Daniel Baal, directeur général de Crédit Mutuel Alliance Fédérale, invité de "On n'arrête pas l'éco"

  • il y a 7 mois
Au menu ce samedi : un reportage sur nos frais bancaires, un entretien avec le nouveau numéro un du Crédit Mutuel, un détour par Pékin et un débat sur le bilan de Joe Biden aux Etats-Unis. Ses résultats économiques s'avèrent solides mais que pèseront-ils dans la future élection face à Donald Trump ? Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/on-n-arrete-pas-l-eco/on-n-arrete-pas-l-eco-du-samedi-09-mars-2024-7634985

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Transcription
00:00 Et mon invité, c'est le directeur général du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
00:04 Bonjour et bienvenue Daniel Bal.
00:06 Bonjour Alexandre Benzaïde.
00:07 Vous êtes proposé pour devenir début avril le numéro 1 du groupe.
00:12 Il y a apparemment peu de suspense.
00:13 Alors quelques chiffres quand même pour vous situer.
00:15 Neuvième banque de la zone euro, 14 millions de clients et sociétaires.
00:19 Vous n'avez pas d'actionnaires parce que vous êtes une...
00:21 Non absolument, nous sommes une banque coopérative et mutualiste.
00:23 Nous avons des sociétaires mais pas d'actionnaires effectivement.
00:26 Et un peu plus de 4 milliards de résultats nets en 2023.
00:29 Exactement.
00:30 Alors on parle de ces frais de succession.
00:34 Les frais bancaires c'est quand même un irritant perpectuel.
00:36 Les associations de consommateurs sont très remontées contre les banques.
00:39 On vient de l'entendre, les politiques se mêlent régulièrement du dossier.
00:42 Ce qui est surprenant c'est que quelqu'un dit dans le reportage
00:45 "c'est la jungle, ça dépend de l'agence, ça dépend du conseiller".
00:50 Est-ce que l'autorégulation des banques, Daniel Bal,
00:52 ça marque vraiment pour les frais bancaires ?
00:55 Oui, je crois que les banques ont véritablement fait des efforts
00:58 pour modérer leurs tarifs.
01:00 Je trouve que l'expression en tant que tel "frais bancaires"
01:03 elle-même ne montre pas ce qu'est la réalité.
01:06 En fait il s'agit bien de prestations de services rendues aux clients.
01:09 Le fait d'avoir un compte, le fait d'avoir un conseiller dédié,
01:12 le fait d'avoir une carte bancaire, le fait d'avoir des infrastructures techniques
01:16 derrière qui sont coûteuses, qui permettent de réaliser les opérations.
01:20 Alors, ça a été dit par le reportage, donc ce ne sont pas mes chiffres.
01:23 215 euros par mois, c'est-à-dire un peu moins de 18...
01:26 215 euros par an, c'est-à-dire un peu moins de 18 euros par mois,
01:30 je conçois que ce soit une charge.
01:32 Maintenant, lorsqu'on l'intègre dans un budget global d'un ménage,
01:35 il faut également relativiser.
01:36 Ensuite, on nous parle d'augmentation forte.
01:39 Pour ce qui nous concerne, j'ai vérifié avant de venir,
01:42 depuis 2018, en moyenne, nous avons eu une augmentation de nos tarifs de 5%,
01:48 alors que l'inflation était de 17%...
01:49 5% sur toute la période ?
01:50 Depuis 2018 jusqu'à début 2024, avec les tarifs en place depuis le 1er janvier 2024.
01:56 Ensuite, nous veillons, et je donne l'exemple du crédit mutuel,
01:59 mais d'autres banques font souvent la même chose,
02:01 nous veillons à modérer un petit peu nos tarifs.
02:04 Par exemple, on a entendu tout à l'heure dans le reportage des clients fragiles,
02:08 nous avons, pour ce qui nous concerne, une offre client fragile
02:12 qui est à 1 euro par mois net.
02:15 C'est-à-dire, même s'il y a des incidents,
02:16 et on entendait les 8 euros dont on parlait tout à l'heure,
02:19 qui étaient manifestement des frais d'incidents
02:21 plus que des frais d'utilisation de la carte,
02:23 ces frais-là ne sont pas facturés.
