Elle est la seule euro-députée à vivre en Isère. A deux mois des élections européennes, l'écologiste Gwendoline Delbos-Corfield évoquent les nombreux sujets d'actualité qui entrent dans le champ de compétences du Parlement européen.
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00:00:00 (Générique)
00:00:18 Bonjour à tous. Bienvenue dans le QG, le rendez-vous politique de Télé Grenoble.
00:00:22 Avec toutes les semaines, un élu fisé roi dont les décisions impactent directement notre vie quotidienne.
00:00:28 Aujourd'hui, je reçois Gwendoline Delbos-Corphyde. Bonjour.
00:00:30 Bonjour.
00:00:31 Bienvenue. Vous êtes députée européenne, écologiste, élue depuis 2019 au Parlement européen.
00:00:37 Vous êtes la seule députée européenne en Isère, à tout parti confondu.
00:00:42 Vous avez également été conseillère régionale de la région Verne-Rhône-Alpes.
00:00:47 C'était de 2010 à 2015. Conseillère municipale de Grenoble à l'époque de Michel Destau sur son dernier mandat de 2008 à 2014.
00:00:55 À l'époque où les écologistes étaient avec Michel Destau ou contre lui ?
00:00:58 Non, on était la deuxième opposition. Il y avait trois groupes importants à l'Amérique de Grenoble.
00:01:04 Les socialistes avec plein d'autres, la droite. Et nous, on était la deuxième opposition.
00:01:08 Et on était l'opposition la plus efficace et la plus volontaire.
00:01:13 On travaillait énormément et on préparait la victoire de 2014.
00:01:16 Pourquoi ne pas être partie justement avec Éric Piolle en 2014 ?
00:01:20 Parce que je n'habitais plus Grenoble. Je suis partie vivre dans le Grézy-Vaudan.
00:01:23 C'est une bonne raison. Je crois que vous viviez sur le plateau des petites roches, au pied de la chartreuse.
00:01:28 Vous faisiez quoi avant de faire de la politique ?
00:01:31 J'ai travaillé dans les salles culturelles à Grenoble.
00:01:34 Et puis j'ai travaillé auprès d'élus assez rapidement.
00:01:37 Et après, en plus, il y a eu aussi des moments où, avant de devenir députée, par exemple, je n'ai plus été élue pendant quatre ans.
00:01:44 Et là, j'ai recherché du boulot. Mais c'est très difficile en tant que femme ancienne élue locale.
00:01:49 On a une étiquette.
00:01:50 On a une étiquette. Je n'ai pas pu retrouver du travail entre 2015 et 2019.
00:01:54 Et j'avais deux enfants petits. Donc voilà, je me suis surtout occupée d'eux.
00:01:58 Alors, j'ai vu que vous êtes née dans un pays qui est loin d'être le berceau de l'Europe, la Grande-Bretagne.
00:02:03 Est-ce que vous avez la nationalité anglaise également ?
00:02:05 Non, je suis arrivée à quelques mois en France. J'ai un lien très fort avec l'Angleterre parce que mon père est anglais, était anglais.
00:02:13 D'ailleurs, il a pris la nationalité française depuis, mais il me parlait tout le temps en anglais.
00:02:16 J'ai beaucoup été élevée dans la culture anglaise, mais je n'ai jamais pris la peine de prendre la nationalité puisque je n'ai pas eu besoin, en fait.
00:02:22 Depuis 2020, le Royaume-Uni ne fait plus partie de l'Europe. C'était le Brexit.
00:02:26 Donc, on a beaucoup parlé avant. On a l'impression que finalement, il n'y a pas eu énormément de conséquences.
00:02:32 Ça a changé quelque chose pour vous au Parlement européen qui n'est plus député britannique ?
00:02:37 Non, ça a vraiment changé les choses pour eux. J'ai l'habitude de dire que l'Angleterre a montré ce qu'il ne fallait surtout pas faire.
00:02:45 Ils se sont retrouvés dans des difficultés immenses dans tous les domaines et ils sont encore dedans.
00:02:49 Et nous n'arrivons encore pas à créer tout à fait la relation que nous pourrions avoir.
00:02:53 On est encore en train de trouver les moyens pour que des choses se passent, des choses en termes économiques, en termes de commerce, en termes humains aussi,
00:02:59 de comment les gens se déplacent d'Angleterre à l'Union européenne. Donc, c'est pour eux que ça a été le plus compliqué.
00:03:04 Mais pour nous, au Parlement européen, c'est la tristesse d'avoir perdu un membre et d'avoir craint à un moment donné que ça pourrait être quelque chose qui arriverait à d'autres.
00:03:14 Encore une fois, l'Angleterre a montré que c'était une tellement mauvaise idée que les autres trouvent d'autres biais, peut-être parfois pour dévier les valeurs de l'Union européenne.
00:03:21 Mais en tous les cas, plus personne ne parle de quitter. Il n'y a plus d'exit.
00:03:25 Mais il reste des liens entre l'UE et l'Angleterre.
00:03:28 Il en reste. Il reste évidemment. Il y a des parlementaires des deux côtés, des parlementaires anglais et des parlementaires de l'Union européenne qui travaillent ensemble de manière très régulière.
00:03:35 Je fais partie de cette délégation d'ailleurs, qu'on appelle UKEU, qui est cette délégation de parlementaires où, justement, on réfléchit.
