
03:48 Il y en a 550 qui sont remontées et donc maintenant on est dans la construction
03:51 de ce plan d'action opérationnel.
03:53 On va commencer à mettre en œuvre, vous l'avez dit, un budget prévisionnel
03:56 pour 2024 de 4 milliards 200 millions d'euros.
04:00 Budget en augmentation assez forte, avec donc la volonté de territorialiser
04:06 les décisions.
04:08 Cet argent, par exemple, quand vous choisissez d'aider une entreprise
04:12 ou d'investir même dans une entreprise, c'est quoi le critère ?
04:15 C'est d'abord l'efficacité carbone, c'est ça ?
04:19 C'est vraiment le premier critère ?
04:20 Alors, il faut répondre en deux temps.
04:22 D'abord, vous avez raison, jamais l'État, la puissance publique
04:26 n'a investi autant d'argent dans la transition écologique.
04:30 Et là, jusqu'au cœur des territoires, jusqu'à aider l'entreprise
04:32 qui se décarbone ou la collectivité qui entame une démarche
04:35 de transition écologique.
04:37 Donc ça, c'est le premier point, c'est des moyens inédits.
04:39 4 milliards d'euros.
04:40 Il faut quand même se dire qu'il y a trois ans, c'était un milliard.
04:43 Donc on parle d'une très très forte croissance et d'une très forte
04:46 focalisation, d'une accélération massive.
04:49 Et le un milliard, à l'époque, c'était plus pour préfigurer les choses.
04:52 Aujourd'hui, c'est pour leur déploiement massif.
04:54 Après, comment on fait ?
04:55 On fonctionne beaucoup par appel à projet, parce que l'appel à projet
04:58 permet de noter, effectivement, les différents projets.
05:01 Alors, on a des ingénieurs qui font ça, sur des méthodologies
05:04 qui sont transparentes et ouvertes, notamment sur l'impact des solutions
05:08 qui sont mises sur la table.
05:10 Il y a une démarche scientifique, d'une certaine façon.
05:13 On est vraiment dans le...
05:15 C'est systématiquement une analyse par des ingénieurs, absolument,
05:17 par des ingénieurs, de l'impact.
05:19 En fait, nous, on ne regarde pas qui on aide,
05:22 peu importe que l'entreprise gagne beaucoup d'argent ou pas,
05:25 peu importe que la collectivité soit riche ou pas.
05:27 On regarde si le projet en lui-même va contribuer significativement ou pas
05:31 à l'amélioration de la lutte contre le changement climatique
05:35 et à la transition écologique, plus généralement.
05:37 - Double question. Est-ce que vous aidez prioritairement des PME
05:40 et est-ce que la hausse du prix des matières premières,
05:43 l'inflation, on va dire, générale, a freiné les transitions environnementales
05:48 au sein de ces petites entreprises ?
05:50 - Alors, vous mettez le doigt sur un point majeur.
05:53 Il y a effectivement des mégas projets sur des grosses entreprises,
05:57 des acieries, des grosses entreprises sur lesquelles on va participer
06:01 significativement au subventionnement et au financement
06:04 pour passer par exemple du charbon à l'hydrogène sur de l'acier,
06:07 pour récupérer de la chaleur fatale dans des équipements industriels lourds.
06:12 Donc ça, c'est les grandes entreprises.
06:15 Il faut savoir que ça pèse 44 millions de tonnes,
06:18 les 50 sites les plus carbonés, 44 millions de tonnes de carbone.
06:21 C'est beaucoup ou pas ? Il faut savoir que l'objectif,
06:23 parce qu'aujourd'hui j'ai la chance d'arriver à l'ADEME
06:25 à un jour où on a des objectifs précis,
06:27 les objectifs c'est 138 millions de tonnes en 7 ans.
06:30 Voilà ce qu'on doit gagner. Jusqu'à 2030, 138 millions de tonnes.
06:33 Donc 44, c'est beaucoup. Après, on sait,
06:36 et j'ai été chef d'entreprise d'une petite ETI,
06:39 on sait que la transition écologique doit embarquer tout le monde.
06:42 Et les acteurs économiques en plus ressentent une responsabilité.
06:46 Mais c'est plus compliqué pour un patron de PME.
06:48 Alors c'est à la fois plus compliqué et c'est à la fois très accessible.
