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Cours de cinéma par Hélène Frappat, écrivaine et critique de cinéma, donné le 1er décembre 2023 au Forum des images.

Telle mère, telle fille, affirme-t-on comme une loi de la filiation. Et puis on ajoute qu’entre mères et filles, c’est souvent la guerre. Alors revenons sur la scène tragique contemporaine —Hollywood— pour observer comment ça se passe, en vrai, dans les films.

Dans le cadre de la thématique Acteurs, Actrices & Avatars.

Les cours de cinéma, chaque vendredi à 18h30, entrée gratuite.

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Transcription
00:00:00 [Silence]
00:00:08 Alors je vais me livrer à un exercice préliminaire d'analyse critique explosive
00:00:14 du thème dont je suis censée vous parler en l'illustrant d'extraits de films.
00:00:20 Pourquoi ? Parce que je ne crois pas au thème qui avec les messages et les intentions
00:00:26 sont la mort assurée de la pensée et des œuvres.
00:00:30 Parce que le cinéma n'est pas un catalogue d'images ou puisé des illustrations.
00:00:35 Parce qu'illustrer un thème c'est fabriquer un joli papier peint traditionnel
00:00:41 à base de clichés par nature conservateur.
00:00:44 Et parce que sur les mères et les filles, certains thèmes dont on rend notre regard
00:00:50 et notre pensée captifs ont bien mérité de se faire exploser.
00:00:55 "Telle mère, telle fille", proclame le dicton.
00:01:01 Les mots de notre langage que nous utilisons pour penser, aimer, détester,
00:01:09 comprendre, vivre, survivre, rêver, nous souvenir,
00:01:14 ces mots aussi ont une famille, des amis, des parents, une mère, une fille peut-être.
00:01:21 En préparant cette conférence, j'ai entendu pour la première fois
00:01:26 le contenu littéral du mot dicton.
00:01:29 Ce que on nous dicte, ce qu'on me dicte, ce que j'ai l'illusion de penser et de choisir
00:01:38 sous la dictée de "on" qui est la voix anonyme de la société, de l'opinion,
00:01:44 parfois de théories déguisées en science, d'autres fois de personnes,
00:01:48 connues ou inconnues, qui parlent à travers moi, à travers nous.
00:01:53 Je vais vous raconter une histoire.
00:01:57 Quand j'avais 27 ans, un âge dangereux pour les rock stars,
00:02:01 une histoire d'amour merdique m'a plongée dans le désespoir.
00:02:05 J'ai écrit une lettre interminable aux garçons qui m'obsédaient depuis des mois
00:02:10 et qui venaient de me quitter pour la énième fois.
00:02:13 Relisant ma lettre-fleuve, je me suis aperçue que j'avais confondu systématiquement
00:02:18 le mot "moi" et le mot "moins".
00:02:21 Chaque fois que j'avais voulu écrire "moi", j'avais écrit "moins".
00:02:25 Je ne sais plus si l'envie m'est venue de rire ou de pleurer
00:02:29 en découvrant la confusion par laquelle je m'étais littéralement diminuée.
00:02:33 À moins qu'une angoisse teintée d'humiliation n'ait submergé la fille de 27 ans
00:02:38 qui se prenait à l'évidence pour une moins que rien.
00:02:42 Ce désespoir m'a conduite sur le divan d'un psychanalyste.
00:02:45 Je vous épargne les années longues qui ont suivi.
00:02:48 Je me contente de la première séance, du moins de la première allongée
00:02:53 sur une vieille banquette, dans une pièce envahie de livres grises
00:02:57 de la fumée des cigarettes.
00:03:00 Voici quels furent très exactement mes six premiers mots.
00:03:04 Quand on a appris à lire, je les aurais vite oubliés
00:03:09 si derrière moi, l'analyste invisible, de sa grosse voix cassée par le tabac et l'alcool
00:03:14 ne m'avait aussitôt interrompue.
00:03:17 "Qui ça, on ?" Je ne m'étais pas entendue parler.
00:03:21 "Oui, c'est vrai, au fait, qui ça, on ?" me suis-je demandé intérieurement
00:03:26 comme si je m'adressais à une étrangère qui était moi-même,
00:03:29 comme si je dialoguais avec moi-même, devenue une étrangère.
00:03:33 L'étrangère et moi-même avons trouvé la réponse instantanément.
00:03:37 Ma mère et moi.
00:03:39 Le psychanalyste a éclaté de son rire bourru.
00:03:42 Je me souviens de ma sensation d'étonnement.
00:03:45 J'avais beau vivre seule avec ma mère depuis la mort de mon père quand j'avais sept ans,
00:03:49 il avait fallu que je prononce le sujet de cette phrase, ce tout petit "on",
00:03:54 pour deviner que la fille de 27 ans, terrassée par un chagrin d'amour, était deux.
00:03:59 Enfin qu'elle était "on", elle et sa mère, en plus d'essayer d'être elle-même,
00:04:04 ce qui semblait mal parti, vu qu'un sortilège transformait son "moi" en un "moi".
00:04:10 Qu'est-ce qu'on me dicte quand on me répète "telle mère, telle fille" ?
00:04:18 Un invariant anthropologique de la filiation ?
00:04:22 Une loi scientifique du clonage générationnel des femmes ?
00:04:27 Si c'est une loi, s'agit-il d'une loi aussi scientifique que le complexe de Diep-Froedien
00:04:33 qui est passé dans le langage courant avec l'évidence vénérable des clichés,
00:04:38 sans que la généalogie de cette invention ne soit ni connue, ni interrogée ?
00:04:43 Or, cette généalogie a à voir avec un acte crucial de croyance.
00:04:49 Croire ou ne pas croire.
00:04:52 Et qui croire ou ne pas croire ?
00:04:55 Les femmes.
00:04:57 Plus précisément, les patientes de Froed,
00:05:00 qualifiées d'hystériques en raison de leurs bruyants symptômes,
00:05:03 et de la cacophonie qui s'exprime par leurs deux bouches,
00:05:06 bouches bavardes et utérus malades.
00:05:10 Il faut dire que depuis les planches anatomiques de la Grèce antique,
00:05:13 qui représentent bouches et utérus féminins réduits au silence par un même verrou,
00:05:18 on tient pour établi que la femme a deux bouches.
00:05:23 Froed, donc, invente le complexe d'Oedipe à l'époque où il décide de ne plus croire
00:05:30 en la réalité des abus qui ont causé les traumatismes des femmes dites hystériques,
00:05:37 dont il a recueilli la parole.
00:05:40 Ce renversement repose sur plusieurs raisons,
00:05:42 que je détaille dans mon essai "Le gaslighting ou l'art de faire taire les femmes".
