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Enregistré le 18 novembre 2023 au Forum des images dans le cadre de la thématique Acteurs, Actrices & Avatars.

Monia Chokri et Yolande Moreau ont en partage le goût du jeu et de la mise en scène. Comment assument-elles cette double casquette et passent-elles devant et derrière la caméra dans un même élan créatif, et avec toujours autant de talent ?

Rencontre animée par Alex Masson, critique et programmateur.

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Transcription
00:00:00 [Applaudissements]
00:00:10 Bonsoir.
00:00:20 Parlez-vous d'eux. L'idée est peut-être d'essayer de voir ce qui vous rassemble, ce qui vous sépare, ce qui vous différencie, ce qui vous associe,
00:00:32 mais avec, dans une optique de départ, une thématique autour des actrices réalisatrices.
00:00:40 Est-ce que pour vous, l'une ou l'autre, c'est un statut à part d'être actrice et réalisatrice ?
00:00:47 Un statut à part, je ne sais pas. Moi, je ne me considère pas trop comme une actrice.
00:00:51 C'est ça qui est bizarre. On fait le lien, ce qui est normal, parce que j'ai défini ma carrière au départ comme actrice,
00:00:58 mais à partir du moment où j'ai touché à la réalisation, à la scénarisation, j'ai eu l'impression que mon métier d'actrice était comme mon troisième métier.
00:01:08 Je le fais d'ailleurs un peu en dilettante. Je ne sais pas si c'est un statut particulier.
00:01:15 C'est un statut que beaucoup d'acteurs ont envie d'obtenir. Ils ont envie d'aller vers ce médium-là, de réaliser,
00:01:26 parce qu'il y a à un moment donné une fatigue d'être sous le regard de l'autre ou dans le désir de l'autre.
00:01:34 On va beaucoup parler de regard et de désir, effectivement, de toute façon. Et pour vous ?
00:01:40 Moi, bizarrement, j'ai plus derrière moi une carrière de comédienne.
00:01:49 Mais par contre, je trouve que le fil rouge a été de raconter la vie des gens et que dans le cinéma,
00:01:57 pour moi, c'est une continuation de raconter la vie des gens avec un espace de création beaucoup plus grand.
00:02:05 C'est-à-dire qu'on peut imaginer une histoire des comédiens, les lieux où ça se passe, la musique.
00:02:11 Donc très excitant. J'avais envie de cinéma depuis longtemps. Je me suis mis tardivement. Je suis une débutante.
00:02:21 Si on parle de débutante, ça a été quoi le déclic ? Qu'est-ce qui fait qu'un jour vous vous êtes dite
00:02:27 « OK, c'est maintenant, il faut que j'y aille et je peux y aller ».
00:02:31 Moi, c'est beaucoup passé par l'écriture. C'est un peu un parcours sinueux.
00:02:38 Quand je suis au conservatoire à Montréal, quand j'étudie là-bas, il y a déjà une envie de transgresser le métier d'actrice.
00:02:47 J'adore mettre en scène des scènes-êtes avec mes collègues de travail.
00:02:52 Quand on a à écrire quelque chose, quand on a à créer quelque chose, j'y vais en première ligne.
00:02:57 Dès que je sors de l'école, j'ai envie d'écrire des choses.
00:03:02 Ça passe peut-être par le théâtre, par mettre en scène. Il y a toujours une volonté de mise en scène qui est apparue assez tôt.
00:03:08 Après, c'est passé par l'écriture, à la rencontre de Xavier Dolan, quand j'ai fait « Les amours imaginaires ».
00:03:12 On a été très proches, je l'ai vu dans son processus créatif.
00:03:15 Soudainement, j'ai eu envie d'écrire aussi du cinéma.
00:03:18 C'est passé par l'acte d'écrire, où je ne pensais pas réaliser,
00:03:21 parce que pour moi c'était aussi farfelu que devenir astronaute.
00:03:25 Je me disais que je n'avais pas les capacités pour faire ce métier-là.
00:03:30 Mais à force d'écrire, je commençais à voir les images, à avoir envie de les créer, de les générer.
00:03:36 Après, c'est la rencontre avec ma productrice Nancy Grant, qui m'a donné l'impulsion de faire un court-métrage,
00:03:45 voir si j'aime ça, si j'ai un lirai assez solide, si c'est quelque chose qui me plaît.
00:03:49 Et puis, il n'est qu'un extraordinaire. Et à partir de là, le reste est une histoire.
00:03:58 Pour moi, je pense que les années que j'ai passées chez Jérôme Deschamps ont donné un style d'écriture particulier.
00:04:06 Je ne m'étais jamais imaginée que je pouvais écrire pour le cinéma,
00:04:11 même pour le théâtre, il y a très longtemps que j'ai fait mon spectacle.
00:04:15 J'avais fait une école de clowns, et Philippe Gaullier, avec le masque, j'avais une liberté de parole.
00:04:21 Et il m'a dit « tu dois écrire ». J'étais très fière qu'il me dise ça, parce que j'étais quand même très dure à l'école.
00:04:27 Et donc, j'ai commencé à écrire fort de ce qu'il m'avait dit, encouragé par Philippe Gaullier.
00:04:36 Des années plus tard, quand on a fait « Quand la mer monte » avec Gilles Porte,
00:04:41 j'ai découvert l'écriture de cinéma qui n'était pas du tout une écriture de prose.
00:04:49 C'est très particulier, on peut dire « j'ai envie de te tuer » en passant à « je crier ».
00:04:57 Et donc, c'est une autre écriture.
00:05:01 Et je crois que j'ai beaucoup aimé les années passées chez Jérôme Deschamps, avec l'improvisation qu'on avait.
00:05:10 Donc, j'ai beaucoup aimé l'écriture cinématographique pour le premier film.
00:05:16 Je me suis dit que ça me plaisait bien.
00:05:19 C'est bien. Vous parliez de regards. On va illustrer cette rencontre par des extraits.
00:05:25 Et les premiers extraits vont être peut-être le premier regard que nous, en tant que spectateurs, en avons porté sur vous deux.
00:05:32 Ce n'est pas tout à fait vos premières apparitions pour l'un ou pour l'autre,
00:05:35 mais c'est en tout cas une des premières fois où le public français vous a découvert.
00:05:40 Je me demande ce que c'est.
00:05:42 Vous devez avoir une petite idée quand même.
00:05:44 On va démarrer avec deux extraits qui sont relativement courts de toute façon,
00:05:50 qui sont entre guillemets vos premières fois en tant qu'actrice.
00:05:56 On ne te l'a pas dit, un des deux est mort. L'autre, c'est Pitou.
00:05:59 Et lui, il fait tout ce qu'il veut. En tout cas, très peu pour moi tout ça.
00:06:03 Ce qu'il me faut, c'est un métier et pas de famille.
00:06:06 T'as raison, pars. T'as 18 ans. A 18 ans, on peut toujours partir.
00:06:11 Qu'est-ce que tu veux qu'ils te disent ?
00:06:13 Ils peuvent pas te tâcher.
00:06:16 Et pour l'argent ?
00:06:19 Puis que l'argent trie.
00:06:21 Et tu la vends.
00:06:23 Non, pas l'argent trie parce qu'ils vont me tomber dessus.
00:06:25 Je peux prendre leur carte de crédit, le numéro de code. Je me débrouillerai bien pour le trouver.
00:06:29 Ou bien non. Demande-leur ta part d'héritage.
00:06:32 Ça te revient. Faut pas les tuer pour ça. Tu l'exiges.
00:06:36 C'est à toi.
00:06:38 [Musique]
00:06:53 [Musique]
00:07:19 [Musique]
00:07:32 [Musique]
00:07:58 [Musique]
00:08:11 [Musique]
00:08:36 [Musique]
00:08:56 Si on reste dans l'idée justement du regard,
00:08:58 alors ces deux extraits-là qui ont un côté un peu déconnecté par rapport au film,
00:09:02 parce qu'ils reflètent pas vraiment les films en question,
00:09:04 mais ils posent la question de quel regard on posait sur vous.
00:09:08 On va y revenir un peu après.
00:09:10 Mais donc là, vous, vous démarrez dans un court-métrage d'Agnès Zavarda.
00:09:14 Comment ça se passe ?
00:09:16 Si j'ai bien suivi, c'est elle qui vient vous chercher après avoir vu un de vos spectacles ?
00:09:20 Ah oui, j'étais surprise.
00:09:23 Et oui, c'est le...
00:09:26 Donc c'est le pétite scène de ma cuisine
00:09:29 qu'elle a réalisé avant de faire son Tony Noir.
00:09:31 Et elle avait vu mon spectacle qui passait à la télé, je crois.
00:09:37 Et elle est venue me chercher.
00:09:39 Et la première chose que j'ai apprise, c'est qu'il fallait arriver à l'heure.
00:09:43 J'arrivais à midi, moi.
00:09:45 [Rires]
00:09:47 Elle dit "tu me rejoins". Bon, d'accord.
00:09:49 Voilà.
00:09:51 Et c'était rigolo à faire.
00:09:53 Elle a repris des extraits, je crois, dans les plages d'Agnès, plus tard,
00:09:58 et dans son Tony Noir, je l'ai rejoint après.
00:10:02 Si on parle de choses qui peuvent vous associer,
00:10:05 alors vous, il y a le fait d'avoir tourné avec Varda,
00:10:08 mais quelque part, moi j'ai l'impression que Varda,
00:10:11 c'est une figure qui est importante pour vous en tant que cinéaste.
00:10:15 Oui, bien sûr, Varda.
00:10:18 D'abord, je voulais dire que je trouvais Yolande magnifique dans l'extrait,
00:10:21 puis je me disais, la cinégenie, c'est ça,
00:10:24 c'est une blessure qu'on expose ou pas,
00:10:28 mais en tout cas qu'on a en filigrane comme acteur,
00:10:31 un regard et une voix.
00:10:33 Puis c'est ce que je voyais chez Yolande dans cet extrait.
00:10:36 C'était magnifique.
00:10:38 Oui, bien Varda, en fait, je l'ai découvert assez tardivement
00:10:41 parce que je suis le produit de ma société,
00:10:44 et que quand j'étais dans ces âges de jeune, fin adolescence,
00:10:50 début vingtaine où tu commences à découvrir le cinéma d'auteur,
00:10:54 évidemment, je me suis plongée dans le cinéma de la nouvelle vague.
00:10:57 Donc j'ai été biberonné par les Truffauts, Godard, etc.
00:11:02 Et en fait, Varda m'était passé sous le radar,
00:11:06 puis je l'ai découvert il n'y a pas si longtemps,
00:11:12 il a 5, 6, 7 ans.
00:11:14 Puis c'est vrai que quand j'ai commencé avec Cléo de 5 à 7,
00:11:17 après j'ai vu d'autres de ses films,
00:11:19 mais j'ai été vraiment estomaquée par la qualité,
00:11:25 d'abord d'écriture, mais aussi de mise en scène,
00:11:28 de montage, de profondeur.
00:11:33 Et puis je me suis dit, en fait,
00:11:37 j'ai l'impression que c'est une,
00:11:39 en tout cas pour moi c'est la cheffe de file de la nouvelle vague,
00:11:43 et je pense que par son époque et par son statut de femme,
00:11:48 elle a été peut-être pas mise à l'écart,
00:11:51 mais en tout cas on l'a mis un peu de côté en disant,
00:11:53 alors que moi je pense qu'elle est plus intéressante que les autres.
00:11:59 Mais c'est mon avis, humble.
00:12:03 - Une des caractéristiques de Varda qui est représentée, c'est cette liberté.
00:12:06 Alors liberté contrainte dans l'époque où elle tournait effectivement la nouvelle vague,
00:12:10 où on a plus retenu ses collègues qu'elle,
00:12:12 mais il y a toujours eu une idée de liberté,
00:12:14 alors c'est peut-être moi qui extrapole,
00:12:16 mais que moi je retrouve dans vos films,
00:12:18 cette idée d'une liberté d'aller où vous voulez aller,
00:12:21 de traiter les sujets que vous voulez aller,
00:12:23 comme vous voulez les aborder.