06:51 Donc là on développe, on travaille avec la ministre Olivia Grégoire
06:55 pour développer une plateforme à destination des PME,
06:58 pour se dire, si je ne sais pas trop comment m'y prendre,
07:01 comment est-ce que je navigue dans cette complexité-là ?
07:04 Et on s'aperçoit en fait qu'en fonction des priorités que vous pouvez avoir
07:08 dans votre chaîne de production, ou alors si vous n'êtes pas dans l'industrie,
07:11 dans vos flottes de véhicules, ou alors même dans la façon dont vous gérez
07:15 vos plans de déplacement de salariés, il y a beaucoup d'axes sur lesquels
07:20 vous pouvez jouer pour aider à la transition écologique
07:23 et beaucoup de dispositifs qui existent pour vous.
07:25 Et alors je repose la question, freiné ou pas par l'inflation,
07:28 par le risque de plus de matières premières ?
07:30 C'est tout à fait vrai que mathématiquement, par exemple quand on regarde
07:33 l'efficacité carbone de l'euro investi, pour un réseau de chaleur aujourd'hui,
07:36 il y a une inflation des prix et évidemment ça veut dire qu'il faut
07:39 plus de milliards d'euros pour faire le même résultat en carbone.
07:41 Donc effectivement l'inflation touche comme dans tous les domaines.
07:45 Cela dit, les moyens sont en tellement forte croissance,
07:49 comme je vous le disais, que là on est vraiment dans une logique
07:52 de cibler l'efficacité carbone. Après c'est vrai que l'inflation,
07:56 évidemment comme dans tous les domaines, a un impact.
07:58 Vous avez été élu local en Alsace, maire de Katzenheim, député de Strasbourg.
08:03 Les collectivités locales, elles donnent l'exemple ou pas ?
08:07 C'est trop vaste ma question, ça dépend desquelles.
08:09 C'est une vraie question. Les collectivités locales, elles jouent un rôle majeur.
08:13 Je ne le dis pas seulement parce que j'ai été élu local,
08:16 mais aujourd'hui tous les maires s'interrogent sur qu'est-ce que je dois faire,
08:20 comment je veux faire et beaucoup ont des initiatives.
08:22 La proposition qu'on est en train de travailler, c'est de se dire
08:25 comment on accompagne les élus à leur donner des clés pour décrypter
08:29 la transition écologique. On a plein de projets et de possibilités là-dessus.
08:33 Mais comment on décrypte ça ? Pour qu'à 22h30 au conseil municipal de Katzenheim,
08:37 par exemple, quand vous dites "Tiens, on a envie de planter 50 arbres",
08:42 il y a quelqu'un qui a le réflexe de dire "Attention, les arbres qu'on va planter,
08:45 il faut les arbres du climat de dans 30 ans, pas la même chose qu'on a fait
08:48 avec nos gars depuis 10 ans". Que quand on regarde la salle des fêtes
08:52 sur laquelle on veut faire des travaux, attendez, on va la décarboner,
08:55 échanger la source d'énergie ou alors on va vraiment l'isoler.
08:58 Donc quel choix on va faire ? Donc ces questions-là, mais aussi les questions
09:02 de sobriété d'usage. On veut faire une salle pour les associations,
09:06 mais au fait, notre école à 19h30, elle est fermée, on ne peut pas réutiliser ça.
09:10 Donc vous voyez, tous ces réflexes qui aident à la transition écologique,
09:14 mais aussi de décrypter qui sont les acteurs. Aujourd'hui, une collectivité,
09:17 on peut l'accompagner, y compris financièrement, y compris avec des ressources humaines
09:21 sur la façon de conduire leur plan de transition écologique,
09:25 qui soit adapté à leur territoire. Donc voilà, il y a beaucoup d'actions,
09:29 il y a beaucoup de leviers, mais le message clé, c'est vrai pour les PME,
09:33 c'est vrai pour les collectivités de toutes les tailles, le message clé,
09:37 c'est un message de mobilisation. Aujourd'hui, maintenant qu'on a cet objectif précis
09:41 de décarbonation, notamment, c'est un des objectifs clés de la transition écologique,
09:45 maintenant, il faut qu'on se mobilise et qu'on arrive à créer cette dynamique-là
09:49 pour accélérer massivement la transition écologique.
09:52 Merci beaucoup Sylvain Wasserman.
09:53 C'est moi.
09:54 Et bientôt sur Bismarck, on passe à notre débat, le mentorat au service de l'entrepreneuriat responsable.

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