L'histoire du détecteur de mensonges _ ARTE

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Au début du XXe siècle, des chercheurs médiatisent une découverte passionnante : ils ont mis au point une machine capable de déceler le mensonge. Connu sous le nom de "détecteur de mensonges", l'appareil était présenté comme un outil infaillible de lutte contre la criminalité. Au lieu de cela, le détecteur de mensonges est devenu un outil de peur et d'intimidation.
Transcript
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00:18 - We've all lied at some point.
00:22 We've all tried to figure out
00:23 when someone else is lying to us.
00:25 ♪ ♪ ♪
00:27 We use these visual clues,
00:28 whether it's looking people to avert their eyes
00:31 or blushing or they shift their body weight,
00:34 giving off these tells, essentially.
00:36 ♪ ♪ ♪
00:41 - C'est une aspiration aussi vieille que le monde.
00:44 Au cours des premières décennies du 20e siècle,
00:47 trois chercheurs que tout oppose ont prétendu
00:49 qu'en décryptant des indices donnés par le corps humain,
00:52 ils pouvaient démasquer un imposteur,
00:54 détecter un mensonge et faire éclater la vérité.
00:59 ♪ ♪ ♪
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01:17 Mais il s'avérera que l'utilisation
01:19 de ce puissant outil peut conduire à des abus tragiques.
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01:43 Au fil du temps, le détecteur de mensonges
01:46 acquérera une puissance et une portée
01:49 que même ses créateurs n'auraient jamais pu imaginer.
01:52 Il sera testé chaque année sur plusieurs millions d'Américains,
01:55 bouleversant des milliers de vies.
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02:23 Le détecteur de mensonges est un phénomène
02:26 typiquement américain qui mêle criminalité,
02:29 science, médias et charisme.
02:32 Il se nourrit du doute et engendrera les soupçons
02:37 et la jalousie qui finiront par détruire la vie
02:40 de ses inventeurs.
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03:01 - Attention!
03:03 Aux armes!
03:05 Attention aux jambes!
03:07 Présent!
03:09 Attention!
03:11 Présent!
03:13 Présent!
03:15 Prêt! Un, deux, trois, quatre, cinq, six!
03:18 Retournez à gauche!
03:20 Dégagez!
03:22 ♪ ♪ ♪
03:25 - John Larson n'est pas un policier comme les autres.
03:29 Âgé de 29 ans et originaire de la Nouvelle-Angleterre,
03:32 il vient d'arriver en Californie.
03:34 Il entre dans la police de Berkeley en 1920
03:37 et se révèle rapidement le plus mauvais tireur du service.
03:40 Il est en outre si mauvais conducteur
03:43 que dans la même journée, il envoie à la casse
03:46 deux voitures de police.
03:48 Mais le pire aux yeux de ses collègues plus âgés,
03:51 c'est qu'il est le seul policier du pays titulaire d'un doctorat.
03:54 Il passe son temps libre à suivre des cours de psychiatrie
03:57 criminelle et écrit un livre sur les techniques
04:00 de prise d'empreintes digitales.
04:02 Au début des années 1920, la police ne dispose
04:22 d'aucun outil scientifique et son comportement
04:25 est rarement irréprochable.
04:27 La plupart des affaires sont résolues sur la base d'aveux,
04:33 dont un nombre effroyable est arraché
04:35 grâce à des passages à tabac.
04:38 - It was expected and it was accepted
04:41 that officers would torture people.
04:43 You can use any means necessary,
04:49 even if that means mutilating their body,
04:52 to get them to confess.
04:54 But a lot of the time,
04:58 people who are being tortured were innocent,
05:01 and sometimes they would end up maybe confessing
05:04 just to make the torture stop.
05:07 - Heureusement pour John Larson, son patron, August Vollmer,
05:11 le chef de la police de Berkeley, est un précurseur
05:14 dans l'utilisation de méthodes de travail
05:17 scientifiques humaines et intègres.
05:19 - John Larson, le patron, August Vollmer,
05:22 was the great police reformer of the early 20th century.
05:25 His special tool for making cops themselves law-abiding
05:28 was to give them scientific tools.
