#126 - Samurai Champloo - Ces dessins animés-là qui méritent qu'on s'en souvienne

Tchoucky et al.

l’année dernière

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Court métrage

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00:00 *musique*

00:24 *musique*

00:29 Tu te rappelles Samouraï Champloo?

00:31 Non pas vraiment.

00:32 Oh j'en avais bien vu quelques épisodes à la télé lorsque ça passait sur Canal+.

00:35 Mais ça ne m'avait pas trop convaincue sur le moment au point que je n'en ai quasiment rien retenu.

00:40 La série qui nous a été recommandée de nombreuses fois au fil des années figurait sur notre liste prévisionnelle de visionnage

00:46 mais c'est sa parenté alléguée avec Cowboy Bebop, du même réalisateur,

00:50 qui nous a motivé à la regarder afin de lui consacrer une vidéo exactement un an après celle sur sa prédécesseuse.

00:57 L'un des enjeux était de déterminer si Samouraï Champloo parlerait plus à moi que ne l'a fait Cowboy Bebop sur laquelle j'avais davantage de réserve.

01:03 C'est très clairement le cas.

01:04 Ce que propose Samouraï Champloo, plus humoristique avec des personnages beaucoup plus classe même s'il reste des sortes de losers

01:10 et des scénarios qui même s'ils ne vont occasionnellement nulle part comme ceux de Cowboy Bebop,

01:13 sont un peu plus substantiels en termes de propos et donc plus propices à une réflexion qui prend la forme d'un discours,

01:18 est nettement plus à mon goût.

01:19 Et toi, le visionnage intégral a-t-il démenti tes premières impressions?

01:22 Oui.

01:23 J'ai passé un très bon moment devant Samouraï Champloo.

01:26 Plus d'une part que je ne l'aurai imaginé

01:29 mais surtout plus d'autre part que devant Cowboy Bebop

01:32 et pourtant j'ai adoré Cowboy Bebop.

01:34 Mais en effet, les personnages de Samouraï Champloo fascinent davantage

01:38 et ça suffit à faire une grosse différence

01:40 même si l'ambiance générale de Cowboy Bebop, notamment musical, m'a paru meilleure.

01:45 Il faut que je sois honnête moi-même.

01:46 Les deux séries sont très travaillées

01:48 mais malgré mes goûts personnels, il me paraît évident que Samouraï Champloo l'est tout de même moins que Cowboy Bebop.

01:53 Cowboy Bebop est plus belle visuellement, son ambiance contemplative est certainement plus fouillée que l'ambiance plus dynamique de Samouraï Champloo

01:58 et il est clair que l'équipe a pris son travail encore plus au sérieux sur Cowboy Bebop que sur sa successeuse.

02:03 Cela étant dit, musicalement parlant, je suis obligé de te contredire

02:06 car moi j'ai adoré ce que proposait Samouraï Champloo.

02:08 Pour cause, c'est ni plus ni moins que la bande son de foot de rue.

02:10 Ben oui, elle est très bien la bande son de foot de rue

02:12 mais dans foot de rue.

02:14 Dans foot de rue, il n'y avait pas de dissonance entre l'ambiance musicale et l'action

02:18 donc on pouvait se laisser porter par l'ensemble qui allait dans le même sens.

02:21 Dans Samouraï Champloo, cette même ambiance hip hop est par dessus des combats au sabre au Japon en plein air et d'eau.

02:28 Cette dissonance oblige le spectateur à se demander s'il aime ce style musical.

02:32 Et du coup, je peux répondre.

02:35 En fait, j'aime pas le hip hop.

02:36 Ah je suis pas d'accord avec toi pour la dissonance.

02:38 Le choix du hip hop sert un propos, il en sert même plusieurs. On y reviendra.

02:42 Je pense qu'on peut quand même se mettre d'accord sur le fait que par contre,

02:46 le générique de Samouraï Champloo est pire que les 3 génériques de foot de rue.

02:50 *Générique de Samouraï Champloo*

02:58 C'est indiscutable.

02:59 Mais puisqu'on parle de ça, vu que les 2 séries ont effectivement en commun une emphase particulière sur le choix du style musical,

03:04 ça vaut le coup de se poser la question, au delà de ça, la parenté entre Cowboy Bebop et Samouraï Champloo est-elle si évidente que ça?

03:10 Hum, on la voit quand on la cherche.