00:05:47 Elles concernent, d'une part, les abus commis par le propre père de Froed
00:05:52 sur son frère et certaines de ses sœurs cadettes,
00:05:55 et d'autre part l'avenir de la carrière de Froed,
00:05:58 dont la réussite dépend de son concept clé, l'hystérie,
00:06:02 comme il le formule explicitement dans une série de lettres à Willem Flies
00:06:06 en date du 21 septembre, du 8 et 11 février 1897.
00:06:12 L'invention du complexe d'Oedipe a pour conséquence de décrédibiliser
00:06:18 la parole des femmes qui ont été victimes de violences dans leur entourage familial.
00:06:23 En faisant le choix de ne plus croire en la réalité des abus dont elles ont été victimes,
00:06:28 Froed transfère sa propre incrédulité sur leur crédibilité.
00:06:33 Dès qu'il leur retire sa croyance, non parce qu'il a cessé de les croire,
00:06:39 mais parce qu'il l'a décidée,
00:06:41 la vérité factuelle des abus et de l'inceste se trouve réduite à un fantasme.
00:06:47 Simultanément, et c'est crucial pour ce qu'on nous dicte des mères et des filles,
00:06:54 le complexe d'Oedipe et sa théorie des attractions incestueuses fantasmatiques
00:07:00 met l'accent sur la rivalité entre la mère et la fille.
00:07:05 Car, dit-on, elles recherchent le fameux phallus dont elles manquent,
00:07:10 en se disputant le mari et le père qui, eux, l'ont.
00:07:14 D'où la rivalité présentée comme la loi naturelle de leur relation.
00:07:20 Autant dire que le complexe d'Oedipe contient aussitôt en germe un scénario.
00:07:26 Un excellent scénario même, un scénario à Oscar au regard des critères dramaturgiques hollywoodiens
00:07:32 régissant nombre de drames, mélodrames, soaps, peplums, thrillers, comédies,
00:07:39 films gothiques, films d'horreur, films de vampires.
00:07:44 Telle mère, telle fille.
00:07:46 On nous dicte qu'entre mère et fille qui se ressemblent, qui se reproduisent, qui se clônent,
00:07:52 c'est toujours la guerre.
00:07:54 Comme dans ces tragédies grecques que personne n'a lues,
00:07:57 mais où, dit-on encore, mère et fille s'entretuent.
00:08:01 La lecture freudienne de Sophocle et Échil nourrit d'ailleurs le récit psychanalytique
00:08:06 de la rivalité mère-fille.
00:08:09 Récit ou bien pur et simple fiction, pour ne pas dire élucubration.
00:08:16 Ce mot d'élucubration que j'adore est employé par Jacques Lacan dans "Les tourdis",
00:08:22 un texte de 1972 dans lequel il critique le complexe d'Oedipe freudien
00:08:28 pour lui substituer simultanément son propre mot ou concept
00:08:32 destiné à élucider la relation entre une mère et sa fille.
00:08:36 Je le cite.
00:08:38 À ce titre, l'élucubration freudienne du complexe d'Oedipe,
00:08:42 qui fait la femme poisson dans l'eau, de ce que la castration soit chez elle de départ,
00:08:47 Freud dit, cite, contraste douloureusement avec le fait du ravage
00:08:52 qu'est chez la femme pour la plupart le rapport à sa mère,
00:08:56 d'où elle semble bien attendre comme femme plus de subsistance que de son père,
00:09:01 ce qui ne va pas avec lui étant second dans ce ravage.
00:09:05 Traduction.
00:09:07 L'élucidation a beau venir du mot latin lux, lumière,
00:09:11 le dogme lacanien qui fixe la relation de la plupart des mères avec leur fille
00:09:16 est pour le moins obscur, même si les saillies misogynes et homophobes
00:09:21 de ce texte de 1972 ont le mérite d'être clairs, à défaut d'être drôles.
00:09:26 La rivalité entre une mère et sa fille, dit, cite Lacan,
00:09:31 ne repose pas originellement sur la castration des femmes,
00:09:35 mais sur une relation qu'il qualifie de ravage.
00:09:38 Il rapporte ce ravage au défaut de subsistance caractéristique de l'être féminin,
00:09:46 de la femme comme femme, précise-t-il, si je puis dire.
00:09:51 La fille comme femme manque de subsistance et elle attend que sa mère
00:09:58 comble ce défaut de subsistance.
00:10:01 De cette attente naît le ravage.
00:10:05 Ravage vient du latin rapere, emporter avec violence, enlever, piller, ravir,
00:10:13 s'emparer violemment, voler.
00:10:16 C'est intense le ravage, effroyable même,
00:10:19 dévastation causée par les guerres ou les fléaux naturels,
00:10:22 dégâts visibles sur le corps et l'âme, ravage du temps et de la vieillesse,
00:10:28 emprise vampirique de la séduction, faire des ravages.
00:10:32 C'est violent, ça va vite, ça détruit, comme dans un torrent, un raptus,
00:10:38 un kidnapping, une dépossession, une guerre, un enlèvement.
00:10:42 Ce serait donc ça, le scénario mère-fille qui hante la psychanalyse,
00:10:49 dont l'invention est contemporaine de l'hypnose qui se joue dans la salle de cinéma.
00:10:54 Ce scénario, je rappelle qu'il repose sur le postulat que la femme est un continent noir,
00:11:00 un mystère, une énigme.
00:11:02 Le ravage lacanien rajoutant une couche de noirceur à ce continent noir
00:11:07 qui n'en finit pas d'être colonisé, selon une logique qu'Hélène Cixous a démasquée en 1975
00:11:14 avec une ironie géniale dans "Le rire de la méduse".
00:11:18 Il n'y a pas de "je" sans un "on" qui étouffe sa subjectivité,
00:11:26 autrement dit sa liberté de penser et de vivre.
00:11:29 Réciproquement, tous les "on" de tous les dictons du monde
00:11:34 dissimulent toujours un petit "je" qui a du mal à s'avouer
00:11:39 que les vérités éternelles qu'il profère reposent sur des préjugés.
00:11:43 Moi aussi j'ai eu une mère, moi aussi j'ai pu en être ravagée d'amour fou et de haine.
00:11:49 Et puis j'ai écouté nombre de filles me décrire leur mère,
00:11:53 fille personne de la vie, fille personnage des films et des romans.
00:11:58 Un jour, ma deuxième psychanalyste m'a recommandé la lecture d'"Entre mère et fille, un ravage"
00:12:05 consacré en partie à la relation entre Marlène Dietrich et sa fille.
00:12:09 Voici comment Marie-Magdalene Lessana résume le scénario du ravage
00:12:15 en s'appuyant autant sur Lacan que sur les journaux féminins
00:12:18 rabâchant le scénario de la guerre et/ou de la fusion érotique des filles avec leur mère.