00:12:26 Est-ce que cette idée-là, la liberté de traitement,
00:12:29 dans un milieu qui est quand même lié,
00:12:31 quand on fait des films à l'économique,
00:12:33 c'est quelque chose qui est important pour vous,
00:12:35 la liberté de raconter une histoire comme vous voulez la raconter ?
00:12:39 - Oui, effectivement, quand j'avais vu les...
00:12:42 Je l'avais suivi, moi je la connaissais depuis longtemps en fait,
00:12:45 mais quand j'ai vu "Les plages" d'Agnès,
00:12:49 je suis sortie de là en disant "Mais ma vieille, pourquoi tu veux faire du cinéma ?"
00:12:53 Parce que je trouvais qu'elle avait un culot monstre,
00:12:56 elle se permettait, avec l'image,
00:12:59 de raconter le siècle dans lequel on vit,
00:13:02 c'est-à-dire, elle racontait le racisme, l'amour, la famille,
00:13:08 et elle se déguise en patate et elle met du sable dans sa rue.
00:13:11 Et je trouve que les procédés de narration étaient multiples,
00:13:16 et elles se servaient vraiment de l'image,
00:13:18 pas seulement des mots, et j'ai adoré ça,
00:13:21 et je la trouvais culottée.
00:13:24 Et moi, mon dernier film, je me suis dit,
00:13:26 j'ai envie de m'offrir d'autres moyens pour raconter une histoire,
00:13:31 pas simplement les mots.
00:13:34 Et c'est ce film-là, spécialement, qui m'a marquée pour ça.
00:13:41 Sinon, oui, le fait de tourner avec elle, "Santoni, l'Oueil", tout ça.
00:13:48 Mais il faut définir la liberté, déjà,
00:13:51 parce qu'en fait, c'est quelque chose qu'on m'a dit quelques fois,
00:13:57 vous êtes libre, il y a quelque chose de libre dans...
00:14:00 Mais moi, je ne le sais pas, en fait, quand je le fais.
00:14:02 Je fais juste être tentée d'exprimer dans la forme qui me semble la plus juste.
00:14:10 Donc, ce n'est pas tant lié à mon sentiment, mon souci de liberté,
00:14:14 plus qu'à un état d'esprit dans lequel je suis,
00:14:18 que je ne peux pas combattre.
00:14:20 C'est-à-dire que je n'ai pas d'autre manière, pour moi,
00:14:22 de raconter des histoires que la manière dont je le fais.
00:14:24 Je n'essaie pas d'être excentrique, je n'essaie pas de choquer,
00:14:27 je ne sais pas de... Je me dis juste,
00:14:28 qu'est-ce qui est le truc le plus juste au moment où je le fais.
00:14:31 Après, je m'amuse, c'est vrai, avec les procédés.
00:14:35 Puis, à la fois, chez certains, ma liberté est considérée comme un excès d'esthétisme.
00:14:42 Puis après ça, si on parle du fond, je pense que du fait que je viens d'un territoire,
00:14:48 donc le Québec, qui a un rapport plus égalitaire dans les rapports hommes-femmes.
00:14:53 Donc, peut-être pour les femmes, il y a des sujets qu'on peut aborder
00:14:57 avec une plus grande latitude et avec moins de contraintes cérébrales
00:15:02 que certaines femmes ici pourraient avoir, peut-être, à raconter les choses.
00:15:09 Mais ça, je n'en sais rien.
00:15:11 - Vous avez un peu demandé la question suivante,
00:15:13 qui était par rapport à l'état d'esprit,
00:15:15 qui fait que vous avez la particularité d'être belge et canadienne.
00:15:19 Je me demandais pour vous, qu'est-ce que vos films,
00:15:22 pour l'une comme pour l'autre, ont de belges ou de canadiens.
00:15:25 Vous avez un peu répondu.
00:15:28 Et je trouve qu'en plus, vous, vous avez clairement une influence
00:15:31 d'un certain cinéma canadien-québécois des années 70, début 80, par exemple.
00:15:36 Mais pour vous, qu'est-ce que votre cinéma, il a de belge ?
00:15:40 - Moi, j'ai toujours du mal un peu quand on parle de belgitude, par exemple,
00:15:44 parce qu'il y a un cinéma belge avec des flamands, des francophones,
00:15:48 et très différent. C'est très différent ce qu'ont fait les frères Dardenne,
00:15:52 qui ont apporté beaucoup de choses.
00:15:55 Pour moi aussi, Jacovin Dormal, je pense qu'il était, pour moi,
00:16:02 quand même déterminant, avec Toto le héros aussi,
00:16:06 avec ses tulipes qui se baladaient.
00:16:09 Après, je trouve que les flamands, pour le moment,
00:16:12 ont quelque chose de...
00:16:15 ont une nouvelle énergie, apportent une nouvelle énergie,
00:16:18 et ça, ça a été le cas pendant des années, avec Félix Van Groeningen,
00:16:22 Bullet, etc. Ce sont des choses assez fortes qui ont émergé par là.
00:16:28 Alors, il n'y a pas un cinéma belge. Il y a Bully Lanners aussi,
00:16:32 avec qui je suis très proche, au point de vue amitié.
00:16:36 Mais je trouve qu'il n'y a pas un cinéma.
00:16:44 Moi, je pose beaucoup la question, avant que j'entame l'écriture d'un scénario,
00:16:49 c'est pourquoi je veux raconter une histoire,
00:16:52 et en tout cas, essayer...
00:16:56 parce que la Belgitude, ça voulait dire aussi beaucoup
00:17:00 un cinéma social, des ciels très bas.
00:17:05 J'avais pas envie de ça.
00:17:07 Mais pourtant, j'aime ce film-là.
00:17:11 Donc, pour moi, ça ne veut pas dire grand-chose.
00:17:15 - Alors que de votre côté, il y a clairement une forme,
00:17:17 peut-être pas d'héritage, mais de tradition,
00:17:19 qui vient effectivement d'un mouvement de cinéma des années 60-70.
00:17:23 - Oui, peut-être dans mon cinéma, après, je ne sais pas...
00:17:27 Je trouve qu'il y a quelque chose, il y a une parenté entre le cinéma belge
00:17:31 et le cinéma québécois, qui vient...
00:17:33 parce que je dirais québécois plutôt que canadien,
00:17:35 parce que comme nous aussi, on est un peu dans la même configuration
00:17:38 que la Belgique. - Double culture, anglophone-francophone.
00:17:40 - Oui, c'est ça. C'est une culture qui, d'ailleurs,
00:17:42 on les appelle les deux solitudes.
00:17:43 C'est vraiment des cultures qui ne se rencontrent pas.
00:17:45 Et puis, en général, les Canadiens anglais,
00:17:47 quand ils sont bons cinéastes ou bons acteurs ou bons chanteurs,
00:17:49 ben, ça fly de l'autre côté de la frontière.
00:17:53 Donc, shout-out to Drake and Justin Bieber.
00:17:58 Mike Myers, bon. Voilà, il y en a plusieurs.
00:18:01 Mais c'est vrai qu'il y a quelque chose, je trouve, de similaire
00:18:04 dans ces peuples, en fait, chez les Wallons, peut-être,
00:18:07 chez les Québécois. On a une culture du loser, du héros,
00:18:14 de l'anti-héros, en fait. J'ai l'impression que c'est quelque chose
00:18:18 où on se prend moins au sérieux, où on célèbre un peu la marge,
00:18:24 ce qui est un peu dans votre film aussi.
00:18:26 Il y a une célébration des personnages qui sont un peu...
00:18:29 sans être social, forcément, parce que, évidemment,
00:18:31 les Darden le font, mais c'est vrai que quand on pense,
00:18:34 évidemment, à des classiques, comme c'est arrivé près de chez vous,
00:18:37 il y a une espèce de... On y va dans l'anti-héros.
00:18:42 Puis je trouve qu'en France, il y a la culture
00:18:46 beaucoup plus hiérarchisée, où on célèbre quand même.
00:18:50 Puis chez nous, c'est vrai qu'on est aussi très intéressés
00:18:53 par les gens qui sont un peu... qui sont pleins de défauts,
00:18:56 en fait, dans notre cinéma. Et donc, pour répondre à...
00:19:00 C'est vrai qu'il y avait un mouvement dans les années 60 au Québec
00:19:03 qui s'appelait le cinéma direct, où on œuvrait des grands cinéastes
00:19:07 comme Michel Brault, comme Claude Jutras,
00:19:09 comme Pierre Perrault, Gilles Grou.
00:19:12 Et en fait, le cinéma, le principe de ce cinéma-là,
00:19:14 c'est que c'était des cinéastes qui travaillaient
00:19:16 à l'Office national du film du Canada
00:19:18 et qui étaient des documentaristes qui travaillaient.
00:19:20 Et ils prenaient souvent leur chute de pellicule à l'ONF
00:19:23 pour créer leur propre fiction, leur film.
00:19:26 Et c'était vraiment des cousins de la nouvelle vague.
00:19:29 D'ailleurs, Truffaut était très ami avec Claude Jutras.
00:19:31 On l'aperçoit, Truffaut, dans À tout prendre, de Claude Jutras.
00:19:35 Et en fait, c'est qu'eux, ils faisaient un cinéma
00:19:39 qui était proche de la nouvelle vague,
00:19:41 mais ils intégraient toujours un élément de documentaire dans le film,
00:19:44 un peu comme Vardaf a fait dans certains de ses films.
00:19:47 Donc, c'était ça, la spécificité de ce cinéma-là.
00:19:49 C'est vrai que moi, c'est un cinéma dont je me suis inspirée.
00:19:53 Après, je ne sais pas si tous les cinéastes au Québec...
00:19:55 Il n'y a pas vraiment non plus de ligne directrice très précise
00:19:58 de ce qu'est le cinéma québécois.
00:20:00 Les gens en France pensent que le cinéma québécois,
00:20:02 c'est extrêmement volubile, parce que les exemples qu'ils ont,
00:20:04 c'est Denis Harkamp, Xavier Dolan et moi,
00:20:06 qui sommes vraiment l'exception à la règle du cinéma volubile au Québec.
00:20:10 C'est-à-dire qu'au Québec, il y a une espèce de blague sur le cinéma
00:20:13 qui est, tu sais, on fait...
00:20:16 On va déboucher le bain,
00:20:18 puis on va attendre que l'eau est complètement descendue,
00:20:21 qu'il n'y ait plus une goutte.
00:20:23 Donc ça, c'est plutôt représentatif de notre cinéma.
00:20:25 Donc un cinéma plutôt mutin,
00:20:27 un cinéma...
00:20:29 Pas mutin, ça veut dire violent, non ?
00:20:33 C'est ça, non ? Mutin ?
00:20:35 Non, pas mutin, mais miotté, je voulais dire,
00:20:38 pour parler un bon français.
00:20:40 Silencieux.
00:20:42 On va essayer, si tout le monde se dit,
00:20:46 de tirer des traits avec l'extrait suivant.
00:20:49 Je ne vous dis pas ce que c'est tout de suite,
00:20:51 parce qu'on va en parler directement après.
00:20:53 C'est un extrait très court, encore une fois,
00:20:55 pas forcément représentatif du film,
00:20:57 mais vous verrez avec la question qui suivra.
00:21:01 Quand je ne dors pas, la nuit se traîne,
00:21:05 la nuit n'en finit plus,
00:21:08 et j'attends que quelque chose vienne.
00:21:12 Mais je ne sais qui, je ne sais quoi,
00:21:17 j'ai envie d'aimer, j'ai envie de dire,
00:21:21 que je ne sais pas qui, je ne sais quoi.
00:21:25 J'ai envie d'aimer, j'ai envie de vivre,
00:21:31 malgré le vide de tout ce temps passé,
00:21:39 de tout ce temps gâché, et de tout ce temps perdu.
