• il y a 10 mois
L'autrice Stéphanie Polack présente son nouveau livre, "Les corps hostiles". Maude y est en lutte avec son désir pour un homme typique d'un cliché détestable. L'écrivaine a souhaité un personnage hors de cet autre cliché femme fatale / mère / victime, pour explorer cette attirance qui nous déroute.

Plus d'infos : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20/l-itw-de-9h20-du-mardi-06-fevrier-2024-7333532

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Transcription
00:00 - Et Léa, ce matin, votre invitée est éditrice et autrice.
00:03 - Bonjour Stéphanie Polak.
00:05 - Bonjour.
00:06 - Merci d'être avec nous ce matin.
00:07 Si vous étiez un sentiment, un animateur télé et une drogue, vous seriez quoi ?
00:11 - Un sentiment, je crois que je serais l'amour.
00:14 Même si ça parait un peu galvaudé, ça n'est pas tant que ça.
00:17 Si j'étais un animateur télé, je serais Henri Chapier parce qu'il était fondu de
00:22 cinéma, Polyglotte, ce qui est mon rêve, et qu'il a croisé Fritz Lang.
00:26 Donc ça vaut le coup.
00:27 Et si j'étais une drogue, je serais la bouffe, je crois.
00:29 - Vous ne parlez ni de Cyril Hanouna, ni de la coke, pourtant qui sont très présentes
00:34 dans votre roman.
00:37 Avant d'y venir, cette citation de la Recherche du Temps Perdu de Proust, Swan se fait la
00:44 réflexion suivante sur sa relation à Odette.
00:46 "Dire que j'ai gâché des années de ma vie, que j'ai voulu mourir, que j'ai eu mon plus
00:51 grand amour pour une femme qui ne me plaisait pas et qui n'était pas mon genre."
00:56 Ça vous parle ?
00:57 - Oui, ça me parle.
00:58 Mais c'est plutôt elle qui n'est pas son genre.
01:01 En tout cas, c'est une rencontre qui se...
01:04 Mais je crois qu'il lui arrive quelque chose d'idiot à cette mode.
01:08 - À cette mode, c'est votre narratrice, c'est votre héroïne, l'héroïne de votre roman,
01:12 les corps hostiles chez Grasset.
01:14 - C'est qu'elle n'avait pas anticipé qu'elle allait se retrouver subjuguée et retenue
01:19 par la présence physique et par le corps d'un homme.
01:24 - Je vais vous laisser parler du roman et du corps notamment, puisque c'est au cœur
01:29 de ce roman, des désirs contraires, des attractions contraires.
01:32 Il en est question dans ce roman qui est, et c'est pour ça que je vous ai invité,
01:35 l'un des plus forts sans doute de cette rentrée littéraire d'hiver.
01:38 En tout cas, celui dont on parle le plus.
01:40 Un roman que vous publiez 12 ans après le précédent.
01:42 On peut dire que vous l'avez mûri celui-là.
01:44 12 ans, c'est long.
01:46 Mais il faut dire que votre premier métier, c'est pour vous resituer pour nos auditeurs,
01:49 Stéphanie Pollax, éditrice où vous publiez les grandes voix du féminisme contemporain
01:53 comme Laurent Hedrickel ou Maria Pourcher.
01:55 Mais là, c'est votre voix qu'on entend à travers cette réhéroïne de maude.
01:59 Une intello, la petite quarantaine, vivant en couple, plutôt heureuse d'ailleurs avec
02:05 Franck, est embauchée pour travailler, pour écrire des chansons avec un chanteur un peu
02:09 médiocre dont elle trouve que le travail est de la daube, c'est elle qui le dit.
02:13 Un mec irrationnel et mécanique, narcissique et bodybuildé.
02:17 Bref, tout ce qu'elle méprise.
02:19 Sauf que voilà, il lui plaît.
02:20 Il lui plaît terriblement ce Loïc, ce petit chanteur.
02:23 Il a envie de son corps et elle se laisse bientôt aller à une passion dévorante et
02:27 obsessionnelle qui balaye tout, à ce désir qui vous fout droit la moelle, qui s'impose
02:31 avec une telle puissance.