05:30 Things like fingerprinting and analysis of crime scenes
05:33 and categorized methods of operation.
05:35 - La technologie naissante la plus révolutionnaire
05:41 est sans doute ce que les scientifiques appellent alors
05:44 le test de détection de mensonges.
05:47 - Il y avait une vision à l'époque
05:49 où le crime allait être résolu par un instrument
05:52 qui pouvait détecter une personne en faisant le mensonge.
05:55 - Il n'y aurait peut-être pas besoin d'un juge et d'un jury,
05:59 car la machine révélera à tout le monde
06:03 si cette personne ment ou dit la vérité.
06:06 - August Vollmer sait que la fabrication
06:10 d'un détecteur efficace relève de la prouesse scientifique.
06:13 Mais dès 1921, il confie le projet à John Larson.
06:18 Pour relever cet immense défi,
06:29 le policier ne dispose que de matériel emprunté
06:32 et d'un unique assistant, un lycéen de la région.
06:36 ♪ ♪ ♪
06:39 - Depuis des décennies,
06:56 des scientifiques européens et américains
06:58 cherchent des indices prouvant qu'un individu ment.
07:01 Ils mesurent sa fréquence et sa profondeur respiratoire.
07:05 Sa tension artérielle ou le temps qu'il mette
07:08 à répondre à une question.
07:10 Les résultats obtenus sont plus ou moins satisfaisants,
07:13 mais aucune mesure ne permet à elle seule
07:15 de détecter un mensonge de manière fiable.
07:18 John Larson fabrique alors un appareil unique
07:21 qui regroupe plusieurs instruments de mesure.
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08:03 Au printemps 1921, le détecteur est prêt à être testé.
08:08 Auguste Vollmer envoie John Larson enquêter
08:12 sur une série de vols au College Hall,
08:15 une résidence pour étudiantes
08:17 de l'Université de Californie à Berkeley.
08:20 L'affaire est banale.
08:22 Une résidente vole de l'argent, des bijoux
08:25 et des vêtements à ses camarades.
08:27 Mais si le policier parvient à la résoudre,
08:30 les conséquences seront considérables.
08:33 Il soumet chacune des jeunes femmes à un test.
08:37 Après la première série d'interrogatoires,
08:45 John Larson pense tenir la coupable.
08:48 Variation soudaine de la tension artérielle,
08:51 du rythme cardiaque et de la respiration.
08:54 Hélène Graham cache manifestement quelque chose.
08:58 Interrogée à plusieurs reprises,
09:00 elle finit par avouer les vols et quitte la ville.
09:03 John Larson appelle son appareil
09:05 le cardiopneumopsychographe,
09:07 mais les journalistes lui trouvent un nom plus accrocheur.
09:11 La presse présente l'affaire du College Hall
09:16 comme un véritable triomphe.
09:18 Elle témoigne du potentiel révolutionnaire
09:21 du détecteur de mensonges.
09:23 Mais lorsque les vols reprennent,
09:25 après le départ d'Hélène Graham,
09:27 le doute s'immisce dans l'esprit de l'inventeur.
09:31 Depuis son exil, la jeune femme lui explique
09:34 dans une lettre pourquoi elle a fini par avouer.
09:37 Elle avait bien quelque chose à cacher,
09:40 mais ce quelque chose n'avait rien à voir
09:43 avec les vols au College Hall.
09:46 - Elle avait une histoire de troubles.
09:48 Elle avait été abusée sexuellement,
09:50 à l'âge de sa vie.
09:52 Et en peur que cette machine
09:54 allait découvrir ses secrets,
09:56 elle a fait des missions
09:58 pour tenter de faire arrêter la question.
10:01 - Un polygraphe est un instrument très blanc.
10:04 Les émotions humaines et les autres variables extranières
10:07 causent des agressions physiologiques.
10:11 C'était une partie du problème du cas du College Hall.
10:15 - Larson n'a jamais vraiment été en mesure
10:18 de s'assurer que Hélène Graham ait commis le crime.
10:21 C'est le premier cas, et dès le début,
10:23 toutes les ambiguïtés sont là.
