Thomas Buberl, directeur général d'Axa, invité d'On n'arrête pas l'éco

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Ce samedi, Alexandra Bensaid reçoit Thomas Buberl, le directeur général d'Axa, géant mondial de l'assurance.Le groupe vient de publier la dixième édition de son Futures Risk Report, une synthèse des plus gros risques assurantiels pour les années à venir. Parmi eux : les tensions géopolitiques ou le dérèglement climatique, constantes de plus en plus pressantes depuis quelques années.

Ecoutez l'émission en intégralité : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/on-n-arrete-pas-l-eco/on-n-arrete-pas-l-eco-du-samedi-11-novembre-2023-1741560

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Transcription
00:00 C'est le premier assureur français, le deuxième européen, le directeur général d'Axa
00:04 et l'invité d'On n'arrête pas l'écho.
00:05 Bonjour et bienvenue Thomas Bouberle.
00:07 Bonjour Alexandra.
00:08 La sécheresse et les maisons qui se fissurent.
00:12 On l'a entendu, c'est une facture qui augmente pour les assureurs.
00:14 On a entendu aussi des mots très durs de l'avocat de certaines familles.
00:18 Il y a des contentieux, il y a des études, des rapports qui se multiplient, des propositions
00:23 de lois.
00:24 Sur ce sujet particulier, on entre par là, Thomas Bouberle, que dites-vous ? Qu'est-ce
00:27 qui doit changer ?
00:28 Il est clair que la sécheresse c'est un risque nouveau et on voit certainement dans
00:33 les catastrophes naturelles, il y a cinq ans on n'a parlé que des oragans, aujourd'hui
00:38 on parle des feux, de la sécheresse, de l'inondation.
00:41 Ça veut dire que la fréquence de ces événements a augmenté beaucoup et c'est toujours dans
00:47 ces moments-là où il faut voir quelles sont les nouvelles solutions pour ça.
00:52 La sécheresse, on a vu entre 2016 et 2020, un milliard, cette année trois milliards.
00:58 Ça c'est la facture pour le secteur pour cette année.
01:03 Ça veut dire, et c'est toujours dans des bouleversements des risques, c'est là où
01:09 l'assureur peut se montrer parce que l'assurance est au cœur de la société pour aider à
01:15 trouver les nouvelles solutions.
01:16 Et c'est clair, pour la sécheresse, il faut maintenant…
01:18 Pour les maisons alors ?
01:19 Pour les maisons, François-François Lutzmann l'a dit, on fait maintenant le pilote avec
01:26 les 300 maisons, mais il est clair que sur la partie réhydratation des sols, sur la
01:32 partie…
01:33 Alors ça j'explique juste un petit peu, on essaie de voir si en mettant de l'eau
01:37 sous les fondations, ça ne peut pas empêcher le retrait et le gonflement des argiles.
01:41 Voilà.
01:42 Exactement, et on évite les fissures qui sont tellement difficiles aussi à détecter.
01:46 Certainement, mais c'est dans ces moments-là où l'assurance peut accompagner nos clients,
01:54 accompagner la société pour trouver des nouvelles solutions.
01:57 Mais là apparemment, ils trouvent que c'est un peu long les clients.
02:00 Ça va être 5 ans cette expérimentation dont vous parlez.
02:04 Oui, mais je pense que ça va être beaucoup plus vite parce qu'il faut s'y mettre,
02:08 il faut comprendre beaucoup mieux le risque, mais il faut aussi travailler sur la prévention.
02:15 Parce que juste regarder comment on peut rembourser, ça ne va pas suffire.
02:20 On a aussi entendu dans la documentation que le régime NATCAT et sa pérennité est en
02:27 question.
02:28 Pour continuer à assurer, il faut faire plus de prévention.
02:31 Le régime des catastrophes naturelles, en effet, c'est celui qui permet de partager
02:36 la facture entre le public et le privé.
02:38 Le privé c'est vous, les assureurs.