02:32 Écrivez-vous, ce que votre livre dit, c'est que c'est le corps qui décide.
02:37 Que la raison, l'esprit ne peut rien, même la culture ne peut rien.
02:41 Quand le corps veut, il écrase tout.
02:44 Oui, mais je pense qu'elle est plus ambiguë que ça encore.
02:47 Je pense qu'elle évalue sans tout à fait se le dire très vite qu'il y a une expérience
02:53 à faire là-dedans et qu'à travers cette histoire, elle va pouvoir interroger des choses
02:58 qu'elle a envie d'interroger sur ce que c'est qu'un mec, ce que c'est que la masculinité,
03:02 ce que c'est que sa féminité.
03:03 Je pense que c'est ça aussi qui se joue.
03:06 Elle se dit que ce mec qui incarne une masculinité un peu paroxystique et ridicule, c'est vrai,
03:11 va lui permettre d'explorer des choses en elle et va lui permettre de comprendre des
03:15 choses de la masculinité.
03:16 Et il faut dire aussi que ça arrive à un moment de sa vie très particulier, puisqu'en
03:20 fait elle fait ce qu'on appelle une fausse couche tardive qui à la fois la bouleverse
03:26 et en même temps, et ça j'y tiens, revigore quelque chose chez elle.
03:31 C'est-à-dire qu'elle se voit bizarrement amplifiée par cette perte, comme si on pouvait
03:35 aussi être fort de ce qu'on perdait.
03:37 Et c'est peut-être aussi ça qui va la précipiter dans cette histoire.
03:40 Oui, d'ailleurs les pages sur la fausse couche sont particulièrement fortes et particulièrement
03:45 bien écrites pour qui a connu ça.
03:50 Elle se regarde désirer cet homme qui n'a rien à voir avec elle, qui consomme les femmes
03:54 tous les jours comme une drogue, des femmes refaites et botoxées, interchangeables, qu'il
03:58 drague sur Instagram, cet homme qui prend de la coke tous les jours.
04:01 Elle se regarde, elle, le désirer et elle se juge.
04:04 Elle juge ce désir honteux, elle dit que c'est la part dégueulasse d'elle-même.
04:07 Oui, parce qu'il y a quelque chose qu'elle ne comprend pas, elle sent qu'elle a besoin
04:13 et c'est vrai que ça la caractérise, je pense, d'être désaxée par les rencontres
04:17 qu'elle fait, d'être défaite de ce qu'elle est, d'être libérée bizarrement de l'enfer
04:22 que c'est parfois d'être soi et de naître que soi.
04:24 Sauf qu'effectivement, ça la plonge dans des turpitudes et dans des histoires dont
04:28 elle ne comprend pas toujours exactement comment elle a pu s'y égarer, alors que par ailleurs,
04:32 c'est quelqu'un de plutôt fiable, dentier, de constant.
04:35 Donc, il y a quelque chose là qu'elle n'arrive pas totalement à craquer, mais c'est vrai
04:40 qu'elle rentre peut-être dans cette espèce de psychose ordinaire qui consiste à ne pas
04:44 céder sur son désir, comme on dit.
04:46 J'avais envie que ce corps-là, ce corps inouï, me terrasse et m'étreigne, me fragilise
04:51 et m'amplifie.
04:52 Un corps pénétré est un corps amplifié, Stéphanie Pollack.
04:56 Je crois.
04:57 Je pense que si on commence à imaginer la sexualité en pensant qu'on est soumis quand
05:03 on est pénétré, c'est une catastrophe, surtout pour les femmes et pour les hommes
05:07 qui peuvent jouir aussi d'être pénétrés.
05:09 D'ailleurs, le personnage, dès le prélude, vous faites référence à Jean Genet et à
05:17 Querelle de Brest.
05:18 Son personnage de marin homosexuel et criminel.
05:20 Fassbinder avait fait un film sur Querelle de Brest.
05:22 Absolument.
05:23 Dans Querelle, il y a une anecdote qui a été un moment épiphanique pour moi.
05:27 C'est que Querelle déboule, c'est une espèce de marin qui sème le désordre là où il
05:32 va, qui rend exactement une espèce de figure pasolinienne.