00:12:24 Je cite
00:12:29 "Le ravage entre fille et mère n'est pas un duel, ni le partage d'un bien,
00:12:37 c'est l'expérience qui consiste à donner corps à la haine torturante, sourde,
00:12:42 présente dans l'amour exclusif entre elles, par l'expression d'une agressivité directe.
00:12:47 Le ravage se joue entre les deux femmes touchées par l'image de splendeur
00:12:52 et un corps de femme désiré par un homme.
00:12:55 Il révèle l'impossible harmonie de leur amour qui se heurte à l'impossible activité sexuelle entre elles.
00:13:02 L'épreuve se traversera quand l'image fascinante sera atteinte au point de déchoir.
00:13:07 Il ne s'agit pas de meurtre, mais d'un acte qui fasse la peau à l'image éblouissante qui persécute.
00:13:15 La chute du pouvoir persécutif de l'image marquera la sortie du ravage,
00:13:20 un corps emportera la cicatrice.
00:13:23 Pourquoi consacrer du temps à ces théories psychanalytiques ?
00:13:29 Parce qu'elles ont influencé mon regard de spectatrice ? Non.
00:13:34 Je veux dire non, elles ne l'ont absolument pas influencé.
00:13:37 Comme spectatrice ou écrivaine, je me méfie du scénario psychologique.
00:13:42 Parce qu'elles ont éclairé mon propre parcours analytique ? Pas plus, et d'ailleurs ce serait hors sujet.
00:13:48 Parce qu'elles résument un cadre de pensée et de fiction devenu littéralement notre lieu commun, en partie.
00:13:56 Le cinéma est un lieu de pensée parce qu'il nous contraint à élaborer un point de vue.
00:14:03 Autrement dit, à sortir du "on" qui est l'absence de point de vue incarné.
00:14:08 De cette fiction de notre origine, de cette origine fiction qui se ramène invariablement à la toute-puissance maternelle.
00:14:16 Notre préhistoire inoubliable que nul n'égalera jamais, dit Sittfrud, dans la vie sexuelle.
00:14:22 Je retiens son scénario. J'insiste sur le mot.
00:14:27 Scénario vient de la langue italienne, où "scenario" signifie depuis 1764 "décor de théâtre".
00:14:34 Scénario se disant "sceneggiatura".
00:14:37 Or de mon point de vue, ni le décor, ni le théâtre ne sont le cinéma, ne font cinéma.
00:14:44 Qu'est-ce qu'y fait le cinéma ?
00:14:48 Je vais répondre par une analogie.
00:14:51 C'est ce qu'y fait littérature dans un livre.
00:14:54 Non pas une histoire, mais une écriture.
00:14:57 L'écriture aussi est un point de vue, même quand il s'avance masqué.
00:15:02 Après la publication de mon roman "Trois femmes disparaissent",
00:15:06 l'enquête que j'ai menée sur la lignée hollywoodienne qui me fascinait depuis 20 ans,
00:15:11 il s'est produit un phénomène bouleversant.
00:15:13 Mes trois stars personnages, la grand-mère Tippi Edren, sa fille Melanie Griffith,
00:15:19 sa petite-fille Dakota Johnson, ont soudain éclairé des pans secrets de mon enquête,
00:15:25 éclairé comme seul le cinéma dont le vrai sujet et la lumière, c'est le fer.
00:15:31 Voilà que la cage aux oiseaux, où Alfred Hitchcock avait enfermé Tippi Edren,
00:15:37 avant que Tippi Edren n'enferme à son tour sa fille Melanie Griffith, dans la cage aux fauves,
00:15:43 devenait aussi la cage où il était arrivé à ma mère d'enfermer sa fille.
00:15:48 Je ne fais pas allusion ici au sujet de mon livre, autrement dit à son scénario tragique.
00:15:55 Car peu de gens le savent, et Freud n'en fait pas partie,
00:15:59 la soi-disant tragédie grecque n'a jamais été un théâtre,
00:16:03 au sens où nous autres modernes l'entendons,
00:16:06 c'est-à-dire un décor où des spectateurs vont écouter un texte.
00:16:11 Ce scénario-là est une illusion.
00:16:14 Un texte tragique, comme l'explique l'héléniste Florence Dupont,
00:16:19 en dehors du rituel des jeux scéniques n'est rien. Ce n'est pas un texte littéraire.
00:16:25 La tragédie antique, romaine mais aussi bien grecque,
00:16:29 telle qu'on l'a construite en Occident depuis le XVIIIe siècle, est une illusion littéraire.
00:16:35 Du coup, si je sors, si nous sortons du scénario réduit à son thème,
00:16:41 l'immémorial crêpage de chignon, qu'est-ce qui nous reste ?
00:16:46 Qu'est-ce qui va nous rester ce soir, si nous décidons de ne pas être réunis
00:16:51 pour confirmer nos préjugés grâce à des illustrations ?
00:16:55 Des larmes, beaucoup de larmes,
00:16:59 exactement ce que les spectateurs des jeux scéniques antiques venaient chercher.
00:17:04 Mon roman "Trois femmes disparaissent" s'ouvre sur la phrase que prononce Marilyn Monroe
00:17:10 dans le film de George Cukor "Something Got To Give", que sa mort a interrompue.
00:17:16 Est-ce que je peux pleurer pour toi ?
00:17:21 La tragédie des mères et des filles n'est pas un scénario archétypal,
00:17:27 un texte connu et reconnu que femmes et hommes se répètent par cœur.
00:17:32 C'est la forme musicale par laquelle un cœur accueille nos pleurs.
00:17:37 Nos mythes sont rétrospectifs.
00:17:40 Quand ils nous donnent l'illusion de vérité éclairant notre présent,
00:17:44 cela signifie qu'ils ont pris la patine vénérable et rassurante des clichés.
00:17:49 Or le cinéma n'est pas là pour illustrer des clichés.
00:17:53 Les extraits que nous allons regarder ce soir ne sont pas là pour rejouer un texte poussiéreux
00:17:58 dans un vieux décor de théâtre dont la fonction politique consiste à perpétuer des mécanismes de domination.
00:18:05 Au cinéma, je me contrefous du "on".
00:18:10 La tragédie des mères et des filles qui va se jouer ce soir n'est pas un scénario,
00:18:15 parfois nommé "bible" par les professionnels du cinéma.
00:18:18 Ce n'est pas non plus LA bible et son catalogue d'hommes violents et de femmes rivales,
00:18:23 mais une expérience.
00:18:28 Nous allons rire, ou bien pleurer, parfois les deux en même temps.
00:18:33 Nous allons comprendre.
00:18:35 Quoi ? Je ne sais pas.
00:18:38 Les morts vivant en nous vont dialoguer.
00:18:41 Les secrets obscurs en nous vont se dénouer.