03:12 Difficile de dire si on l'aurait vu sans avoir été alerté dessus dès le départ.

03:16 Je pense que non, d'ailleurs elle m'avait complètement échappé lors de mon premier visionnage sur Canal+.

03:21 Au delà du fait d'avoir un côté désabusé, cynique, typique des animés japonais pour un public plus âgé

03:27 qu'on retrouve aussi dans Initial D par exemple pour ne citer qu'elle,

03:30 ces 2 séries sont vraiment très différentes.

03:32 Sachant leur parenté en termes de production, on leur trouve beaucoup de points communs

03:36 mais pas plus qu'on en trouve couramment entre 2 séries sans rapport entre elles dans nos autres vidéos.

03:41 Peut-être que ces séries n'ont pas grand chose en commun à part leur réalisateur

03:44 ou peut-être, et c'est mon impression influencée par la connaissance préalable de leur parenté,

03:48 qu'elles sont en fait l'inverse l'une de l'autre.

03:50 Et parce qu'elles sont l'inverse l'une de l'autre, elles ont beaucoup de points communs.

03:53 Koboi Bebop se passe dans un futur sans avenir stagnant qui ressemble au passé.

03:57 Samouraï Champloo se passe dans un passé qui ressemble à un avenir sans cesse promis dans les épisodes

04:01 par un narrateur policier historien qui connait le futur sans qu'on sache trop comment ça se fait.

04:04 Ainsi les 2 séries sont lourdement anachroniques.

04:06 Mais autant quand on est dans le futur, on peut parler sérieusement du passé, autant on ne peut faire l'inverse que pour l'humour.

04:12 "Vous cherchez quoi? Passer pour les précurseurs des textos?"

04:14 Dans la même veine, on a parlé des personnages.

04:16 A l'instar des personnages de Koboi Bebop, les personnages de Samouraï Champloo sont des losers.

04:21 Mais pas du tout le même type de loser.

04:24 Les personnages de Koboi Bebop ont un objectif assez modeste, celui de survivre dans un monde difficile

04:29 et ils n'y parviennent qu'avec grande difficulté quand ils y parviennent tout court.

04:32 Ils ont certains talents remarquables mais sont aliénés par des défauts rédhibitoires qui les maintiennent dans le bourbier.

04:39 Ainsi ils sont tous off-class.

04:41 Sur les trois personnages principaux de Samouraï Champloo,

04:44 une seule a un objectif bien déterminé qu'elle poursuivra pendant toute la série même s'il progresse très lentement

04:49 et les deux autres se laissent porter par le vent.

04:52 Ce sont des champions à contester ou en tout cas peu contestés dans leur domaine d'expertise

04:56 mais vu qu'ils n'ont pas de but particulier dans la vie, pas même celui de survivre,

05:01 lorsqu'ils font des choses un peu substantielles, c'est au gré de séries de coïncidences

05:05 et ça a souvent pour effet principal de mettre un bordel monstrueux partout où ils passent.

05:09 Ca ne les empêche en aucune façon d'être d'abord et avant tout extrêmement classe.

05:16 Ils n'ont pas de but particulier dans la vie, pas même celui de survivre.

05:19 En fait ils ont plutôt pour but de mourir

05:21 mais de mourir de la manière dont ils ont décidé eux, c'est à dire le sabre à la main.

05:24 La série aborde à plusieurs reprises la question de l'inéluctabilité de la mort

05:28 et Mugen et Jin, les deux personnages en question, ont accepté cet état des choses.

05:31 La question est donc maintenant pour eux d'avoir la mort la plus classe possible puisqu'il faut mourir.

05:35 C'est surtout qu'ils ont leur vie derrière eux et pas devant.

05:38 Ils ont eu des amis, des amours, des compagnons, des maîtres et ils n'en auront plus d'autres.

05:43 L'ultime combat est la seule chose qu'il leur reste à rechercher.

05:46 Résumons la série pour comprendre de quoi ça s'agit.

05:49 L'intrigue principale est celle de Fu, une jeune fille que les péripéties du premier épisode obligent à quitter son job de serveuse pour partir à la recherche de son père disparu.

05:55 Euh c'est un spoiler?

05:57 On ne nous dit qu'assez tardivement que l'homme qu'elle cherche est son père.

06:00 C'est trop évident pour être passé sous silence et pas assez important pour en préserver le secret.