00:03:45 On ne pense pas à certaines choses, mais par exemple, les étudiants, c'est très compliqué.
00:03:49 Les artistes, aujourd'hui, aller faire une tournée en Angleterre ou pour des gens d'Angleterre, aller faire une tournée sur l'Union européenne, c'est très compliqué.
00:03:54 Il y a un certain nombre de choses où on doit encore trouver des solutions.
00:03:57 Les solutions ne sont pas du tout finalisées. Peut-être même qu'un jour, l'Angleterre reviendra dans l'Union européenne avant qu'on ait fini de tout régler.
00:04:06 On a contractualisé à travers les années tellement de choses qu'en fait, aujourd'hui, c'est très compliqué quand un pays sort.
00:04:11 Et puis surtout, il perd accès à tellement de choses, encore une fois, de tout ordre que oui, ça demande à ce qu'entre parlementaires, on continue à inventer des choses, à penser des choses.
00:04:20 Et qu'après, on alimente la réflexion au niveau de l'Union européenne et au niveau du gouvernement anglais pour que des solutions soient trouvées.
00:04:27 Un message peut-être à méditer pour les eurosceptiques français, parce qu'il y en a aussi dans notre pays.
00:04:32 Il n'y a plus que 705 députés européens aujourd'hui au Parlement, puisque les Britanniques sont partis il y a deux ans.
00:04:40 Sur ces 705, il y a 79 députés français actuellement, 23 de la majorité présidentielle, 18 du Rassemblement national, 8 LR, 7 PS, 6 LFI et 12 écologistes.
00:04:52 Vous étiez d'ailleurs la douzième de liste en 2019 derrière Yannick Jadot.
00:04:57 Les députés français pèsent peu au sein de l'Assemblée européenne, puisque dans les deux principaux groupes qui dirigent l'Europe, ils représentent moins de 5 % chacun.
00:05:08 Au Parlement européen, on n'a pas besoin d'être dans les grands groupes pour travailler et pour peser.
00:05:12 C'est vraiment la grande différence avec le système présidentiel français. On a du mal à le comprendre en France. On est une exception dans l'Union européenne.
00:05:20 On peut exister dans l'opposition.
00:05:22 Ce n'est pas une opposition. On est un système parlementaire. Moi, je suis en charge de dossier en mon nom propre. Je suis rapporteure sur un certain nombre de dossiers.
00:05:28 Je suis la personne, par exemple, qui gère la question de la situation en Hongrie, qui est un pays où les choses vont très mal.
00:05:33 C'est moi qui gère. C'est moi qui discute avec les diplomates. C'est moi qui discute avec la Commission européenne.
00:05:38 C'est moi qui discute au sein du Parlement sur ce sujet-là et qui dirige un peu les travaux.
00:05:42 Mais sur plein d'autres sujets, nous allons être rapporteurs ou rapportrices à un moment donné. C'est le système parlementaire.
00:05:47 Donc on pèse énormément sans être dans le grand groupe ou même en étant un petit nombre dans le petit groupe.
00:05:53 Dans le groupe social-démocrate, il y a une socialiste de Lyon, Sylvie Guillaume, qui a beaucoup travaillé sur les questions d'asile, d'immigration.
00:06:01 Et c'est elle qui a mené au bout les négociations. Donc je peux vous donner des tas d'exemples.
00:06:05 Raphaël Glucksmann, qui était dans ce grand groupe, a pu aussi faire des choses. Nous, dans notre groupe, Benoît Bitho, un agriculteur, a énormément influencé le travail sur l'agriculture.
00:06:12 Voilà. Je pourrais vous donner des tas d'exemples où on peut être soit pas nombreux dans les grands groupes, soit dans des groupes qui ne sont pas les plus gros groupes
00:06:18 et être très actifs et très efficaces au Parlement européen. C'est le système parlementaire.
00:06:22 – C'est un système qui pourrait fonctionner en France. On voit que le Parlement a parfois du mal, aujourd'hui, à diriger le pays avec une majorité relative.
00:06:30 C'est quelque chose qui pourrait se transposer, ce système de Parlement européen, à notre démocratie française ?
00:06:36 – Alors moi, je suis convaincue que les Français ne sont pas plus bêtes que les autres. Donc je pense que oui.
00:06:40 Mais on a des années, des décennies et plus que des décennies, peut-être même des siècles, d'une vision très manichéenne, avec un homme au pouvoir.
00:06:49 Et je dis un homme parce que ça a toujours été des grands hommes, en France. Voilà, on est un peu coincés dans ce système-là.
00:06:55 Et on a un peu cette image en France de l'homme qui va sauver les choses, de cet homme qui va nous tracer un chemin et qui va trouver toutes les solutions.
00:07:02 Et on n'est pas très fort à travailler l'intelligence collective. Les échelles où on y arrive un petit peu, c'est le municipal et les agglomérations.
00:07:10 Mais c'est pareil, on n'y arrive pas à l'Assemblée nationale. Et les régions ont très peu de pouvoir, finalement.
00:07:15 C'était un système qui avait essayé de retrouver la proportionnelle et le parlementarisme. Et on n'y arrive pas bien.
00:07:20 Donc oui, il y aurait un apprentissage démocratique pour un certain nombre de parlementaires et de gens du gouvernement, à apprendre ça.