00:21:47 Dire qu'il y a tant d'êtres sur la Terre,
00:21:52 qui, comme moi, ce soir sont solitaires.
00:21:56 C'est triste à mourir, quel monde insensé,
00:22:01 je voudrais dormir et ne plus penser.
00:22:06 J'allume une cigarette,
00:22:11 j'ai des idées noires en tête,
00:22:15 et la nuit me paraît si lente, si lente, si lente.
00:22:21 Au loin, parfois, j'entends un bruit de pas,
00:22:27 quelqu'un qui vient.
00:22:30 Mais tout s'efface, et puis c'est le silence.
00:22:37 La nuit ne finit là dans pas,
00:22:41 la lune est bleue, il y a des jardins,
00:22:45 des amoureux qui s'en vont.
00:22:50 Main dans la main,
00:22:54 et moi je suis là.
00:22:57 C'est donc la toute fin d'Henri.
00:23:00 J'ai fait le choix volontairement par rapport à l'extrait de "Télère"
00:23:03 des "Amies imaginaires" pour qu'on ait un côté musical,
00:23:05 mais pour moi cet extrait pose la question de
00:23:07 comment est-ce qu'on filme quelqu'un.
00:23:10 Parce qu'on verra aussi après sur d'autres extraits
00:23:12 le rapport à la distance que vous avez chacun,
00:23:14 le rapport au montage qui est très différent,
00:23:16 mais là, sur ce plan-là, il y a la question de
00:23:19 comment est-ce qu'on filme quelqu'un.
00:23:20 Comment est-ce que l'une et l'autre, vous savez,
00:23:22 sont à la bonne distance des personnages et de vos acteurs ?
00:23:27 - Moi je ne sais pas.
00:23:33 - Là, en l'occurrence, ce plan-là qui est quand même particulier,
00:23:37 parce que c'est un plan fixe, qui est sur la durée,
00:23:40 comment il vient ? D'où il est ?
00:23:42 À quel moment vous vous dites il faut que je le filme comme ça ?
00:23:45 - Pour moi, il était plus compliqué à imaginer
00:23:49 ces pipeaux de Le Bono, je savais qu'il voulait qu'on danse.
00:23:53 Plusieurs samedis de suite, j'avais répété avec lui,
00:23:57 ça ne marchait pas, j'ai failli l'annuler.
00:24:00 Et je lui ai dit "mais comment toi tu ferais ?"
00:24:03 Et là il me fait cette danse, je dis "c'est ça qu'on va faire".
00:24:07 Et donc je me rappelle que toute l'équipe était là,
00:24:10 parce que je voulais en même temps qu'il soit sous,
00:24:14 qu'il vienne par bribes, c'est ça ce qu'il fait.
00:24:18 Et alors moi, je ne sais pas, la distance,
00:24:23 je me fais aider pas mal par le chef opérateur,
00:24:27 mais je ne sais pas si c'est la bonne distance, franchement.
00:24:31 - C'est tellement spécifique à chaque...
00:24:36 C'est parce que c'est plein de choses,
00:24:40 d'abord, dans mon cas, je commence à travailler
00:24:43 par exemple l'idée générale du film,
00:24:45 donc je me dis "ok, comment je vais raconter cette histoire
00:24:49 en général en posant une espèce de vocabulaire
00:24:52 un peu abstrait et un peu comme un puzzle,
00:24:56 où les pièces se mettent en place loucement l'une avec l'autre.
00:25:00 On filme les gens aussi entourés de notre équipe,
00:25:06 donc la direction artistique, quel lieu on trouve,
00:25:10 comment notre caméra va être tributaire
00:25:14 de notre environnement aussi.
00:25:16 Puis après, c'est de l'instinct, je dirais,
00:25:20 c'est dans le découpage, on se dit comment en fait...
00:25:25 Moi, je travaille avec l'état d'esprit intime du personnage
00:25:31 au moment où il est rendu dans la dramaturgie du film,
00:25:34 de me dire "est-ce que je le laisse loin, libre,
00:25:37 est-ce que je le contrains?"
00:25:40 Puis après, j'utilise le vocabulaire de base du cinéma,
00:25:44 quand on fait vraiment du signifiant,
00:25:51 de dire si on est large, ça raconte quelque chose
00:25:54 dans le vocabulaire du cinéma, si on est très proche,
00:25:56 si on cache la moitié du visage d'un personnage,
00:26:00 mais essentiellement, je suis en train de tout raconter ça,
00:26:04 mais c'est de l'instinct, je pense vraiment.
00:26:06 - Vous parliez de dramaturgie,
00:26:08 alors cela aussi, c'est peut-être un ressenti personnel,
00:26:10 mais cet extrait-là, pour moi, il me raconte quelque chose aussi,
00:26:13 ne serait-ce que par la place de la caméra,
00:26:16 de l'empathie envers ce personnage-là.
00:26:19 Alors évidemment, je ne sais pas combien de vous ont vu Henri,
00:26:22 mais il y a toute une trajectoire dans le film,
00:26:24 là, c'est la fin du film, mais il y a quelque chose
00:26:26 qui, je trouve, dans ce plan-là, amène une tendresse,
00:26:28 une réelle tendresse et une empathie pour ce personnage-là.
00:26:31 Et j'ai l'impression que de film en film,
00:26:33 toutes les deux, vous glissez de plus en plus vers ça,
00:26:36 vers quelque chose qui est plus vers l'empathie envers les personnages.
00:26:39 C'est une interprétation, je me trompe, c'est ça ou...?
00:26:43 - Ben oui, dans mon cas, c'est sûr que dans "Same comme Sylvain",
00:26:47 j'ai eu envie de... mais c'est l'âge aussi.
00:26:50 C'est vrai, je suis devenue plus tendre,
00:26:53 et je ne dirais pas cynique, mais un petit peu moins caustique,
00:26:57 j'ai pu l'être, et moins contrôlante aussi.
00:27:00 Moins contrôlante avec mon équipe, mes acteurs,
00:27:03 moins de choses à prouver.
00:27:05 C'est une équipe que je connais bien maintenant,
00:27:07 ça fait trois longs-métrages qu'on fait ensemble,
00:27:09 où j'ai moins besoin de tout placer,
00:27:11 d'être très aux aguets ou à la feu,
00:27:13 de laisser un peu couler une espèce de douceur.
00:27:17 Donc, oui, peut-être j'ai envie de...
00:27:21 Je trouve que c'est une meilleure façon
00:27:23 de rencontrer le public aussi.
00:27:26 Oui.
00:27:29 Pour moi, l'empathie, c'est sûr, avec les personnages,
00:27:32 mais là, si vous me dites que la place...
00:27:37 Je suis d'accord qu'on a dit que c'est une forme d'instinct,
00:27:41 et en tout cas, la façon dont ils dansent,
00:27:45 c'est sûr que j'ai envie de voir le corps s'exprimer,
00:27:48 donc de loin,
00:27:51 et c'est plus de l'ordre de l'instinct
00:27:54 que calculer en même temps.
00:27:58 D'une manière générale, j'aime bien avoir de l'empathie
00:28:01 pour les personnages du film,
00:28:04 pour tous en tout cas,
00:28:07 mais j'ai du mal, moi, à décortiquer
00:28:10 ce que je fais, là,
00:28:13 à en parler d'une manière intellectuelle.
00:28:17 Après, je trouve ça très difficile,
00:28:19 c'est deux métiers différents, je trouve.
00:28:21 Mais en le posant sur papier,
00:28:26 je ne vais pas me dire, je mettrais une certaine distance
00:28:29 pour avoir de l'empathie. Je ne me le dis pas.
00:28:31 - Ce n'est pas ce que je veux dire par là,
00:28:33 mais j'ai l'impression que c'est un trait de caractère,
00:28:35 de votre côté, par rapport à ce qu'on a pu connaître de vous aussi
00:28:38 en tant qu'actrice, par courant avec les Deschiens,
00:28:40 avec des personnages qui transpirent,
00:28:42 et ça, ou même ce que vous faites chez les autres réalisateurs,
00:28:44 il y a ce côté d'une humanité qui est là,
00:28:46 même si c'est un terme, mais il y a quelque chose là-dedans.
00:28:48 Mais j'ai vraiment le sentiment que de film en film,
00:28:50 vos films glissent vers à la fois
00:28:52 une observation sociale très forte,
00:28:55 mais en même temps, sans envie de revendiquer quelque chose,
00:29:00 de revendiquer un message social et politique,
00:29:02 mais juste dire "regardez ces gens tels qu'ils sont".
00:29:05 Ils sont comme vous, ils sont comme nous.
00:29:07 Il y a un côté de cette fibre-là.
00:29:09 Ça n'appelle pas forcément de réponse,
00:29:11 c'était juste un commentaire.
00:29:13 - En tout cas, pour ce qui est de vouloir faire un message,
00:29:16 je pense toujours que l'art, c'est le dernier rempart de liberté réelle
00:29:19 qu'un être humain peut avoir pour s'exprimer.
00:29:22 Si je voulais faire des œuvres politiques, des actes politiques,
00:29:26 ça vient malgré nous, en fait.
00:29:28 Déjà, faire un geste artistique, c'est un geste politique
00:29:32 parce que c'est contre la nature d'une société
00:29:35 qui souhaite de la productivité.
00:29:37 Donc l'art, c'est l'inverse de la productivité,
00:29:39 d'une certaine manière.
00:29:41 Et après, c'est aux autres d'y voir un sujet politique.
00:29:48 Sinon, on écrirait des livres de sociologie,
00:29:51 on ferait de la politique.
00:29:53 Mais ce qui est beau, c'est quand on n'est pas manichéen
00:29:57 dans notre travail, puis qu'on pose des questions
00:30:00 plutôt que d'y répondre, j'ai l'impression.
00:30:03 - Vous avez l'impression que vos films ne font pas...
00:30:05 - Je suis d'accord aussi avec ça.
00:30:07 De toute façon, je trouve que déjà faire un film,
00:30:09 c'est un acte politique, c'est un acte politique
00:30:11 de la vie des gens.
00:30:13 Et pour moi, ça, c'est un acte politique, quelque part.
00:30:16 Et je sais que moi, pour le dernier film,
00:30:18 j'ai voulu faire quand même un film libertaire.
00:30:20 Un petit peu libertaire et pour moi,
00:30:23 qui incite un peu à marcher hors des clous,
00:30:26 mais sans message, sans...
00:30:30 Mais en tout cas, oui, c'est une vision
00:30:34 peut-être du monde dans lequel on vit.
00:30:37 C'est un geste politique malgré moi,
00:30:41 parce que parler des gens, c'est forcément
00:30:45 un geste politique, je trouve.
00:30:49 - Je reviens sur l'extrait. Il y a la chanson,
00:30:51 "Petula Clark", qui amène quelque chose au film,
00:30:54 qui est une chanson populaire.
00:30:56 Qu'est-ce que ça veut dire pour vous,
00:30:58 faire du cinéma populaire ?
00:31:00 Parce qu'on vous identifie entre les deux,
00:31:02 en fait, quelque part. On vous identifie...
00:31:04 Je veux dire que vos films, souvent,
00:31:06 après, soit ils sont répertoriés sur des comédies,
00:31:08 ce qui ne sont pas tout à fait,
00:31:10 soit on vous envoie un peu plus vers un côté
00:31:12 du cinéma dit d'auteur, alors qu'en fait,
00:31:14 vous faites un cinéma qui, quelque part,
00:31:16 ce que je disais tout à l'heure, c'est qu'il est servi
00:31:18 pour parler à un maximum de gens.
00:31:20 Qu'est-ce que ça veut dire pour vous,
00:31:22 le cinéma populaire ?
00:31:23 - Mais qu'est-ce que ça veut dire,
00:31:24 le cinéma populaire, déjà ?
00:31:26 Je ne sais pas ce que c'est.
00:31:28 C'est-à-dire qu'il y a une façon de faire des films
00:31:31 qui serait... On dirait qu'on s'est formatés
00:31:33 pour faire un cinéma populaire,
00:31:35 mais il y en a d'autres qui le seraient pas.