06:04 De ce père disparu, elle n'a qu'un seul souvenir, il n'en est pas vraiment un.

06:07 Une image à moitié fantasmée de lui dodo dans un champ de tournesol.

06:10 Comme elle sait qu'il s'agit d'un samouraï, elle est donc prête à ratisser le Japon au pays de fin à la recherche d'un samouraï

06:15 avec pour seul indice pour le reconnaître l'hypothèse qu'il sentirait le tournesol.

06:18 Mais c'est très précis ça dit donc.

06:20 Naïveté immodérée ou foi démesurée dans sa bonne étoile, ça lui suffit pour entreprendre ce voyage.

06:25 Pour l'entreprendre, oui mais pas pour l'entreprendre seule.

06:28 Or les péripéties qui l'ont conduite à prendre la décision de partir à l'aventure appliquent à deux énergumènes qui ont retenu son attention.

06:35 Jin, un renin, c'est à dire un samouraï sans maître, tellement bien entraîné qu'il en est apparemment devenu invincible au sabre

06:42 et Mugen, un bandit tout aussi invincible au sabre sans raison apparente. Il est juste comme ça.

06:47 Jin, dans un noble élan de redresseur de Thor, s'en est pris à des gens qu'il fallait pas et a bien foutu le bordel dans le pâtelin où habitait Fou.

06:53 Mugen, pour gagner sa pittance et par goût pour la bagarre, s'en est aussi pris à des gens qu'il fallait pas et a aussi bien foutu le bordel.

06:59 Ensuite en se retrouvant nez à nez au milieu du chaos, Mugen et Jin, le rouge et le bleu, la bête enragée et l'expert maître de lui-même,

07:05 se sont affrontés pour voir qui est le plus invincible des deux et ont encore plus foutu le bordel.

07:09 Après avoir contribué à leur éviter de se faire exécuter pour le bordel qu'ils ont foutu, Fou propose donc à Mugen et Jin un marché.

07:16 Plutôt que de s'entretuer pour savoir qui est plus fort, ils lui serviront tous les deux de garde du corps jusqu'à ce qu'elle ait trouvé son samouraï qui sent le tournesol.

07:24 Mugen et Jin refusent parce qu'ils préfèrent s'entretuer.

07:26 Mais Fou parvient à les obliger à la suivre grâce à un jeu de hasard truqué

07:29 et c'est ainsi que les trois compagnons se lancent sur la piste du samouraï qui sent le tournesol

07:33 et vivront sur le chemin à chaque épisode des aventures rocambolesques pleines de baston et d'humour.

07:37 N'ayant consenti à suivre Fou que sous la contrainte et mollement, Mugen et Jin prendront vraiment leur mission de garde du corps par dessus la jambe

07:45 ce qui fait qu'ils seront tout au long de la série des porte-flingues parfaitement inefficaces.

07:49 Ainsi dans de nombreux épisodes, Fou se fera kidnapper ou séquestrer d'une manière ou d'une autre.

07:55 "Faudra me donner l'adresse du mec à qui c'est arrivé plus qu'à moi."

07:57 "Hahahahaha."

07:59 Elle est mignonne.

08:00 "Sauvez moi quand il me soulave, qu'il me tombe la main, ma foi se déragle."

08:07 "Sauvez moi, ses yeux me désarment quand il me retient, quand ses doigts m'en servent le support."

08:16 Alors pourquoi elle essaie pas de se trouver d'autres gardes du corps?

08:18 Bah déjà pour la raison évidente,

08:20 elle s'est attachée à Mugen et Jin et réciproquement d'ailleurs.

08:24 Là encore, on peut considérer que c'est l'inverse de Cowboy Bebop.

08:27 Les liens que nouent nos 3 personnages au fil de la série sont réellement forts

08:32 au point que vers la fin, ils sont prêts à se sacrifier les uns pour les autres.

08:35 On se doute bien en regardant la série que Mugen et Jin ne vont pas s'entretuer après la fin de la quête de Fou comme ils n'ont de cesse de le répéter.

08:42 Ce dont on ne se doute pas forcément vu qu'on est dans une série un peu cynique avec des personnages assez amoureux,

08:48 c'est que l'amitié qu'ils nous rend est telle qu'ils vont renoncer à ce projet explicitement et officiellement.

08:54 Sans en dire plus sur la fin, c'est notable.