00:07:27 À apprendre qu'une opposition, ce n'est pas forcément des gens qui sont juste dans le débat stérile d'être contre.
00:07:32 Et qu'un gouvernement, surtout, ou qu'une mairie, etc., ce n'est pas des gens qui imposent constamment des choses, en dépit parfois d'une discussion qui pourrait être intéressante dans le collectif.
00:07:41 – Bon, on ne va pas révolutionner la démocratie française à travers cette émission. Mais bon, c'était intéressant de faire le parallèle.
00:07:47 On connaît bien, en général, la vie, la mission des députés français à l'Assemblée nationale.
00:07:54 Un peu moins, voire beaucoup moins, celle des députés européens.
00:07:57 Vous êtes beaucoup moins nombreux, cette fois, moins nombreux en France que les députés nationaux.
00:08:01 C'est quoi le quotidien de votre vie de députée européenne ?
00:08:06 – Alors d'abord, c'est à Bruxelles, énormément. C'est là que nous travaillons. Nous partons 4 jours par mois à Strasbourg.
00:08:12 – C'est Bruxelles, le cœur de…
00:08:13 – Mais le cœur du travail, c'est à Bruxelles. Moi, j'y réside aujourd'hui en grande partie.
00:08:17 J'avais des enfants petits quand j'ai été élue. Un petit garçon qui n'avait encore que 2 ans.
00:08:20 Donc si je voulais le voir, il fallait que je le fasse venir avec moi.
00:08:23 Donc tout le monde vit à Bruxelles et nous revenons les vacances et certains week-ends.
00:08:26 Voilà, donc c'est beaucoup de travail, exactement comme dans un Parlement français, en commission.
00:08:31 C'est beaucoup un travail, beaucoup plus qu'au Parlement français.
00:08:34 Beaucoup un travail de compréhension des enjeux à travers des expertises et des experts.
00:08:38 Nous écoutons beaucoup la société civile. Nous écoutons beaucoup des experts de ces sujets-là.
00:08:42 Et après, c'est un travail avec la Commission européenne qui correspond à peu près au gouvernement en France.
00:08:47 Les commissaires, c'est un peu comme les ministres.
00:08:49 Il y a un commissaire à l'agriculture, un commissaire aux finances, un commissaire à la justice.
00:08:52 Moi, je travaille beaucoup avec le commissaire à la justice, par exemple,
00:08:54 et la commissaire aux valeurs et aux droits ou la commissaire à l'égalité.
00:08:58 Ça, c'est les commissaires avec qui moi, je vais travailler.
00:09:00 Et puis, on travaille aussi avec les États membres, la représentation permanente française,
00:09:04 c'est-à-dire les diplomates français qui travaillent sur ces sujets-là à Bruxelles.
00:09:07 Mais aussi, moi, je me retrouve à travailler avec beaucoup d'autres.
00:09:09 Et puis, on travaille avec nos collègues énormément.
00:09:12 C'est un travail, tout se fait au Parlement européen à travers du travail collectif
00:09:16 et du travail de compromis entre sept membres en général, qui représentent les sept groupes.
00:09:21 Et donc, il faut trouver des réflexions qui conviennent à tout le monde
00:09:25 pour qu'après, on puisse avoir des majorités.
00:09:27 – Strasbourg, c'est les séances, c'est la représentation médiatique ?
00:09:32 – C'est voilà, c'est le moment un peu de vote en plénière solennelle.
00:09:35 Et c'est la représentation médiatique, mais ça ne dure que quatre jours par mois.
00:09:38 Et tout le monde se transporte à Strasbourg pendant ces quatre jours-là
00:09:42 pour y travailler, effectivement.
00:09:44 Et c'est là aussi où il y a un certain nombre de gens qui viennent vous rencontrer aussi.
00:09:49 C'est vrai qu'il y a beaucoup d'associatifs ou de personnalités
00:09:53 qui aiment venir à Strasbourg parce que c'est le Parlement officiel, le bon Parlement.
00:09:57 – C'est l'image d'épinal, presque, du Parlement européen.
00:10:01 Bon, ce n'est pas très écolo de déplacer tout le monde de Bruxelles à Strasbourg chaque mois.
00:10:04 Mais bon, ça, c'est un autre débat.
00:10:07 Pour faire le parallèle avec les députés de l'Assemblée nationale,
00:10:11 vous n'avez pas de territoire attaché.
00:10:13 Est-ce que vous avez une permanence pour recevoir éventuellement des citoyens ?
00:10:17 – Alors, j'ai une permanence à Grenoble, mais qui sert en fait pour mon équipe
00:10:21 parce que j'ai deux assistantes locales et c'est elles qui travaillent là.
00:10:24 Parce qu'il faut bien qu'elles aient des bureaux.
00:10:26 Mais en réalité, vous n'allez pas toquer à la porte de votre député.
00:10:28 – Vous n'allez pas toquer comme on le fait pour un député.
00:10:29 – Voilà, parce que moi, je ne peux pas aider quelqu'un pour quoi que ce soit, à peu près en France.
00:10:32 Les enjeux sur lesquels nous travaillons, les dossiers sur lesquels nous travaillons,
00:10:35 c'est des dossiers de compétences de l'Union européenne.