10:25 - Le souvenir de cet épisode restera gravé
10:30 dans la mémoire de John Larson jusqu'à la fin de sa vie.
10:34 Au cours de l'enquête, il avait interrogé à plusieurs reprises
10:38 l'une des victimes des vols, Margaret Taylor.
10:41 - Il a découvert qu'elle avait des sentiments pour lui
10:44 et qu'ils se sont mariés.
10:46 Les journaux, comme vous pouvez l'imaginer,
10:48 aimaient ça.
10:50 - Suite à l'affaire du College Hall,
10:56 le couple quitte Berkeley et s'installe à Chicago.
11:00 John Larson prévoit d'y étudier la psychiatrie
11:03 tout en explorant de nouveaux champs d'application
11:06 pour son détecteur de mensonges
11:08 à l'Institut de recherche sur les enfants et les adolescents.
11:12 Il continue de perfectionner son invention,
11:15 mais les enjeux étant trop importants,
11:17 il hésite encore à l'utiliser dans le cadre d'enquêtes criminelles.
11:21 À ce stade de développement, écrit-il,
11:25 aucun test ne peut permettre de déceler de façon certaine
11:29 que quelqu'un ment.
11:31 Tout le monde, néanmoins, ne partage pas ses scrupules.
11:35 À l'automne 1922, John Larson reçoit une lettre
11:41 d'un certain William Marston.
11:43 Diplômé en droit et en psychologie,
11:45 cet homme de 29 ans est le président
11:47 du département de psychologie
11:49 de l'Université américaine de Washington
11:52 et l'inventeur de ce qu'il a appelé
11:54 le détecteur de mensonges Marston.
11:57 ...
12:15 William Marston estime pourtant
12:17 que son invention est quasiment infaillible.
12:21 ...
12:27 ...
12:37 En 1922, Marston tente de faire accepter
12:41 comme preuve juridique les résultats de ses tests.
12:44 Prenant connaissance par la presse
12:46 des travaux de John Larson, il adresse à ce dernier
12:49 une lettre lui demandant plus de détails.
12:52 John Larson répond gentiment à l'inventeur très déterminé
12:56 que son dispositif n'est pas fiable.
12:59 Trop tard, Marston et son invention
13:02 vont s'immiscer au coeur d'une affaire de meurtre
13:05 très médiatisée.
13:07 ...
13:09 Selon la police, James Fry a avoué
13:12 avoir tué un éminent médecin noir.
13:15 L'intéressé déclare quant à lui que ses aveux
13:18 lui ont été arrachés par la ruse.
13:21 ...
13:31 ...
13:41 Le juge rend sa décision en concluant qu'un jour, peut-être,
13:45 les détecteurs de mensonges permettront de savoir
13:48 quels témoins disent la vérité.
13:50 Mais pour l'instant, ajoute-t-il, c'est le travail du jury.
13:55 Quelques mois plus tard, la cour d'appel
13:58 donne raison à John Larson.
14:00 Le détecteur de mensonges de William Marston
14:03 n'a pas été validé par la communauté scientifique
14:06 et n'a donc pas sa place dans un tribunal.
14:09 ...
14:20 ...
14:27 James Fry passera 18 ans en prison.
14:31 L'effet collatéral des ambitions de Marston
14:34 aura détruit sa vie.
14:36 ...
14:46 ...
14:50 ...
14:54 Le rêve de révolutionner la justice est mort.
14:58 Et le détecteur de mensonges semble voué à disparaître.
15:02 Pourtant, pour l'appareil et ses créateurs,
15:06 l'aventure ne fait que commencer.
15:09 ...
15:14 ...
15:20 ...
15:25 En 1928, Marston présente au monde
15:28 une version très différente de son détecteur de mensonges.
15:32 Il l'a rebaptisé "le conteur d'amour".
15:35 ...
15:44 C'est après une série de déboires
15:46 que Marston a décidé de revoir son invention.
15:49 Suite à la désastreuse affaire Fry,
15:51 il a remisé au placard son détecteur de mensonges,
15:54 cessé toute activité juridique
15:56 et perdu son poste à l'université américaine.
