Beaux Regards

  • il y a 7 mois

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00:00 L'année dernière, c'était mon premier salon de l'agriculture comme secrétaire nationale d'Europe Ecologie des Verts.
00:03 J'étais une coutumière du salon de l'agriculture à titre personnel,
00:06 mais là, l'exercice d'y aller en tant que politique, j'ai trouvé que c'était très restrictif
00:10 parce que même si on y a passé, je crois, à peu près 10 heures l'année dernière,
00:14 vous arrivez à 30 sur un stand, ils sont 30 en face,
00:18 il y a des discussions forcément très standardisées parce qu'il y a tout le journaliste qui écoute,
00:21 et voilà, ça fait partie de l'exercice, mais je trouvais que ça valait la peine.
00:24 On s'était dit, l'année prochaine, on fera 15 jours avant une tournée agricole
00:28 pour aller rencontrer tout type d'agriculteurs
00:31 et avoir des échanges peut-être plus francs sur le terrain
00:34 pour mieux comprendre la profession et arriver au salon en ayant eu tous ces échanges préalables.
00:39 Donc ça fait là 15 jours de déplacement à peu près aux quatre coins de la France
00:45 pour aller découvrir les réalités de ce métier, les écouter beaucoup,
00:49 confronter nos visions, confronter nos inquiétudes pour cette profession.
00:53 Et je trouve que quels que soient les agriculteurs que l'on rencontre,
00:57 il y a beaucoup de respect, il y a beaucoup d'écoute.
00:59 Je remarque que cette colère des agriculteurs a mis la profession au centre de l'attention médiatique,
01:06 et c'est une bonne chose, que les Français ont soutenu massivement cette colère,
01:10 et c'est une bonne chose, et que nous, on nous a beaucoup interrogé sur le sujet.
01:14 Et donc en tant qu'écolos, tout ce qu'on travaille depuis des mois,
01:16 depuis des années, depuis même des décennies, a été mis en lumière.
01:19 Et j'ai remarqué qu'il y avait une grande écoute, un grand intérêt,
01:23 une grande curiosité pour la profession envers ce qu'on pouvait raconter.
01:27 Je ne vais pas vous dire qu'on est d'accord sur tout ou le temps,
01:30 mais en fait, ce qu'on dit depuis des décennies, chacun se rend compte que c'est vrai.
01:34 60% des eaux de l'échange ont disparu depuis 40 ans. C'est un fait.
01:38 L'eau manque chaque été dans certains territoires pour arroser les cultures. C'est un fait.
01:43 Les traités de libre-échange ont mis à genoux la profession. C'est un fait.
01:47 Il faut plus de repas bio-locaux dans les cantines, la restauration scolaire,
01:51 c'est 3,4 milliards de repas par an. C'est un fait.
01:54 Et donc nous sommes, quand on va se battre contre un entrepôt logistique
01:58 comme on l'a fait ce matin à Virezon pour préserver les terres agricoles
02:02 d'un énième entrepôt logistique, on est des alliés objectifs.
02:05 On est des alliés objectifs sur plein de sujets sur lesquels on combat
02:08 main dans la main depuis très longtemps.
02:11 Et je pense que ça commence à se voir.
02:13 On a été attaqué par le gouvernement en mode "c'est de la faute des écolos, tout ça".
02:17 Et le fait que du coup les micros se sont tendus, on a pu expliquer notre projet
02:20 qui est très transversal parce que les écologistes, nous allons parler de bien-être.
02:25 Alors c'est le bien-être des paysans, c'est le bien-être des animaux,
02:29 c'est le bien-être alimentaire, c'est le bien-être global en fait, c'est notre santé.
02:34 Et c'est la santé à la fois économique, alimentaire, la santé des écosystèmes,
02:38 la santé humaine, c'est vraiment un projet très transversal, une approche très globale
02:43 qui je pense en 2024 parle au plus grand nombre.
02:45 Attention je tousse.
02:47 Cette séquence, la colère agricole, pour vous, elle vous a permis de vous faire davantage entendre
02:56 que si on avait parlé d'autres sujets comme l'immigration ?