02:25 C'est vraiment un geste qu'on fait parce que nous devons être solidaires.
02:29 On a entendu parler des frais de succession.
02:32 Il faut voir que certains dossiers de succession sont très simples à gérer
02:36 et ne nécessitent pas beaucoup de travail.
02:38 D'autres sont complexes.
02:39 Nous avons des équipes dédiées pour le traitement des opérations de succession.
02:44 Pour autant, pour la majorité des dossiers,
02:46 nous avons décidé de ne plus facturer.
02:49 Puisque pour toute succession jusqu'à 10 000 euros,
02:53 la proposition de loi parle de 5 000 euros,
02:55 pour ce qui nous concerne jusqu'à 10 000 euros,
02:57 ce qui fait plus de la moitié des dossiers,
02:59 ne donneront plus lieu à une facturation.
03:01 - Donc j'entends le plaidoyer Prodomo,
03:03 mais vous remarquez quand même avec moi que les politiques,
03:05 par exemple sur la frais de succession, sont obligés de s'en mêler.
03:08 À un moment donné, je remarque aussi que l'Observatoire des tarifs bancaires
03:12 de la Banque de France a pointé dans son dernier rapport
03:15 une tendance à créer ou généraliser des tarifs bancaires.
03:20 On avait compris que quand les taux étaient bas,
03:22 les banques ne gagnaient pas d'argent.
03:24 C'est pour ça qu'il y avait des tarifs en augmentation.
03:26 Mais là, les taux, Daniel Bal, ils remontent.
03:28 - Les taux remontent, effectivement.
03:31 Le coût des ressources pour les banques augmente.
03:33 Mais je tiens à faire remarquer que les taux des prêts,
03:37 eux, n'ont pas monté.
03:38 En tout cas, les prêts qui étaient en place.
03:40 - Mais là, je parlais des tarifs.
03:42 - Oui, non, mais effectivement, vous parliez également du fait
03:46 que nous allons gagner davantage d'argent parce que les taux montent.
03:48 Sans doute que le fait que les taux soient positifs
03:52 est un meilleur contexte que de travailler dans un contexte
03:54 de taux négatifs où on était autour de zéro.
03:56 Je voudrais juste dire que le fait que nous ayons en France
03:59 des prêts immobiliers à taux fixes a été au cours des deux dernières années
04:04 une formidable protection pour les emprunteurs.
04:07 Parce qu'alors que tous les prix augmentaient,
04:10 leur mensualité de remboursement des prêts immobiliers est restée stable.
04:14 Pendant ce temps-là, les taux sont restés fixes.
04:16 Les taux que les banques ont pratiqués sont restés à ces niveaux-là.
04:19 Alors que le coût des ressources sur le marché,
04:22 c'est-à-dire le prix auquel nous achetions l'argent, continue à augmenter.
04:27 Donc on voit qu'on a quand même une démarche extrêmement vertueuse
04:31 qui amène à protéger nos clients, à protéger notamment les emprunteurs.
04:36 Parce qu'on a vu ce qui s'est passé en Espagne ou en Grande-Bretagne,
04:40 où il y a eu beaucoup de défaillances dans le remboursement des prêts immobiliers,
04:43 justement parce qu'on était sur des taux variables.
04:44 - Daniel Bal, vous préférez parler du crédit ou il y a des tarifs ?
04:48 - Non, je peux parler des tarifs.
04:50 Mais la réalité, c'est qu'on a en face de vraies prestations de services,
04:53 de vraies charges, des salariés, des agences.
04:56 Et je reste convaincu que nous devons être dans la modération.
05:01 Et pour ce qui nous concerne, nous sommes dans la modération.
05:04 - Alors le crédit immobilier, Daniel Bal, on en parle,
05:06 ça serait en train de se débloquer un petit peu.
05:08 Est-ce que c'est vrai ?
05:10 - Aujourd'hui, le sujet, ce n'est pas que les banques ne veulent pas prêter.
05:13 C'est qu'il n'y a pas de demande.
05:14 On peut faire tout ce qu'on veut, mais dès lors qu'il y a peu de demandes,
05:17 parce qu'il y a peu de transactions immobilières,
05:19 on ne va pas faire grand-chose.