00:18:46 Cette expérience-là, avec un avant et un après,
00:18:49 un avant souvent ennuyeux, un après toujours enivrant,
00:18:53 est une révolution.
00:18:56 Comme toujours, parole de romancière, la vérité nous sera livrée par la fiction,
00:19:01 non par la platitude d'un scénario,
00:19:04 mais par la liberté d'une mise en scène, une liberté communicative
00:19:08 qui donne aux spectateurs la force de suspendre toutes ces vieilles croyances.
00:19:16 Commençons par l'acte 1.
00:19:19 Nous sommes en Italie, pays du mélodrame,
00:19:22 dans l'ancienne capitale déchue de l'Empire, Rome,
00:19:25 territoire du mélodrame au carré,
00:19:28 dont la divinité est une mer Louvre,
00:19:31 et ville dans laquelle, pour dire "dégage", on dit "smam",
00:19:35 ce qui veut dire littéralement "sans la mam", "sans ta mère".
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00:21:16 - Elle est mignonne, cette fille. - Oui, elles sont toutes jolies, les filles.
00:21:19 Toutes jolies. Mais j'aime bien les mères.
00:21:23 Excusez-moi, je vous donne un conseil.
00:21:27 La deuxième fois, l'examen sera plus sévère et ces photos ne servent pas.
00:21:31 - Un peu vaches ? - Oui.
00:21:34 Il vaut mieux les faire plus grandes, plus belles, et aller voir un photographe.
00:21:37 - Je peux vous donner un droit ? - Comment ?
00:21:40 - Il faut mon nom. - Anovazzi.
00:21:43 - Alberto Anovazzi, c'est moi. - Oui.
00:21:46 - Le photographe est à la voie 414. - 414 ?
00:21:49 - Allez-y, il sera là. - Je vais, bien sûr.
00:21:52 - Je le remercie. - Je l'imagine.
00:21:54 - Je n'ai pas de mots. - Au revoir.
00:21:56 - Je peux entrer ? - Oui, il arrive dans 3 ans.
00:21:58 - Si je ne l'avais pas trouvé, c'était une chance. - Félicitations pour la fille.
00:22:01 - Dis "ciao". - Ciao. Et ne t'en va plus.
00:22:04 - J'ai un peu de stress. - Oui, c'est bon.
00:22:06 - Au revoir. - Au revoir, madame.
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00:30:34 qui mettent en scène et qui présentent ces petites filles qui sont évidemment exclusivement des hommes.
00:30:39 Et la séquence finale est très explicite là-dessus, c'est-à-dire qu'à partir de ce scénario, encore une fois,
00:30:46 joué dans ce décor dont je rappelle l'origine historique, parce que Visconti évidemment y pense quand il fait le film,
00:30:56 il va à Visconti nous montrer précisément qui est le metteur en scène de ce vieux scénario où on oublie systématiquement,
00:31:07 en réduisant le scénario, comme je le disais, à une guerre immémoriale, naturelle, soit disant naturelle, entre les mères et les filles,
00:31:17 où on oublie qui tire les ficelles, qui est le metteur en scène, pour qui, à qui s'adresse cette petite fille.
00:31:23 Donc là, la mère parle littéralement à travers sa fille, c'est d'autant plus montré que la petite zozote,
00:31:32 et elle se livre, la mère a un véritable numéro de ventriloquisme à travers cette petite, dont on souligne justement qu'elle est trop petite.
00:31:43 L'escroc, celui qui est là pour arnaquer les mères et les filles, et draguer les mères, dit "ne t'éloigne pas trop", dit-il à la petite,
00:31:57 "ne t'éloigne pas trop de ta mère, reste collée à ce scénario-là", et il est souligné ici qu'elle est trop petite,
00:32:04 comme si c'était quelqu'un qui ne grandirait, un individu qui ne grandira jamais, qui ne pourra pas se dissocier de cette mère,
00:32:14 dans ce scénario, littéralement, où les hommes mènent la danse.
00:32:19 Visconti, à propos de Bellissima, a dit cette phrase très belle, il a dit "c'est nous, nous les hommes, qui mettons des illusions dans la tête des mères et des petites filles".
00:32:30 Donc pour lui, c'était explicitement ce sujet-là qui était celui de son film.
00:32:37 Alors j'aurais voulu, je vais en dire quelques mots, parce que c'était important pour moi, mais malheureusement nous n'avons pas pu trouver d'extrait de ce film,
00:32:44 mais peut-être certains d'entre vous l'ont vu. Est-ce que vous avez vu "Spanglish", le film de James L. Brooks ?
00:32:51 Donc tout à l'heure, vous aurez l'occasion de voir "Tendre Passion", le premier film de James L. Brooks, mais je voudrais quand même en dire quelques mots.
00:32:59 Donc j'avais envie de montrer un extrait de ce film, parce que "Spanglish", c'est un film qui date de 2004,
00:33:06 film du très très grand, immense réalisateur étasunien James L. Brooks, producteur, inventeur aussi, producteur et scénariste des "Simpsons".
00:33:17 Et dans ce film de 2004, il va mettre en scène précisément, et montrer, en échappant à tout le vieux scénario de la rivalité Murphy,
00:33:28 deux couples de mères et de filles, qui vont être, leur conflit étant entièrement incarné à travers la question de la langue,
00:33:38 puisque là, les deux personnages, les deux héroïnes principales sont deux Mexicaines qui sont des immigrés clandestines,
00:33:48 et qui vont se retrouver, la mère donc bonne, employée de maison dans une famille, dans une riche famille à Los Angeles,
00:33:55 ne parlant pas l'anglais, parce qu'elle peut parfaitement vivre dans la communauté hispanique énorme de Los Angeles, et trouver du travail.
00:34:02 Au moment où elle trouve un travail mieux payé, et elle se retrouve avec la nécessité d'avoir sa fille comme traductrice.
00:34:10 Sa fille qui, elle, comme fille, qui n'est pas née aux Etats-Unis, mais qui est arrivée très tôt, est déjà entre deux mondes et entre deux langues,
00:34:20 donc qui parle aussi bien espagnol qu'anglais, et qui va se trouver littéralement dans ce rôle,
00:34:26 ce rôle auquel la petite fille de Bellissima ne peut accéder, précisément à cause de ce ventriloquisme auquel elle est condamnée.
00:34:36 Elle va donc devoir jouer ce rôle de traductrice, alors qu'elle est extrêmement, comment dire, soulignée par le fait qu'il s'agit d'une différence de langue,
00:34:47 mais ce que je trouve extraordinaire dans le film de James L. Brooks, c'est que la question est une question qui concerne la condition humaine.
