L'invité du jour - David Foenkinos

  • il y a 6 mois
Du lundi au jeudi, rendez-vous, dès 6h30 avec Thomas Sotto et Marie Portolano. Et du vendredi au dimanche, c'est au tour de Damien Thévenot et Maya Lauqué de dynamiser le réveil.

Category

📺
TV
Transcript
00:00 -C'est le romancier David Fuenkinos. Bonjour.
00:02 -Bonjour.
00:03 -Merci de nous avoir rejoints ce matin,
00:05 rejoint toute l'équipe.
00:07 -Avec Ben Silly, avec Adrien et avec Olivia.
00:09 -Evidemment. On va parler de votre dernier roman,
00:12 "La vie heureuse", David Fuenkinos, paru chez Gallimard.
00:14 Mais d'abord, puisque vous dites pour moi
00:16 "Trouver les prénoms de mes personnages,
00:18 c'est 90 % du travail",
00:20 comment est-ce qu'on procède et comment est-ce que vous arrivez à Eric ?
00:24 -Oui, c'est très important.
00:26 Quand j'ai écrit "La délicatesse",
00:27 j'ai mis du temps à trouver le prénom de mon héroïne.
00:30 Finalement, elle s'appelle Nathalie et ça évoque la Renaissance.
00:32 Donc c'est vrai que je cherche...
00:34 Une fois que j'ai le prénom, j'ai 80 %...
00:36 Je vais faire un livre avec Mathieu et Maya.
00:39 On verra l'ambiance. -Mais pourquoi pas ?
00:41 -Ca va être entreprendre. -C'est électrique, comme on dit.
00:44 -Vous prenez un dictionnaire des prénoms
00:46 et vous voyez ce qui vous inspire ?
00:47 -Vous pensez qu'on écrit... Non.
00:49 En fait, je cherche la sonorité.
00:50 Pour moi, c'est très important et ça donne une énergie.
00:53 Et Eric Caresson, c'est vrai qu'on imagine un personnage...
00:56 Au début, il est un petit peu dépressif.
00:58 Il travaille chez Decathlon.
00:59 Il en a marre que tout le monde lui dise "Alors, affronte la forme."
01:02 Et après, effectivement, il va se renouveler.
01:04 On sent chez lui, avec ce prénom, un potentiel de réinvention.
01:09 Une façon de démonstrer sa vie. -Vous vous sentez presque chez un Eric.
01:11 -Voilà, exactement.
01:12 -Et Mathieu, par exemple, ça vous a...
01:14 -Je le sens pas, Mathieu. -Vous le sentez pas.
01:16 C'est risqué. -Mais c'est très matinal.
01:18 Le Mathieu est matinal. -Il y a deux T.
01:19 -C'est pas surprenant que vous soyez là.
01:22 -Le roman raconte l'histoire d'Eric, cadre, avec une belle carrière,
01:26 qui s'ennuie, je vais un peu vite.
01:28 Il est contacté par une camarade de classe de son enfance
01:30 qui lui propose un job dans un cabinet ministériel.
01:33 Et c'est le point de départ, finalement.
01:34 Ensuite, c'est un livre sur la notion de seconde chance,
01:37 l'idée de changer de vie.
01:38 Vous croyez qu'on peut changer de vie ?
01:40 -J'en ai la certitude.
01:41 Et on voit bien partout autour de nous, il y a beaucoup de gens qui se réinventent.
01:45 Moi, je vois des gens qui quittent tout pour aller vendre du fromage en Corse
01:49 ou devenir professeur de yoga.
01:50 Et c'est vrai qu'il y a une interrogation permanente sur le bien-être,
01:54 la vie heureuse, l'essentiel, ce qui n'est pas essentiel.
01:56 C'est vrai que mes personnages, et d'ailleurs tous les personnages du livre,
01:58 vont, à un moment donné, changer de vie.
02:00 Alors, pour des raisons particulières dans le livre,
02:03 mais j'aime bien cette idée de prendre son destin.