08:56 Mais aussi, Fou garde Mugen et Jin comme porte-sabre parce que bah au final, elle est plutôt en sécurité avec eux.

09:04 Elle survit à toutes ses mésaventures grâce à eux.

09:06 Pas forcément parce qu'ils ont activement cherché à lui porter secours

09:09 mais parce que l'implication de ces 2 guerriers ultimes finit toujours par provoquer les bouleversements qui lui permettront d'échapper à ses ravisseurs.

09:16 Les personnages principaux font constamment preuve dans la série d'une inefficacité paradoxale qui remet moins que dans Cowboy Bebop leur compétence générale en cause.

09:23 Ils n'ont jamais d'argent malgré leur fréquente tentative d'en gagner, ils passent leur temps à crever la dalle et ils galèrent partout où ils vont.

09:29 Mais c'est pas du tout parce qu'ils sont nuls, c'est parce qu'ils sont plutôt malchanceux, surtout Fou, et impulsif et pas très concentré, surtout Mugen et Jin.

09:35 Mugen et Jin qui n'envisagent pas leur existence d'horizon plus intéressant que celui de s'entretuer pour voir lequel des 2 est le plus fort

09:41 ont du mal à se discipliner pour mettre du coeur à l'ouvrage quand Fou leur demande de faire quelque chose.

09:45 Ils y vont au mieux à reculons et se laissent distraire partout et n'importe quoi.

09:49 Ca ne changerait au fait qu'encore une fois, ils sont des champions absolus dans ce qu'ils font.

09:53 Ils sont toujours badass et classe mais ont du mal à se donner autre chose que des objectifs futiles et pas très lucratifs.

10:00 A mes yeux, c'est l'une des 2 fonctions que remplit ce choix d'ambiance musicale très particulier.

10:04 Ce style hip hop, soutenu par une tonalité un peu kaira dans les dialogues que la VF accentue autant que faire se peut malgré sa grande fidélité au texte de la VO,

10:10 incite le spectateur à ne pas idéaliser le contexte posé par la série, le Japon de l'ère Edo

10:14 et à ne pas présupposer que les personnages vont posséder une dignité qui leur serait automatiquement conférée par l'époque

10:19 par le fait qu'ils sont habillés classe, surtout Jin, et par le fait qu'ils se battent au sabre.

10:23 Cette relativisation, cette série nous l'impose en jouant sur l'anachronique pour l'humour comme on l'a déjà dit

10:27 "Eh John Lennon, t'es sûr que tu nous caches pas quelque chose?"

10:30 "Qui c'est le donneur de leçons? C'est le mec aux deux glands?"

10:32 et en choisissant tout simplement de la musique connotée ghetto.

10:35 Le fond suit la forme.

10:36 Dans la série, les figures d'autorité ont fréquemment la dignité d'un dragon céleste de One Piece.

10:42 Le premier combat du premier épisode implique une équipe de samouraïs d'élite qu'on présente comme une bande de raclures sans honneur

10:48 et les épisodes mettent fréquemment en scène de la délinquance, de la drogue ou de la prostitution d'une manière pas du tout idéalisée

10:54 et sur un mode très moderne malgré l'enrobage historique.

10:57 Quand il y a des yakuza, on trouve aussi bien des parrains honorables et des bras droit classe que des petites frappes sans foi ni loi.

11:03 Ainsi, comme tu dis, on ne va pas avoir une admiration spontanée pour les personnages principaux sous prétexte que ce sont des personnages du passé.

11:10 Ils doivent donc trouver leur dignité autrement à nos yeux.

11:13 Contrairement à Jin qui tire son invincibilité d'un entraînement et qu'on présentera plus tard,

11:17 Mugen est introduit au spectateur comme une force de la nature,

11:20 imbattable par essence malgré sa technique foutraque et son manque de discipline.

11:23 Son passé fait l'objet d'un double épisode entier et est plus détaillé que celui de Jin

11:26 mais son récit reste lacunaire et on rend mieux justice au personnage en précisant simplement que c'est un ancien pirate devenu vagabond,

11:32 seul au monde depuis la trahison de son ancien compagnon d'armes.

11:34 Il vit au jour le jour et apprécie les plaisirs simples de l'existence comme la bouffe et le sexe.

