Enfin, enfin, enfin "Le vicomte de Bragelonne" fait son entrée dans le saint des saints littéraire, La Bibliothèque de la Pléiade, chez Gallimard.
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00:00 de l'édito culture avec vous Laurent Delmas, alors là on fait les choses en grand, quoi
00:04 de neuf ce matin ? Un Vicomte !
00:05 Enfin, enfin, enfin, le Vicomte de Bragelonne fait son entrée dans le sein des seins littéraires,
00:11 la bibliothèque de la Pléiade chez Gallimard.
00:14 Je glisse avec un peu de mal sur le fait que l'entrée du dit Vicomte dans la Pléiade
00:18 se sera ainsi passée quelques années après celle du petit marquis Jean d'Ormesson.
00:23 L'équilibre est désormais rétabli, n'en parlons plus.
00:25 Certains vont se demander pourquoi évoquer ce matin un roman qu'Alexandre Dumas a
00:29 fini de publier en 1850 et qui se déroule sous le règne de Louis XIV.
00:34 Facteur aggravant, il est le dernier volet d'une trilogie littéralement écrasée
00:38 sous le poids de son volume initial « Les trois mousquetaires ». Avec une injustice
00:42 définitive à la clé, il renferme une énigme universellement partagée, celle du masque
00:46 de fer.
00:47 Résultat, l'histoire de Raoul de Bragelonne passe au second plan et l'infinie mélancolie
00:52 du roman avec elle.
00:53 Or, l'intérêt du livre de Dumas n'est pas là, lui qui disait qu'on pouvait faire
00:58 des enfants à l'histoire à condition qu'ils soient beaux.
01:00 Et la beauté du Vicomte de Bragelonne, elle réside tout simplement dans ce romanesque
01:04 assumé.
01:05 Souffrez donc que je vous lise les premières lignes du roman.
01:09 « Vers le milieu du mois de mai de l'année 1660, à 9h du matin, lorsque le soleil déjà
01:15 chaud séchait la rosée sur les Ravenelles du château de Blois, une petite cavalcade
01:20 composée de trois hommes et deux pages rentra par le pont de la ville, sans produire d'autres
01:24 effets sur les promeneurs du quai qu'un premier mouvement de la tête à la main pour
01:28 saluer et un second mouvement de la langue pour exprimer cette idée dans le plus pur
01:33 français qui se parle en France.
01:35 Voici Monsieur qui revient de la chasse.
01:37 Et ce fut tout.
01:38 » Et ce fut tout, c'est une drôle de façon de commencer une histoire.
01:42 « C'est digne d'un Flaubert ou d'un Simnon Léa parce qu'il faut savoir que
01:46 dans cette belle édition de la Pléiade, 1960 pages suivent ce « Et ce fut tout ».
01:52 Onze lignes, donc pour commencer par « Il était une fois » aussi baroque qu'intriguant.
01:56 Onze lignes qui, soit dit en passant, nécessiteraient plusieurs minutes au cinéma pour en rendre
02:01 précisément compte.
02:02 Je vous dis cela car ma partie à moi, c'est plutôt le cinéma.
02:05 Enfin, c'est ce qui se dit, Nicolas.
02:07 Alors qu'en fait je serais plutôt Lièvre à la Royale et Vingt-Cornasses.
02:10 Mais c'est une autre histoire.
02:12 C'est une autre histoire.
02:13 Claude Chabrol qui s'y connaissait en cinéma, en littérature, en adaptation et en Lièvre
02:17 à la Royale aussi d'ailleurs, a expliqué un jour que pour rendre compte de la première
02:20 page du père Goriot de Balzac au cinéma, il faudrait un film d'une heure trente.
02:25 Et il resterait les deux cents pages suivantes à traiter.
02:27 C'est bien pareil avec ce vieux vie-compte de Brajlon.
02:30 Et bon courage pour faire passer ce « Et ce fut tout » sur grand écran.
02:35 Reste, reste qu'on aimerait voir le tumultueux destin de Raoul de Brajlon adapté vraiment
02:40 au cinéma.
02:41 Ça nous changerait des dizaines de versions des Trois Mosquetaires et autres Masques de
02:44 Fer.
02:45 Tiens, il faudrait en parler à Rebecca Zlotowski ou à Xavier Giannoli pour la réalisation.
02:49 Et proposer à Raphaël Canard de sortir de sa zone de confort déjantée pour incarner
02:54 Raoul.
02:55 En attendant, laissez-vous embarquer par Dumas.
02:58 Vers le milieu du mois de mai de l'année 1669 à 9h du matin, lorsque le soleil est
03:03 déjà chaud, séchée et arrosée sur les Ravenel du château de Blois, une petite cavalcade,
03:08 c'est parti.
03:09 Et c'est loin d'être tout.