00:31:38 - Ce que je n'aime pas, c'est le terme populiste.
00:31:40 - Oui, ça, ça.
00:31:41 - D'ailleurs, j'aime beaucoup.
00:31:43 - Non, mais en fait, je pense que c'est un hasard
00:31:45 si notre cinéma devient populaire,
00:31:47 dans le sens où, encore une fois,
00:31:49 c'est drôle, parce qu'il y a quelqu'un
00:31:51 qui m'avait dit ça une fois, un espèce de cinéaste
00:31:53 un peu hargneux au Québec, qui était fâché
00:31:55 parce qu'il n'avait pas été financé.
00:31:56 Puis moi, oui, il m'avait pris dans un coin,
00:31:57 dans une fête, c'était tellement lourd.
00:31:59 Il m'avait dit, "Oui, non, mais Xavier, toi,
00:32:01 "non, mais c'est facile, vous faites des films
00:32:03 "de cinéma d'auteurs populaires."
00:32:05 Puis j'étais genre...
00:32:07 (rires)
00:32:08 On dirait que c'est un compli-merde,
00:32:10 comment on va dire?
00:32:12 - Pour moi, le cinéma populaire,
00:32:14 c'est une forme de compli, mon Henri.
00:32:16 - Non, mais ce que je veux dire,
00:32:18 c'est qu'il y a comme une connotation
00:32:20 dans l'idée du cinéma populaire
00:32:22 qui voudrait dire que c'est comme...
00:32:24 Oui, c'est léger, tu sais, comme c'est digeste.
00:32:26 (rires)
00:32:27 Donc, comme si c'est digeste,
00:32:29 mais comme moins intelligent que les autres.
00:32:31 Tu sais, comme on s'abaisse au peuple.
00:32:33 Je sais pas ce que ça veut dire,
00:32:35 mais c'est une...
00:32:37 Il y a quand même quelque chose d'alambiqué
00:32:39 dans cette terminologie,
00:32:41 sans vouloir faire une conférence
00:32:43 sur la semi-antique.
00:32:45 Mais, tu sais, si on s'exprime clairement
00:32:48 sur ce qui est populaire,
00:32:50 il y a quand même cette notion légèrement...
00:32:53 - Méprisante.
00:32:55 - Je sais que c'est pas votre cas,
00:32:57 mais c'est méprisant d'une certaine manière.
00:32:59 Parce qu'on pourrait dire qu'on catégorise les films.
00:33:01 On va dire...
00:33:02 Si on fait un quiz entre nous,
00:33:04 puis on dit "Les Ch'tis",
00:33:06 est-ce que c'est un film populaire?
00:33:08 Oui.
00:33:09 Mais si "Les Ch'tis" avait pas marché,
00:33:11 même scénario, au box-office,
00:33:13 ça devient plus un film populaire?
00:33:15 Tu sais, c'est comme...
00:33:17 Donc, puis...
00:33:19 Donc, c'est ça.
00:33:21 Je sais pas exactement ce que ça veut dire.
00:33:23 Est-ce que "Titan", qui a fait...
00:33:25 "Peu d'entrées" est un film populaire
00:33:27 parce qu'il a gagné la Palme d'Or
00:33:29 puis qu'il a été très médiatisé?
00:33:31 Je sais pas, tu sais.
00:33:33 Moi, je fais moins d'entrées
00:33:35 que d'autres films qui sont considérés
00:33:37 comme des films d'auteurs.
00:33:39 Peut-être parce qu'ils marchent moins.
00:33:41 Je sais pas.
00:33:43 Donc, je sais pas ce que ça veut dire,
00:33:45 mais je suis très contente
00:33:47 d'avoir ce titre-là.
00:33:49 En tout cas, j'ai pas répondu, mais...
00:33:51 - Asseyez quand même un peu.
00:33:53 - Ouais.
00:33:55 - Je sais pas si vous voulez
00:33:57 rejeter quelque chose ou pas.
00:33:59 Non.
00:34:01 Je reviens sur cette idée d'un cinéma politique.
00:34:03 Je trouve assez étonnant que...
00:34:05 Pas que vous réfutiez, mais
00:34:07 vous freiniez un peu sur cette idée-là.
00:34:09 Alors que, pour moi, c'est pas des films
00:34:11 ouvertement politiques, mais en tout cas,
00:34:13 ils le sont par la manière dont vous filmez l'intime.
00:34:15 En quoi ça vous importe
00:34:17 de filmer l'intime?
00:34:19 Et de filmer du coup,
00:34:21 ça a forcément un impact sur la manière
00:34:23 dont vous écrivez les histoires,
00:34:25 la manière dont vous les filmez.
00:34:27 - J'aime bien que vous ne le disez pas ouvertement,
00:34:29 mais en même temps, je pense que,
00:34:31 en tout cas, ce que j'expliquais au début,
00:34:33 de par le passé de comédienne,
00:34:35 "Mauville rouge", c'est raconter les gens.
00:34:37 C'est principalement ça qui m'a toujours intéressée
00:34:39 à travers le théâtre
00:34:41 et même là, en continuant.
00:34:43 Ce sont les gens qui m'intéressent.
00:34:45 Et j'aime bien, par contre,
00:34:47 que les...
00:34:49 que les acteurs
00:34:51 ne soient pas toujours tout lisses.
00:34:53 Et donc, tu parlais des
00:34:55 fêlures tout à l'heure.
00:34:57 J'aime bien ça aussi.
00:34:59 J'aime bien de voir
00:35:01 des gens qui, tout à coup,
00:35:03 m'interpellent.
00:35:05 - Oui, je pense qu'effectivement,
00:35:07 il y a un geste, mais encore une fois,
00:35:09 ce n'est pas un geste qui est calculé.
00:35:11 C'est peut-être parce que...
00:35:13 Tu sais, j'ai été vraiment surprise
00:35:15 sur "Same comme Sylvain"
00:35:17 que beaucoup de gens me disent
00:35:19 qu'on n'a jamais vu des scènes
00:35:21 d'intimité ou des scènes de sexualité
00:35:23 filmées de cette manière-là.
00:35:25 Après, j'ai dit, "Allez voir les films de Gene Kempion,
00:35:27 calmez-vous."
00:35:29 - Calmez-vous!
00:35:31 - Mais merci.
00:35:33 Non, mais...
00:35:35 C'est vrai qu'en fait,
00:35:37 j'ai dit, "Wow, c'est fou!"
00:35:39 Parce que, encore une fois, malgré moi,
00:35:41 je fais un acte politique, tu sais, de filmer...
00:35:43 Ouais, l'intime...
00:35:45 Ça veut dire qu'il y a encore du chemin à faire.
00:35:47 Il y a encore plein de choses.
00:35:49 Moi, j'étais contente.
00:35:51 Je me suis dit, "Wow, il y a plein de choses
00:35:53 à explorer encore."
00:35:55 Mais c'est vrai que...
00:35:57 De toute façon, en tout cas,
00:35:59 si vous pointez le fait qu'on parle peut-être
00:36:01 de l'intime des femmes,
00:36:03 ou je ne sais pas si c'était le cas...
00:36:05 C'est sûr que comme ça a été un sujet
00:36:07 qui a été peut-être peu traité ou moins traité,
00:36:09 on a encore beaucoup à dire.
00:36:11 Et effectivement, il y a parfois des images
00:36:13 qui brassent à l'intérieur des gens.
00:36:15 Donc, effectivement,
00:36:17 de toute façon,
00:36:19 raconter l'intime des femmes
00:36:21 dans ce qu'elles ont de plus juste,
00:36:23 ou en tout cas dans un regard
00:36:25 qui est moins fantasmé
00:36:27 est forcément un geste nouveau.
00:36:29 Alors, y a-t-il politique?
00:36:31 Je ne sais pas, mais il est nouveau, je pense.
00:36:33 - Il y a cette idée de l'intime des femmes,
00:36:35 et en même temps,
00:36:37 plus ça va, plus vous filmez des hommes.
00:36:39 Je vois que dans Henri,
00:36:41 clairement, il n'y a pas que le personnage du Béthuneau
00:36:43 et le Bonneau, mais là, cet extrait
00:36:45 est une manière de filmer un corps d'homme.
00:36:47 Vous aussi, de plus en plus,
00:36:49 il y a quelque chose qui tend vers ça.
00:36:51 Il y a aussi cette idée,
00:36:53 dans "La fiancière du poète", par exemple,
00:36:55 là, vous filmez très clairement
00:36:57 ce que c'est qu'être un homme aujourd'hui,
00:36:59 selon vous.
00:37:01 Qu'est-ce qui a amené vers cette idée-là,
00:37:03 ce glissement-là de filmer les hommes?
00:37:05 - Moi, je filme quand même beaucoup
00:37:07 de choses qui sont très intimes,
00:37:09 mais je ne sais pas si c'est ça.
00:37:11 - Moi, je filme quand même beaucoup
00:37:13 les femmes en rôle principal, mais...
00:37:15 - Il y a quand même une manière de filmer les hommes.
00:37:17 - Ils sont satellitaires.
00:37:19 Pour une fois, on les met sur le côté.
00:37:21 Mais parce que ça va de part.
00:37:23 On est dans un monde, tu sais...
00:37:25 Oui, c'est vrai,
00:37:27 parce que dans mon court-métrage,
00:37:29 mon seul et unique court-métrage,
00:37:31 il n'y avait que des filles.
00:37:33 Mais parce que moi,
00:37:35 de toute façon,
00:37:37 le féminisme que je prends est un humanisme.
00:37:41 Le féminisme est un humanisme.
00:37:43 Et puis donc, ça va de part aussi
00:37:45 avec la rencontre avec les hommes.
00:37:47 Et j'ai envie aussi de...
00:37:49 Et encore une fois,
00:37:51 ce n'est pas un geste politique,
00:37:53 c'est un geste plutôt inconscient,
00:37:55 mais de ce que j'ai envie de vivre,
00:37:57 de ce que j'ai envie de voir.
00:37:59 Et tout d'un coup, j'ai envie de raconter aussi
00:38:01 la douceur ou l'intime des hommes
00:38:03 que je n'ai pas vu non plus beaucoup.
00:38:05 Parce que peut-être que les hommes
00:38:07 se fantasment en héros
00:38:09 ou qu'ils ne veulent pas trop montrer leur fragilité.
00:38:11 Mais c'est assez beau, hein?
00:38:13 Tu sais, nous, comme femmes,
00:38:15 comme auteurs,
00:38:17 on a eu accès à l'intime des hommes
00:38:19 depuis toujours, tu sais,
00:38:21 parce qu'elle a été déployée
00:38:23 dans la littérature, dans l'art,
00:38:25 dans les médias,
00:38:27 dans la place...
00:38:29 dans le social.
00:38:31 En fait, les hommes ont occupé
00:38:33 beaucoup de choix
00:38:35 et ils ont déployé leur intimité beaucoup.
00:38:37 Vous êtes beaucoup dévoilés, malgré vous,
00:38:39 dans les œuvres.
00:38:41 Les femmes ont eu moins de place.
00:38:43 Et donc, je trouve que
00:38:45 ce qui est intéressant, c'est qu'on a quand même
00:38:47 une connaissance dans l'écriture
00:38:49 que les hommes ont peut-être moins, tu sais,
00:38:51 d'acuité par rapport... Je pense qu'il y a des hommes
00:38:53 qui peuvent très bien le faire, mais qui ont un petit peu moins d'acuité.
00:38:55 Je parlais avec
00:38:57 Olivier Nacache dernièrement
00:38:59 et il m'a dit, il m'a avoué, il m'a dit
00:39:01 qu'Éric et moi, on ne sait pas
00:39:03 écrire des personnages de femmes.
00:39:05 On ne sait pas.
00:39:07 On n'arrive pas à déployer des personnages denses.
00:39:09 Puis il m'a dit la prochaine fois,
00:39:11 je veux que tu lises.