05:35 Il prie pasolinienne, il déboule au feriat, qui est le bordel local, et il joue son corps
05:41 sur une partie de dés et il triche pour perdre.
05:44 Parce que quand il s'offre, il a le sentiment d'affirmer une part de sa puissance.
05:48 J'ai appris plus tard que ça s'appelait les power bottom.
05:51 Et bien voilà, vive les power bottom.
05:53 Sur le désir et le plaisir des sangs, j'avais envie de vous faire écouter l'amant de
05:57 Lady Chatterley, de D.H.
05:59 Lawrence.
06:00 Quand Lady Chatterley découvre l'extase avec son amant, elle explique que tous les
06:04 poètes du monde mentent.
06:06 On n'a pas besoin de mots, de sentiments, on a juste besoin de jouir.
06:10 Lecture de Guillaume Gallienne.
06:11 C'était là la vie, c'était ainsi qu'on était vraiment.
06:15 Il ne restait rien qu'il fallut cacher ou dont on dut rougir.
06:18 Elle partageait son ultime nudité avec un homme, avec un autre être.
06:24 Maintenant elle en était sûre.
06:26 Profondément dans les assises mêmes de son âme, elle avait secrètement soupiré
06:31 après cette battue phallique et elle avait cru qu'elle ne la connaîtrait jamais.
06:34 Et soudain, c'était cela.
06:37 Quels menteurs, les poètes et tous les autres.
06:41 Ils vous font croire qu'on a besoin de sentiments, quand au contraire ce dont on a suprêmement
06:46 besoin c'est de cette sensualité perçante, consumante, peut-être horrible.
06:51 Saskia de Ville : Ils mentent les poètes ?
06:53 Oui, c'est marrant parce que je lisais ce matin dans l'Ibé que les jeunes se passaient
06:59 de plus en plus de sexualité et que c'était peut-être une bonne chose.
07:01 Il y a ce sondage incroyable qui dit que les 18-24 ans ne font plus l'amour ou quasiment
07:08 plus, en tout cas 5 fois moins qu'il y a 10 ans.
07:10 Et c'est vrai que je conçois que la raison du malin phallocrate a pu s'adosser à la
07:15 libération sexuelle pour imposer sa loi.
07:18 J'entends ça, il faut faire très attention à la manière dont on fait l'amour parce
07:22 qu'on s'expose à des choses émotionnellement dangereuses.
07:24 C'est vrai que je trouverais très dommage de se priver de l'accès à soi et à l'autre
07:30 merveilleux malgré tout qui est le sexe.
07:34 Saskia de Ville : Oscar Wilde disait "Tout dans le monde est une question de sexe, sauf
07:37 le sexe.
07:38 Le sexe est une question de pouvoir".
07:39 Ah oui, justement, je ne suis pas sûre d'être d'accord avec ça.
07:43 Je ne suis pas sûre d'être d'accord avec ça.
07:45 Ça peut bien sûr, c'est traversé par une symbolique tellement puissante.
07:47 Mais justement, je pense que c'est le seul lieu où cette symbolique-là peut s'abolir.
07:52 Ça dépend évidemment de l'éthique des deux partenaires.
07:55 Mais en tout cas, ce que pressent Maud, c'est que le théâtre du genre, avec lequel elle
08:01 aime beaucoup jouer aussi, ne suffit pas à épuiser la question de sa féminité.
08:05 Et qu'il y a quelque chose de sa féminité qu'elle explore et qu'elle ne peut explorer
08:10 que dans la sexualité.
08:11 Qu'en étant possédée.
08:13 C'est ce que vous écrivez.
08:14 Vous disiez dans une interview à Elle avoir envie de créer un personnage féminin qui
08:18 sorte de certaines représentations agréées.
08:20 Dans ce sens, ça a été revigrant pour vous de voir les derniers films de Justine Trier
08:24 et de Catherine Brea qui mettent en scène des personnages féminins pas forcément séduisants,
08:28 possiblement coupables ou vampiriques.
08:30 Des personnages de femmes pas sympas.
08:32 J'aime, dites-vous, l'idée que le féminin se décline en sortant des polarisations.
08:37 Et ça, c'est très intéressant.
08:38 Fatale, mère, victime.