02:06 -Olivia, vous avez un mot à nous dire ?
02:08 -Oh bah, j'aime beaucoup ce livre, j'en ai parlé ici,
02:11 parce que je trouve qu'il a une sorte de mélancolie heureuse.
02:15 Certes, au départ, il va pas très fort,
02:18 mais effectivement, je trouve que quand on referme les livres de David Fuentesquinos,
02:23 on a toujours une sorte de sourire comme ça, et de deuxième chance.
02:27 Et il y a une chose que je me demandais,
02:29 c'est qu'avec cette deuxième chance, dans votre livre,
02:31 il faut écrire son épitaphe.
02:33 -Exactement.
02:34 -C'est dur, oui, effectivement,
02:36 parce qu'il y a un rituel au coeur du livre, un vrai rituel.
02:39 -C'est une idée que vous importez de Corée du Sud,
02:42 une thérapie basée sur de fausses funérailles,
02:45 "Happy Life", la vie heureuse, vous l'avez renommée ainsi dans le roman.
02:49 En fait, c'est votre enterrement comme si vous y étiez.
02:51 -Exactement. C'est vrai qu'on a parlé d'Eric et Amélie,
02:53 donc c'est leur histoire sur 30 ans, mais au coeur du livre,
02:56 vous avez raison, il y a ce rituel coréen, on voit des images,
03:00 qui est un véritable phénomène en Corée du Sud.
03:02 C'est l'idée, qu'on peut aisément comprendre,
03:04 de vivre physiquement sa mort, son enterrement,
03:07 pour pouvoir avoir un rapport peut-être plus apaisé à la vie
03:11 et à ses propres angoisses.
03:12 Donc voilà, vous vous mettez pendant une heure dans un cercueil,
03:15 l'obscurité, le silence, vous rédigez votre épitaphe, effectivement,
03:19 vous, parfois même une lettre d'adieu,
03:22 vous mettez votre photo, il y a votre nom...
03:24 -Il n'y a pas de fête autour, il n'y a pas un pot...
03:27 -Alors ça, c'est le côté festif !
03:29 -Il n'y a pas beaucoup d'invités !
03:31 -Non, alors, ça serait pas mal,
03:33 parce que j'aimerais beaucoup que ça arrive en France,
03:34 on prendra votre idée, on fera un petit pot après.
03:36 Mais en tout cas...
03:37 -Vous goûtez des spécialités.
03:38 -Mais ça me touche beaucoup que vous puissiez dire ça,
03:40 parce que c'est, pour moi,
03:42 j'ai vu beaucoup de regards angoissés quand je raconte ce rituel,
03:45 mais c'est, je vais pas dire que c'est joyeux,
03:47 mais c'est extrêmement bénéfique,
03:48 c'est pour faire du bien quand on voit les commentaires...
03:50 -C'est une thérapie !
03:51 -Oui, c'est une thérapie vraiment qui est un phénomène en Corée du Sud,
03:54 c'est vraiment une thérapie de choc.
03:55 On est dans un pays avec un grand taux de suicide,
03:57 beaucoup de malades, de pression sociale,
03:59 et c'est vrai que cette thérapie fait du bien.
04:01 Moi, j'ai lu, grâce à Google Traduction,
04:04 les commentaires sur les forums coréens,
04:06 et beaucoup parlent de seconde vie, de renaissance,
04:08 et c'est vrai que c'est quelque chose qu'on peut facilement comprendre
04:10 quand on est confronté à la mort, aux difficultés de la vie...
04:13 -Vous, d'ailleurs, très jeune, vous avez été confronté...
04:16 -Oui ! -A une expérience de maladie très grave,
04:20 d'être très proche de la mort,
04:21 et vous dites "la mort a changé mon existence".
04:23 -Oui, je pense que c'est pour ça que j'ai été aussi fasciné par ce rituel,
04:28 et je sais à quel point l'expérience...