00:39:13 Ils me disent, oui et non,
00:39:15 ça, c'est pas bien.
00:39:17 Mais je trouvais ça assez touchant qu'ils l'admettent,
00:39:19 qu'ils disent
00:39:21 qu'il y a une méconnaissance.
00:39:23 Je pense que nous, si on observe bien,
00:39:25 on a eu la chance quand même de vous entendre
00:39:27 et de vous écouter, de vous lire
00:39:29 et de vous ressentir beaucoup.
00:39:31 - Du coup, j'aimerais qu'on revienne sur "La fiancée du poète"
00:39:37 parce que ce film a la particularité, contrairement
00:39:39 à...
00:39:41 C'est un peu comme Sylvain, vous avez un rôle secondaire,
00:39:43 vous êtes présente, vous avez un rôle principal
00:39:45 et petit à petit, ça glisse sur les hommes.
00:39:47 Et je trouve qu'il y a quelque chose de très, très étonnant
00:39:49 dans ce film-là, sur la manière
00:39:51 dont vous affirmez quelque chose du regard sur les hommes.
00:39:53 Parce que vous montrez des hommes
00:39:55 dans toute leur diversité, y compris de physique,
00:39:57 y compris de sexualité.
00:39:59 Ça dit quelque chose, ça aussi.
00:40:01 Pourquoi ce film-là en particulier ?
00:40:03 Il a glissé vers ça.
00:40:05 - Voulez-vous vous allonger ?
00:40:13 C'est vrai que
00:40:17 dans mon film, il y a beaucoup d'hommes, justement.
00:40:19 C'est partie de l'histoire du scénario
00:40:23 où je voulais avoir autour de moi,
00:40:25 dans cette communauté,
00:40:27 trois hommes
00:40:29 qui étaient un peu comme
00:40:31 des fils que j'aurais pu avoir
00:40:33 ou des petits amants potentiels.
00:40:35 Et mon film se construit
00:40:37 quand même autour des faussaires.
00:40:39 Chaque
00:40:41 homme là-dedans a une manière
00:40:43 d'être double
00:40:45 dans sa vie.
00:40:47 Et donc il y a le plus jeune,
00:40:49 alors c'est des âges différents,
00:40:51 le plus jeune,
00:40:53 qui justement, parce que lui avait
00:40:55 beaucoup d'empathie et beaucoup de douceur,
00:40:57 c'est Thomas Guy,
00:40:59 qui est faussaire,
00:41:01 qui étudie à l'école des beaux-arts.
00:41:03 Grégory Gadebois, lui, il se traversit
00:41:05 la nuit
00:41:07 et il s'habille en robe.
00:41:09 Tout de suite, j'ai pensé à lui.
00:41:11 D'abord, je l'adore comme acteur
00:41:13 et je pense qu'il
00:41:15 aurait beaucoup de finesse
00:41:17 pour avoir de ce rôle.
00:41:19 Et puis il y a Esteban,
00:41:21 qui est l'émigré turc.
00:41:23 Et en même temps,
00:41:25 ils se complètent très bien, ils sont très différents.
00:41:27 Il y a le curé,
00:41:29 qui est William Scheler,
00:41:31 pour sa singularité,
00:41:33 qui se traversit aussi.
00:41:35 J'espère que vous avez vu le film,
00:41:37 sinon je suis en train de tout dévoiler.
00:41:39 Et donc ça s'est plutôt
00:41:43 construit comme ça,
00:41:45 avec des hommes finalement très différents.
00:41:47 Et ma grande
00:41:49 interrogation avant de
00:41:51 tourner, c'est de voir comment
00:41:53 la mayonnaise
00:41:55 prendrait. Est-ce que
00:41:57 cette petite communauté ou cette
00:41:59 famille un peu subversive
00:42:01 va être crédible ? C'était ça
00:42:03 ma grande angoisse.
00:42:05 - Avec quelque chose
00:42:07 pour prolonger sur cette idée de filmer
00:42:09 sur les hommes, qui est l'idée d'un rapport au désir
00:42:11 et d'un rapport à une forme d'érotisme.
00:42:13 Vos films ne sont pas foncièrement
00:42:15 dans une forme d'érotisme, parce qu'on voit très finalement,
00:42:17 dans le vôtre un peu plus quand même,
00:42:19 pas tant que ça la peau, le côté charnelle,
00:42:21 mais il y a quelque chose
00:42:23 d'une sensualité, d'une forme
00:42:25 d'érotisme dans les mouvements.
00:42:27 Votre personnage dans "La fiancée du poète"
00:42:29 assume très clairement
00:42:31 que dans un temps, elle a des désirs,
00:42:33 des envies. Ce n'est pas des choses si courantes qu'on entend
00:42:35 dans des personnages de femmes au cinéma.
00:42:37 Cette idée de dire "oui,
00:42:39 j'ai un désir".
00:42:41 - Et pourtant !
00:42:43 (Rires)
00:42:45 - Évidemment,
00:42:47 ça revient un peu à ce que j'ai dit tout à l'heure.
00:42:49 Mais oui,
00:42:51 on a des désirs, comme tout le monde.
00:42:53 (Rires)
00:42:55 Mais parce que aussi, c'est délicat.
00:42:57 Les personnages féminins,
00:42:59 ils sont... On a une marge
00:43:01 de sympathie
00:43:03 qui est moins large que celle
00:43:05 des hommes. - Sympathie ?
00:43:07 - Oui, je l'avais remarqué
00:43:09 sur la femme de mon frère,
00:43:11 le personnage de
00:43:13 Sophia, le personnage
00:43:15 qu'a interprété Annelisabeth Bossé,
00:43:17 était parfois malmené,
00:43:19 surtout par des critiques masculines
00:43:21 qui la trouvaient
00:43:23 agaçante, ou qui la trouvaient...
00:43:25 Parce qu'elle n'était pas là
00:43:27 pour plaire, en fait. C'était un personnage
00:43:29 qui ne déployait pas,
00:43:31 comme dans "Sème comme Sylvain", le personnage de Sophia,
00:43:33 interprété par Magali Pendurondo,
00:43:35 n'est pas là pour plaire, mais il y a quelque chose de plus
00:43:37 sensuel, de plus
00:43:39 romantique. Là, c'était vraiment un personnage
00:43:41 qui n'en a rien à foutre.
00:43:43 Et c'est des personnages
00:43:45 féminins auxquels on n'est pas tellement
00:43:47 confrontés. Je digresse un peu sur l'histoire
00:43:49 du désir, mais...
00:43:51 Et je trouve que les hommes, ils ont une plus
00:43:53 grande marge. Il y a Bill Murray,
00:43:55 ou je ne sais pas, Paul Giamatti,
00:43:57 dans "Sideways".
00:43:59 Il y a tellement de...
00:44:01 Ou Jean-Pierre Bacry, qui est un excellent
00:44:03 exemple de ça, de ces acteurs
00:44:05 qui se sont formés autour du désagréable
00:44:07 sympathique.
00:44:09 Moi, je ne connais pas
00:44:11 d'actrices
00:44:13 qui ont basé une carrière là-dessus.
00:44:15 Ce n'est pas accepté
00:44:17 socialement qu'une femme ne soit pas
00:44:19 là pour plaire ou pour sourire.
00:44:21 Et c'est vrai que quand on a
00:44:23 des personnages féminins qui
00:44:25 changent un peu la donne,
00:44:27 et que ça peut être aussi des personnages féminins
00:44:29 qui peuvent aller
00:44:31 vers leur désir, montrer qu'ils ont
00:44:33 le désir, donc qu'ils sont des personnages
00:44:35 actifs, et non pas
00:44:37 juste fantasmés ou passifs,
00:44:39 encore une fois, ça peut déstabiliser
00:44:41 chez certains
00:44:43 spectateurs.
00:44:45 - Dans "La fiancée du poète", votre personnage
00:44:47 va dans ce sens-là.
00:44:49 C'est clairement quelqu'un qui n'est pas là pour plaire,
00:44:51 qui n'est pas forcément là pour faire rire,
00:44:53 et qui est juste là pour
00:44:55 retrouver quelque chose, retrouver un sentiment,
00:44:57 quelque chose. Je suppose que là-dessus,
00:44:59 au moins, vous vous retrouvez.
00:45:01 - Oui, mon personnage,
00:45:03 je suis quand même...
00:45:05 J'ai l'âge que j'ai, 70.
00:45:07 Je ne suis pas vraiment... Quand je propose
00:45:11 au truc de m'épouser,
00:45:13 il tire plutôt la gueule.
00:45:15 En même temps, je n'ai pas pensé
00:45:21 à cette carte-là.
00:45:23 Une fois, il y a eu une réaction
00:45:25 de quelqu'un
00:45:27 qui m'a dit "Mais pourquoi
00:45:29 on ne montre pas l'acte sexuel
00:45:31 de... Je n'aurais pas
00:45:33 l'intérêt du tout".
00:45:35 J'ai fermé la porte rapidement.
00:45:37 Je l'ai fait rentrer, puis je ferme la porte.
00:45:39 Je n'ai pas l'intérêt, mais en même temps,
00:45:43 de marquer son désir,
00:45:45 effectivement. Et moi, j'aime beaucoup,
00:45:47 dans le film, à un moment donné, ils sont devant
00:45:49 le tableau
00:45:51 de Félicien Ropps, le Pornographes.
00:45:53 C'est une femme avec les yeux
00:45:55 bandés, tirée par un cochon,
00:45:57 avec des anges. Je dis, il connaît bien les femmes.
00:45:59 Le Félicien, tiré par un
00:46:01 cochon, des anges dans la tête.
00:46:03 Et lui, il répond ce que moi, j'aime beaucoup aussi.
00:46:05 Peut-être que
00:46:07 les cochons aussi ont des anges dans la tête.
00:46:09 Ce que moi, j'aime bien, parce que ça remet
00:46:11 un peu les pendules à l'heure, par rapport
00:46:13 à, pour le moment, le
00:46:15 contexte qui est... C'est bien
00:46:17 parce qu'il y a une parole
00:46:19 qui s'exprime,
00:46:21 mais que je trouve
00:46:23 parfois un peu violente par rapport
00:46:25 aux hommes.
00:46:27 Et parfois, pas tout à fait juste.
00:46:29 Voilà.
00:46:31 Rantaise.
00:46:33 - Le corollaire
00:46:35 du "Désir et tout ça", c'est le rapport
00:46:37 aux sentiments amoureux qui baignent quand même
00:46:39 vos films. Est-ce que, quelque part,
00:46:41 vous diriez que, finalement, ce qui guide vos films,
00:46:43 c'est une forme de romantisme
00:46:45 ou d'envie de romantisme ?
00:46:47 Parce que, même s'ils sont des films qui sont
00:46:49 francs dans ce qu'ils montrent, dans la période,
00:46:51 dans l'époque, dans le rapport aux gens,
00:46:53 moi, je les trouvais extrêmement romantiques, quelque part.
00:46:55 - Vous m'avez démasqué.
00:46:57 - OK.
00:46:59 Oui, oui, mais moi, je suis une grosse romantique
00:47:01 qui se cache
00:47:03 derrière deux, trois blagues, mais
00:47:05 qui ne l'est pas.
00:47:07 Ah, il y a quelqu'un qui ne l'est pas et quelqu'un sur Halluciné
00:47:09 qui fait une critique. Elle était là, "L'amour, l'amour, l'amour, l'amour."
00:47:11 Ça commence comme ça. "L'amour, l'amour, l'amour, l'amour,
00:47:13 le sexe, le sexe, le sexe, le sexe.
00:47:15 On a soupé de ça."
00:47:17 Je me suis dit, bon, elle n'est pas romantique.
00:47:19 Mais oui, oui, il y a une forme
00:47:21 de romance,
00:47:23 de mélancolie.
00:47:25 - Oui, bien sûr, très assumée.
00:47:27 - Oui, chez moi,
00:47:29 chez moi aussi.