00:34:54 C'est-à-dire que nous sommes tous traducteurs de nos parents et de nos enfants, nous naissons tous, nous, êtres humains, je veux dire,
00:35:03 traducteurs, et à peine naissons-nous, quelle que soit la langue dans laquelle nous parlons, et que cette langue soit celle à la maison,
00:35:12 qui est celle du pays, ou pas, que la langue du pays où on naît soit celle du pays où on vit, etc.,
00:35:17 nous nous livrons en permanence à un exercice de traduction qui fait que la langue de la maison d'un enfant n'est pas la même que la langue qu'il parle à l'école,
00:35:27 qui n'est pas la même que celle qu'il parle dans la cour de l'école, qui n'est pas la même que celle qu'il parle en classe,
00:35:31 qui n'est pas la même que celle qu'il parle dans la rue, qui n'est pas la même que celle qu'il parle avec ses amis, etc., etc.
00:35:38 Donc, la question de l'enfant et la question du lien, et du lien de la mère et de la fille, elle passe essentiellement d'un point de vue humain,
00:35:47 par cette question du langage, et alors évidemment c'est plus visible, et il y a une scène plus visible dans le cas de parents et d'enfants qui ne parlent pas nécessairement la même langue,
00:36:01 et il y a une scène extraordinaire où précisément toute la question qui se pose, et qui se pose, qui est exemplifiée, disons, pour une petite fille d'immigré,
00:36:10 comme c'est le cas dans le film de James L. Brooks, Spanglish, qui est "Est-ce que réussir, c'est ressembler à ma mère ? Est-ce que pour moi ?"
00:36:21 Et James L. Brooks, qui est un grand cinéaste humaniste, donne à ses personnages l'occasion de se poser cette question,
00:36:27 "Est-ce que pour une enfant, alors là en l'occurrence une enfant pauvre, réussir c'est ressembler à sa mère qui fait des ménages,
00:36:36 est-ce que c'est ressembler à sa mère en conservant sa culture d'origine et sa langue d'origine, etc. ?"
00:36:42 Mais au fond, dans cette scène où tout se passe entre un moment où à la fois la fille en a marre de traduire en permanence le langage du monde du travail
00:36:54 et le langage des patrons, le langage du pouvoir, le langage du pays d'accueil qui a le pouvoir pour sa mère, mais où,
00:37:00 et c'est là où c'est extrêmement beau, et vous le verrez aussi si vous voyez "Tendre Passion" tout à l'heure,
00:37:06 il n'y a jamais aucun de ce que je critiquais en commençant, aucun de ces clichés réactionnaires qui nous imprègnent en permanence.
00:37:16 C'est pour ça que j'ai tellement insisté. Je pense que c'est extrêmement important de mesurer à quel point notre langage
00:37:23 est imprégné de ce "on". James L. Brooks donne à ces deux personnages l'occasion démocratique de pouvoir s'exprimer autant l'un que l'autre,
00:37:33 autant la mère que la fille, c'est-à-dire la mère va en avoir à un moment autant marre d'être traduite par sa fille que la fille en a marre de traduire la mère.
00:37:44 Et bien entendu, comme je le disais, la question de la traduction ne se joue pas uniquement au niveau des langues, mais au niveau du monde,
00:37:53 du regard sur le monde qu'il y a à traduire, et c'est ce moment-là, crucial précisément, où la mère choisit dans ce point de glitch d'apprendre l'anglais.
00:38:03 Donc cette question qu'il y a à voir dans le cinéma états-unien avec ce que les États-Unis ont appelé, continuent d'appeler d'ailleurs, le rêve américain.
00:38:14 J'emploie le mot "états-unien" parce que, pareil, il faut se méfier du mot "américain" parce qu'il désigne quand même...
00:38:20 Comme je me méfie un peu du mot "continent", vous l'aurez remarqué, le continent noir et son impensé raciste étant quand même une expression freudienne relativement gratinée, je trouve.
00:38:31 Donc je me méfie un peu du continent américain parce que même si vous êtes nuls en géographie comme moi, vous avez remarqué qu'il est quand même assez grand, le continent américain.
00:38:37 Donc quand on emploie le mot "américain", ça veut dire qu'on désigne... Comment dire ? Nous accédons, en disant ça, à un certain impérialisme qui consiste à s'emparer du continent entier.
00:38:49 Donc pour s'en tenir aux États-Unis, aux rêves états-uniens de réussite, j'aimerais qu'on voit maintenant l'extrait d'un film absolument extraordinaire,
00:39:01 qui, prolongeant celui de Visconti, c'est-à-dire la question de l'illusion, va s'interroger sur ce que c'est que la vie et ce que c'est qu'une vie qui serait une imitation de la vie,
00:39:15 à travers un terme très important pour le coup dans la langue et dans la culture états-unienne, qui est le terme de "passing".
00:39:30 - In Germany is...
00:39:32 - Oh, can I do something for you ? - Sorry to trouble you, miss, but I brought these for my little girl.
00:39:39 - I'm afraid you made a mistake. I don't have any little colored girl in my class. - But they said 3B. This is 3B, isn't...
00:39:47 - Oh, there's Sarah Jane. There's my baby. - You mean Sarah Jane Johnson ? - Yes, ma'am. I'm Mrs. Johnson.
00:39:55 - Sarah Jane, baby, I brought you... Sarah Jane ! - But... No ! - Sarah Jane, wait ! Sarah Jane ! Baby, wait !
00:40:16 - Sarah Jane ! Sarah Jane, wait ! Wait ! Now, now, let me do it. Now, put your coat on. What do you want to do, catch pneumonia ?
00:40:35 - I hope I do. I hope I die. - Honey, nothing's hurt. You shouldn't have let them... - They didn't ask me ! Why should I tell them ?
00:40:43 - Because that's what you are, and it's nothing to be ashamed of. - Why do you have to be my mother ? Why ?
00:40:49 I was talking about melodramas, at the beginning, and tears. "Mirage de la vie" in French, I never understood the translation of this title.
00:41:01 It's a 1959 Douglas Hork's film, "Imitation of Life", one of the greatest titles in the world. It's about this question,
00:41:13 which is at the heart of the human being, and which is translated in the relationship of filiation, which is the question of shame.
00:41:25 So, what is "passing" ? I was talking about "passing", it's a term invented at the end of the 1920's in the United States,
00:41:33 to designate the fact, especially for a black man, who would have a clear enough skin to play with this illusion, to pass for a white man.
00:41:49 So, the Douglas Hork's film, through the meeting of two couples of single mothers, one of them playing the American dream,
00:41:59 the Anna Turner, the blonde, with her little blonde daughter, who is completely unbearable, and who is supposed to be able to handle all the cases,
00:42:09 the plague of the popular girl in the American culture. So, this single mother, who is an actress, will pick up another couple,
00:42:23 a mother and her daughter, black, but the little one is white enough to pretend not to be black at school.