15:59 Sa nomination comme simple enseignant
16:02 à l'université Tufts
16:04 n'a fait que confirmer sa déroute professionnelle.
16:07 Un esprit plus timoré, ce serait à s'agir.
16:10 Marston, lui, sans tête à chercher les ennuis.
16:14 ...
16:19 ...
16:26 Son épouse, Elisabeth Holloway Marston,
16:29 est son égale dans tous les sens du terme.
16:32 Avocate accomplie, elle a également joué un rôle crucial
16:36 dans la conception du détecteur Marston.
16:39 Le couple est lié par de très nombreux goûts communs
16:42 et non conventionnels.
16:44 Depuis un certain temps à Boston,
16:46 il forme une coterie avec des amis adeptes du polyamour.
16:50 La proposition de Marston
16:52 n'est donc pas aussi excentrique qu'il y paraît.
16:55 Elisabeth l'accepte
16:57 et Olive Byrne s'installe chez eux.
17:00 On raconte aux voisins qu'elle est veuve
17:03 et travaille chez le couple comme gouvernante.
17:06 Mais les rumeurs vont bon train
17:08 et Marston perd son poste de professeur.
17:11 Voyant que sa carrière universitaire est ruinée,
17:14 il recommence à travailler sur son appareil
17:17 rebaptisé "le compteur d'amour".
17:19 A l'instar de John Larson,
17:21 il s'intéresse à l'utilisation de l'appareil
17:24 en tant que capteur d'émotion.
17:26 Mais si le parcours du policier
17:28 la conduit jusqu'à un centre de redressement pour mineurs
17:32 à Chicago, Marston, pour sa part, se retrouve à Hollywood.
17:36 ...
17:40 En 1928, ses tests comparatifs effectués
17:43 sur des femmes blondes, rouses ou brunes
17:46 attirent l'attention de Carl Laemmle.
17:49 A la tête des studios Universal,
17:51 Carl Laemmle cherche un nouveau moyen
17:54 de mesurer la réaction du public à ses films.
17:57 ...
18:01 -Larson was in fact using his device
18:04 to hook up people and gauge audience reactions
18:07 for these films that were being screened.
18:10 ...
18:13 ...
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18:23 ...
18:25 ...
18:27 Mais au lieu d'asseoir son succès,
18:29 Marston réussit une fois de plus à lasser son employeur.
18:33 A la fin de l'année 1929,
18:35 il est licencié par les studios Universal
18:38 où le métier qu'il a inventé est confié à un jeune homme ambitieux.
18:42 ...
18:45 Leonard Keillor a fait du chemin depuis l'époque où, adolescent,
18:49 il était l'apprenti de John Larson
18:51 dans les services de police de Berkeley.
18:54 ...
18:56 En 1923, lorsque ce dernier part à Chicago,
18:59 Keillor suit son patron, August Vollmer,
19:02 qui a été nommé à Los Angeles pour y assainir la police.
19:06 Sur place, le jeune homme entreprend de retravailler
19:10 le prototype conçu par John Larson.
19:13 Alors que Larson était obsédé par les limites de l'appareil
19:18 et s'inquiétait des injustices auxquelles il pouvait conduire,
19:22 Keillor l'utilise sans compter,
19:25 testant de vrais suspects
19:28 et accumulant ce qu'il nomme des victoires.
19:32 ...
19:35 ...
19:38 La presse célèbre le jeune inventeur
19:49 et sa machine futuriste.
19:51 Lorsque les studios Universal se lassent de William Marston,
19:55 le nom de Leonard Keillor s'est donc imposé tout naturellement.
19:59 ...
20:01 Mais le séjour de Keillor à Hollywood sera de courte durée.
20:05 ...
20:07 Estimant que son travail dans l'industrie du cinéma
20:11 le détourne de son véritable objectif,
20:14 l'ancien policier part s'installer
20:17 dans la capitale américaine du crime.
20:20 ...
20:24 ...
20:27 ...
20:52 Lorsque Keillor arrive à Chicago au début de l'année 1930,
20:56 les règlements de compte entre gangs sont devenus monnaie courante.
