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Transcription
00:00 Il est enfin libre de sa parole. Christine Angot.
00:04 Je me rappelle mes impressions quand j'ai commencé à recevoir au début de l'été
00:08 les livres qui allaient paraître à la rentrée. Je ne pouvais pas en parler ici parce que
00:13 je fais partie d'un jury. Maintenant que la saison des prix est passée et que les
00:17 libraires préparent celles des cadeaux de Noël, je peux. Je me rappelle que quand j'ai
00:22 ouvert le livre de Jean-Philippe Toussaint et commencé à le lire, plus j'avançais
00:27 dans ma lecture, plus je me disais « mais tout le monde va vouloir lui donner un prix,
00:32 les jurys vont se battre ». Et en fait, il n'a rien eu. Et je n'en ai pas beaucoup
00:37 entendu parler autour de moi. Son livre est magnifique, peut-être que ça suffit. Et
00:42 puis c'est un véritable écrivain considéré comme tel depuis longtemps. Mais quand même.
00:47 Il nous tient en haleine, de la première à la dernière page. Les grandes phases de
00:53 la vie depuis l'enfance jusqu'au temps présent, qui avec le recul se révèlent
00:58 comme les cases d'un jeu d'échecs qui était déjà en train de se jouer. Il y avait
01:03 aussi un petit livre dont je ne crois pas avoir entendu parler au cours de la rentrée
01:07 qui m'a donné beaucoup de plaisir quand je l'ai lu pendant l'été. Atlantique.
01:11 Il y avait quelque chose d'assez quotidien, de banal presque, qui me plaisait. L'auteur
01:18 s'appelait Marie Lassire. C'était un de ces livres dont on se dit « la fille
01:22 qu'il a écrite pour être une amie ». Il y avait quelque chose de profondément
01:25 naturel, de profondément vrai. Un peu comme si un livre pouvait ressembler à une vie,
01:31 à quelqu'un. Une femme vient de rencontrer un homme et l'accompagne pour les vacances
01:36 dans une maison qu'il a dans le Médoc. C'est la base de l'histoire. On passe les
01:40 vacances avec eux, on découvre la maison et on partage les réflexions que se fait
01:43 la narratrice à elle-même. Puis arrive un perturbateur sous la forme d'un autre homme
01:47 qui vit dans la région. C'est un roman qui nous parle de ce qu'on connaît tous.
01:52 Vie quotidienne, vacances, rencontres, amour pour plus ou moins longtemps. Et plein de
01:57 petites questions sans prétention apparente, arrimées à la trajectoire de la narratrice.
02:02 Et on ne lâche pas le livre. Et puis il y a eu un livre, pas du tout dans mon style,
02:07 a priori, de Nicolas de Laussalle, valse russe, à la fois simple et ambitieux, auquel je
02:13 me suis attachée. On est en Ukraine, dans la guerre, avec lui, il est journaliste. Il
02:19 l'est vraiment. C'est concret, humain, inhumain aussi. Au bout de quelques pages,
02:24 on apprend que sa mère est russe et a émigré en France où il est né, et son attachement
02:28 à la Russie. Mais il y a comme un mur entre l'engagement du journaliste aux côtés
02:33 de l'Ukraine et la fierté de l'homme qui aime la Russie depuis l'enfance. Et ça
02:37 ne vient jamais entraver la clarté de ses positions dans cette guerre. On a l'impression
02:42 de lire le livre d'un type bien, si ça veut encore dire quelque chose. Là, en ce moment,
02:48 je lis un livre, ou plutôt je le feuillette, c'est le genre de livre qu'on feuillette,
02:52 de Jonathan Ayoune et Judith Koen Solal, le bouquin de l'humour juif, dans la collection
02:57 bouquins, il y a des tonnes d'histoires juives, comme celle-ci. Sarah se rend au journal Le
03:04 Monde pour passer l'annonce de la mort de son mari. « Monsieur, vous n'avez qu'à
03:09 mettre Isaac Mor. Vous ne voulez pas marquer son nom, la date et le lieu de l'enterrement ?
03:14 Non, ceux qui doivent venir sont déjà au courant. Pas besoin de précision. Isaac Mor,
03:19 ça suffit. Mais Madame, donnez plus d'informations, vous avez, quoi qu'il en soit, un forfait
03:24 de base de 5 mots. Bon, alors dans ce cas, marquez Isaac Mor, Mercedes à vendre. »
03:30 Merci Christine Angot. Et à jeudi prochain.

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