00:10:38 Mais ceci étant dit, on sait quand même, parmi les écolos, les 12 écolos,
00:10:43 on sait quand même un peu répartir le territoire en fonction de notre histoire
00:10:47 et de là où on avait travaillé déjà avant.
00:10:49 Donc c'est sûr que moi, je réponds, je vais beaucoup dans les écoles et les lycées
00:10:53 et les collèges de Rhône-Alpes.
00:10:55 En Auvergne, on m'a peu appelée, mais j'y suis allée une ou deux fois.
00:10:58 Mais en Rhône-Alpes, j'y vais beaucoup.
00:10:59 Et je travaille beaucoup avec le monde associatif et le monde, voilà,
00:11:03 le monde aussi politique.
00:11:05 Ronald-Pauvergne, je me rends assez peu dans les autres territoires.
00:11:09 Il y a quelques territoires comme ça, comme Nancy, où ils aiment bien me faire venir.
00:11:13 Et voilà, donc ils me rappellent régulièrement.
00:11:15 Et on n'a pas de députés écolos qui travaillent sur ce point-là.
00:11:18 Mais par exemple, je ne vais jamais en Ile-de-France et à Paris
00:11:20 parce qu'il y a plein de députés écolos déjà là-bas.
00:11:22 Donc ils se répartissent le travail sur ces sujets-là.
00:11:25 Et moi, les sujets que j'essaye de travailler en local, c'est vraiment des sujets d'ici.
00:11:28 – Si un, disait Roi, a l'ambition de toucher une subvention européenne,
00:11:33 il ne peut pas venir voir son député européen ou le député européen de son…
00:11:37 – Alors, il peut venir nous voir et on pourra lui indiquer comment on procède.
00:11:41 Mais nous n'avons aucune capacité à agir sur les subventions.
00:11:45 C'est déjà souvent pas totalement le cas quand même, ni au niveau national,
00:11:49 ni même au niveau local, malgré ce que les élus essayent de faire croire.
00:11:52 – Je vais dire, ils le font sans croire.
00:11:53 – Les choses sont très codifiées et l'administrative.
00:11:55 Donc il y a beaucoup d'élus qui font croire qu'ils peuvent avoir des passes droits
00:11:57 ou qu'ils peuvent, mais c'est de moins en moins le cas.
00:11:59 Et c'est tant mieux parce que sinon c'est du clientélisme.
00:12:01 Mais nous, au niveau européen, c'est absolument impossible.
00:12:03 Une subvention européenne, ça passe dans le cadre de la Commission européenne.
00:12:06 C'est des systèmes, c'est un peu la critique qu'on fait parfois à la Commission européenne,
00:12:09 c'est très technocratique, mais c'est vrai que c'est des études de dossiers très lourdes et très compliquées.
00:12:12 Notre capacité à nous d'influencer une subvention, elle n'existe pas.
00:12:17 En revanche, nous pouvons effectivement apporter des informations et guider les gens.
00:12:21 – Alors vous parlez de clientélisme.
00:12:23 Un heureux député gagne plus qu'un député classique en France.
00:12:26 Je crois que c'est environ 10 000 euros brut par mois, plus 5 000 euros pour des frais généraux.
00:12:30 On est sur des montants très confortables qui n'ont pas empêché pour autant la corruption.
00:12:35 C'était l'an dernier, plusieurs députés européens ont été accusés d'avoir perçu de l'argent de la part du Qatar
00:12:42 pour influencer sur les décisions du Parlement européen.
00:12:44 On parle là de plusieurs millions d'euros.
00:12:46 On a retrouvé des billets en petite coupure au domicile de ces députés.
00:12:50 Ça vous a surpris cette histoire ?
00:12:52 – Celle-là, oui. Elle est surprenante parce qu'elle a…
00:12:55 – On va prendre sortie d'un film de grande stature.
00:12:57 – Voilà, celle-là, elle a un côté réo-cambolesque qui n'est pas du tout notre quotidien.
00:13:01 On parle d'une très belle femme dans un très beau couple avec un monsieur aussi très beau.
00:13:06 – C'est un député grec et un député italien.
00:13:08 – Voilà, à Grèce, il aimait être pris en photo.
00:13:10 Ils avaient un petit. Il y a eu une course-poursuite jusqu'à la gare à Bruxelles avec des paquets d'argent.
00:13:14 On a découvert ces gens-là, des sacs remplis d'argent.
00:13:17 Ça, ça n'arrive pas tous les jours, bien évidemment.
00:13:19 En revanche, c'est sûr que, exactement comme au niveau national mais comme au niveau local,
00:13:24 il y a une tentative de grands groupes au niveau européen.
00:13:27 Ça va être les plus grands groupes qu'on peut trouver.
00:13:29 Alors, ils ont une influence plus importante certainement qu'une petite entreprise locale
00:13:33 mais qui vont essayer d'influencer les décisions qu'on peut prendre au niveau politique.
00:13:38 On prend quand même des décisions qui ont des conséquences.
00:13:41 Récemment, il y a eu des grands textes européens qui sont sortis sur le numérique
00:13:45 qui encadrent les grands groupes numériques, les fameux GAFAM.
00:13:49 Et donc, effectivement, ça ne plaisait pas tellement aux GAFAM
00:13:52 qu'on vienne leur régler, réguler un peu ce qu'ils font.