21:00 On en compte 500 depuis le début de la prohibition,
21:03 sans qu'aucun n'ait abouti à une condamnation.
21:06 Pourtant, même dans la capitale du crime,
21:09 le massacre de la Saint-Valentin marque les esprits.
21:12 L'indignation de l'opinion publique conduit à une nouvelle approche
21:16 de la lutte contre la criminalité.
21:18 ...
21:20 -Le laboratoire scientifique de recherche criminelle
21:36 voit le jour à l'université Northwestern de Chicago
21:39 à l'automne 1929.
21:41 Il rassemble des spécialistes en empreintes digitales,
21:45 en balistique, en photographie de scènes de crime,
21:49 en analyse graphologique et en toxicologie.
21:52 Keillor en devient l'expert en matière de détection de mensonges
21:57 grâce à une nouvelle machine qu'il a lui-même conçue.
22:01 ...
22:08 ...
22:28 -Keillor a également ajouté une nouveauté.
22:31 Deux électrodes placées sur les paumes des mains
22:34 du sujet interrogé.
22:36 ...
22:46 -Keillor donne à son dispositif le nom de polygraphe,
22:50 un terme générique qui désigne tout appareil
22:53 enregistrant simultanément plusieurs paramètres.
22:56 Mais il prend soin de faire breveter son invention
22:59 et s'en approprie le nom.
23:01 Pour la plupart des gens, polygraphe devient rapidement
23:04 le nom de détecteur de mensonges.
23:07 ...
23:10 Alors même que Keillor vend son appareil à la police
23:13 et à des détectives, il développe parallèlement
23:16 une nouvelle application très lucrative
23:19 et promise à un bel avenir.
23:22 ...
23:49 Si une enquête criminelle ne conduit souvent
23:52 qu'à un seul interrogatoire avec le détecteur de mensonges,
23:55 dans les deux années qui suivent son arrivée à Chicago,
23:58 Keillor teste plus d'un millier de caissiers de banques
24:01 et d'employés de grands magasins.
24:03 Il partage ses honoraires avec le laboratoire
24:06 et cette activité annexe devient bientôt
24:09 sa principale source de revenus.
24:11 ...
24:14 Keillor réussit à imposer son polygraphe
24:17 alors même que les méthodes d'interrogatoire
24:20 sont sur le point de changer radicalement.
24:23 Tout commence en 1931 par la publication
24:26 d'une étude gouvernementale
24:28 sur les irrégularités commises par la police.
24:31 ...
24:36 Bien qu'ils entendent parler de passage à tabac
24:39 depuis des années, les Américains n'en sont pas moins sidérés
24:43 par les horreurs dénoncées dans le rapport Wickersham.
24:46 ...
24:49 ...
25:00 Suite à la publication du rapport Wickersham,
25:03 la Cour suprême décrète enfin irrecevables
25:06 les aveux obtenus par la violence.
25:08 ...
25:15 ...
25:21 Depuis 10 ans, très peu de services de police
25:24 se sont intéressés aux détecteurs de mensonges.
25:27 Selon les propres mots du maire de New York, Jimmy Walker,
25:31 une bonne vieille matraque est bien plus efficace
25:34 que les nouvelles méthodes scientifiques.
25:37 Mais maintenant que la violence est soi-disant bannie
25:40 des salles d'interrogatoire, le polygraphe commence
25:43 à tenir l'attention des forces de l'ordre.
25:46 ...
25:52 ...
25:58 ...
26:02 ...
26:08 ...
26:14 ...
26:22 ...
26:30 Comme l'explique son concepteur, la réussite de cette méthode
26:34 dans l'obtention d'aveux repose en grande partie
26:37 sur l'effet psychologique induit par l'appareil.
26:40 ...
26:46 ...
26:54 ...
27:02 ...
27:10 ...
27:18 ...
27:26 ...
27:34 ...
27:40 ...
27:48 ...
27:54 Lorsque Keillor intègre le laboratoire
27:56 de recherche scientifique, il est l'un des seuls opérateurs
27:59 de polygraphes du pays et le département qu'il dirige
28:02 est presque considéré comme secondaire.