08:40 C'est vrai qu'on est un peu enfermé dans ces trois catégories.
08:43 Soit tu es la femme fatale, soit tu es la mère, soit tu es la victime.
08:46 Oui, et moi c'est vrai que j'étais fatiguée de ces représentations.
08:49 Du coup, j'ai sans doute composé Maud à partir de ce que j'avais de plus ingrat,
08:55 de ce que j'avais de moins agréable, de ce que j'avais de moins sympa, de ce que j'avais
08:59 de plus brutale aussi.
09:00 J'espère quand même être un peu plus sympa qu'elle.
09:02 Oui, vous êtes… Je ne connais pas bien, mais vous semblez plus sympa.
09:07 Mais elle n'est pas désagréable, attention.
09:08 Vous n'avez pas fait une méchante.
09:10 Non, j'espère pas.
09:12 Elle se regarde désirer cet homme qui va à la salle de sport tous les jours pour sculpter
09:17 son corps, qui prend des anabolisants, qui fait des séances d'UV pour bronzer, cet
09:20 homme qui met de la crème sur la peau et de l'huile sur son corps.
09:22 Cet homme au trait féminin, dites-vous, alors qu'elle, elle se juge masculine.
09:26 J'ai le sens de l'agressivité, du refus, de l'ironie, je bois de la bière au goulot,
09:30 j'aime conduire et plutôt vite, j'ouvre ma gueule et jusque dans la confusion, je
09:33 prends position, comme on dit.
09:35 Vos deux personnages principaux troublent les frontières du genre, comme dirait Judith
09:38 Butler.
09:39 Vous dites, je trouvais urgent de repenser le féminin et le viril.
09:43 Là, c'est l'histoire aussi, c'est vrai, d'une femme qui regarde un homme.
09:47 Et je crois que j'avais envie de documenter ce moment de ce qu'on appelle de la cristallisation
09:52 amoureuse ou de l'innamoramento du point de vue d'une femme.
09:56 Qu'est-ce que c'est en fait que cette tyrannie ordinaire qui consiste à déposséder l'autre
10:00 de ce qu'il est pour en faire une espèce de chimère, de créature mythologique entre
10:05 l'animal et le demi-dieu alors qu'il n'en demande pas tant ? Et en plus, une fois que
10:08 vous avez fait ça, évidemment, une fois que vous avez fait de l'autre un minotaure ou
10:12 un centaure, vous le condamnez à vous décevoir.
10:15 Il ne peut pas en être autrement.
10:16 Et ce qui m'intéresse aussi, c'est que c'est peut-être avec la déception aussi paradoxale
10:20 que ça puisse paraître que peut-être peut commencer quelque chose qui pourrait commencer
10:24 à ressembler à l'amour.
10:25 Mais pour ça, il faut aussi que l'autre soit accepte d'être regardé dans la nudité
10:30 et la modestie de ses limites.
10:32 Oui, c'est pour ça que cet homme a du mal en fait.
10:34 C'est-à-dire qu'il consomme les femmes tous les jours, des femmes botoxées, interchangeables.
10:38 Écrivez-vous des femmes fantasmées et quand il arrive avec elles, à un moment…
10:45 Tout est insupportable.
10:46 Mais il n'y arrive pas surtout.
10:48 Parce qu'il l'admire, parce qu'elle ne correspond pas à ses canons de beauté.
10:50 Et puis il faut voir la configuration dans laquelle ils sont saisis.
10:53 C'est-à-dire qu'elle écrit pour lui.
10:56 Donc elle est d'emblée dans cette configuration-là.
10:59 Il va dire ses mots.
11:00 Elle est en position de puppet master, de démurge.
11:04 Comment est-ce que vous faites pour arriver à désirer un démurge ? Surtout que lui,
11:08 il a en plus besoin de dominer ce qu'il désire.
11:11 Donc il se retrouve effectivement dans une impasse.
11:13 Et elle avec lui.
11:14 Le livre interroge aussi sur le vieillissement du corps.
11:17 Elle a 40 ans, elle se regarde dans la glace, elle voit les défauts, la cellulite, la peau
11:20 qui se relâche.
11:21 Et elle ne supporte pas trop ça.