00:47:31 Des fois, qui s'expriment parfois
00:47:33 différemment parce qu'au début,
00:47:35 en tout cas dans La fiancée du poète,
00:47:37 je pense que quand elle avait
00:47:39 18 ans, elle a suivi le poète,
00:47:41 mais par sentiment amoureux.
00:47:43 J'ai beaucoup de mélancolie
00:47:49 et de romantisme.
00:47:53 - On va passer à quelque chose de plus
00:47:55 pratique avec les deux extraits suivants,
00:47:57 qui ont une manière de comparer
00:47:59 vos manières de filmer,
00:48:01 notamment vos manières de monter.
00:48:03 Ce sont des extraits, je vous préviens, qui sont totalement
00:48:05 décorrélés à nouveau des films,
00:48:07 mais ce sont des scènes qui se ressemblent. Vous allez voir pourquoi.
00:48:09 (soupir)
00:48:11 - Oui?
00:48:21 - Je t'avertis, ça va payer le gaz.
00:48:31 - Je pense que c'est légal. Il me semble qu'après 14 ans,
00:48:33 on peut coucher avec n'importe qui.
00:48:35 Mais y était-tu consentant?
00:48:37 - J'ai demandé à Doudou, mais je sais pas si ça rentre
00:48:39 dans le droit de la famille, par exemple.
00:48:41 (sifflement)
00:48:43 Il est très en demande, ces temps-ci.
00:48:45 C'est pas urgent, ça se peut qu'il te réponde pas tout de suite.
00:48:47 - La balle est dans leur camp.
00:48:49 Ils travaillent tellement fort. Même moi, je le vois pas.
00:48:51 Heureusement qu'on a gardé nos samedis soirs.
00:48:53 Si tu vas en cours avec ça...
00:48:55 - Non, mais je veux pas te faire peur avec ça. Je pense pas.
00:48:57 - Rénov', rénov', rénov', rénov'.
00:48:59 - Y a 5 G dans la douche.
00:49:01 - 5 Divers Tellers.
00:49:03 T'sais, je les avais montrées.
00:49:05 Je les avais déjà montrées.
00:49:07 C'est très puissant, là.
00:49:09 (bruit de pet)
00:49:11 Mon avis, puisque je parle déjà espagnol,
00:49:13 je pensais que ça allait me mélanger.
00:49:15 (en espagnol)
00:49:17 (en espagnol)
00:49:19 (en espagnol)
00:49:21 - T'as même pas ça, voyager.
00:49:23 - T'as couché avec un mineur.
00:49:25 - C'est pas confirmé.
00:49:27 - C'est pas confirmé parce que tu te souviens de rien.
00:49:29 (chantant)
00:49:31 (chantant)
00:49:33 (chantant)
00:49:35 - Je suis vraiment obligée d'aller là-bas.
00:49:37 - Oui, c'est ton ami.
00:49:39 Ça lui ferait beaucoup de peine que tu sois pas là.
00:49:41 C'était la raison pour laquelle je viens de te sauver.
00:49:43 Il faut peut-être que t'arrêtes de boire.
00:49:45 T'arrives souvent à ça.
00:49:47 En tout cas, je dis ça, je dis rien.
00:49:49 - C'est pas mon ami, là. C'est un résidu de relation.
00:49:51 (bruit de voiture)
00:49:53 (bruit de voiture)
00:49:55 (musique douce)
00:49:57 (musique douce)
00:49:59 (musique douce)
00:50:01 ...
00:50:29 -Comment va-t-il ?
00:50:30 ...
00:50:43 ...
00:51:01 -Donc, on a 2 scènes de voiture avec 2 personnes dedans,
00:51:05 mais qui sont formellement radicalement opposées.
00:51:09 Comment est-ce que vous travaillez l'une et l'autre,
00:51:10 le montage, le découpage ?
00:51:13 Parce que là, c'est vraiment 2...
00:51:14 C'est des scènes qui sont presque le contre-exemple l'une de l'autre
00:51:17 en termes de forme.
00:51:18 ...
00:51:25 -Oui, ben, moi, j'ai un...
00:51:27 -Surtout, je retourne... Dans votre cas,
00:51:29 des scènes de dialogue qui sont très découpées
00:51:32 en champs contre champs en montage,
00:51:33 il y en a assez souvent.
00:51:35 C'est pas un défaut, loin de là,
00:51:37 mais ça amène une dynamique qui, quelque part,
00:51:41 devient presque une image de marque ou une forme de style,
00:51:43 en tout cas, chez vous, cette idée d'être dans un rythme
00:51:45 très particulier.
00:51:46 -Imaginez mon cerveau.
00:51:48 ...
00:51:51 Oui, après, j'ai quand même évolué parce que, bon...
00:51:54 Alors, ça, c'est le court-métrage que j'ai fait il y a 10 ans.
00:51:58 Et je l'ai monté avec Xavier Dolan.
00:52:01 Donc...
00:52:03 Et à l'époque, on était vraiment très inspirés,
00:52:08 notamment par "Husbands and Wives" de Woody Allen,
00:52:12 qui est un film très volumineux
00:52:15 et avec des jump cuts comme ça,
00:52:17 puis on adorait ce style-là.
00:52:20 Donc, j'étais très inspirée par ça pour le montage.
00:52:23 Après, j'ai continué, dans "La femme de mon frère",
00:52:24 effectivement, à travailler beaucoup
00:52:26 avec le jump cut et tout.
00:52:27 Puis après, j'ai un peu abandonné cette formule-là
00:52:31 pour les deux derniers films.
00:52:32 Donc, je me suis un peu adoucie au niveau du montage aussi.
00:52:36 Donc, ça évolue aussi avec un rythme intérieur
00:52:39 puis une manière de raconter des histoires, en fait.
00:52:40 Je dis pas que je ne reviendrai pas à cette forme-là,
00:52:43 mais pour moi, maintenant, en ayant exploré beaucoup ça,
00:52:47 dans mon cinéma, moi, c'est limite, je trouve.
00:52:52 Ça me permettait, en fait, aussi de laisser tourner ma caméra
00:52:54 avec les acteurs, puis de pouvoir regarder juste des pluchés,
00:52:57 en fait, le meilleur de ce qui...
00:53:00 Je préfère répéter une phrase quatre fois,
00:53:02 la même phrase à l'acteur, en fait,
00:53:04 en sachant qu'en montage, j'allais faire du jump cut.
00:53:08 Donc, pour ceux qui ne sont pas familiers,
00:53:10 c'est vraiment...
00:53:11 L'idée, par exemple, avec ce personnage-là,
00:53:13 c'est que je fais rouler la caméra,
00:53:15 puis en fait, elle fait son texte et tout et tout.
00:53:17 Et puis quand elle a fini, c'était vraiment un monologue qu'elle faisait.
00:53:20 Puis donc, parfois, je faisais redire dans la même prise,
00:53:23 sans couper, une phrase.
00:53:25 Je voulais qu'elle dise une phrase sur tel ton, tout ça.
00:53:29 Puis je pouvais faire, je sais pas, mettons, cinq prises de ça.
00:53:32 Puis après, moi, j'échantillonne les meilleurs moments des cinq prises
00:53:36 dans une liberté, parce que c'est du jump cut.
00:53:38 Donc, je coupe l'image vraiment de manière grossière,
00:53:41 puis j'en accole une autre par-dessus,
00:53:43 ce qui donne ce rythme frénétique.
00:53:46 Voilà, mais après, c'était vraiment une façon de faire à ce moment-là.
00:53:50 Donc, effectivement, dans le découpage,
00:53:53 ça faisait que je pouvais un peu plus...
00:53:56 Être un peu plus... Pas légère sur le découpage,
00:53:59 mais maintenant que j'utilise moins cette technique-là
00:54:02 pour faire un montage, il faut que je sois plus sourde,
00:54:04 mais je suis plus sur la longueur, en fait.
00:54:06 Donc, je fais des... C'est un peu plus, entre guillemets,
00:54:09 classique comme manière de découper le film avant le tournage.
00:54:12 - Quant à vous, Yolande, le montage, ça se passe comment ?
00:54:16 - Avec l'aide d'un très bon monteur. - C'est mieux.
00:54:20 - Oui, c'est mieux.
00:54:21 Et puis, c'est toujours curieux de mettre bout à bout
00:54:26 ce qu'on a imaginé.
00:54:28 Moi, je suis plus, effectivement,
00:54:31 parfois dans la lenteur et dans...
00:54:33 à laisser filer.
00:54:35 Alors, ça dépend des fois des choses
00:54:38 et de chaque scène, parce que...
00:54:41 Je sais, par exemple, la scène pour moi,
00:54:44 avec William Schiller qui joue le curé,
00:54:46 il n'avait jamais joué auparavant.
00:54:49 Donc, je sais que là...
00:54:51 D'abord, je voulais la filmer comme dans un petit théâtre,
00:54:54 elle filmait entre deux arbres,
00:54:56 d'une manière très fixe, de loin.
00:54:59 Et en champ contre champ,
00:55:02 en me disant que je voulais pouvoir me retourner.
00:55:07 Sinon, ça dépend des scènes.
00:55:10 Il y a des scènes que j'aime.
00:55:11 J'adore, moi, les tout petits personnages
00:55:13 perdus dans des immensités.
00:55:15 C'est quelque chose que j'adore.
00:55:17 Mais je vous avoue que je ne suis pas cinéphile
00:55:22 et que je n'ai pas non plus fait d'études de cinéma.
00:55:27 En tout cas, moi non plus.
00:55:31 Donc, j'ai toujours un peu senti comme une usurpatrice, des fois,
00:55:36 en me disant qu'on a l'aide quand même
00:55:40 du chef opérateur pour la manière de filmer les choses.
00:55:43 Je pense que la préparation est très importante
00:55:46 pour savoir comment on va filmer les choses,
00:55:50 à quelle distance sont les comédiens, à peu près,
00:55:54 dans quel lieu ça va se passer.
00:55:57 Après, au montage, tout ça, ça bouge aussi.
00:56:02 Je trouve qu'ils sont vachement doués quand même,
00:56:06 dans les propositions.
00:56:07 - C'est intéressant, vous parlez des termes d'usurpatrice
00:56:09 avec un film qui parle des faussaires,
00:56:12 mais qui parle de l'importance des faussaires,
00:56:14 de la nécessité d'avoir des faussaires dans la vie actuelle.
00:56:16 Est-ce que vous avez l'impression, aujourd'hui, encore,
00:56:18 d'être dans une forme, peut-être pour revenir sur cette idée
00:56:20 du rapport homme-femme dans le monde du cinéma,
00:56:23 d'être quelque part encore une forme,
00:56:25 dans un sentiment de ne pas être à votre place,
00:56:27 ou d'un syndrome d'imposture ?
00:56:32 - Non. - Tant mieux.
00:56:34 - Non, parce que...
00:56:38 Je l'étais peut-être un petit peu au début,
00:56:42 quand j'ai fait le court-métrage,
00:56:43 puis que ma chef-opératrice, Josée Daim,
00:56:46 m'a demandé dans quel format je voulais le faire,
00:56:47 puis j'ai dit dans le format normal.
00:56:49 J'étais même pas capable de dire un 85.
00:56:53 Mais après, je pense pas...
00:56:56 C'est ça l'avantage de l'art, ou l'inconvénient,
00:56:58 c'est qu'il n'y a pas une école qui nous apprend à créer.
00:57:01 Il y a des écoles qui nous apprennent des techniques,
00:57:03 mais la créativité,
00:57:04 Xavier Dolin n'a pas fait d'école de cinéma,
00:57:07 ni de théâtre, ni de cinéma,
00:57:09 mais c'est devenu un des cinéastes majeurs de notre cinéma.
00:57:12 Donc malheureusement, c'est pas garanti
00:57:15 que de faire une école va nous faire des grands artistes,
00:57:19 au contraire.
00:57:20 Et voilà, après...
00:57:25 C'est-à-dire que c'est pas de savoir
00:57:27 est-ce que j'ai ma place ou pas dans ce métier-là,
00:57:28 c'est juste de dire, ben moi, c'est le métier
00:57:30 que j'ai envie de faire, puis...