11:38 Lors de sa première rencontre avec Fu, alors serveuse dans un restaurant,

11:41 il lui propose de la débarrasser des gros relous de la table d'à côté en échange du déjeuner qu'il n'a pas les moyens de payer.

11:46 Mugen trouve sa dignité dans le fait qu'il est extrêmement persévérant.

11:50 Bien qu'imbattable, il lui arrive de trouver son maître au combat, on y reviendra.

11:54 Mais il se donnera toujours à fond pour surmonter l'obstacle,

11:57 simplement parce qu'il n'a rien de mieux à faire de son temps.

12:00 Dans un épisode, il apprend même à lire.

12:02 Son nom veut dire "infini"

12:04 et le caractère primal de sa force lui confère une sorte de pureté style héros de shonen

12:08 paradoxal sachant que c'est lui et pas Jean qui aime aller aux putes et se bourrer la gueule.

12:13 Son aspect visuel rappelle celui de Luffy avec sa tenue rouge, son short, ses sandales et ses cheveux noirs en bataille.

12:18 Vu que c'est un ancien pirate, c'est peut-être voulu.

12:21 La série date de 2004, ce serait crédible.

12:23 Jean lui est à peu près ce dont il a l'air.

12:25 C'est étonnant pour cette série qui joue sur des effets de dissonance et sur des anachronismes.

12:28 Il a des lunettes.

12:30 Et?

12:31 Il est à peu près ce dont il a l'air sauf qu'il a des lunettes.

12:34 Ce type de personnage n'a jamais de lunettes, en tout cas pas dans les séries historiques de l'époque Edo.

12:39 Ses lunettes ne servent au scénario que dans la mesure où elles le rendent facilement identifiable

12:43 et cet aspect même est rarement exploité.

12:45 Elles sont clairement là pour être le petit détail qui ne colle pas dans l'apparence cohérente du personnage.

12:50 Discret le petit détail parce que l'impression générale que laisse Jean reste très conforme à ce qu'il est en tant que personnage.

12:54 Il est toujours calme et mesuré. Il est sage, il est même plutôt gentil.

12:58 Sa première action dans l'intrigue consiste à s'opposer à une injustice.

13:00 Son sens déontologique est plus important que celui des autres personnages.

13:03 Sa dignité lui vient de là.

13:05 Il est en outre plus fort que Mugen.

13:07 Du moins il l'affirme et rien ne permet de le contester.

13:10 L'exploit de Mugen lors de leur première confrontation est d'avoir survécu à ses attaques, pas d'avoir été son égal au combat.

13:16 Ainsi, comme Jean est clairement le plus fort des deux, il est aussi celui qui ne sert le plus souvent à rien dans les épisodes.

13:23 La partie baston utile au scénario est plutôt assurée par Mugen.

13:27 Jean lui passe l'épisode à jouer au shogi avec des inconnus ou à se livrer à d'autres futilités du même genre.

13:32 Bien sûr celles-ci finissent par se recouper avec l'intrigue principale

13:36 mais c'est parfois d'une manière très anecdotique.

13:39 Evidemment ce n'est qu'une tendance.

13:40 Il y a des épisodes où Jean joue un rôle plus important, notamment ceux relatifs à son passé.

13:45 Jean est donc un renin, un samouraï sans seigneur.

13:48 Il était le meilleur de son dojo, le disciple favori de son maître, maître qu'il a assassiné.

13:52 Depuis, il est poursuivi par ses anciens camarades car chacun espère être celui à qui reviendra la gloire d'avoir vengé le maître et triompher de l'un des meilleurs combattants du pays.

13:59 Jean est donc plutôt célèbre et comme tu l'évoquais tout à l'heure, reconnaissable à ses lunettes, rare au Japon à cette époque d'après les dialogues.

14:05 La vérité derrière la backstory de Jean n'est révélée que vers la fin de la série

14:08 mais il est absolument évident dès le début que vu le type de personnage qu'est Jean,

14:11 s'il a tué le maître, c'est parce que celui-ci s'était compromis d'une manière ou d'une autre et pas par avidité comme le présupposent ses adversaires.

14:17 Sans être aussi spectaculairement doué que Mugen et Jean qui sont invincibles, Fou a elle aussi une certaine classe en ce sens qu'elle...

14:24 Attends, je pense qu'avant de parler de Fou, ce serait bien de faire une parenthèse sur ce qu'on entend par Mugen et Jean sont invincibles.

14:28 Bon, si tu veux.