05:21 - Pourquoi il y a peu de demandes ? Pourquoi les Français ne passent pas la porte ?
05:23 - Tout simplement parce qu'on est dans une situation d'attentisme.
05:25 Bon, d'une part parce que les taux ont remonté,
05:27 donc ça réduit un petit peu la solvabilité d'un certain nombre de ménages.
05:31 Mais aussi, aujourd'hui, on le sait bien,
05:33 le marché de l'immobilier est relativement à taune.
05:37 Il a baissé en 2023 de l'ordre de 40%.
05:41 Notre production de prêts, elle, de prêts immobiliers,
05:44 a baissé de 24% en 2023.
05:47 Ce qui veut dire que nous avons d'ailleurs gagné des parts de marché dans ce contexte.
05:51 Donc, il suffira qu'il y ait un redémarrage.
05:56 Mais aujourd'hui, c'est un peu compliqué parce que les taux sont à un niveau
06:00 qui est certes supérieur à ce qu'on a connu il y a deux ou trois ans,
06:03 mais pas encore à des niveaux exceptionnels.
06:05 Beaucoup attendent aujourd'hui une baisse des taux.
06:08 Je pense qu'il y aura peut-être une baisse des taux,
06:10 mais il ne faut pas s'attendre à ce que cette baisse des taux soit extrêmement importante d'ici l'été.
06:15 - Là sur 21, d'ici l'été, oui.
06:17 - Oui, d'ici l'été, je pense, en voyant l'évolution des taux
06:20 qui est également dans les projets de la Banque Centrale Européenne.
06:24 Mais une baisse des taux, ça veut dire que ça pourra avoir un effet
06:27 sur une nouvelle hausse du prix de l'immobilier.
06:31 L'immobilier n'a pas beaucoup baissé, notamment l'immobilier ancien,
06:35 mais tout simplement parce qu'il y a toujours une corrélation
06:37 entre l'immobilier ancien et l'immobilier neuf.
06:39 Et l'immobilier neuf ne peut pas baisser aujourd'hui,
06:41 tout simplement parce que les coûts de construction ont fortement augmenté.
06:46 - Bon, là vous renvoyez la balle du coup vers les promoteurs.
06:49 - Non, je n'envoie pas la balle, parce que de toute manière,
06:51 ils ne peuvent pas faire baisser leur prix,
06:52 puisque eux-mêmes ont des coûts de construction augmentés,
06:55 les matériaux ont augmenté, les coûts de main d'oeuvre ont augmenté.
06:58 Donc on est dans cette situation assez paradoxale.
06:59 - Mais alors comment on en sort, Daniel Bal ?
07:01 Parce que le gouvernement, par exemple, il cherche des nouvelles formules.
07:03 On a entendu cette idée du crédit in fine.
07:06 Ouh là là, je vous vois soupirer.
07:08 Ça veut dire... Alors, crédit in fine, c'est compliqué,
07:09 on ne va pas rentrer dans la technique, mais en gros, ça fait...
07:11 - Non, mais c'est de fausses bonnes idées, voilà.
07:13 - OK, le crédit in fine, le crédit hypothécaire que défend Christophe Béchut ?
07:18 - Non, mais on a aujourd'hui en France un système de prêts immobiliers
07:21 qui fonctionne avec notamment le taux fixe,
07:25 comme je l'ai expliqué tout à l'heure,
07:27 avec aujourd'hui des banques qui font leur travail de manière très responsable,
07:31 en regardant quelle est la capacité de remboursement
07:34 et qui, chaque fois qu'elle peut accorder un prêt, la banque le fait.
07:38 Je veux dire, la vocation d'une banque, et notamment d'une banque de détail,
07:42 c'est d'accorder des crédits, c'est de faire du prix immobilier.
07:44 - Mais alors comment on débloque ? Si vous trouvez que leur formule, c'est...
07:46 Bon, le crédit in fine et le crédit hypothécaire,
07:49 qu'est-ce qui doit se passer pour aider les Français ?
07:51 - Un peu d'allègement peut-être sur certaines normes.
07:52 Aujourd'hui, les normes du Haut Comité de Stabilité Financière sont un peu gênantes,
07:57 notamment lorsque l'on accorde des prêts pour le locatif,
08:01 donc ça, c'est où on regarde le taux d'effort,
08:04 alors qu'il faudrait plutôt regarder le reste à vivre.