04:30 Moi, j'ai eu une expérience de mort, et puis après,
04:32 de long mois à l'hôpital,
04:34 l'expérience de cette fragilité-là m'a propulsé dans une nouvelle énergie.
04:37 Moi, j'étais pas du tout issu d'un milieu littéraire,
04:39 je ne lisais pas...
04:40 C'est vrai que cette fragilité-là m'a propulsé
04:44 vers une énergie de beauté, de sensibilité,
04:46 et je me suis mis à lire, à écrire à partir de cette expérience.
04:49 Donc je sais que la rencontre avec la mort,
04:50 ou en tout cas avec des circonstances graves ou extrêmes dans la vie,
04:54 peut, après, dans un deuxième temps...
04:56 -Peut, paradoxalement, apaiser cette relation à la mort.
04:59 -Donc j'aimerais beaucoup que ce rituel vienne en France.
05:02 -Alors, on en vient à la question d'Olivia.
05:04 -Oui, Olivia. -Vous êtes formidable.
05:06 Je crois que tout le monde vous pose la question.
05:07 -Oui, alors j'ai mis du temps.
05:09 Ça me fait plaisir qu'Olivia soit là,
05:10 parce que c'est une journaliste qui avait écrit un article,
05:13 ça ne nous rajeunit pas, sur mon premier livre en 2002.
05:16 -Je t'interdis de donner la date.
05:17 -C'est toujours... Voilà.
05:18 -Trop tard ! -Donc voilà.
05:20 Moi, je pense que je mettrais mon horoscope.
05:24 J'adore l'astrologie.
05:25 Vous l'avez regardée ?
05:26 C'est la pièce qui nous raconte... -C'est quoi, votre signe ?
05:28 -Je mettrais scorpion, ascendant scorpion,
05:30 et avec mon horoscope du jour.
05:31 -Oh là là ! -Vous êtes scorpion, ascendant scorpion ?
05:34 -Oui. -Ça s'annule.
05:35 -C'est pour ça que vous m'avez invitée.
05:36 -Non, je sais pas. Ouais, non...
05:38 -C'est inquiétant. -Je sais pas.
05:40 -C'est inquiétant ? -C'est flippant, un peu, non ?
05:41 -C'est un peu flippant, oui.
05:42 -Dans un mot, parce qu'on parle beaucoup de la mort,
05:44 je voudrais quand même le dire, c'est pas du tout morbide
05:47 comme roman. -Non.
05:48 -C'est même plutôt drôle, il y a pas mal d'humour.
05:50 J'arrive juste pas à savoir si c'est un roman
05:53 qui va vers le sombre ou qui est optimiste.
05:54 -Pour moi, elle est clairement optimiste.
05:56 Mais c'est vrai que je l'ai plutôt écrit comme une comédie romantique.
05:58 J'adore l'idée.
05:59 Ma référence, c'était le film "Quand Henri rencontre Sally",
06:02 c'est-à-dire qu'on a un couple sur 30 ans
06:04 qui se croisent au lycée,
06:06 et puis grâce à un groupe Facebook
06:07 des anciens du lycée de Châteaubriand-Arène à Mélis,
06:11 qui travaillent pour le gouvernement,
06:13 voient le profil d'Éric, qui travaille chez Decathlon,
06:16 elle veut quelqu'un de la société civile dans son équipe,
06:19 ils se retrouvent, ils se comprennent pas vraiment,
06:21 il y a une mission un peu particulière à Séoul,
06:24 et puis, quelques années après, ils se retrouvent.
06:27 Donc c'est un long cheminement entre ces deux personnes.
06:30 -Vous restez avec... -Oui, optimiste.
06:32 -Optimiste. Vous restez avec nous, David Foynquinos,
06:34 on va parler de musique et de cinéma et de cette histoire d'amour aussi.
06:37 Dans "La vie heureuse", le dernier roman que vous publiez chez Gallimard,
06:40 on revient tout de suite.
06:42 *Don't stop me now*