02:40 Et il est déficitaire depuis 2015.
02:43 Est-ce que la surprime catastrophe naturelle doit augmenter ?
02:47 Est-ce que c'est ça la solution ?
02:48 Une des solutions ?
02:49 Alors d'abord, on doit être très fier de ce régime.
02:52 Parce que nous sommes un des seuls pays qui a ce régime.
02:55 Il y a beaucoup d'autres pays qui n'ont rien.
02:57 Ce régime nous permet à lisser les coûts des catastrophes naturelles dans le temps.
03:04 Mais il est clair, avec le changement de mix et l'augmentation de la fréquence, la question
03:10 du financement suffisante se pose.
03:13 Aujourd'hui, on voit que la sinistralité dépasse les contributions.
03:17 Et il est clair que les contributions doivent augmenter.
03:22 Et c'est aussi important.
03:24 Parce que pour moi, ce régime des catastrophes naturelles donne de certitude et certainement
03:30 aussi de la confiance aux citoyens français.
03:33 Ça veut dire que ce risque a un prix, mais ce prix nous donne de la confiance.
03:39 C'est intéressant parce que Thomas Buberl, qu'est-ce que vous en pensez ?
03:41 Est-ce que quand on est exposé à des catastrophes naturelles, quand on est dans une zone inondable,
03:47 par exemple avec sa maison, est-ce que pour vous la solution c'est tout le monde paie
03:51 un peu plus ? Ou bien est-ce que les assureurs vont proposer des produits particuliers à
03:55 certaines personnes ? Est-ce que ça va être une assurance individuelle ou solidaire vers
04:00 laquelle il faut aller ?
04:01 Il est clair que ça doit être solidaire.
04:04 Parce que ça c'est le mécanisme et le modèle de l'assurance.
04:07 C'est la société qui aide les gens qui sont en difficulté.
04:12 Ça peut uniquement être solidaire.
04:14 Mais comme j'ai dit, ça ne suffit pas juste de réfléchir sur comment on peut mieux alimenter
04:20 ce mécanisme.
04:21 Pour que l'assurabilité soit assurée dans le temps, il faut qu'on parle et qu'on
04:28 pousse beaucoup plus la prévention.
04:30 Aider les gens pour éviter des dégâts en amont des catastrophes qui se passent.
04:37 Qui doit payer pour cette prévention ?
04:38 C'est aussi la totalité des gens qui doivent payer.
04:43 Mais c'est beaucoup moins cher de prévenir que de payer derrière pour le sinistre.
04:49 Thomas Buber, vous avez vu en Californie ces compagnies d'assurance qui refusent de
04:54 prendre des nouveaux assurés à cause des feux de forêt.
04:57 Est-ce que ça, ça peut arriver en France ?
04:59 Pas à cause des feux de forêt mais à cause de certains risques.
05:03 Est-ce qu'un jour, à cause du réchauffement climatique, on peut se dire "non, on ne
05:08 peut plus assurer ça" ?
05:09 Moi je suis convaincu que tout est assurable.
05:14 Sous trois conditions.
05:16 La première, il faut avoir les bons modèles pour modéliser ces risques.
05:21 Parce que quand même la dynamique a changé.
05:22 Avec notre Futurist Report, on a quand même une base de données.
05:27 Votre rapport annuel qui est sorti il y a quelques jours.
05:29 On va en parler.
05:30 Qui nous aide à vraiment comprendre ces risques.
05:33 Deuxièmement, comme j'ai évoqué, il faut travailler sur la prévention.
05:37 Aider les gens à éviter le sinistre ou à réduire la facture.
05:41 Là par exemple, chez AXA, on a lancé il y a quelques années une entité qui s'appelle
05:46 AXA Climate qui a aujourd'hui plus de 200 personnes qui travaillent uniquement là-dessus.
05:51 Et une démente extrêmement forte.
05:54 Et troisièmement, il faut que la collaboration entre le public et le privé continue à bien
06:02 fonctionner.