00:57:34 Donc il n'y a pas vraiment cette notion d'usurpateur ou pas,
00:57:39 ou de...
00:57:41 En tout cas, elle est pas...
00:57:44 Elle est pas dans mon esprit, non.
00:57:47 - Moi, la posture, je trouve ça baron.
00:57:50 Je trouve ça marrant, parce qu'il y a très longtemps,
00:57:54 ça donne aussi quelque chose, pour moi, de culotté,
00:58:00 de me dire, je suis là,
00:58:02 c'est peut-être pas vraiment ma place, mais j'y vais.
00:58:05 Je me rappelle, il y a très longtemps,
00:58:06 quand j'avais décidé d'être comédienne,
00:58:08 j'étais jeune, j'avais le choix, j'hésitais entre plusieurs choses,
00:58:12 puis je me suis dit, je vais être comédienne.
00:58:14 Et du jour au lendemain, je me suis dit, je suis comédienne.
00:58:18 Et effectivement, après, je me pose pas la question,
00:58:21 mais quand même, il y a des fois, je me suis retrouvée
00:58:23 avec mon spectacle, "Sulverston", j'ai dit,
00:58:26 "Mais t'es folle, c'est pas pour toi, t'es dingue."
00:58:28 Et en même temps, ça me donne une espèce de petite folie
00:58:33 que j'aime bien.
00:58:34 Et le cinéma, c'est pareil, en fait.
00:58:37 La première fois, j'y étais avec Gilles Porte,
00:58:40 pour "Quand la mer monte",
00:58:41 mais je pense que depuis,
00:58:44 je me dis pas que c'est pas ma place,
00:58:47 mais ce culot-là m'amuse.
00:58:51 Je me dis, pourquoi pas, après tout.
00:58:55 Et en fait, je m'amuse à ma place,
00:58:57 mais ce sentiment d'imposture m'amuse.
00:58:59 -Est-ce que ça veut dire, parce que vous parliez de vos spectacles,
00:59:01 au premier spectacle, en fait, il y avait un masque.
00:59:03 Il y avait vraiment un côté, un art du masque.
00:59:05 C'était les personnages qui étaient grimés derrière des masques.
00:59:07 Est-ce que faire des films, c'est une manière de s'en débarrasser ?
00:59:10 De devenir réalisatrice, c'est une manière de s'en débarrasser
00:59:12 pour pouvoir assumer ce qu'on a à dire, ce qu'on a à montrer ?
00:59:16 -Déjà, je m'en suis débarrassée, parce que c'était au tout début,
00:59:18 d'être intimide, je n'osais pas parler.
00:59:20 Mais le masque m'a donné une liberté de parole.
00:59:23 Après, j'ai longtemps travaillé comme comédienne sans masque,
00:59:28 en me disant, mais c'est un chemin.
00:59:32 Et après, longtemps après, faire des films,
00:59:36 c'est une manière de raconter des histoires de nouveau.
00:59:39 Donc...
00:59:45 Je n'avais plus besoin de masque.
00:59:46 -Je voulais juste redire que Godard, il dit que faire des films,
00:59:51 c'est une grande fraude ou c'est la plus grande fraude.
00:59:53 Donc, on est tous des fraudeurs, de toute manière.
00:59:56 Des fraudeurs.
00:59:58 Moi, en tout cas, j'ai l'impression que oui,
01:00:01 mais c'est l'écriture, surtout,
01:00:02 que je dis toujours que c'est un acte de honte.
01:00:04 Donc, pour bien écrire, il faut être dans une forme de sincérité.
01:00:08 Et le métier d'acteur...
01:00:12 Je pense qu'il peut être un métier sincère,
01:00:15 parce qu'on va travailler quand même avec des choses
01:00:17 qui sont profondes en nous et qui sont parfois, malgré nous,
01:00:20 qui sortent, surtout, par exemple, au cinéma,
01:00:22 quand on filme un acteur,
01:00:23 il sait pas qu'on lui vole certaines choses
01:00:26 qu'il n'aperçoit même pas de lui-même.
01:00:28 Mais c'est plus inconscient, j'ai l'impression.
01:00:31 Et voilà, moi, j'ai le sentiment
01:00:35 que je me mets beaucoup plus à nu.
01:00:37 Puis je dis toujours que si on veut connaître la personnalité
01:00:39 d'un cinéaste, on a juste à regarder ses films,
01:00:41 on n'a pas besoin de le rencontrer.
01:00:43 On est à peu près sûr de rencontrer la personne
01:00:46 qu'on a dans la tête selon les images qu'il nous envoie,
01:00:51 sa vision du monde, son rythme, sa manière de parler, d'être, tout ça.
01:00:57 Donc, oui, ça dévoile beaucoup de...
01:01:00 En tout cas, moi, je trouve que c'est à la fois
01:01:03 un métier qui me renforce,
01:01:05 parce que je monte ma forme,
01:01:07 parce que je monte ma fragilité,
01:01:10 puis c'est un métier qui me fragilise
01:01:12 parce que je monte ma fragilité.
01:01:13 - Cette idée de mise à nu et de sincérité,
01:01:17 elle joue aussi sur...
01:01:18 Vous avez fait des films différents,
01:01:20 mais vous avez fait des films où vous jouez,
01:01:22 des films où vous ne jouez pas,
01:01:23 des films où vous ne faites qu'apparaître.
01:01:25 Qu'est-ce que ça change?
01:01:26 Qu'est-ce que c'est, quand on a été actrice, de se filmer?
01:01:29 Qu'est-ce que ça change?
01:01:32 - Moi, j'ai pas de grand intérêt sur moi,
01:01:36 donc j'ai pas commencé ce métier-là.
01:01:39 Il y a des acteurs qui vraiment
01:01:42 commencent le métier de cinéaste
01:01:43 pour vraiment pouvoir soit s'écrire des rôles
01:01:47 dont ils souhaiteraient jouer ce type de rôle,
01:01:50 mais moi, le moteur n'était pas celui du jeu
01:01:52 quand j'ai voulu réaliser.
01:01:55 Donc, je fais une apparition très symbolique
01:01:58 dans "La femme de mon frère" à la fin.
01:02:00 Je ne joue pas dans quelqu'un d'extraordinaire.
01:02:02 - Oui, mais dans "Baby-sitter", par exemple.
01:02:04 - Oui, dans "Baby-sitter", c'est un peu comme...
01:02:08 Comment dire?
01:02:10 Ce scénario-là, je l'avais dans les mains depuis un an
01:02:13 et je ne pensais pas jouer le rôle principal.
01:02:15 Puis c'est l'auteur...
01:02:16 Parce que je ne l'ai pas écrit, en fait.
01:02:17 C'est Catherine Léger qui l'a écrit.
01:02:19 Et à un moment donné, elle m'a écrit avec le producteur
01:02:23 et puis ils m'ont dit,
01:02:24 ils m'ont dit que ce serait chouette
01:02:25 que tu joues le personnage de Nadine.
01:02:28 Qu'est-ce que tu en penses?
01:02:29 Puis donc, j'ai dû relire le scénario en réfléchissant
01:02:32 et puis finalement, je me suis embauchée.
01:02:35 Je trouvais que c'était payant, que ça faisait...
01:02:37 Ça doublait les salaires.
01:02:39 Comme j'avais des travaux à faire à la maison.
01:02:42 Je me suis dit pourquoi pas.
01:02:43 Non, je l'ai fait parce que justement,
01:02:45 ce n'était pas mon écriture.
01:02:46 Donc, je me suis dit...
01:02:47 En fait, ça ne m'intéresse pas quand c'est mon écriture,
01:02:49 quoique j'ai un petit rôle.
01:02:50 J'ai fait un petit rôle dans "Sam comme Samantha",
01:02:53 mais je ne ferai jamais le rôle principal
01:02:54 parce que je trouve que ce qui est très beau,
01:02:55 c'est d'écrire des personnages.
01:02:56 Puis surtout, souvent, j'écris des alter-égos
01:02:59 ou en tout cas des personnages qui sont
01:03:02 un peu dans mes préoccupations, dans mon âge.
01:03:04 Puis je trouve que si c'est moi qui l'interprète,
01:03:06 c'est comme si je suis au degré zéro de l'écriture.
01:03:08 Puis en le passant, des actrices qui sont...
01:03:10 Des femmes que j'admire,
01:03:11 que je trouve vraiment plus intéressantes
01:03:12 et plus cinégéniques et profondes que moi à l'écran,
01:03:17 j'ai vraiment beaucoup plus de plaisir, en fait,
01:03:19 à voir ce personnage-là se déployer.
01:03:22 Mais...
01:03:23 Donc, ce n'est pas...
01:03:25 Ce n'est pas une erreur de parcours, "Baby-sitter",
01:03:27 mais je voulais tester.
01:03:29 Je me disais qu'est-ce que c'est d'être acteur
01:03:31 dans ses propres films, de diriger les autres,
01:03:33 quel exercice...
01:03:34 Qu'est-ce que ça demande, cérébralement?
01:03:39 Puis moi, je trouve ça vraiment épuisant.
01:03:41 Je ne sais pas comment on fait, en fait.
01:03:44 Je trouve ça...
01:03:45 - Surtout que sur "La fiancée du poète", pour le coup,
01:03:48 vous avez vraiment le rôle...
01:03:49 C'était déjà aussi le cas dans "Quand la mer monte",
01:03:51 mais là, le film démarre sur vous
01:03:53 et peu à peu glisse sur cette communauté d'hommes.
01:03:56 Mais qu'est-ce qui a fait le choix, votre choix,
01:03:59 de jouer ce personnage-là?
01:04:01 - Au départ, moi, en tout cas,
01:04:03 je n'ai pas choisi de faire un film pour me donner un rôle.
01:04:07 Mais, par exemple, dans "La fiancée",
01:04:09 je me suis clairement fait plaisir.
01:04:11 Ça m'a amusé.
01:04:13 Après, je me pose la question, comment on fait?
01:04:16 Parce que dans "Quand la mer monte",
01:04:18 on était deux pour le faire,
01:04:20 en même temps, j'étais à l'écriture,
01:04:22 et ce rôle, le raconter un peu, quand même,
01:04:24 une histoire vécue.
01:04:26 Mais au moment de tourner, je me dis,
01:04:29 "C'est qui, ce personnage?"
01:04:30 J'ai eu très peur, en fait.
01:04:32 Et ici, "La fiancée",
01:04:34 je me suis fait plaisir,
01:04:36 mais je ne l'ai pas écrit pour me faire plaisir.
01:04:39 C'est un rôle aussi...
01:04:41 Après, se poser la question, surtout, comment on fait?
01:04:45 Et moi, je considère aussi
01:04:47 que le cinéma, c'est une forme d'artisanat.
01:04:51 Donc on est quand même...
01:04:53 Tout un...
01:04:55 Pour moi, un film se fait grâce,
01:04:58 à l'aide de toute une équipe.
01:04:59 Et il y a les yeux de toute cette équipe.
01:05:03 Il y a la chef opératrice, le preneur de son,
01:05:06 qui est le premier à entendre les choses.
01:05:08 J'avais hésité à prendre quelqu'un qui était là
01:05:11 pour diriger le travail d'acteur.
01:05:14 Alors, il était là pour moi.
01:05:17 Après, je me dis,
01:05:18 je me désaisis un peu de mon film si je fais ça.
01:05:21 Donc je me suis dit, "Non, on va faire comme ça."
01:05:25 Mais je ne vais jamais voir au combo comment je fais,
01:05:29 parce que je veux jouer avec mon ventre, pas avec ma tête.
01:05:32 Et effectivement, au montage, des fois,
01:05:35 j'ai un peu des surprises.
01:05:37 "J'aurais quand même dû faire ça. Pourquoi j'ai pas fait ça?"
01:05:40 C'est le temps des regrets qu'on a souvent au montage.
01:05:44 Et alors, il y a ma fille qui escrite.