00:13:55 Et du coup, ils ont essayé par des déjeuners, par des week-ends, etc.
00:13:58 de pouvoir influencer les députés.
00:14:00 Les gens, ils sont de plus en plus immunisés.
00:14:02 Au niveau européen, on travaille énormément la question depuis très longtemps.
00:14:05 Il y a un registre des lobbies, ce qui n'existe pas en France.
00:14:07 Au niveau européen, vous devez dire quand vous déjeunez avec quelqu'un,
00:14:11 ce qui n'est pas le cas en France, vous ne savez jamais avec qui vos députés déjeunent.
00:14:14 Nous, on doit vraiment énormément rendre des comptes.
00:14:17 Ça n'empêche qu'il reste encore effectivement des zones d'ombre.
00:14:20 C'est cette histoire du Qatar qui a mis une image très négative
00:14:23 et qu'on n'est pas encore assez réglementée.
00:14:24 Moi, j'ai beaucoup travaillé là-dessus.
00:14:25 Ça a été un de mon travail durant ce mandat.
00:14:27 Et effectivement, je voudrais des règles bien plus sévères et bien plus strictes.
00:14:31 Vous avez aussi parlé de cette enveloppe de 5 000 euros que nous avons chaque mois
00:14:34 qui doit servir à des frais liés à notre mission parlementaire,
00:14:37 qui ne sont pas encadrés.
00:14:39 La plupart d'entre nous, on est très honnête.
00:14:41 On l'utilise pour louer.
00:14:42 À Grenoble, c'est mon loyer de la permanence.
00:14:45 C'est les factures de téléphone de mon équipe.
00:14:48 C'est un certain nombre de besoins que j'ai quand je voyage, par exemple,
00:14:52 de remboursement de frais.
00:14:54 Et ça ne doit servir qu'à ça.
00:14:56 À la fin du mandat, il y a un certain nombre de députés
00:14:58 qui ne rendent pas l'argent qu'ils n'ont pas utilisé.
00:15:00 Et croyez-moi, 5 000 euros par mois, c'est tellement énorme
00:15:03 que ce que vous n'avez pas utilisé, c'est que vous le gardez pour vous, pour votre poche.
00:15:06 Donc ça, par exemple, c'est quelque chose qui me met très en colère.
00:15:08 J'ai essayé pendant ce mandat, assez seule.
00:15:12 Le groupe vert maintient cette position depuis des années.
00:15:15 Moi, j'étais la représentante dans un groupe de travail au nom des verts
00:15:18 pour travailler sur ces questions-là.
00:15:20 Et j'étais un peu seule.
00:15:21 Même les socialistes n'ont pas beaucoup bossé là-dessus.
00:15:23 Ils ont été très sévères sur d'autres sujets.
00:15:25 Ils ont fait un gros chemin, les socialistes.
00:15:27 Ça nous a permis d'encore mieux encadrer nos règles.
00:15:29 Mais même sur ces 5 000 euros, aujourd'hui, il y a une résistance culturelle
00:15:31 de tous les parlementaires qui voudraient quand même
00:15:33 qu'on les laisse tranquilles avec leurs 5 000 euros d'enveloppe chaque mois.
00:15:36 - Oui, qu'ils puissent en faire ce qu'ils veulent sans qu'on contrôle.
00:15:39 En tout cas, les députés incriminés dans cette affaire liée au Qatar
00:15:44 ont fait un peu de prison, mais sont revenus.
00:15:46 Je crois qu'ils siègent aujourd'hui encore au Parlement.
00:15:48 - La dame en question grecque, elle est revenue.
00:15:50 Elle finit son mandat, puisque voilà, il n'y avait pas de...
00:15:53 Voilà, la Grèce ne l'a pas obligée à démissionner.
00:15:57 On pourra avoir un peu des règles comme ça nationales
00:15:59 qui disent que quand vous vous êtes retrouvés dans une histoire de corruption,
00:16:01 mais ça n'est pas le cas, elle finit le mandat.
00:16:03 Par contre, elle ne sera pas représentée par aucun groupe en Grèce.
00:16:06 Donc, elle ne reviendra pas le prochain mandat.
00:16:08 - Alors, sur le prochain mandat, il y aura 2 eurodéputés de plus pour la France en 2024.
00:16:12 C'est de 79 à 81.
00:16:15 Ça veut dire que chaque liste doit être constituée de 81 candidats potentiels ?
00:16:19 - En France, oui, c'est ça.
00:16:20 En France, vous devez faire une liste paritaire,
00:16:22 hommes-femmes, hommes-femmes ou femmes-hommes-femmes-hommes.
00:16:24 Et puis, vous devez présenter les 80.
00:16:27 Ce n'est pas le cas dans toute l'Union européenne.
00:16:28 Chacun a ses règles.
00:16:29 Donc, il y a des pays où vous ne présentez qu'une partie de la liste.
00:16:31 Nous, en France, les règles, c'est que vous devez trouver 81 noms.
00:16:34 - Alors, vous serez une femme qui sera la tête de liste.
00:16:37 Ça avait été Yannick Jadot en 2019.
00:16:39 Là, ce sera Marie Toussaint, qui est élue, comme vous, députée européenne depuis 2019.
00:16:45 C'est une place qui a été discutée au sein des élus européens, la tête de liste ?
00:16:51 - Pas tant que ça.