00:42:35 Another extraordinary aspect in the Douglas Hork's film is the question of skin.
00:42:41 When I was quoting a text of a psychoanalyst, who was talking about the relationship between Marlene Dietrich and her daughter,
00:42:53 the question of the scar and the skin, which I talked a lot about in my book "Three women disappear",
00:43:01 and how the mother, Tippi Edren, the star of Hitchcock, who was reduced to her own body, by the contract she had with Hitchcock,
00:43:13 had a daughter, Melanie Griffiths, who found herself in this story of repetition,
00:43:33 reduced not only to her body, but to her skin, to the point that the scars of their relationship,
00:43:43 the scars inflicted by invisible directors of their relationship, will be inscribed in the skin,
00:43:52 and the surgery operations, at the beginning, will be repaired by Melanie Griffiths.
00:43:58 So, it's a question of shame to have the same skin, the question of the limits between the mother's skin and the daughter's skin.
00:44:09 Is it possible to set limits such that the daughter will imitate a white skin?
00:44:20 I was thinking, while watching this film, of Alice Diop, Saint-Omer, who, you may have seen,
00:44:27 who addresses this question of the limits of the skin between a black mother and her little daughter.
00:44:39 What happens between a mother and her daughter when the mother has trouble transmitting the limits of the body and the limits of the skin,
00:44:46 and the limits are blurred, when there is no protection that is transmitted.
00:44:53 What happens is quite simple, it's another form, we just saw an excerpt from a melodrama,
00:45:01 it's another form of film that can be played between the mother and the daughter,
00:45:06 and it's the form of horror film, which we will see here, one of the possible variants.
00:45:16 (The mother is playing with her daughter)
00:45:26 (The daughter is playing with her daughter)
00:45:36 (The daughter is playing with her daughter)
00:45:46 (The daughter is playing with her daughter)
00:45:56 (The daughter is playing with her daughter)
00:46:06 (The daughter is playing with her daughter)
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00:46:36 (The daughter is playing with her daughter)
00:46:46 (The daughter is playing with her daughter)
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00:47:06 (The daughter is playing with her daughter)
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00:47:26 (The daughter is playing with her daughter)
00:47:36 (The daughter is playing with her daughter)
00:47:46 (The daughter is playing with her daughter)
00:47:56 (The daughter is playing with her daughter)
00:48:06 (The daughter is playing with her daughter)
00:48:16 (The daughter is playing with her daughter)
00:48:26 (The daughter is playing with her daughter)
00:48:36 (The daughter is playing with her daughter)
00:48:46 (The daughter is playing with her daughter)
00:48:56 (The daughter is playing with her daughter)
00:49:06 (The daughter is playing with her daughter)
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00:49:26 (The daughter is playing with her daughter)
00:49:36 (The daughter is playing with her daughter)
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00:49:56 (The daughter is playing with her daughter)
00:50:06 (The daughter is playing with her daughter)
00:50:16 (The daughter is playing with her daughter)
00:50:26 (The daughter is playing with her daughter)
00:50:36 (The daughter is playing with her daughter)
00:50:46 (The daughter is playing with her daughter)
00:50:56 (The daughter is playing with her daughter)
00:51:06 (The daughter is playing with her daughter)
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00:51:46 (The daughter is playing with her daughter)
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00:52:06 (The daughter is playing with her daughter)
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00:52:26 (The daughter is playing with her daughter)
00:52:36 (The daughter is playing with her daughter)
00:52:46 (The daughter is playing with her daughter)
00:52:56 (The daughter is playing with her daughter)
00:53:06 (The daughter is playing with her daughter)
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00:53:26 (The daughter is playing with her daughter)
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00:53:46 (The daughter is playing with her daughter)
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00:55:46 (The daughter is playing with her daughter)
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00:57:26 (The daughter is playing with her daughter)
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00:57:56 (The daughter is playing with her daughter)
00:58:06 (The daughter is playing with her daughter)
00:58:16 (The daughter is playing with her daughter)
00:58:26 (The daughter is playing with her daughter)
00:58:36 There is another film, by Ingrid Bergman,
00:58:46 who refused to play this mother's role.
00:58:56 She started her career in Sweden,
00:59:06 and she had a great career in Hollywood.
00:59:16 She was the co-star of the film.
00:59:30 In this film, there is also an actress
00:59:36 who is furious about Ingmar Bergman's actions.
00:59:44 She refused to play this scene,
00:59:54 and she refused to play this scene,
01:00:04 and she refused to play this scene,
01:00:14 and she refused to play this scene,
01:00:24 and she refused to play this scene,
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01:31:24 and she refused to play this scene,
01:31:34 and she refused to play this scene,
01:31:44 and she refused to play this scene,
01:31:54 and she refused to play this scene,
01:32:04 and she refused to play this scene,
01:32:14 and she refused to play this scene,
01:32:24 and the reality of the contract that Tippi had signed,
01:32:28 and the reality of the contract that Tippi had signed,
01:32:36 and the trauma of Marnie,
01:32:38 and the trauma of Marnie,
01:32:44 who is a fauve, a predator,
01:32:54 who is a fauve, a predator,
01:33:04 and Melanie is trapped,
01:33:08 and Melanie is trapped,
01:33:12 and Melanie is trapped,
01:33:18 and Melanie is trapped,
01:33:24 and Melanie is trapped,
01:33:32 and Melanie is trapped,
01:33:40 and Melanie is trapped,
01:33:46 and Melanie is trapped,
01:33:54 and Melanie is trapped,
01:34:02 and Melanie is trapped,
01:34:10 and Melanie is trapped,
01:34:18 and Melanie is trapped,
01:34:26 and Melanie is trapped,
01:34:34 and Melanie is trapped,
01:34:42 and Melanie is trapped,
01:34:50 and Melanie is trapped,
01:34:58 and Melanie is trapped,
01:35:04 and Melanie is trapped,
01:35:10 and Melanie is trapped,
01:35:16 and Melanie is trapped,
01:35:22 and Melanie is trapped.
01:35:26 I'd like to finish with...
01:35:30 I'd like to finish with...
01:35:34 I mentioned the question of the coming back,
01:35:38 it was said that cinema is a ghost art,
01:35:44 it was said that cinema is a ghost art,
01:35:48 even if the actors are not dead,
01:35:52 it's still a part of the dead.
01:35:56 It's still a part of the dead.
01:36:00 I wrote a book with Jacques Rivette,
01:36:04 we published the preface of three unfinished films,
01:36:08 we published the preface of three unfinished films,
01:36:12 which were ghost movies,
01:36:16 and we discussed the concept of ghost movies,
01:36:20 and we discussed the concept of ghost movies,
01:36:24 to make a precise typology to distinguish a ghost from a specter,
01:36:28 from a coming back, etc.