01:05:46 Mais il y a l'aide de plein de gens autour,
01:05:50 quand même, qui sont là
01:05:52 et qui sont les premiers spectateurs.
01:05:55 Parce que le jeu avec les autres aussi,
01:05:56 je vais pas dire aux acteurs que je choisis
01:05:59 comment ils doivent faire.
01:06:01 Moi-même, j'ai envie de me laisser surprendre par eux.
01:06:04 Donc il y a une part d'inconnue aussi.
01:06:07 Et moi, j'aime bien cette part-là,
01:06:10 de jouer...
01:06:12 Je pense que vraiment,
01:06:15 quand ça va dans une mauvaise direction,
01:06:17 c'est pas ça que j'ai voulu dire,
01:06:19 mais je pense que ça s'est pas passé...
01:06:22 Si, une fois, en fait.
01:06:24 Dans "La fiancée",
01:06:27 je pensais que mon intention n'était pas bonne
01:06:30 avec Grégory,
01:06:35 mais je lui ai dit...
01:06:37 En fait, il comprenait pas ce que je voulais dire.
01:06:39 Et puis au montage, je lui ai dit, "C'est très bien ce qu'il fait."
01:06:42 Et...
01:06:45 Voilà. Moi, je pense beaucoup à l'artisanat.
01:06:48 Tu vois, j'entendais ce que tu expliquais tout à l'heure.
01:06:51 Je vais recommencer plusieurs fois.
01:06:53 Des fois, j'aime bien diriger comme ça aussi.
01:06:55 Moi, j'ai des gens, tu vois, de recommencer,
01:06:58 de recommencer la scène.
01:07:00 Tu vois, je la reprends par moi-même
01:07:03 parce que je me dis, peut-être autre chose.
01:07:05 En même temps, quand on est comédien,
01:07:08 il y a quelque chose qui nous dépasse, qu'on ne peut pas contrôler.
01:07:12 Et il y a des fois, je me dis, "Tiens, là, c'est bien ce que je fais.
01:07:15 Je suis contente."
01:07:16 À côté, je dis, "Là, j'aime pas du tout."
01:07:18 Et c'est à côté que c'est intéressant.
01:07:19 Parce qu'il y a quelque chose qui nous dépasse,
01:07:22 qu'on ne peut pas, qu'on vient nous voler quelque part.
01:07:25 Et c'est toujours très étrange, ces choses-là.
01:07:29 Mais par exemple, à la mise en scène même,
01:07:31 il y a des petites choses qu'au montage...
01:07:35 - Quoi, par exemple ?
01:07:36 - Eh bien, par exemple, dans "La fiancée du poète",
01:07:40 quand on regarde le faux,
01:07:45 le Félicia Rops,
01:07:47 et Méraille dit,
01:07:50 "Sans les faussaires, la vie serait vraiment triste."
01:07:52 Le petit Thomas Guy se tourne vers elle
01:07:56 et elle dit, "Paul Valéry, c'est une phrase de Paul Valéry."
01:07:59 Et alors, je regrette que tout ne se soit pas tourné.
01:08:02 En fait, pour faire des trucs un peu chorales,
01:08:04 c'est une fable, mon histoire.
01:08:06 Et un petit sourire,
01:08:08 parce que je rends les faussaires joyeux.
01:08:11 Voilà. C'est des petites choses comme ça.
01:08:15 - Alors, puisque vous parlez de fables, ça tombe bien,
01:08:16 on va y venir avec les deux extraits suivants.
01:08:18 Je suis un peu désolé pour vous, mais il y a un extrait de "Baby-sitter".
01:08:21 "Baby-sitter".
01:08:26 "Le temps de vie est très court pour chacun.
01:08:30 "Alors, retournez-vous,
01:08:38 "en flamant, en brûlant,
01:08:41 "en feu, retournez-vous en haut.
01:08:46 "Le monde restera au monde,
01:08:49 "même si la terre reste au ciel.
01:08:53 "Le monde reste au monde,
01:09:02 "même si la terre reste au ciel.
01:09:07 "Au monde reste au ciel."
01:09:11 (Bruit de la mer)
01:09:15 (Bruit de la mer)
01:09:18 (Bruit de la mer)
01:09:21 (Bruit de la mer)
01:09:24 (Bruit de la mer)
01:09:27 (Bruit de la mer)
01:09:30 (Bruit de la mer)
01:09:33 (Bruit de la mer)
01:09:37 (Bruit de la mer)
01:09:40 (Bruit de la mer)
01:09:43 (Applaudissements)
01:09:46 -L'extrait de "Baby-sitter",
01:09:48 celui-ci, il ne ressemble pas à ce qu'il reste du film.
01:09:51 Pour moi, c'est un "Marie Poppins" qui parle de cul.
01:09:54 Pour ceux qui ne l'auraient pas vu, vous comprenez pourquoi.
01:09:57 Mais ça pose la question, ces deux extraits-là,
01:10:01 de votre rapport à l'imaginaire,
01:10:03 dans la mesure où vous faites des films
01:10:05 qui ont une vraie réalité des gens dont ils parlent,
01:10:08 qui parlent vraiment de quelque chose de très concret,
01:10:10 mais qui pourtant s'autorisent à un imaginaire, à un poétique.
01:10:13 J'aurais très bien pu le prendre, mais on n'a pas pu le récupérer,
01:10:15 et on a des extraits de "La fiancée du poète" à la fin,
01:10:17 où il y a aussi cette brume.
01:10:19 Il y a des plans très, très beaux à la fin,
01:10:20 où il y a ce bateau qui part dans la brume,
01:10:22 où t'entends des apparitions dans la brume.
01:10:24 Mais c'est quoi, votre rapport à l'imaginaire
01:10:26 et en quoi c'est nécessaire, ou au poétique,
01:10:28 parce que forcément, "La fiancée du poète", on est en plein dedans,
01:10:31 cette nécessité de, quelque part dans vos films,
01:10:35 de les rattacher à un imaginaire,
01:10:38 à quelque chose qui sorte du réalisme.
01:10:40 Parce que vos personnages sont réalistes,
01:10:42 mais vos films ne le sont pas forcément tout le temps
01:10:44 dans un terme formel.
01:10:46 - Moi, c'est vraiment...
01:10:48 En fait, il y a plein de réflexions qui me sont apparues
01:10:52 dans les dernières années,
01:10:53 mais c'est surtout avec la multiplication de l'image.
01:10:57 En fait, n'importe qui peut produire de l'image aujourd'hui
01:11:01 avec son téléphone.
01:11:02 On n'a qu'à le sortir, on filme.
01:11:05 Donc on a accès nous-mêmes, on a cette espèce de...
01:11:08 On photographie, ou bien on va sur les réseaux sociaux,
01:11:13 ou on regarde.
01:11:14 Donc on est toujours bombardés d'images.
01:11:17 Et donc notre attention aussi, elle s'est amenuée.
01:11:21 Et je me demande toujours, en fait,
01:11:24 et c'est la question du cinéma, c'est...
01:11:26 Qu'est-ce qui appartient au cinéma?
01:11:28 Qu'est-ce que c'est l'image cinématographique?
01:11:30 Pourquoi on se dit que ça, c'est une image de cinéma?
01:11:33 C'est même pas une image de série télé ou de...
01:11:36 Non, ça appartient vraiment au cinéma.
01:11:40 Donc...
01:11:41 Puis je trouve qu'il y a un rythme, justement,
01:11:44 quand je fais des incursions dans mon cinéma,
01:11:46 de ces moments-là, un peu plus...
01:11:48 En fait, c'est un peu comme...
01:11:54 C'est lié aux rêves, j'ai l'impression.
01:11:57 C'est comme ça que je le nommerais le mieux.
01:11:59 C'est quand un cinéaste, on est capable de projeter des...
01:12:04 Comme si c'était vraiment des rêves.
01:12:06 Évidemment, le chef de file de ça, c'était Fellini,
01:12:10 mais on peut penser à Buñuel,
01:12:12 on peut penser à toutes sortes de cinéastes comme ça,
01:12:16 Sorrentino, maintenant,
01:12:18 ou Alice Rohrbacher, que j'aime beaucoup,
01:12:21 où ils ont un...
01:12:23 Ouais, c'est touché aux rêves, en fait.
01:12:26 Peut-être que ça vient de là, la liberté, en fait.
01:12:30 J'aime bien ce thème que tu emploies, d'incursion,
01:12:35 pour moi aussi,
01:12:38 parce que je parlais tout à l'heure d'une autre manière
01:12:41 de pouvoir raconter les choses,
01:12:43 où c'est pas forcément réaliste,
01:12:46 la manière de les montrer.
01:12:48 Moi, je me suis amusée avec, par exemple,
01:12:51 la sortie de la mairie,
01:12:54 où il y a tous les gens qui reviennent en file indienne
01:12:58 pour aller au mariage,
01:13:01 sur la voie de Hallage.
01:13:04 J'ai pensé à des images de Pierre-Henri Bauge
01:13:07 qui m'avaient marquée avant.
01:13:09 Et...
01:13:11 Et puis, tout à coup, après,
01:13:15 sur la meuse,
01:13:17 il y a ces canards qui se suivent,
01:13:20 juste à côté.
01:13:22 Ce sont des gens qui reviennent d'un mariage.
01:13:25 Voilà. C'est une autre manière de raconter,
01:13:29 mais elle n'est pas fausse.
01:13:31 -Le réalisme, ça existe pas.
01:13:33 C'est aussi une autre notion.
01:13:35 Je pense que même, par exemple,
01:13:37 on va prendre un exemple très probant,
01:13:40 ce sont les frères Dardenne,
01:13:42 ou Ken Loach, on va se dire,
01:13:44 ça fait un cinéma social, un cinéma réaliste.
01:13:47 Mais ça veut rien dire, parce qu'ils créent une réalité.
01:13:51 C'est-à-dire, leur manière de regarder le monde
01:13:55 et de le voir est vraiment créée de toutes pièces
01:13:58 par leur imaginaire.
01:14:00 On pourrait dire que mon réalisme,
01:14:03 ou Vim Venders, ou celui de Ken Loach,
01:14:06 ou du frère Dardenne, ou du tien,
01:14:09 sont des réalités, mais notre réalité,
01:14:12 c'est notre manière de voir le monde,
01:14:15 c'est la manière de l'enregistrer
01:14:18 dans notre cerveau.
01:14:20 C'est comme ça qu'on voit le monde,
01:14:23 et donc c'est comme ça qu'on le raconte.
01:14:25 Mais pour moi, même si dans les frères Dardenne,
01:14:28 il n'y a pas de moment où il y a de la fumée,
01:14:31 c'est tout à fait la réalité.
01:14:33 C'est du cinéma.
01:14:36 C'est une distorsion de la réalité.
01:14:38 - Mais avec la question d'éventuelles influences,
01:14:41 que là, les images d'Henri à la fin,
01:14:43 on dirait l'Angélus, quand même.
01:14:45 Et même là, je ne sais pas d'où viennent
01:14:49 les phrases qu'on a, qui sont en surtitres.
01:14:52 - Un poème, oui.
01:14:54 - Mais en quoi pour vous, c'est important d'avoir aussi
01:14:57 ce rapport à d'autres artistes,
01:15:00 à d'autres artistes,
01:15:02 et à d'autres artistes,
01:15:04 et à d'autres artistes,
01:15:06 et à d'autres artistes,
01:15:08 et à d'autres artistes,
01:15:10 et à d'autres artistes,
01:15:13 et à d'autres artistes,
01:15:15 et à d'autres artistes,
01:15:17 et à d'autres artistes,
01:15:19 et à d'autres artistes,
01:15:21 et à d'autres artistes,
01:15:24 et à d'autres artistes,
01:15:26 et à d'autres artistes,
01:15:28 et à d'autres artistes,
01:15:30 et à d'autres artistes,
01:15:32 et à d'autres artistes,
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01:15:41 et à d'autres artistes,
01:15:43 et à d'autres artistes,
01:15:46 et à d'autres artistes,
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