11:22 Non, c'est difficile.
11:23 En fait, il y a une chose qu'il faut comprendre, je crois.
11:27 C'est que nos générations, en tout cas, 35-55, on est tous les enfants et les petits-enfants
11:32 d'hommes et de femmes qui ont embrassé avec le XXe siècle une industrie qui est Hollywood
11:39 et dont les normes de genre ont entièrement été façonnées par Hollywood.
11:43 Et ça, ça condamne les hommes à être tous plus ou moins des héros.
11:47 Et évidemment, ils n'y arrivent pas.
11:48 Et ça condamne toutes les femmes à être et à rester résolument bandantes.
11:52 Et évidemment, à un moment donné, on n'y arrive pas.
11:54 Et elle, elle résiste.
11:55 Mais son combat, évidemment, est vain.
11:58 - C'est un livre sur le corps, sur le désir, sur les désirs contraires.
12:03 C'est un livre aussi sur l'époque.
12:04 C'est une satire sociale que vous faites à travers ce personnage, cet homme, ce garçon
12:09 très très dans son époque, sur les réseaux sociaux, ce chanteur très narcissique qui
12:14 va d'ailleurs participer à une émission de Cyril Hanouna, TPMP.
12:18 Et là, vous écrivez ce type d'émission.
12:21 Elle regarde, elle veut regarder ce que c'est que le TPMP d'Hanouna.
12:24 Ce type d'émission exercée sans que je le veuille, une séduction trouble sur moi,
12:28 ce mélange de vulgarité bonne enfant, d'explosion d'anarchie infantile sur fond de calcul politique,
12:32 d'idéologie travestie et de rationalisation par l'audience, donnait le ton d'un XXIe
12:36 siècle toujours plus au bord de la psychose et dans lequel, comme tout le monde, je m'englouais.
12:41 - Oui, oui, je regarde souvent Hanouna.
12:43 - C'est vrai ?
12:44 - Oui, oui, je regarde souvent Hanouna parce qu'il y a quelque chose là-dedans qui est
12:46 tellement symptomatique des temps dans lesquels on est saisi.
12:49 Mais à chaque fois, je pense un peu à, pour moi, je ne sais pas, à une figure comme Trump,
12:54 une figure comme Zelensky, une figure comme Hanouna.
12:56 C'est des figures du XXIe siècle.
12:59 Ils n'auraient pas pu exister au XXe siècle.
13:02 Hanouna qui a commencé effectivement en se mettant à poil sur la chaîne comédie et
13:06 qui aujourd'hui interviewe les plus grands politiques, c'est quelque chose au XXe siècle
13:09 qu'on n'aurait pas pu imaginer.
13:11 Et oui, il y a une part de moi que ça émerveille malgré moi.
13:15 - Elle a aussi son amie Barbara, cette jeune maude, qui a réglé le problème du désir
13:19 pour les hommes.
13:20 C'est dépasser le désir, elle vous dit, c'est un truc du XXe siècle.
13:24 Et elle vous explique que le mieux, c'est de devenir lesbienne.
13:26 Elle m'a fait penser à Virginie Despentes, que j'avais interviewée il y a quelques
13:29 années, qui m'expliquait pourquoi elle était enfin sereine et heureuse d'être
13:33 devenue lesbienne.
13:34 - Parce que c'est beaucoup plus simple, parce que c'est beaucoup plus joyeux, parce
13:37 que justement, on n'est pas tout le temps en train de se retaper à la maison et dans
13:42 l'histoire d'amour des trucs extrêmement douloureux.
13:44 Parce que l'histoire entre les hommes et les femmes, c'est extrêmement douloureux.
13:47 Et donc, on invente autre chose aussi parce qu'on est soustrait à quelque chose qui
13:50 est le regard de l'homme qui a tout le temps dit ce qui était bien pour elle, ce qui
13:54 était bien dans son attitude, ce qui était bien pour sa psyché, pour sa libido.
13:56 Là, dès que tu sors de l'hétérosexualité, tu sors de tout ça, de cette exigence masculine
14:02 qui porte sur toi tout le temps.
14:03 Et il se trouve que c'est un soulagement, en tout cas pour moi.