00:16:53 Il y avait une autre candidature, un autre député, David Cormand.
00:16:56 Mais en réalité, elle a gagné assez clairement.
00:16:59 Je crois que c'était assez clair pour tout le monde.
00:17:02 C'est quand même quelqu'un qui a fondé une association assez importante
00:17:06 et qui a fait la fameuse affaire du siècle,
00:17:08 c'est-à-dire vraiment aider des associations à amener en justice le gouvernement
00:17:13 sur des questions de climat,
00:17:15 en association d'ailleurs avec d'autres associations européennes,
00:17:18 qu'on fait ça ailleurs, aux Pays-Bas, etc.
00:17:20 Donc, elle avait un peu cette histoire-là très intéressante et très importante.
00:17:24 Puis, elle avait fait un gros travail en tant que députée européenne
00:17:26 sur les questions très environnementales.
00:17:28 C'est une des personnes qui vraiment représente notre groupe
00:17:30 sur toutes ces questions environnementales au Parlement européen.
00:17:32 Donc, c'était assez clair que ça allait être elle.
00:17:34 - Vous étiez 12e en 2019.
00:17:36 Vous avez quelle position sur le prochain scrutin ?
00:17:38 - Je serais 13e.
00:17:39 - 13e. Bon.
00:17:40 Ça risque d'être compliqué, cette place, pour être élue aujourd'hui,
00:17:42 au regard des sondages.
00:17:44 - On ne va pas faire de la langue de bois.
00:17:45 Ça risque d'être très compliqué.
00:17:46 - Vous vous projetez dans une autre vie ensuite, déjà ?
00:17:49 - Oui.
00:17:50 Les choses, voilà, là, on rentre dans du personnel.
00:17:52 Ma situation personnelle et politique est devenue difficile depuis quelques temps.
00:17:55 Donc, je n'ai pas encore eu le temps de me projeter.
00:17:57 Déjà, je finis ce mandat-là.
00:17:58 Et voilà.
00:17:59 Et on a plein de choses compliquées à faire avant la fin du mandat.
00:18:01 Mais effectivement, il va falloir que je puisse utiliser l'expertise
00:18:04 que j'ai eue en tant que députée européenne ailleurs.
00:18:06 - Parce qu'aujourd'hui, les sondages ne sont pas très bons pour pas mal de candidats,
00:18:11 et notamment pour les écologistes.
00:18:13 Si on fait une projection en sièges, d'après les sondages,
00:18:16 le Rassemblement national aurait 28 sièges,
00:18:18 17 pour la majorité d'Emmanuel Macron,
00:18:21 10 pour le PS, 7 à 8 pour LR, et peut-être les écologistes,
00:18:25 et puis 5 pour la France insoumise.
00:18:27 Est-ce que c'était une bonne stratégie de partir désunis à gauche,
00:18:31 alors qu'on avait créé une dynamique au moment des élections législatives
00:18:34 avec la nuppes sur un scrutin comme celui-là ?
00:18:37 - Pour moi, c'est une évidence.
00:18:39 Encore une fois, les élections européennes,
00:18:41 ce n'est pas le système présidentialiste français.
00:18:43 C'est un système parlementaire, à la proportionnelle,
00:18:45 où tout le monde peut avoir des élus.
00:18:46 Si tout le monde fait une très bonne campagne à gauche,
00:18:48 on pourrait gagner beaucoup d'élus.
00:18:49 Moi, ma problématique, c'est plus pourquoi la montée de l'extrême droite
00:18:52 n'est pas un sujet dans cette campagne.
00:18:54 Je ne supporte pas quand la gauche se critique les unes les autres au lieu de...
00:18:58 Voilà.
00:18:59 On n'a pas besoin d'être sur la même liste.
00:19:01 - Mais le fait d'être concurrent implique forcément qu'on va un peu...
00:19:03 - Moi, je ne crois pas.
00:19:04 Je crois qu'on pourrait pouvoir promouvoir ce qui fait la qualité de notre travail
00:19:08 quand on se retrouve au niveau européen,
00:19:09 à travailler ensemble sur ces sujets-là.
00:19:11 Après, on a une vraie différence, par exemple, avec la France insoumise,
00:19:13 qui reste un parti souverainiste,
00:19:16 qui ne pense pas que beaucoup de compétences
00:19:18 devraient être au niveau de l'Union européenne.
00:19:19 Moi, je pense que toutes les compétences
00:19:21 qu'on a actuellement au niveau de l'Union européenne sont saines à avoir.
00:19:24 Et je pense même qu'on devrait y rajouter, par exemple, la santé.
00:19:26 Je pense qu'il y a plein de choses qu'il faut continuer à gérer au niveau national,
00:19:28 au niveau local, au niveau régional,
00:19:30 à chaque niveau, la nécessité de faire des choses.
00:19:32 Mais au niveau européen, les enjeux d'aujourd'hui,
00:19:34 je crois que c'est vraiment au niveau européen qu'on les gère.
00:19:36 La France insoumise reste souverainiste.
00:19:38 Et ce n'est pas grave. On est d'accord avec eux sur plein d'autres choses.
00:19:40 Mais là-dessus, on a un problème.
00:19:41 Donc, ça ne faisait vraiment pas sens d'être avec eux, aux européennes, à mon avis.