01:36:32 The coming back is a theme linked to what Jacques Lacan would call the feminine eternal,
01:36:36 which is a word he likes,
01:36:40 the death of a lover,
01:36:44 etc.
01:36:46 The coming back as a theme,
01:36:48 you'll understand I don't like themes,
01:36:50 I'm not interested in that.
01:36:52 What I'm interested in is the point of view of coming back,
01:36:54 the possibility, hospitality or not,
01:36:56 that a work, a film, a person can do,
01:37:00 has its coming back, its own death in its life,
01:37:04 and its coming back in films.
01:37:06 One of the most beautiful coming back films,
01:37:08 I mentioned it earlier,
01:37:10 is the film of George Cukor,
01:37:12 "Something God To Give".
01:37:14 I'd like us to see the extract of one of the most beautiful coming back films
01:37:18 in the history of cinema,
01:37:20 where something is untied,
01:37:24 a bit like Marnie,
01:37:26 but very differently,
01:37:28 a trauma that conditioned the story of the relationship between a mother and her daughter,
01:37:36 and how do we go from survival to life.
01:37:38 How do we go from survival to life?
01:37:40 That's what's played in the extract we'll see
01:37:42 of the film of Pedro Almodovar,
01:37:44 "Volver", which means "to come back",
01:37:48 which is exactly what coming back films do.
01:37:50 [Music]
01:38:12 - Mom, what are you doing there?
01:38:16 [Music]
01:38:38 - But the door was open.
01:38:40 - I came back to apologize.
01:38:44 I didn't know anything, my daughter.
01:38:48 I couldn't even imagine it.
01:38:50 [Crying]
01:38:54 - Pao, Pao.
01:38:56 [Music]
01:38:58 - Raimunda!
01:39:00 [Music]
01:39:10 - My girl.
01:39:12 - My girl.
01:39:14 - The worst has happened.
01:39:16 He has seen me.
01:39:18 - And you didn't reject me, did you?
01:39:20 - No.
01:39:22 - Is it true that you came back to apologize?
01:39:26 - I'll be with you too.
01:39:30 - Someday you'll explain to me what's going on.
01:39:32 - Yes.
01:39:34 And that day I hope you understand me, Sole.
01:39:38 And that you forgive me too.
01:39:40 [Crying]
01:39:50 - Mom.
01:39:52 [Crying]
01:40:04 - I have to talk to her.
01:40:06 - Why don't we go back?
01:40:10 - Now.
01:40:12 - Of course.
01:40:14 [Crying]
01:40:26 [Horn]
01:40:30 [Horn]
01:40:38 [Horn]
01:40:44 - I've dreamed about this so many times.
01:40:46 - Me too.
01:40:48 - I don't know where to start.
01:40:52 - You're not a ghost, are you?
01:40:54 - You're not dead.
01:40:56 - No, my daughter, no.
01:40:58 - You're taking a weight off my shoulders.
01:41:00 - But if I had died,
01:41:02 I would have come back to apologize
01:41:04 for not realizing what happened to you.
01:41:08 I was blind.
01:41:10 I found out the same day the fire broke out.
01:41:13 - Is it true that you had left dad?
01:41:16 - Yes.
01:41:18 I couldn't take it anymore.
01:41:20 The evening of the fire,
01:41:22 you called and talked to the aunt.
01:41:26 As usual, you didn't ask about me.
01:41:29 I got very angry.
01:41:31 I told the aunt you were a whore.
01:41:33 And how you kept throwing up.
01:41:36 The aunt came out in your defense
01:41:41 and told me everything.
01:41:45 That your father had abused you.
01:41:52 That you were pregnant.
01:41:55 And that Paula was your daughter
01:41:59 and your sister.
01:42:02 I couldn't believe it.
01:42:05 How could such a monstrosity happen
01:42:08 in front of my eyes without me realizing it?
01:42:12 Then I understood everything.
01:42:16 I understood your silence
01:42:19 and your distancing.
01:42:21 I understood that your father
01:42:23 went to work in Venezuela,
01:42:25 unable to accept the shame of what he had done.
01:42:29 I understood that after marrying Paco,
01:42:34 you would come to Madrid
01:42:36 and you wouldn't want to know anything about us.
01:42:39 - I hated you for not realizing anything, Mom.
01:42:42 - And you were right, my daughter.
01:42:45 When I found out,
01:42:47 you don't know how I felt.
01:42:50 I went to the box, willing to tear out her eyes.
01:42:54 And I found her sleeping in the nap with Agustina's mother.
01:42:57 Both of them.
01:42:59 They didn't see me.
01:43:01 I set the box on fire.
01:43:04 It was a windy day
01:43:06 and in a short time the flames devoured everything.
01:43:10 She didn't have time to wake up.
01:43:13 - The ashes that are buried in your place
01:43:16 are from Agustina's mother.
01:43:19 - Yes.
01:43:21 Then I was lost in the field for a few days.
01:43:30 Hidden.
01:43:32 Like an animal.
01:43:34 I thought of giving myself up.
01:43:37 But first I went to see Paula.
01:43:42 And I found her so bad.
01:43:45 When she saw me, she didn't miss me at all.
01:43:50 I came from the past, where she lived.
01:43:54 And she welcomed me as if I had just come out the door.
01:43:59 The tragedy made her lose the little reason she had.
01:44:03 I couldn't leave her alone.
01:44:06 So I stayed to take care of her
01:44:10 until she died.
01:44:14 - Mom, people think you're a ghost.
01:44:17 - That's the good thing about these superstitious people.
01:44:20 It's easier for me to follow the trend than to tell the truth.
01:44:25 I thought I would be taken to prison.
01:44:28 I couldn't imagine that no one would investigate or punish me.
01:44:33 Although all this time
01:44:36 I swear I have lived in a real purgatory.
01:44:40 I swear I have lived in a real purgatory.
01:44:43 It's better said.
01:44:50 - The word "purgatory" is beautiful.
01:44:53 It reminds me of what Marnie lived at the end.
01:44:57 I was saying the point of view of the screenwriter
01:45:02 who wrote Hitchcock's film.
01:45:05 He went very far in the crudeness of the abuses
01:45:10 that the character of Tippi and Drenn lived.
01:45:13 At the same time, at the end of Marnie,
01:45:16 when she leaves, the only thing she has is this marriage
01:45:20 which is a captivity that is not different from the limousine
01:45:26 where Hitchcock wants to lock her up.
01:45:29 She comes back to the places of her past,
01:45:34 she visits them again, but at the same time she can't leave.
01:45:38 She is condemned to stay there.
01:45:41 The point of view at the end of Marnie is that of this man
01:45:45 who hits the three times and puts her in a theater setting
01:45:50 to lock her up.