06:03 On est aujourd'hui dans un très bon dialogue.
06:05 Mais ce sujet, quel est le futur pérenne du système, du pool des catastrophes naturelles,
06:12 est une discussion entre les pouvoirs publics et les privés.
06:16 En attendant ce matin, ce n'est pas la sécheresse ni les maisons fissurées qui préoccupent
06:19 les assureurs, n'est-ce pas ? Ce sont les inondations dans le Nord Pas-de-Calais qui
06:22 font suite à deux tempêtes qui ont touché l'Ouest de la France.
06:26 Ça veut dire des demandes d'indemnisation.
06:28 Pour vous, on en est où ? Quel est le bilan ce matin ?
06:30 D'abord, je suis très touché par le drame qui se passe là.
06:34 Quand on voit les images, la souffrance des gens, on ne peut pas exprimer.
06:40 Pour nous, il y a juste une seule manière de faire.
06:45 Il faut aider.
06:46 Et depuis le 30 octobre, on a créé une cellule de crise qui ne fait que contacter les gens,
06:54 être en contact avec les gens et aider les gens.
06:56 Pour être très concret, dans le Pas-de-Calais, on a aujourd'hui 600 collaborateurs d'AXA
07:02 qui sont mobilisés dans la région pour aider ces familles.
07:07 Ça veut dire qu'ils répondent au téléphone, ils font le tournée ?
07:11 Oui.
07:12 Alors, qu'est-ce qu'on fait ? On envoie des SMS pour être en contact, pour aussi
07:15 aider les gens avant la tempête et avant les inondations pour bien se comporter.
07:20 Deux, pour prendre les nouvelles, pour voir comment ils sont.
07:24 Trois, on essaie vraiment d'aider les familles, par exemple pour les reloger.
07:30 On a dans le Pas-de-Calais, jusqu'ici, relogé une vingtaine de familles.
07:36 Et bien évidemment, on aide aussi sur les démarches administratives.
07:41 Par exemple, normalement, il faut donner la notification du sinistre dans cinq jours.
07:48 On fait 30 jours.
07:50 On donne tout de suite 1500 euros d'indemnisation sans avoir réglé le sinistre.
07:56 On a doublé la période du relongement.
08:00 Ça veut dire qu'on veut vraiment être là pour aider.
08:02 Alors, mais est-ce qu'on peut faire un point sur le nombre de demandes d'indemnisation
08:05 à cette heure ? Et est-ce que vous pensez que quelle sera la facture ? On parle de plusieurs
08:09 centaines de millions d'euros pour toutes ces intempéries.
08:12 Alors, nous sommes au milieu de cette catastrophe naturelle parce que, comme vous l'avez dit,
08:18 les inondations se passent encore.
08:20 Selon mes estimations d'aujourd'hui, je pense qu'on va être à 25 000 sinistres.
08:27 Et c'est certainement plusieurs centaines de millions d'euros de dégâts.
08:31 Thomas Buber, là, on parle du fait que vous êtes en première ligne face au réchauffement
08:37 climatique et vous vous êtes engagé à atteindre la neutralité carbone en 2050.
08:42 Et pourtant, cette semaine encore, certains points du doigt votre responsabilité en tant
08:46 qu'assureur, c'est-à-dire ce que vous financez quand vous investissez ou bien la couverture
08:51 d'assurance que vous proposez à certaines entreprises.
08:54 Des ONG vous reprochent de continuer à assurer des nouveaux champs de pétrole et de gaz.
08:59 Comment réagissez-vous à ces critiques ? Est-ce que sur le sujet de la lutte contre le réchauffement,
09:04 les assureurs, vous, vous avez un double langage ?
09:06 Pas du tout.
09:08 Je vous rappelle que AXA était la première compagnie en 2015 de dire "on va sortir du
09:15 charbon".
09:16 Et notre démarche était assez logique jusqu'ici.
09:19 D'abord, on a exclu toutes les industries et tous les endroits qui sont clairement très
09:26 polluants.