03:02 Alors je pense que les écologistes arrivent à se faire entendre sur tous les sujets,
03:06 quel que soit la séquence, on a toujours notre mot à dire, on a un projet de société
03:10 et on est en mesure de s'exprimer, de faire des propositions sur tous les sujets.
03:13 Sur l'agriculture, ça fait 50 ans qu'on en parle.
03:16 Je vous dis 50 ans parce que cette année, en 2024, on fête les 50 ans de notre première candidature
03:21 aux élections présidentielles, c'était René Dumont qui était ingénieur agronome
03:25 et c'est justement parce qu'il était ingénieur agronome et qu'il se déplaçait beaucoup
03:30 à travers le monde, qu'il connaissait très bien ce métier, qu'il était devenu écologiste.
03:33 Et depuis 50 ans, nous n'avons cessé de faire des propositions sur le sujet.
03:36 Peut-être que des fois c'était dans l'ombre, peut-être que des fois le message n'arrivait
03:41 pas forcément au destinataire et le fait que les micros se tendent sur ce sujet pendant
03:46 cette colère a permis à notre message d'être mieux entendu.
03:48 Vous voyez, il y a 6 mois, en novembre 2023, on a fait une journée où les écologistes
03:54 sont allés faire 10 déplacements dans toute la France le même jour, c'était le 13 novembre
03:58 2023, parce qu'on pensait que d'ici la fin d'année 2023, la loi d'orientation agricole
04:02 serait à l'Assemblée nationale, au Sénat.
04:05 Et donc les écologistes, Benoît Biteau, parlementaire européen, Marie Pochon à l'Assemblée
04:09 nationale et Daniel Salmon au Sénat, avaient travaillé avec leurs équipes à en livrer
04:13 sur nos propositions pour l'agriculture qu'on est allé remettre partout sur le territoire.
04:16 Moi j'étais avec Yannick Jadot dans l'Aisne et il y avait 9 autres déplacements le même
04:19 jour.
04:20 On a été très suivis par la presse en région, etc., qui sont venus suivre les déplacements,
04:23 mais la presse nationale en a quasiment pas parlé.
04:25 Et voilà, les journalistes politiques qui nous suivent sont sur les sujets politiques
04:28 chauds.
04:29 L'agriculture tout d'un coup est devenue un sujet politique chaud.
04:32 Vous nous avez dit "eh ben les écologues, quand est-ce que vous allez dans une ferme ?"
04:34 Ben on y va tout le temps en fait.
04:36 Je pense que c'est le type de déplacement depuis que je suis secrétaire nationale et
04:39 même avant, dans ma vie militante, dans les campagnes, dans les différents tours de France
04:43 que j'ai fait, c'est le type de déplacement qu'on fait le plus.
04:45 Et c'est logique, parce qu'il n'y aura pas d'écologie sans les agriculteurs et sans
04:49 tous les agriculteurs.
04:50 On ne peut pas, pour faire la transition de la France, du monde, s'appuyer que sur ceux
04:53 qui sont d'accord avec nous.
04:54 On va avoir besoin de tout le monde.
04:55 Et les agriculteurs se rendent bien compte, de plus en plus, qu'il n'y aura plus d'agriculture
05:00 à long terme sans écologie.
05:01 Que si on ne protège pas les sols, que si on ne protège pas l'eau, alors on ne protège
05:06 pas l'agriculture.
05:07 Et je pense que c'est un grand enseignement de cette séquence, que beaucoup de gens sont
05:11 devenus conscients de ça.
05:12 Les agriculteurs et les écologistes, c'est donc une love story maintenant ?
05:15 C'est comme dans toute histoire d'amour, il y a des moments plus ou moins romantiques
05:20 et d'autres plus ou moins acrobatiques, c'est comme ça.
05:22 Et je vais vous dire, moi ça me va.
05:23 Il y a des écologistes, il y a des agriculteurs, il y a de la diversité.
05:28 Et nous, vous savez que la biodiversité, on aime beaucoup ça, on trouve que ça fait
05:30 partie aussi du monde, de la richesse, de la nature.
05:33 Et donc, je pense que ce qui a été fort dans cette séquence, c'est qu'on s'est
05:38 peut-être beaucoup plus parlé et que ça a été public.