01:45:52 Because as I said, in a theater setting,
01:45:55 from my cinephile point of view,
01:45:58 if we have to play an opposition, not Murphy,
01:46:01 but a theater-cinema opposition, which is very old,
01:46:04 we are not free, I am not free in the theater setting.
01:46:08 The freedom is what is incredibly embodied
01:46:12 by the directing of Almodovar,
01:46:14 which makes me think a lot of Stanley Donen.
01:46:17 All this sequence, this way in which he will
01:46:20 stage a return, which is the title of the film,
01:46:24 which is not a repetition,
01:46:27 a takeover, in the sense that Kierkegaard leaves the takeover,
01:46:31 or comes back somewhere, but to play something else.
01:46:38 I was thinking, I advise you to go see James L. Brooks' film,
01:46:45 James L. Brooks has always, almost always,
01:46:49 in each of his films, filmed women by the little girls they were.
01:46:53 This is a sentence that Henry James says,
01:46:55 "Women are nothing more than little girls who grew up."
01:46:59 There is something very beautiful in the way,
01:47:02 not the literal way that James L. Brooks
01:47:05 stages in several of his films,
01:47:08 Broadcast News, Spanglish, and Tendre Passion.
01:47:12 His female character starts by staging her as a baby,
01:47:17 as a little girl, and then sees what she becomes.
01:47:21 But the way the film will offer the possibility
01:47:24 to the characters played by Penelope Cruz
01:47:27 to come back to this place, this place of silence,
01:47:30 which is the place of incest,
01:47:32 to literally be able to set fire to it.
01:47:35 Like the sea set fire to it.
01:47:39 So I was saying at the beginning,
01:47:41 that's why you need a heart,
01:47:43 I was talking about tragedy at the beginning,
01:47:45 saying that tragedy is not a text.
01:47:47 That's why taking what was not a text,
01:47:49 and what did not come to us as complete texts,
01:47:52 and making it, for example, a Bible to interpret Oedipus,
01:47:56 is really starting from a total misunderstanding
01:48:00 about the fact that there was no myth,
01:48:02 and there was no text.
01:48:04 However, there was an experience,
01:48:06 which was an experience,
01:48:08 we could say in a contemporary retrospective,
01:48:11 of empathy.
01:48:13 These tears that we will shed,
01:48:16 and that we will shed in the cinema,
01:48:19 Florence Dupont thinks that in the cinema
01:48:21 we don't go to shed tears,
01:48:23 and I don't agree with the brilliant Florence Dupont,
01:48:28 I think we also go to the cinema to shed tears,
01:48:31 precisely because we are not in a theatre,
01:48:33 where in half a day it's dark,
01:48:35 so we can cry all we want.
01:48:38 And for that you need a heart,
01:48:40 you need a mediation.
01:48:42 In these texts that came to us,
01:48:45 in these scenic experiences that came to us,
01:48:48 it was about crying,
01:48:50 crying in music, crying for the dead,
01:48:53 crying with the dead,
01:48:55 and crying through the mediation of the heart,
01:48:57 which gave us this,
01:48:59 not by hitting three times
01:49:01 to force us to come back somewhere,
01:49:04 and then lock us in there,
01:49:06 why not come back somewhere?
01:49:08 But obviously, it's a parody of an analytical session,
01:49:11 since the goal of an analytical session
01:49:13 is not to lock the patient in the trauma
01:49:15 that she will have to play again,
01:49:17 as the pervert husband does.
01:49:20 So we will end on this heart,
01:49:24 we will wrap up, it's a very short extract at the end,
01:49:27 which takes up the scene of the audition,
01:49:34 of this great girl,
01:49:38 this Penélope Cruz in the film,
01:49:40 this very beautiful character
01:49:42 who is taken between, it's a three-generation film,
01:49:44 the grandmother, the mother and the little girl,
01:49:48 herself, this little girl who was abused by her father,
01:49:53 she also lived everything that the little girl of Bellissima lived at the beginning,
01:49:59 that is to say the beauty contest, the audition,
01:50:02 the fact of being brought back like that,
01:50:04 like a piece of meat,
01:50:06 to be sold like that by her mother,
01:50:10 or her grandmother in this case,
01:50:12 and just like in the whole film's staging movement,
01:50:16 which is really a musical comedy movement,
01:50:18 that's why I was talking about Stanley Donnan,
01:50:20 the fluidity of the staging makes me think of Stanley Donnan
01:50:24 or "Au bas fragile" by Jacques Rivette,
01:50:26 well, she will sing again,
01:50:29 she will be able to sing again this character,
01:50:31 evoking the audition,
01:50:33 but singing this time outside of this audition
01:50:37 to which she was forced,
01:50:39 and we will end on that,
01:50:41 with a very short excerpt.
01:50:44 Je ne chante pas depuis longtemps,
01:50:46 mais je vais m'encourager aujourd'hui.
01:50:48 Voyons voir ce qu'il en sort.
01:50:51 Je suis en colère du rencontre
01:50:55 avec le passé qui me rend
01:50:59 à me battre avec ma vie.
01:51:02 Cette chanson sera la de votre mère,
01:51:04 pour présenter à la casting de "Niña Canta".
01:51:06 Je suis en colère de la mort
01:51:09 de ma mère,
01:51:11 pour présenter à la casting de "Niña Canta".
01:51:13 Je suis en colère de la mort
01:51:16 de ma mère,
01:51:18 pour présenter à la casting de "Niña Canta".
01:51:20 J'ai peur de la nuit
01:51:24 qui, pour rien de souvenir,
01:51:28 me chaîne mon rêve.
01:51:31 Mais le voyageur qui s'en va
01:51:34 tard ou tard, arrête son chemin.
01:51:37 Et même si l'oubli, qui détruit tout,
01:51:40 a battu ma vieille illusion,
01:51:44 je garde en escouse une humble espérance
01:51:47 que toute la fortune de mon cœur
01:51:51 revienne.
01:51:55 Avec la tête marquée,
01:52:00 la neige du temps
01:52:02 a battu mon ciel.
01:52:04 Ressentir
01:52:08 que la vie est un souffle,
01:52:11 que 20 ans ne sont rien,
01:52:13 que la gaze s'éclate
01:52:15 et que la sombre
01:52:17 cherche et nomme la vie.
01:52:21 Avec l'âme fermée
01:52:24 à un doux souvenir
01:52:26 que je pleure encore.
01:52:30 Bravo !
01:52:32 Voilà, on termine avec ce film
01:52:41 qui permet de mettre dans le même lieu
01:52:44 deux femmes, trois générations même,
01:52:47 de femmes qui peuvent pleurer ensemble.
01:52:50 Merci.
01:52:52 (Applaudissements)
01:52:55 [SILENCE]

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