Jean-Baptiste Noé : "Il n’y a pas d’alliance entre Pékin et Moscou"

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Transcript

00:00 - Le Grand Matin Sud Radio, 7h-8h30, Patrick Rocher.

00:04 - Il est 7h25 à travers le monde, comme chaque vendredi avec vous, Jean-Baptiste Noé, bonjour.

00:08 - Bonjour Patrick.

00:09 - La Russie, je le disais, s'appuie sur le soutien de la Chine pour faire face aux sanctions occidentales.

00:15 Vente d'hydrocarbures, achat de matériel.

00:17 La relation s'est accrue depuis février 2022, depuis le moment où il y a eu l'invasion de l'Ukraine.

00:23 Mais cela paraît aussi comme une mainmise, en quelque sorte, c'est ce que vous nous expliquez, de la Chine sur la Russie.

00:29 - En effet, la fermeture du marché européen a fait que la Russie s'est tournée vers la Chine,

00:35 notamment pour vendre des hydrocarbures, le gaz, le pétrole, le charbon.

00:39 La Chine est aujourd'hui un des principaux acheteurs de la Russie,

00:42 notamment un grand gazoduc qui passe par la Sibérie, le Power of Siberia,

00:46 qui permet de passer par la route terrestre, qui est beaucoup plus sécurisée que la route maritime.

00:51 Donc c'est pour la Russie un débouché important, mais comme la Chine est l'un des principaux clients de la Russie,

00:56 évidemment, ça crée aussi une relation de dépendance qui met en danger la souveraineté de la Russie.

01:01 - Oui, c'est ça. Donc en vendant ses produits à la Chine, la Russie devient totalement dépendante de Pékin, c'est ça ?

01:07 - Exactement, puisque la Russie vend à la Chine, mais la Russie achète aussi beaucoup à la Chine.

01:11 Par exemple, pour les voitures, le marché russe, c'est à peu près 80% de véhicules chinois.

01:16 Les Russes achètent également des appareils électroménagers, ce qu'on a dans les maisons pour les particuliers.

01:21 Il y a aussi l'achat de puces électroniques, qui servent pour les activités civiles,

01:25 mais qui ensuite sont détachées pour servir pour les activités militaires.

01:29 Et puis les Chinois ont mis en place des sociétés à écran, qui permettent de contourner les sanctions afin de vendre à la Russie.

01:34 Mais aujourd'hui, la Russie est de plus en plus dépendante de ses achats aux Chinois.

01:38 - Oui, alors si on voit que la Russie est de plus en plus dépendante, comme vous le dites, de la Chine,

01:42 est-ce que la Chine se rapproche pour autant de la Russie ?

01:46 - Non, c'est tout le paradoxe de cette relation qui est asymétrique.

01:49 C'est-à-dire que la Russie vend et achète à la Chine, mais la Russie n'est pas pour la Chine son principal marché.

01:55 La Chine continue à vendre essentiellement aux États-Unis et aux Européens.

01:59 Par exemple, les investissements chinois en Russie, c'est moins de 1% des investissements chinois à l'étranger.

02:05 Autrement dit, la Russie ne compte pas beaucoup pour l'économie chinoise.

02:09 Et on voit que cette relation est essentielle pour la Russie, pour continuer à vendre ses droits de carbure et à se fournir,

02:14 mais en revanche pour la Chine, c'est une relation économique, c'est une opportunité économique,

02:18 mais ce n'est pas encore une relation idéologique.

02:21 - Il n'y a pas d'alliance, il n'y a pas d'axe Pékin-Moscou ?

02:24 - Il y a un soutien, évidemment, mais les Chinois savent qu'ils ne peuvent pas se passer ni des Occidentaux,

02:30 ni des Américains, ni des Européens, et donc ils maintiennent les relations entre les deux.

02:34 Ils profitent d'une opportunité sans s'aligner sur Moscou.

02:37 - Il y a un double jeu en quelque sorte.

02:38 - Un double jeu et un profit aussi face à une situation qui leur est profitable.

02:42 - Et puis c'est vrai que, d'un mot, cette relation est très développée avec la Russie,

02:49 en tout cas pour que ça tourne, avec la Chine pardon, pour que ça tourne en Russie,

02:53 mais ça tourne aussi en partie à l'Inde.

02:57 - Exactement, tout à fait.

02:58 Il y a des relations indiennes notamment, là aussi, pour la vente d'hydrocarbures,

03:01 dont une partie ensuite est revendue aux Européens.

03:03 - Aux Européens, bien sûr, ça transite là-bas et ça revient chez nous.

03:06 Merci beaucoup Jean-Baptiste Noé.

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