05:40 Vous voyez quand BFM, pour ne pas les citer, organise une soirée écologiste-agriculteur
05:45 la fracture, ils ne mettent même pas un point d'interrogation, genre c'est une insertion,
05:48 et qu'ils invitent une poignée d'écolos et une quinzaine d'agriculteurs pour une
05:52 soirée en prime time.
05:53 Et voilà, on est arrivé nous en se disant, j'espère que ça va bien se passer.
05:56 Moi j'étais assez confiante, parce que vous savez, dans cette séquence, on n'a pas tout
05:59 calculé en mode gestion de crise, comment on va t'en faire.
06:02 On est allé spontanément sur les plateaux, avec toute notre sincérité, avec notre engagement,
06:06 avec nos valeurs, avec nos propositions, et en fait ça a marché parce que je pense
06:10 qu'on est très alignés, et que ce qui se passe aujourd'hui, on a des solutions
06:15 pour, et ce n'est pas des solutions qu'on a bricolé dans la nuit, c'est des choses
06:17 qu'on porte avec constance et cohérence depuis des décennies, et ce n'est pas des
06:21 choses théoriques, c'est des choses qu'on démontre déjà par l'exemple dans les territoires.
06:26 Sur des fermes comme celle de Beauno Abito, dans des territoires qui créent des circuits
06:31 courts avec la cantine, c'est des choses qu'on fait déjà.
06:33 La métropole de Lyon, c'est la plus grosse collectivité en termes de budget gérée
06:38 par des écolos aujourd'hui.
06:39 Leur budget agriculture depuis 2020 a été multiplié par 4.
06:43 Vous voyez, quand il y a eu la crise agricole, on a demandé à nos élus, et vous, vous
06:48 avez fait quoi sur l'agriculture, est-ce qu'on a des exemples ? La métropole, ils
06:50 regardent et disent, on vient de se rendre compte, on a multiplié le budget par 4.
06:53 On a des objectifs, par exemple à Nantes, où la politique alimentaire et agricole
06:57 est gérée par des écolos, de 100% des exploitations, vous savez, où les gens partent à la retraite,
07:03 qui sont reprises.
07:04 Il y a 200 exploitations dans ce pays qui disparaissent chaque semaine.
07:07 Dans les territoires écolos, on se bat pour que ces exploitations, quand on part à la
07:11 retraite, ne disparaissent pas.
07:12 Et c'est aussi important pour les jeunes qui s'installent que pour les personnes
07:15 qui partent à la retraite en sachant que leur exploitation va continuer.
07:18 Et des politiques comme ça, je peux vous en citer des tonnes, des expériences d'alimentation,
07:22 de sécurité sociale de l'alimentation pour que l'aide alimentaire ne soit pas
07:26 les rebuts dont personne n'a voulu dans la grande distribution, mais des produits
07:29 de qualité, parce que ce n'est pas parce qu'on a des difficultés financières qu'on
07:32 n'a pas le droit à la nourriture de qualité.
07:34 Ce sont des exemples chaque jour dans tout le pays.
07:38 Et les écologies changent déjà la vie de millions de Françaises et de Français dans
07:41 ce pays grâce à leur collectivité.
07:43 Et ça, c'est quand même une nouvelle assez réjouissante.
07:45 Et cette colère agricole, c'est aussi une bonne séquence pour vous en vue des élections
07:49 européennes ?
07:50 Après, je ne vais pas vous dire que c'est une bonne nouvelle que les agriculteurs aillent
07:54 et qu'ils aillent parce que ça nous arrange dans les européennes.
07:57 Moi, encore une fois, je vous dis, je pense que quel que soit le sujet qui émerge, les
08:01 écologistes savent en parler, ont des exemples de sujets qu'ils portent.
08:04 On est tellement constant et cohérent sur le sujet qu'on ne sera pas déstabilisé
08:07 par un sujet.
08:08 Après, je pense que sur le sujet agricole, on est particulièrement à l'aise parce
08:12 que pour moi, l'agriculture et l'écologie, c'est indissociable.
08:15 C'est un sujet qui nous est cher.
08:17 C'est la terre, c'est ce qu'on mange, c'est l'air qu'on respire, c'est l'eau
08:20 qu'on boit.