14:29 Il existe de par le monde des combattants qui sont meilleurs que Mugen et Jean.

14:33 Meilleur que Jean vu que Jean est meilleur que Mugen.

14:36 Donc Mugen et Jean ne sont pas exactement ce qu'est Nanjiro dans Prince of Tennis ou Bunta dans Initial D.

14:42 Ils peuvent être vaincus mais vaincus par des spécialistes surnaturellement doués, des ex-espions...

14:47 Tiens d'ailleurs, c'est une bonne occasion d'expliquer ce qu'on veut dire par "les scénarios ne vont occasionnellement nulle part comme ceux de Cowboy Bebop mais sont un peu plus substantiels en termes de propos".

14:55 Dans un épisode, un type qui désire se venger de Mugen et Jean envoie contre Mugen un type monstrueux et contre Jean un super assassin.

15:04 Le type monstrueux se lie d'amitié avec Fou et constitue donc l'intrigue principale dans laquelle Mugen va être les bras

15:10 et dans laquelle Jean, comme à son habitude, ne va servir à rien.

15:14 Mugen viendra à bout du type monstrueux et de son maître qui mourront tous les deux.

15:17 Entre temps donc, Jean sera approché par l'assassin et l'affrontera.

15:21 Tout au long du combat, l'assassin, même s'il reconnait la grande compétence de Jean, n'a aucun doute sur le fait qu'il l'emportera au bout du compte car le terrain lui est plus favorable.

15:28 On a aucune raison de le croire sur parole.

15:30 Ceux qui l'avancent, il en fait pas du tout la démonstration.

15:33 Mais dans la fiction, on n'est pas convaincu d'un truc comme ça sans raison.

15:36 On l'est rarement à tort en tout cas.

15:37 Mais au final, on ne saura jamais.

15:39 Comprenant que son employeur a été tué, l'assassin renonce simplement à affronter Jean, le salue et s'en va.

15:44 Cette sous-intrigue n'est donc allée nulle part.

15:46 Celle de l'amitié entre fou et l'homme monstrueux non plus d'ailleurs puisque celui-ci meurt.

15:50 Mais l'intrigue de l'assassin est particulièrement frustrante parce que ses déclarations prétentieuses ne sont ni confirmées ni contredites.

15:57 Soutenu comme ça l'était par la mise en scène, j'ai trouvé pour ma part que c'était plutôt poétique.

16:01 Dans la vie, il y a des dénouements qui n'auront pas lieu et des ambiguïtés qui ne seront jamais levées.

16:05 Je crois pour ma part que l'assassin était plus fort que Jean.

16:07 Mais Jean n'en aura jamais le coeur net et ne saura jamais s'il aurait pu tout de même venir à bout de son adversaire.

16:11 Pour moi, il y a un propos qui m'est plus accessible en tout cas que celui de Cowboy Bebop s'il y en a un.

16:15 C'est pas comme si j'avais passé toute une vidéo à t'expliquer ce que c'est le propos de Cowboy Bebop.

16:21 Toujours est-il qu'il existe des combattants plus forts que Moogan et Jean

16:24 dont ils finissent généralement par triompher par persévérance ou au gré des circonstances

16:29 mais qui sont de base meilleurs.

16:30 Donc c'est possible d'être meilleur que eux.

16:33 Par "ils sont invincibles", nous voulons dire qu'un combattant ordinaire, même très compétent,

16:38 s'il n'est pas un de ces super spécialistes, n'a strictement et rigoureusement aucune chance contre Moogan et Jean.

16:44 Leurs limitations ne sont pas un problème en tant que tels, c'est l'insurmontabilité de certains obstacles qui l'est.

16:50 Ca fait une grande différence.

16:51 La question de si Moogan et Jean auraient obtenu de meilleurs résultats en étant plus fort qu'ils ne le sont déjà ne se pose pas.

16:57 Pas dans ces termes en tout cas.

16:58 Et elles ne se posent pas non plus pour fous.

17:00 Ce serait bien d'en parler d'ailleurs, tu crois pas?

17:03 Certes oui.

17:04 Sans être aussi spectaculairement douée que Moogan et Jean,

17:07 Fou a elle aussi une certaine classe en ce sens qu'elle est plutôt polyvalente

17:12 et arrive à garder une attitude adaptée à toutes les situations auxquelles elle est confrontée.