09:27 Deuxièmement, on a focalisé après sur le financement de la transition, ça veut dire
09:33 aider les entreprises, accompagner les entreprises pour faire mieux.
09:38 Et nous sommes dans la prochaine phase aussi dans la démarche symétrique sur la souscription
09:46 des risques.
09:47 Ça veut dire on finance les entreprises qui veulent vraiment se transformer, on assure
09:52 les entreprises et on focalise notre capacité d'assurance sur les entreprises qui veulent
09:58 vraiment se transformer.
09:59 Mais est-ce que ça veut dire qu'en effet les nouveaux champs de pétrole et de gaz,
10:03 vous acceptez encore de les assurer ?
10:05 Très très très peu.
10:07 Alors on a clairement dit en général on ne veut plus assurer des nouvelles explorations
10:15 de pétrole et de gaz, sauf si c'est encore vraiment nécessaire et si l'entreprise qui
10:23 est responsable pour l'exploration a un plan de transition très clair.
10:28 Juste pour vous donner un chiffre, on parle aujourd'hui d'à peu près 5% de ce qu'on
10:34 a fait à l'époque.
10:35 Presque rien.
10:36 Alors dans votre rapport annuel des risques mondiaux, ce risque climatique il est numéro
10:41 un.
10:42 Le risque causé par l'intelligence artificielle est mentionné pour la première fois et puis
10:46 il y a les cyberattaques.
10:47 Votre confrère de Zurich Insurance dit que le risque cyber est peut-être le risque le
10:53 plus inassurable devant les catastrophes climatiques.
10:56 Qu'en pensez-vous ?
10:57 Alors moi je suis de l'avis qu'on peut tout assurer.
11:01 L'assurabilité est garantie mais il faut s'y mettre.
11:05 Il est vrai que le cyber est quasiment la pandémie digitale et il faut là aussi investir
11:14 dans la prévention, se protéger de l'extérieur, se protéger de l'intérieur et avoir un dispositif
11:22 pour vite redémarrer une fois que quelque chose s'est passé.
11:26 Parce qu'aujourd'hui ce n'est plus la question est-ce qu'il y a quelque chose qui se passe,
11:29 c'est quand est-ce qu'il y a quelque chose qui se passe.
11:31 On ne peut pas se protéger 100% contre les menaces asymétriques.
11:36 Une dernière question quand même sur les tarifs.
11:39 On a entendu et lu qu'Axa est en train de préparer comme les autres assureurs une augmentation
11:45 pour la santé, l'habitation, l'automobile et on lit que ça pourrait dépasser l'inflation.
11:50 Donc est-ce que 7-8% d'augmentation des tarifs d'assurance Thomas Buberl c'est possible
11:54 chez Axa ?
11:55 Il faut d'abord se rappeler de l'année 2023 parce que là les assureurs et certainement
12:01 Axa ont été très responsables.
12:03 On a pris la démarche de dire les tarifs en moyenne n'augmentent pas plus que l'inflation
12:10 générale.
12:11 On a tenu ses engagements.
12:13 2024 ?
12:14 On serait bref si vous voulez bien.
12:16 Certainement on a vécu une année avec beaucoup de sinistres, les émeutes, les catastrophes
12:22 naturelles et les gens utilisent plus leurs voitures.
12:25 Il est clair que ce risque doit être reflété dans le prix.
12:30 Les primes vont augmenter mais on va tout faire pour minimiser cette augmentation.
12:36 Il est clair aussi que nos agents sont dans le terrain pour prendre en compte la situation
12:42 spécifique de nos assureurs.
12:43 Ça sera plus que l'inflation ? Ça sera plus que 6% ? Plus que 5% ? C'est possible ?
12:46 Ça va refléter l'inflation des sinistres qui est déconnectée de l'inflation générale.
12:51 Thomas Buber, le directeur général d'AXA, merci d'avoir accepté l'invitation.
12:55 N'en arrête pas l'écho.

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