08:21 C'est un sujet qui est très naturel pour nous et auquel on s'intéresse depuis
08:25 longtemps.
08:26 Et c'est vrai que j'ai eu l'impression qu'à gauche, on n'est pas que la gauche,
08:31 c'est la gauche et les écologistes, mais on va dire à gauche des macronistes.
08:34 J'ai remarqué que spontanément, il y en a qui refusaient un peu les invitations,
08:40 qui ne savaient pas trop à quoi s'attendre.
08:41 Là où nous, on disait oui, pas de problème, on vient.
08:43 Et même quand c'était des plateaux embrouillés avec des agriculteurs qui étaient montés
08:47 exprès et qui en fait se passaient très bien parce qu'on se parlait avant, qu'on
08:50 se parlait pendant, qu'on se parlait après et qu'ils nous invitaient dans leur ferme
08:53 en sortant.
08:54 Vous avez parlé de mieux comprendre le métier, de diversité.
08:58 Après aujourd'hui, pour Bourges, pour le Cher du moins, vous avez échangé avec la
09:02 Confédération de Paysannes.
09:03 C'était une volonté de ne pas forcément, je ne sais pas si vous les avez conviés,
09:07 la FNSEA, des jeunes agriculteurs ?
09:09 En fait, ce qui s'est passé, c'est que le déplacement qu'on fait aujourd'hui,
09:12 les copains du Cher me l'ont proposé en octobre.
09:15 Ça fait très longtemps parce qu'ils voulaient que je vienne sur le projet d'entrepôt
09:18 logistique à Vierzon, que j'aille voir le pôle alimentation, le directeur nous avait
09:23 invité depuis longtemps.
09:24 Donc, depuis octobre, il était organisé comme ça.
09:26 Mais là, par exemple, dans l'Essonne, c'était vendredi, on était avec un responsable
09:32 Île-de-France de la FDSEA sur son exploitation de betteraves.
09:36 Dans l'Aisne, on est allé aussi voir le copain Bruno Cardo qui a fait la une des barrages
09:41 de Picardie qui est beaucoup passée à la télé et que j'avais déjà rencontré avant
09:44 en fait.
09:45 Et puis d'un coup, j'ai vu le chef des barrages de l'Aisne qui arrive à la télé,
09:48 j'ai dit mais c'est Bruno Cardo qui était nous voir à Calais quand on a rencontré
09:51 les betteraviers du Pas-de-Calais.
09:52 Donc, vous voyez en fait, nous, on a toujours discuté avec tout le monde.
09:56 Par exemple, la présidente de la coordination orale, quand on a été au débat BFM, je
10:00 suis allée la voir à la sortie en disant franchement, je suis contente de vous rencontrer
10:04 parce que ce n'est pas l'image que je me faisais de vous.
10:07 Et vous voyez, quand je vous dis de faire baisser les préjugés mutuels, c'est vraiment
10:10 à ça, je pense, qu'a servi cette séquence.
10:12 Moi, quand j'ai vu que le premier sondage qui est sorti montrait que 84% des écologistes
10:17 de ce pays soutenaient la colère agricole, j'étais hyper fière parce que vous voyez,
10:22 des fois, on peut dire, je ne sais pas, on peut essayer d'organiser en disant un truc
10:25 dans une matinale en disant les copains vont reprendre.
10:27 Là, le sondage, il est naturel, ils appellent les gens, vous prétendez écolos, est-ce
10:31 que vous soutenez le mouvement des agriculteurs ? 84% des écolos de ce pays, même des gens
10:35 que je n'ai jamais vus de ma vie, soutenaient ce mouvement de colère.
10:37 Donc, c'était assez naturel et donc, ils ne soutenaient pas que la Confédération
10:40 Paysanne.
10:41 Donc, on est proche de la Confédération Paysanne.
10:43 Ils sont indépendants de nous, vous l'avez compris, mais on est plusieurs.
10:47 Moi, j'étais adhérente longtemps des amis de la Conf, on est beaucoup à l'être.
10:49 On soutient leur combat, leur revendication, mais on discute avec tout le monde.
10:54 Et je rencontre demain la FNSEVA, le président.
10:57 C'est prévu depuis plusieurs semaines parce qu'on voulait le rencontrer avant le Salon
11:01 de l'agriculture.