00:19:44 Et je pense encore, encore une fois,
00:19:46 que notre vraie problématique dans cette campagne,
00:19:50 c'est le Rassemblement national, les idées d'extrême droite.
00:19:53 La France va envoyer peut-être 30 élus.
00:19:56 C'est une honte. C'est un scandale. C'est dramatique.
00:19:58 C'est ce dont la gauche française devrait parler et uniquement parler.
00:20:01 Voir le centre aussi, d'ailleurs.
00:20:03 Et s'en inquiéter.
00:20:05 Ce n'est pas tous les pays qu'on voit autant de députés européens d'extrême droite.
00:20:10 Par ailleurs, la droite française est aussi de plus en plus porteuse d'idées d'extrême droite.
00:20:14 On le voit au niveau européen.
00:20:16 François Bellamy est quelqu'un qui soutient, par exemple,
00:20:18 un monsieur qui s'appelle Viktor Orbán, qui est le Premier ministre de Hongrie.
00:20:21 Moi, c'est un sujet sur lequel j'ai beaucoup travaillé.
00:20:24 La droite française est la pire sur des sujets d'immigration,
00:20:27 la pire sur des sujets de société, des sujets de droits des femmes, etc.
00:20:32 Et même au niveau régional, on le voit avec Laurent Wauquiez.
00:20:35 Donc, on a un vrai enjeu à débattre d'une Europe qui pourrait tourner au brun.
00:20:41 Et je trouve que ce n'est pas suffisamment le sujet de cette campagne.
00:20:44 Mais cette division à gauche, même si vous la validez,
00:20:47 elle fait aussi le jeu du Rassemblement national.
00:20:49 Je prends l'exemple des communistes qui sont donnés en dessous de 5%.
00:20:52 Ça veut dire que les 3 ou 4% qui vont faire,
00:20:54 ce sont des voix qui seront perdues pour la gauche en termes de sièges.
00:20:57 Et mathématiquement, ça renforcera le nombre de sièges des listes
00:21:00 qui auront fait des gros scores comme le RN.
00:21:02 Alors, ce n'est pas tout à fait vrai.
00:21:04 Ce qu'on a vu en 2019, c'est que comme il y avait 5 listes
00:21:06 qui avaient fait plus que 5%, on a tous eu beaucoup d'élus.
00:21:09 Les écolos n'auraient pas eu 12 élus s'il y avait eu plein de listes
00:21:11 qui avaient dépassé les 5%.
00:21:13 Donc, en réalité, à la fin...
00:21:15 C'est plus complexe.
00:21:16 C'est plus complexe.
00:21:17 C'est vrai que quand on ne regarde que les listes qui passent à 5%,
00:21:19 ces voix ne sont pas tant perdues que ça.
00:21:21 On les récupère d'une manière ou de l'autre.
00:21:23 Mais après, encore une fois, la question, c'est de faire voter aux élections européennes,
00:21:27 faire comprendre aux Français que les enjeux européens sont leurs enjeux.
00:21:31 Il y a des enjeux du quotidien.
00:21:33 C'est incroyable cette méconnaissance qu'on a en France.
00:21:35 Je ne la retrouve pas dans d'autres pays,
00:21:37 cette méconnaissance qu'on a des enjeux européens,
00:21:39 de l'importance de l'Union européenne dans un certain nombre de décisions
00:21:41 de tous les jours, dans la protection de vos droits et vos libertés.
00:21:44 L'Union européenne, c'est la garante d'un certain nombre de choses,
00:21:46 de droits et de libertés.
00:21:47 En Pologne, en Hongrie, ils nous ont beaucoup utilisés ces dernières années
00:21:50 parce qu'ils savaient qu'on était ceux qui continuons à les défendre,
00:21:53 nous, les représentants au Parlement européen.
00:21:56 Donc, pour moi, là, ils sont les enjeux.
00:21:58 Et c'est typiquement des idées où, si on veut,
00:22:01 on peut se battre pied à pied contre l'extrême droite.
00:22:04 Nos sociétés, partout dans l'Union européenne,
00:22:07 sont moins racistes qu'elles ne l'étaient avant,
00:22:09 moins homophobes, plus féministes.
00:22:11 Nous avons des sociétés ouvertes et progressives.
00:22:13 Les résultats aux élections, dans les sondages de l'extrême droite,
00:22:18 ne reflètent pas la mentalité des Français,
00:22:20 et pas plus d'ailleurs dans d'autres pays.
00:22:22 Donc, à un moment donné, il faut s'interroger sur l'incapacité
00:22:24 de nos partis à savoir mobiliser femmes, jeunes et personnes progressistes.
00:22:30 Vous parlez des sondages, il y a aussi eu des résultats
00:22:34 pour le RN aux législatives qui étaient très probants
00:22:38 sur cette évolution électorale.
00:22:40 En tout cas, avec 10 à 15 points d'avance,
00:22:42 suivant les sondages, à deux mois du scrutin,
00:22:45 sur la seconde liste, on voit mal comment
00:22:47 ce n'est pas le RN qui sortira en tête de ces élections.
00:22:50 C'est un succès qui leur servira forcément
00:22:53 de rampe de lancement pour la présidentielle en 2016.
00:22:56 La France dirigée par l'extrême droite,
00:22:58 ce n'est plus inimaginable, comme il y a quelques années.