28:04 Et pourtant, au bout de deux ans, son chiffre d'affaires
28:07 dépasse celui de tous les autres services réunis
28:10 et en 1933, il se voit attribuer une récompense
28:13 pour son civisme et sa contribution remarquable
28:16 à la ville de Chicago.
28:18 Des policiers viennent de tout le pays pour suivre
28:21 son enseignement et, de retour chez eux,
28:24 font l'éloge de son invention.
28:26 Keillor devient la coqueluche des médias,
28:29 en grande partie grâce à une femme qu'il a connue
28:32 en Californie.
28:34 Catherine Applegate l'a rencontrée alors qu'il amusait
28:37 des amis avec son détecteur de mensonges.
28:39 Ils se sont mariés peu après son installation à Chicago,
28:42 une ville taillée sur mesure pour le jeune couple.
28:46 ♪ ♪ ♪
28:49 - Un homme, cependant, ne se laisse pas impressionner.
29:15 John Larson, qui ne travaille qu'à quelques kilomètres
29:18 de leur domicile, évolue dans un monde
29:21 radicalement différent.
29:23 Plus la célébrité de Keillor grandit,
29:38 plus Larson éprouve de ressentiments.
29:41 ♪ ♪ ♪
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29:48 ♪ ♪ ♪
29:51 Dans la guerre silencieuse qu'il oppose à son rival,
30:17 Larson se trouve un allié inattendu.
30:20 À la fin des années 1930, William Marston s'est éloigné
30:24 des milieux universitaires, juridiques et cinématographiques.
30:28 Il a eu deux enfants avec Elisabeth,
30:31 puis deux autres avec Olive.
30:33 Et ils vivent tous ensemble dans la banlieue nord de New York.
30:38 ♪ ♪ ♪
30:41 Sa vie a beau être un tissu de mensonges,
30:51 Marston a le don d'apparaître comme le champion de la vérité.
30:55 Le détecteur de mensonges est à son image,
31:00 bluffant, énigmatique et adaptable à l'infini.
31:04 Il ne peut donc rester les bras croisés
31:07 alors que Keillor s'en approprie l'invention.
31:10 Même si le livre est en quasi totale contradiction
31:26 avec l'idée que Larson se fait du polygraphe,
31:29 ce dernier accepte d'en écrire la préface.
31:32 L'aversion des deux hommes pour Keillor
31:35 l'emporte sur leur réticence.
31:37 Mais pas pour longtemps.
31:41 Marston va à Madison Avenue
31:43 et dit qu'il pourrait offrir ses services
31:46 pour investiguer les réactions émotionnelles des gens
31:49 à des produits.
31:51 - Il mettra son détecteur de mensonges
31:54 pour voir leurs réactions
31:56 après avoir utilisé les razorblades Gillette.
31:59 Et, sans surprise, ils aiment tous les razorblades Gillette.
32:03 - Gillette était contente de faire des advertisements,
32:07 mais ils voulaient vérifier avec d'autres experts
32:10 avant de continuer cette campagne.
32:12 Ils ont approché John Larson
32:15 et il a fait des expériences réelles
32:18 et a mesuré leurs réactions
32:20 et n'a trouvé aucune différence
32:22 entre Gillette et les marques rivales.
32:24 - Marston a contacté John Larson
32:27 et lui a dit que si on lui validait
32:30 ce que je lui avais dit dans ces advertisements,
32:33 il lui donnerait 30 000 $.
32:35 - L'alliance de convenance est morte.
32:38 Non seulement Larson refuse le pot de vin,
32:41 mais il dénonce Marston au FBI.
32:44 Marston parvient à échapper aux poursuites pénales,
32:48 mais il s'est encore une fois brûlé les ailes.
32:52 En 1941, il entame une nouvelle carrière
33:01 en créant un personnage de bande dessinée
33:04 qu'il soumet à la société Detective Comics,
33:07 mieux connue sous le nom de DC Comics.
33:11,
33:38 William Marston possède une arme ultra-puissante,
34:06 mais il ne profite que quelques années
34:09 du phénoménal succès de Wonder Woman.
34:12 Il contracte la polio en 1944,
34:15 apprend l'année suivante qu'il a un cancer
34:18 et meurt au printemps 1947.