11:02 On a pris contact avec la coordination rurale.
11:04 D'ailleurs, il y a 15 jours, on était au congrès du Parti Vert Européen à Lyon.
11:08 Donc, il y avait des écologistes de toute l'Europe et on avait une carte blanche, vous
11:11 savez, pour les écologistes locaux.
11:13 C'est nous qui organisions pendant une heure et Marie Toussaint a fait le choix d'inviter
11:16 la coordination rurale RENALP.
11:18 Et le copain, il est venu porter des choses hyper justes.
11:21 Il a été applaudi par tous les écolos d'Europe, tout comme au Salon de l'agriculture l'année
11:25 dernière, j'étais très surprise par les jeunes agriculteurs.
11:27 Je trouvais qu'ils étaient… mais c'est normal, ils sont jeunes.
11:30 Eux, ils se projettent sur c'est quoi mon métier en 2050.
11:33 Ils voient bien que sans écologie, leur métier en 2050, il va y avoir un petit problème.
11:36 Donc, j'ai trouvé que tous les échanges qu'on fait sont hyper riches, font énormément
11:40 réfléchir nous, mais je pense eux aussi.
11:43 Et notre travail en tant que parti politique, c'est pas juste de faire des manies de trucs,
11:46 on sait le faire, on continuera à le faire, mais c'est aussi d'organiser le débat
11:50 public, c'est aussi de faire évoluer les mentalités, de jouer la bataille culturelle,
11:53 de proposer des politiques publiques.
11:54 Et je pense que nous sommes dans notre rôle à pas être juste sur un plateau télé à
11:58 donner notre avis, mais à être droit dans nos bottes, au sens propre du terme, parce
12:03 qu'on a vraiment des bottes aujourd'hui, sur le terrain, avec des gens qui pratiquent
12:07 ce métier tous les jours.
12:08 On n'est pas en train de réfléchir dans des hautes sphères à l'avenir du monde
12:11 sans les gens qu'on a besoin d'emmener avec nous.
12:13 C'est pas comme ça qu'on travaille.
12:14 Pour parler d'un enjeu local, vous avez parlé de l'accord des écolo à 84% avec
12:22 la colère agricole.
12:23 Dans cette colère locale, on a beaucoup entendu la question des bassines, des retenues collinaires.
12:28 Ici, c'est ce qui ressortait beaucoup.
12:33 Donc, quand on est d'accord avec…
12:36 En fait, c'est normal.
12:38 René Dumont, je vais reparler de lui, il y a 50 ans, tend un verre d'eau en disant
12:42 « ceci est un verre d'eau et bientôt l'eau va nous manquer ». Tout le monde
12:45 se fout de lui à l'époque en disant « non mais le mec avec son verre d'eau, on aura
12:49 plus d'eau, mort de rire, etc. ». On est 50 ans après, on n'a plus assez d'eau.
12:54 Et donc, c'est pas parce qu'on l'a dit depuis 50 ans que ça résout le problème.
13:00 On n'a pas été écouté, nous y sommes.
13:02 Et évidemment qu'aujourd'hui, qu'il n'y a plus assez d'eau pour tout le monde,
13:04 il y a d'énormes tensions sur cette ressource.
13:06 Et donc, dans ces cas-là, on a deux solutions.
13:09 Soit on dit la vérité, il n'y a plus assez d'eau pour tout le monde, on ne peut plus
13:12 cultiver de maïs partout dans le pays, comme on le faisait quand il y avait de l'eau
13:16 à profusion et quand il n'y avait pas, une France à plus, 1°C, 1,5°C, 2°C, des sécheresses,
13:22 des canicules, des gelées l'hiver et des inondations.
13:24 Évidemment que les pratiques doivent changer.
13:26 Ça, c'est le raisonnement normal.
13:28 La nature change, changeons avec elle, adaptons-nous.
13:33 Et puis, il y a d'autres types d'humains qui vont se dire "on s'en fout, on va y arriver,
13:38 je change une solution technique".
13:39 Et donc, ils vont créer ce qu'on appelle les objets transitionnels.