17:16 Elle se fait souvent kidnapper car ses gardes du corps qu'elle a eu le bon sens d'engager pour entreprendre son dangereux voyage

17:21 ne sont décidément pas très motivés pour faire leur boulot correctement

17:24 mais on n'a jamais le sentiment qu'elle aurait dû mieux agir

17:27 même s'il est indéniable qu'elle aurait pu éviter certains pièges en étant moins naïve.

17:31 Faut dire que c'est une gamine.

17:32 Elle a quelque chose comme 15 ans là où Moogan et Jean sont des adultes.

17:35 Ca ne l'empêche pas d'avoir une certaine attirance pour eux, surtout pour Jean

17:38 donc on se doute qu'elle finira par plutôt lui préférer Moogan.

17:40 Elle a également un écureuil volant de compagnie, Momo,

17:42 qui sert rarement car la série a tenu à le camper autant que faire se peut comme un vrai animal

17:46 donc qu'on finit par oublier pendant les longues périodes où il n'intervient pas dans l'intrigue.

17:49 L'invincibilité des personnages principaux concerne aussi Fou.

17:52 Quand elle considère qu'elle a une compétence, elle y est imbattable.

17:56 Elle a un appétit surnaturel

17:57 et la même capacité que Big Mom de One Piece à changer de corpulence de façon radicale quand elle mange beaucoup.

18:03 Ce n'est pas une convention graphique.

18:05 "On a repéré une petite grosse qui les accompagnait."

18:07 Elle participe dans un épisode à un concours de bouffe qu'elle aurait gagné au Lama si elle n'avait pas accidentellement déclaré forfait.

18:13 Conclusion, elle aussi est invincible, juste de manière moins spectaculaire que les deux autres.

18:18 Voir avec son histoire de samouraï qui sent le tourne-sol, elle cherche un grindry sur la plage de Yokohama.

18:22 Et pourtant, cette piste, si mince qu'elle soit, mène quelque part.

18:26 C'est une grosse différence avec Cowboy Bebop.

18:28 Certes les héros sont des losers et sont voués à tourner en rond comme ceux de Cowboy Bebop

18:32 mais ils sont malgré tout premiers au succès contre toute attente.

18:34 Ces personnages sont géniaux.

18:36 On adore les voir interagir avec les personnages du jour dans les épisodes

18:40 que ce soit dans le contexte de gros bastons bien bordéliques ou de dialogues humoristiques bien décalés

18:45 appuyés par des choix de traduction très amusants et bien pensés.

18:48 "Camarade, c'est la lutte finale."

18:50 L'intrigue principale avance vraiment très lentement.

18:53 Comme dans Valérian et Laureline par exemple, on pourrait dire qu'elle avance par à-coups

18:56 mais ce sont de tout petits à-coups.

18:58 Comme je le disais, des figurants rencontrés sur le chemin seront capables de renseigner fou juste sur base de cette histoire de samouraï qui sent le tourne-sol.

19:04 Sauf que du coup, on s'attendrait à ce qu'il commence à donner des indices un peu plus concrets sur la manière de le localiser

19:08 et à ce que l'intrigue se développe à partir de ces précisions.

19:11 Mais même pas, enfin pas vraiment.

19:12 Les indications de ces figurants restent tout aussi cryptiques et vagues que l'indice de départ.

19:16 L'intrigue progresse car les personnages vont dans la bonne direction

19:19 mais la partie investigation, elle, ne progresse pas, n'est pas prise au sérieux et n'est pas à prendre au sérieux.

19:23 En tout cas, quels que soient les mots qu'on choisisse pour décrire la manière dont l'histoire du samouraï qui sent le tourne-sol avance,

19:27 une chose est sûre, c'est qu'il n'y a pas le même genre de disparité que dans Cowboy Bebop entre des épisodes aventure du jour à ambiance

19:33 et des épisodes liés à l'intrigue principale de Spike.

19:35 Les épisodes, même ceux qui proposent des twists dramatiques sur les personnages principaux, sont au contraire tous dans le même style à action humour loufoque.

19:41 "C'est vraiment tout ce qu'on peut dire sur ce sujet?"

19:44 "Quel sujet?"

19:44 "L'homogénéité des épisodes."

19:46 Ah, euh... ben... y'a l'épisode 22.