08:06 Mais ça, je pense qu'on peut trouver des aménagements.
08:08 - Attendez, le taux d'effort, c'est donc...
08:10 Il ne faut pas s'endetter à plus de 35% ?
08:12 - Absolument, qui est une règle de bon sens,
08:15 qui s'applique bien lorsqu'on achète pour occuper le logement,
08:21 qui s'adapte un peu moins lorsqu'on fait un prêt locatif
08:23 et qui même doit donner lieu à un certain nombre d'érogations,
08:27 parce qu'en fonction du niveau de revenu,
08:28 on est parfois capable, en regardant le dossier de prêt,
08:32 d'aller au-delà de 35%.
08:34 Je pense sincèrement que si aujourd'hui les taux se stabilisent ou baissent un peu,
08:39 ça peut être un élément pour redonner confiance
08:42 et pour recréer de la demande.
08:44 Alors, créer un prêt in fine, c'est-à-dire qu'on va rembourser dans 20 ans,
08:49 c'est juste mettre à la charge des emprunteurs
08:52 un niveau d'intérêt extrêmement important.
08:55 Puisque tout le monde le comprend,
08:56 lorsqu'on rembourse un prêt normalement,
08:57 on réduit au fur et à mesure la charge d'intérêt.
08:59 - Daniel Bahl, je lis dans le journal le Sonet Loire
09:02 que vous avez proposé un prêt à taux zéro aux étudiants.
09:05 En quoi ça sera différent de ce que...
09:07 Il y a plein d'opérations promotionnelles pour les étudiants régulièrement ?
09:11 - Non, non, ce n'est pas une opération promotionnelle
09:12 parce qu'on s'inscrira dans la durée.
09:14 Donc à partir du 11 mars, dans nos caisses de crédit mutuel
09:18 et dans l'ensemble de nos agences du CIC,
09:20 nous proposerons jusqu'à 50 000 euros un prêt à 0% sur 80 mois.
09:27 C'est pour nous, on l'appelle d'ailleurs le prêt solidaire étudiant.
09:29 C'est une manière d'aider les étudiants,
09:32 c'est une manière de permettre à des jeunes de commencer leurs études,
09:37 alors que parfois l'élément financier peut être un frein.
09:40 Et c'est juste inacceptable qu'il puisse y avoir ce frein.
09:43 - C'est un gros effort pour vous, ça vous met combien sur la table ?
09:45 - Bah écoutez, pour un prêt qui serait de l'ordre de 20 000 euros sur 80 mois,
09:52 ça fait 2000 euros d'économie pour l'étudiant.
09:57 Donc c'est autant de charges parce que nous,
09:59 nous continuons bien sûr à payer le coût de la ressource.
10:01 - Bon, une autre annonce à l'occasion de la journée des femmes,
10:04 vous avez dit que vous vouliez proposer un compte secret
10:07 aux femmes victimes de violences conjugales, comment ça peut marcher ?
10:10 - En liaison avec l'association Femmes Solidarité le 39-19,
10:14 nous allons faciliter l'ouverture de comptes.
10:17 Lorsqu'on ouvre un compte, il y a un certain nombre de vérifications,
10:20 et notamment les justifications de domicile qu'il faut obligatoirement demander.
10:24 Lorsqu'une femme a été obligée de quitter le foyer,
10:28 ou lorsqu'une femme ne veut plus que ses extraits de compte arrivent à son domicile
10:32 parce qu'elle est en situation de violences conjugales,
10:35 il faut trouver des solutions.
10:36 Et avec cette association, nous avons pu travailler,
10:38 on domiciliera les extraits de compte ainsi,
10:40 on facilitera l'ouverture de compte de telle sorte
10:43 à ce qu'elle puisse en toute autonomie et en toute discrétion
10:47 continuer à avoir un compte et notamment domicilier ses revenus sur ce compte
10:50 et ne pas les domiciler sur un compte qui serait également celui du mari.
10:54 - Daniel Balle, le directeur général du Crédit Mutuel Alliance Fédérale,
10:58 merci d'avoir été dans On n'arrête pas l'école.
10:59 - Merci de m'avoir invité.

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