13:42 Pour l'énergie, c'est le nucléaire, c'est ne changez rien, n'économisez aucune énergie,
13:47 continuez à faire des panneaux lumineux, à faire n'importe quoi, il y aura toujours
13:50 assez d'énergie, c'est indépendant, il n'y a pas de problème de déchets, il n'y a pas
13:53 de problème d'approvisionnement en uranium, tout va bien.
13:55 Nucléaire à volonté.
13:57 L'eau, ne changez rien à vos pratiques culturelles.
13:59 Il y aura toujours de l'eau, on va la prendre dans une autre pratique, on va la mettre dans
14:02 des bassines, comment ça, elle va s'épapourrir, pas du tout, et fuite en avant.
14:06 Et quand on est écolo, on peut prendre plein d'exemples.
14:09 Les nouveaux OGM, là, c'est le même exemple, c'est la même logique.
14:12 Et c'est une fuite en avant qui est dangereuse parce que c'est refuser de s'interroger sur
14:17 d'où viennent les problèmes, refuser de s'interroger sur comment on s'adapte et on
14:21 change nos pratiques pour éviter qu'ils ne s'aggravent, et ça crée des tensions fortes.
14:24 Et moi, je refuse de dire que les bassines, c'est un problème des écologistes contre
14:27 des agriculteurs ou des agriculteurs contre les écologistes.
14:29 Les agriculteurs eux-mêmes sont extrêmement divisés.
14:32 Est-ce que vous trouvez normal qu'un maraîcher qui ne va pas rentrer dans la cope pour faire
14:39 une bassine, du coup, quand il y aura l'arrêté sécheresse, lui qui fait attention à ses
14:43 pratiques, qui fait attention à la quantité d'eau qu'il utilise, lui, il sera touché
14:47 par l'arrêté sécheresse, il ne pourra plus arroser, il va perdre peut-être le fruit
14:50 de sa production.
14:51 Vous, vous ne pourrez plus arroser votre jardin ou remplir la piscine de vos enfants.
14:54 Par contre, les gars qui ont été puisés dans la pratique et donc qui font que le problème
14:58 est aggravé, qui font que l'arrêté sécheresse, il arrive plus tôt, eux, ils auront leur
15:02 bassine, leur piscine olympique remplie d'eau.
15:04 – Financée par l'argent public.
15:05 – Financée par l'argent public.
15:06 – Pas dans le chien.
15:07 – C'est complètement injuste.
15:08 – Pardon ? Ah oui.
15:09 – Pas dans le chien.
15:10 – C'est injuste, c'est vexatoire, et en fait, ça ne peut qu'aggraver les tensions.
15:14 Et c'est des projets sur lesquels nous gagnons en justice, quasiment tout le temps.
15:19 Les projets que combat...
15:20 – Pas dans le chien, non plus.
15:21 – Oui, mais ce n'est pas les mêmes.
15:22 – Oui, parce que nous, on n'est pas encore assez armés pour jouer les documents.
15:25 – Et par ailleurs, attendez, moi, je ne suis pas contre tout le temps retenir l'eau.
15:27 Dans mon jardin, j'ai un réservoir d'eau de pluie, et quand il pleut, je récupère
15:32 l'eau de pluie, je ne vais pas la pomper dans la pratique.
15:34 Et donc, on n'est pas contre toujours retenir l'eau.
15:36 Dans toutes les fermes que vous allez voir, il y a des bassines pour récupérer un peu
15:40 d'eau.
15:41 Mais le fait de construire ces méga projets qui font l'équivalent de dizaines de piscines
15:44 olympiques, d'aller pomper dans la pratique, de perturber même plus le cycle de l'eau,
15:48 ben là, on a un problème, et on n'est pas les seuls.
15:51 Les riverains ont un problème, et une grande partie de la profession a un problème.
15:54 – Et pour l'instant, Bassine Nonmerci Duchère n'a pas encore été en justice correctement.
15:57 – Oui, parce qu'après, il y a des choses à faire.
15:58 – D'accord ? Donc, la résultat, il est bientôt en forme.
16:01 Il est bientôt.
16:02 – J'ai fait des annonces en amont du salon de la culture sur la crise agripole.
16:07 La dernière fois qu'il a fait ça, il a annoncé la suspension des cofitos.
16:10 Est-ce qu'on en attend encore ?