19:50 Dans cette série habituellement presque sans magie,

19:52 nos héros se retrouvent dans une vallée avec des zombies qui cherchent un trésor et à la fin, ils meurent écrabouillés par une météorite.

19:57 On n'aura pas d'explication.

19:59 On pourrait croire que tout ça est une hallucination liée aux champignons que Mugen Eiji n'ont mangé au début de l'épisode

20:03 mais d'une part, du coup, Foon ne devrait pas être concerné

20:06 et d'autre part, on voit occasionnellement les événements d'un point de vue extérieur

20:09 ce qui tendrait à prouver que ces événements ont réellement lieu dans l'intrigue.

20:12 Mais hors continuité.

20:14 Logiquement.

20:15 Puisque les héros sont vivants à l'épisode suivant.

20:17 C'est encore ce syndrome de l'épisode incompréhensible écrit par le stagiaire de 3ème.

20:22 Nous avons récemment eu l'occasion de dire que celui des ailes du dragon était le plus absurde qui nous a été donné de voir.

20:28 Celui de Samouraï Champloo nous fait regretter ce diagnostic.

20:31 Et pourtant on est dans une série qui n'hésite pas à faire un épisode sur des jeunes qui font du graffiti urbain moderne en plein Japon du 18ème siècle

20:37 et un autre où les héros doivent disputer un match de baseball pour repousser une armada d'américains qui veulent commercer avec le Japon à l'époque isolationniste.

20:44 L'influence occidentale sur le Japon est en fait un thème récurrent de la série.

20:48 Certes elle le traite généralement sous l'angle de l'humour et avec un anachronisme assumé

20:52 (nous avons déjà mentionné ce narrateur policier historien qui parle du futur dans ses monologues)

20:56 mais ça n'en est pas moins une composante importante de Samouraï Champloo.

21:00 On en arrive à ce qui constitue à mes yeux le deuxième intérêt du choix du hip hop comme style musical pour le fond sonore.

21:05 Ce choix met l'accent sur ce thème récurrent de l'influence qu'aura dans le futur la culture occidentale sur la société japonaise

21:11 par le biais d'une influence anachronique qu'elle a dans le présent.

21:13 Enfin c'est à dire dans le passé.

21:14 Elle a aussi une influence concrète non anachronique dans le présent de la série.

21:19 L'implantation du catholicisme au Japon, sa persécution par les Tokugawa

21:23 et sa clandestinité sont des éléments mis en avant dans certains épisodes.

21:27 Il se trouve d'ailleurs que l'intrigue principale du samouraï qui sent le tourneau sol a un rapport avec la persécution des chrétiens.

21:33 Cela dit, à l'inverse des Ailes du dragon dont on parlait tout à l'heure et qui est clairement une série historique,

21:38 je ne crois pas que Samouraï Champloo soit à considérer comme une série historique

21:41 même si elle donne de temps en temps des éléments de culture générale qui tendraient à en donner l'impression.

21:45 Ce choix de parler de l'influence de l'occident, notamment comme tu l'as dit à travers la persécution des japonais catholiques,

21:50 serait typique d'une fresque historique avec une composante documentaire importante.

21:53 Mais il me semble que la série prend trop le contexte de l'ère Edo à la déconne et contient trop d'humour anachronique pour que ce soit son objectif.

21:59 Une fois encore, Samouraï Champloo propose quelque chose de similaire à Cowboy Bebop en ce sens que c'en est l'inverse.

22:04 Cowboy Bebop cherche beaucoup, par son ambiance contemplative, à attirer l'attention sur sa profondeur même si au final elle est pas si sérieuse que ça

22:10 tandis que Samouraï Champloo exhorte énormément le spectateur, malgré les situations un peu sérieuses qu'elle met en scène, à ne pas trop prendre la série au sérieux.

22:17 Dans les deux cas, ça a plutôt bien fonctionné.

22:19 Les deux séries ont très bonne réputation mais Cowboy Bebop est beaucoup plus analysé que ne l'est Samouraï Champloo.

22:23 Nous avons pour notre part beaucoup accroché à ses personnages fascinants, à son ambiance péchue et à son humour décalé

22:28 qui souligne toujours efficacement le propos de l'épisode sans jamais lui nuire, ce qui est devenu plutôt rare avec l'humour.

22:32 Pour sa forme très maîtrisée et son fond très engageant, Samouraï Champloo mérite qu'on s'en souvienne.

22:37 [Musique]