34:21 Il est alors riche, célèbre
34:25 et généralement considéré
34:27 comme le père du détecteur de mensonges.
34:30 Les Américains n'ont pas fini de célébrer
34:46 la fin de la Seconde Guerre mondiale,
34:49 qu'ils entrent déjà en conflit
34:51 avec un ennemi d'un genre nouveau.
34:55 ♪ ♪ ♪
35:00 ♪ ♪ ♪
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35:17 ♪ ♪ ♪
35:23 Six mois après que l'anéantissement d'Hiroshima
35:26 a révélé au monde le programme nucléaire américain,
35:29 Leonard Thiller est affecté
35:31 à l'usine ultra-secrète d'enrichissement d'uranium,
35:34 Dockridge, dans le Tennessee.
35:37 ♪ ♪ ♪
35:42 Sa fonction est de vérifier la loyauté,
35:45 l'intégrité, la fiabilité, la stabilité mentale
35:49 et les aptitudes des employés.
35:52 Si le programme se concentre d'abord
35:56 sur des personnes triées sur le volet,
35:58 très vite, les 5 000 membres du personnel
36:01 sont soumis à un test tous les six mois.
36:05 La peur et la suspicion s'infiltrent
36:09 dans la psyché nationale.
36:11 Le polygraphe va bientôt connaître
36:14 son heure de gloire, Leonard Thiller également.
36:17 À l'été 1948, ce dernier se laisse entraîner
36:21 dans le premier procès-spectacle de la guerre froide.
36:25 ♪ ♪ ♪
36:28 - Alger Hiss,
36:30 former high state departmental official,
36:32 is branded a communist by...
36:34 His accuser, Whitaker Chambers,
36:36 self-confessed former communist,
36:38 testified before the Un-American Affairs Committee.
36:40 - Mr. Hiss...
36:43 represents the concealed enemy.
36:45 - Les membres de la Commission des activités anti-américaines
36:48 souscrivent aux réquisitoires de Whitaker Chambers
36:51 contre Alger Hiss.
36:53 Ils le font sans grande conviction,
36:55 à une exception près.
36:57 Le tout nouveau député, Richard Nixon,
36:59 méprise l'accusé et oeuvre sans relâche à sa chute.
37:03 - I am not and never have been
37:06 a member of the Communist Party.
37:09 - L'affaire se résume à une question.
37:12 Lequel de ces deux hommes ment?
37:15 La plupart des Américains s'opposent à Nixon.
37:19 Ils font confiance à Hiss,
37:21 tout comme les présidents Roosevelt et Truman ont cru en lui.
37:25 Mais le 16 août 1948, alors que l'audition se termine,
37:29 l'accusé tombe dans le piège
37:31 soigneusement préparé par le jeune député.
37:34 "La Commission se heurte à un problème difficile",
37:37 lui dit Richard Nixon.
37:39 "Je me demande si dans ces circonstances,
37:42 "vous seriez prêt à passer au détecteur de mensonges."
37:46 Richard Nixon garantit à Alger Hiss
38:04 que le test sera conduit par Killer en personne.
38:08 Mais l'accusé connaît la loi
38:10 et la transcription de ses objections est faufuillante,
38:13 fait deux pages.
38:15 Le test ne se fera pas.
38:17 Nixon n'en a que faire, car sa manœuvre a réussi.
38:21 Il a décrédibilisé à jamais son adversaire.
38:24 Comme il le dira plus tard,
38:26 "Je ne connais rien au polygraphe.
38:29 "Je sais seulement qu'ils font une peur bleue aux gens."
38:33 Lorsqu'un grand jury déclare qu'il a eu raison depuis le début,
38:39 des millions d'Américains tombent de haut
38:42 et l'inquiétude s'installe.
38:44 À peu près à l'époque où il est entraîné dans l'affaire Hiss,
39:06 Leonard Killer joue son propre rôle dans un grand film hollywoodien
39:10 aux côtés de l'une des stars les plus célèbres du moment.
39:14 "Appelé North 777" raconte une affaire récente
39:17 dans laquelle Killer a contribué
39:19 à libérer un homme condamné à tort pour meurtre.