16:12 Enfin, est-ce qu'on attend encore des choses du gouvernement ?
16:14 Qu'est-ce qu'on attend ? Et surtout…
16:15 – Je ne vais pas aussi expliquer.
16:16 – Oui, je suis venu, oui.
16:19 – C'est une mauvaise fois pour Bassine.
16:20 – Justement, cette séquence, pour vous,
16:22 la séquence des agriculteurs, la colère des agriculteurs,
16:27 ça a été pour vous l'occasion d'exprimer votre position au niveau de l'Europe ?
16:32 – Absolument, c'est-à-dire que ça a mis en lumière les propositions des écologistes
16:36 qu'on porte, nous, à l'échelon européen.
16:38 On sort d'une négociation de la PAC qui a été votée le 23 novembre 2021,
16:43 qui est en vigueur depuis le 1er janvier 2023.
16:45 On voit bien que cette PAC, et c'est une des raisons de la colère des agriculteurs,
16:49 est une PAC qui n'est pas écologique, ça on l'avait bien identifié,
16:52 mais qui n'est pas non plus sociale.
16:53 C'est ce qui explique que les agriculteurs sont en grave difficulté.
16:56 81% de l'enveloppe publique de la PAC à 20% des agriculteurs.
17:01 Ça veut dire quoi en creux ?
17:02 Ça veut dire que les 80% d'agriculteurs qui restent,
17:05 qui est quand même la grande majorité,
17:06 ne se contentent que des miettes que constituent les 20% restants.
17:11 Donc c'est une PAC qui n'est pas sociale, qui n'est pas équitable,
17:15 au-delà de ne pas être écologique.
17:17 Et nous, les écologistes, et on est à l'aise pour en parler
17:20 à l'occasion de cette crise agricole,
17:22 on a tout fait pour empêcher que cette PAC prenne cette tournure-là.
17:26 On a tout fait pour proposer autre chose,
17:28 pour qu'elle soit plus sociale, plus équitable.
17:30 On n'a pas été entendus.
17:32 Et ceux qui se revendiquent les chevaliers blancs
17:34 qui viennent au secours des agriculteurs,
17:36 sont ceux qui ont voté cette PAC,
17:38 que ce soit le Rassemblement National, que ce soit les Républicains,
17:41 que ce soit la République en marche.
17:43 Donc on voit bien qui sont les imposteurs.
17:45 Et c'est ça l'intérêt de l'Union Européenne transparente,
17:48 c'est qu'on démasque qui a voté quoi,
17:50 et qui soutient vraiment les agriculteurs.
17:52 Alors qu'on est présenté comme à l'origine de tous les maux,
17:56 qu'on est le punching ball de ce gouvernement,
17:58 nous les écologistes,
17:59 on peut faire la démonstration, à l'échelon européen,
18:02 que ce qu'on a défendu était au service des agriculteurs,
18:05 et aurait pu éviter cette grave crise traversée aujourd'hui,
18:08 et qui s'exprime dans la détresse qu'on a pu constater au mois de janvier.
18:12 Et puis, il y a un autre sujet à l'échelon européen,
18:15 c'est les accords de libre-échange.
18:17 Les accords de libre-échange, l'Europe décide de oui ou non
18:20 avec qui on discute et avec qui on échange.
18:22 Qui s'est opposé systématiquement à tous les accords de libre-échange,
18:27 a même déposé des amendements de rejet des accords de libre-échange.
18:30 Et bien sûr le rejet du Mercosur par exemple,
18:33 si on prend celui-ci qui est très en vue,
18:37 le Rassemblement national n'a pas voté le rejet des écologistes
18:40 de l'accord de libre-échange,
18:42 les Républicains n'ont pas voté le rejet des écologistes
18:45 de l'accord de libre-échange avec le Mercosur,
18:47 la République En Marche n'a pas voté non plus
18:49 ce rejet des accords de libre-échange.
18:51 Donc, ça démasque les impostures de ceux qui se revendiquent
18:55 les alliés des agriculteurs.