14:07 Et je vois bien que ce n'est pas pour moi, en fait.
14:09 C'est vraiment une fête.
14:11 - Oui, je l'entends, je la comprends.
14:16 C'est vrai que ce qu'il faut comprendre, c'est que je crois que la masculinité, elle
14:20 est hantée par la peur de l'impuissance.
14:22 C'est un pléonasme, en fait.
14:24 La virilité, non.
14:25 C'est peut-être un des projets inconscients du livre, c'est d'opposer la masculinité
14:28 à la virilité.
14:29 Mais la masculinité, elle est hantée par la peur de l'impuissance.
14:30 Et quand on a peur de sa propre impuissance, de sa possible impuissance, on fait de l'autre
14:34 une espèce de fétiche parce qu'il est plus facilement manipulable ou possédable.
14:38 En tout cas, c'est ce qu'il se raconte.
14:39 - Et enfin, pour finir, Stéphanie Polacq, il y a dans ce livre de la critique musicale,
14:44 un livre très pop, très contemporain.
14:46 Puisque vous avez une théorie, les gens se classent dans deux catégories.
14:49 Ceux qui préfèrent les chansons de Julien Clerc composées par Jean-Loup Dabadie et
14:52 ceux qui préfèrent les chansons de Julien Clerc composées par Étienne Rodagil.
14:55 Et bien, je vous soumets un quiz.
14:57 - J'étais sûre, je n'ai pas du tout révisé.
14:59 - Eh bien, regardez.
15:00 - J'ai écrit ça en 10 minutes.
15:01 - Oui, ben, faut assumer.
15:02 - Oui, absolument.
15:03 Allez-y, allez-y.
15:04 Je vais vous dire.
15:05 - C'est Dabadie.
15:09 - Ah oui, c'est toujours un peu Guillaume Vivaldi.
15:24 - C'est ce que vous dites.
15:25 Il faut acheter le livre pour la théorie sur Dabadie et sur Rodagil.
15:31 - Ce n'est rien.
15:34 - Ah oui, ils ne vont pas me mettre ce n'est rien.
15:36 - C'est ma prêf.
15:37 - Ben oui, c'est sa prêf en plus.
15:39 Rodagil.
15:40 Bon, ils vont la retrouver.
15:42 Pour finir, les impromptus.
15:44 Et après, premier, on l'écoute à la fin.
15:46 Écrire ou éditer, Stéphanie Polac ?
15:48 - Lire.
15:49 - Vous seriez un homme pendant 24 heures, vous faites quoi ?
15:52 - Je fais l'amour tout de suite pour voir quand même.
15:55 - Le réarmement démographique d'Emmanuel Macron, vous en pensez quoi ?
15:58 - Ouf.
15:59 - Marguerite Duras ou Virginia Woolf ?
16:01 - Duras.
16:02 - Wim Wenders ou John Kassavets ?
16:04 - Ça dépend qu'à quelle époque.
16:06 Allez, Wenders.
16:09 - Etienne Dao ou Miosec ?
16:11 - Miosec.
16:12 - Tpmp ou La Grande Librairie ?
16:14 - La Grande Librairie.
16:16 - Sinon, Augustin n'est pas content.
16:18 - Etretat ou Dieppe ?
16:20 - Etretat.
16:21 - Gallimard ou Grasset ?
16:22 - Oh, dis donc.
16:23 - Eh oui.
16:24 - Grasset, c'est ma maison.
16:25 - Fayard ou Stock ?
16:26 - Stock.
16:27 - C'est votre nouvelle maison.
16:28 - Oui.
16:29 - Liberté, égalité, fraternité, vous choisissez quoi ?
16:31 - Fraternité.
16:32 - Et Dieu dans tout ça ?
16:34 - Dieu, j'y pense souvent, mais je n'y crois pas.
16:40 - Les Corps Hostiles, c'est chez Grasset, ce livre tendu, électrique, troublant et très moderne.
16:47 Lisez-le, vous aimerez.
16:49 Et on termine avec "Ce n'est rien" quand même.
16:51 - Ah, merci.
16:52 - Mais ce n'est rien, Stéphanie.
16:54 - Et merci à mes amis techniciens.

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