39:23 Il est à présent aussi célèbre
39:33 que les principaux acteurs judiciaires du pays.
39:36 -Quand Killer a fait de la détection de mentes plus coercive,
39:40 il est devenu un type de poster boy
39:43 pour la détection de mentes et l'interrogation de faux.
39:46 -Qu'est-ce qui se passe ?
39:48 -Après la guerre, Killer s'est impliqué
39:51 dans ce qu'on appelle aujourd'hui un projet d'innocence.
39:55 Killer vend la détection de mentes
39:58 non pas pour dire que les gens sont en colère,
40:01 mais pour les exonérer.
40:03 Mais sa conversion de Joliet en libérateur
40:06 commence à peine qu'elle est déjà interrompue
40:09 par la multiplication de ses problèmes personnels.
40:13 Son mariage bat de l'aile
40:16 et il engage un détective privé pour suivre sa femme.
40:31 -Problèmes conjugaux, alcoolisme et paranoïa
40:35 sont des fléaux courants dans sa profession.
40:39 -You're sitting there for hours and hours and hours
40:42 doing mental combat
40:44 with someone who may be the worst criminal you've ever seen
40:48 or someone who's absolutely innocent.
40:51 If I wrongly accuse you, your life is over with.
40:57 If I say you're innocent and you're guilty
41:02 and I let you go, you're gonna walk out
41:05 to go out and commit more crimes.
41:08 And that stress is just palpable to most examiners.
41:12 Fin 1948, Leonard Killer,
41:19 qui a fait du polygraphe un élément incontournable
41:22 de la vie américaine,
41:24 est victime d'une grave attaque cérébrale.
41:27 Il meurt le 20 septembre 1949 à l'âge de 45 ans.
41:32 -John Larson a assisté à la déchéance de son rival
41:36 depuis la ville de Logansport, dans l'Indiana,
41:39 où il occupe le poste de directeur médical
41:42 de l'hôpital psychiatrique d'État.
41:45 Si sa capacité à améliorer la vie de ses patients
41:49 est appréciée de tous,
41:51 ses tentatives d'utilisation du polygraphe
41:54 dans un cadre thérapeutique
41:56 se sont révélées peu fructueuses.
41:58 -Larson held out hope always for the device
42:01 as just a way to get people to sort of open up
42:05 and perhaps even resolve underlying complexes within them.
42:09 Whether this is a successful strategy is a different story.
42:13 -Mais cet homme sérieux et tranquille est rongé
42:16 par la jalousie qu'il ressent à l'égard de son ancien rival.
42:20 Il rassemble compulsivement des coupures de presse,
42:23 des courriers et des rapports
42:25 afin de faire des choses
42:27 qui, il pense-t-il, révèlera enfin
42:30 les intentions frauduleuses de Keillor.
42:33 Il prévoit de l'intituler "Unmasking the lie detector",
42:37 démasquer le détecteur de mensonges,
42:40 et espère qu'il sonnera le glas de sa propre création.
42:44 ...
43:04 -The lie detector is used first at Oak Ridge,
43:07 but then it expands.
43:09 ...
43:32 -La méthode fait également fureur dans les entreprises,
43:35 aussi bien dans les banques
43:37 que dans les chaînes de restauration rapides.
43:39 Des milliers, puis des millions d'employés
43:41 et de postulants à un emploi
43:43 sont soumis à des tests polygraphiques.
43:46 ...
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44:10 -En cas de situation problématique,
44:12 de plus en plus d'Américains se retrouvent confrontés
44:15 à ce type de mensonge.
44:17 Mais à la télévision, dans les films et les bandes dessinées,
44:20 l'appareil ne commet jamais d'erreurs.
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45:39 -Cette réputation d'infaillibilité a contribué
45:43 à une très large diffusion du détecteur de mensonges.
45:46 En réalité, l'instrument est capricieux
45:50 et ses résultats peuvent facilement être mal interprétés.
45:54 Seul un petit pourcentage d'opérateurs
45:56 a bénéficié d'une formation professionnelle
45:58 et les abus sont légion.
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