18:57 Et en vérité, nous qui sommes présentés
18:59 à l'origine de tous les maux de l'agriculture,
19:02 et bien cette crise agricole nous permet au moins
19:05 de montrer la sincérité de nos propositions
19:08 et la constance aussi de nos propositions,
19:11 et de montrer qu'en vérité, ce que nous proposons
19:13 fait des écologistes les meilleurs alliés des agriculteurs aujourd'hui.
19:16 Et de montrer aussi l'importance de l'élection européenne à venir,
19:19 est-ce que ça prend du coup une tournure particulière ?
19:21 Alors effectivement, l'élection européenne de juin prochain,
19:26 c'est un peu l'élection de tous les dangers pour l'Europe,
19:28 parce que les prédictions sondagières nous montrent
19:31 que potentiellement, on risque d'avoir une poussée de la droite
19:34 dont on connaît les positions sur ces sujets-là.
19:36 Alors que si on veut que l'Europe remplisse les fonctions
19:39 qu'on attend d'elle sur les dimensions écologiques,
19:42 sur les dimensions sociales, sur les dimensions aussi
19:45 de paix dans le monde ou de paix en Europe,
19:47 on voit bien que c'est pas avec cela qu'on va avancer.
19:50 Et donc plutôt que de vouloir jeter l'eau du bain
19:52 et le bébé avec, comme certains qui demandent
19:54 de sortir de l'Union européenne,
19:56 dans un contexte comme celui qu'on est en train de traverser,
19:59 d'effondrement de la biodiversité, de dérèglement climatique,
20:03 de la guerre aux portes de l'Europe,
20:05 c'est plus d'Europe qu'il faut qu'on mette en avant.
20:07 Et qui porte plus d'Europe ?
20:09 C'est nous les écologistes, c'est nous les gens
20:11 qui se revendiquons progressistes,
20:14 mais surtout pas ceux qui se referment
20:16 sur des logiques conservatrices
20:18 ou qui s'épandent sur des logiques ultralibérales
20:21 dont on voit les limites aujourd'hui.
20:23 Il y a une inquiétude aussi sur l'élargissement à l'Ukraine.
20:26 Qu'est-ce que vous répondez à ça ?
20:28 L'inquiétude de l'élargissement à l'Ukraine,
20:31 elle est peut-être fondée,
20:32 mais quand on se revendique un territoire de paix,
20:34 il faut qu'on envisage de faire entrer l'Ukraine dans l'Union européenne.
20:38 Moi, je ne suis pas hostile à l'entrée de l'Ukraine dans l'Union européenne.
20:42 En revanche, si on veut que ce soit compatible
20:45 avec une Europe du partage, une Europe solidaire,
20:49 il va falloir qu'on revisite des politiques publiques
20:51 importantes de l'Union européenne.
20:53 Et la première à revisiter, ce sera la politique agricole commune.
20:56 Elle est un 88% du budget total consacré à la politique agricole commune.
21:00 Sauf que si on la laisse orienter telle qu'elle est,
21:02 avec les ressorts tels qu'on lui connaît,
21:04 et les mécanismes qu'elle utilise aujourd'hui,
21:07 l'Ukraine va devenir une menace pour la politique agricole commune.
21:12 Et donc, il faut repenser la politique agricole commune
21:14 pour qu'elle soit compatible avec une entrée de l'Ukraine dans l'Union européenne.
21:18 Et ceux qui me disaient, avant le vote du 23 novembre 2021,
21:22 ces farfeluces que tu proposes, les aides aux unités de surface et tout ça,
21:26 commencent à venir me voir en disant, finalement,
21:28 la refonte de la PAC qui pourra rendre compatible
21:32 l'entrée dans l'Union européenne de l'Ukraine,
21:34 c'est celle que tu proposes.
21:36 C'est celle qui va permettre de probablement sauver une politique majeure,
21:40 une politique aussi importante que la politique agricole commune
21:43 sur fond d'entrée de l'Ukraine dans l'Union européenne.
21:45 Donc, encore une fois, je ne savais pas qu'on allait accélérer
21:49 ou qu'on aurait l'hypothèse d'une accélération de l'entrée de l'Ukraine dans l'Union européenne.
21:53 Mais encore une fois, sur ce sujet-là,
21:55 ceux qui ont été les plus visionnaires, c'est nous.
21:58 – Merci beaucoup. – Merci beaucoup.