00:23:00 La semaine dernière, je recevais à votre place Eric Piolle,
00:23:02 le maire de Grenoble.
00:23:03 Je lui ai demandé de vous poser une question
00:23:05 qui fait écho justement à cette éventualité.
00:23:07 On l'écoute.
00:23:09 Alors, cher Gwendoline, nous avons un lien très particulier,
00:23:14 puisque j'ai commencé ma vie politique à vos côtés,
00:23:18 au Conseil régional.
00:23:20 La question que je veux vous poser, c'est que
00:23:22 vous avez fait un travail, je le sais,
00:23:24 de simulation de ce qui se passerait
00:23:29 dans nos systèmes juridiques, notamment en cas
00:23:32 d'arrivée au pouvoir de régime autoritaire,
00:23:35 et ce qui se passerait en matière de liberté publique,
00:23:38 en France.
00:23:40 Je serais intéressé pour que vous partagiez
00:23:43 les conclusions de ces travaux,
00:23:45 et qu'on puisse remettre au centre
00:23:48 ce qui risque de se passer si l'extrême droite
00:23:52 arrivait au pouvoir.
00:23:53 On se voit entre membres d'Europe Écologie Les Verts ?
00:23:57 Non, c'est un peu étonnant.
00:23:58 On se connaît bien avec Eric, mais c'est les circonstances.
00:24:01 C'est la télé. Quand on a la télé,
00:24:02 on a le réflexe de vous voyer en général.
00:24:04 Alors, sur la question que le maire vous pose...
00:24:07 C'est très intéressant qu'il pose cette question-là.
00:24:10 C'est une inquiétude que j'ai depuis un moment.
00:24:12 J'ai commandité une étude.
00:24:15 Je dis souvent que les parlementaires français
00:24:18 ont des enveloppes pour payer des repas.
00:24:21 Nous, on a des enveloppes pour payer des études.
00:24:23 C'est aussi ça, l'intérêt du travail parlementaire
00:24:25 au niveau européen.
00:24:26 C'est peut-être plus utile.
00:24:27 Je pense que c'est plus utile.
00:24:28 J'ai commandité un certain nombre d'études
00:24:30 à des universitaires durant mon mandat,
00:24:32 parce que je pense que ça aide beaucoup
00:24:33 à prendre des décisions et à penser des politiques publiques.
00:24:35 Nous travaillons beaucoup au niveau européen comme ça.
00:24:37 Et donc, j'ai demandé à deux universitaires spécialistes
00:24:40 du droit français et du droit européen,
00:24:42 Laurent Pêche et Sébastien Platon,
00:24:44 qui ont eux-mêmes, après, se sont entourés
00:24:46 d'autres spécialistes, de faire une étude
00:24:48 du système administratif légal et judiciaire français.
00:24:51 À quel point aujourd'hui, déjà dans les lois,
00:24:53 il y a des choses qui permettraient à un gouvernement
00:24:55 qui serait d'inspiration autocratique,
00:24:57 s'il arrivait au pouvoir,
00:24:59 de tout de suite pouvoir appliquer des choses autocratiques.
00:25:02 On a cet exemple de la Hongrie.
00:25:04 On a cet exemple de la Pologne.
00:25:06 Ces gens, quand ils sont arrivés au pouvoir,
00:25:08 ils sont arrivés élus.
00:25:09 Ils étaient démocrates, parfois même libérales, centristes.
00:25:11 Et ils arrivent au pouvoir et ils détricotent
00:25:14 pendant des années le droit.
00:25:15 C'est comme ça qu'aujourd'hui, on arrive au pouvoir.
00:25:16 Ce n'est pas avec des tanks et des armées.
00:25:18 Les autocrates, aujourd'hui, arrivent comme ça au pouvoir.
00:25:20 Mais c'est une fois qu'ils arrivent au pouvoir
00:25:22 qu'ils détricotent.
00:25:23 Et nous, la question, c'est est-ce qu'il y aurait
00:25:25 tant que ça à détricoter ?
00:25:26 Parce qu'on a déjà eu, sous le gouvernement Hollande
00:25:28 et depuis les attaques terroristes de 2015,
00:25:30 un certain nombre d'exceptions et de dérogations au droit.
00:25:33 On en a accumulé après, durant les années.
00:25:35 On a donné de plus en plus de pouvoir aux policiers,
00:25:37 de plus en plus à la force policière,
00:25:40 de plus en plus de pouvoir au président.
00:25:42 On a une assemblée qui est de moins en moins
00:25:44 en capacité d'agir de manière parlementaire,
00:25:46 comme on l'a déjà dit.
00:25:47 Et puis, on s'est attaqué aussi progressivement
00:25:49 aux libertés associatives, ainsi qu'aux droits des journalistes.
00:25:52 Pendant longtemps, un journaliste en France,
00:25:54 ses sources étaient protégées, etc.
00:25:56 Aujourd'hui, au nom de la Sécurité nationale,
00:25:58 on oblige de plus en plus les journalistes
00:26:00 à dévoiler leurs sources, ce qui est très dangereux pour eux
00:26:02 et ce qui est très inquiétant.
00:26:04 On criminalise les activistes, les activistes environnementaux,
00:26:07 les gens qui s'occupent des migrants,
00:26:09 mais parfois même juste la LDH,
00:26:11 qui a connu elle-même des choses.
00:26:13 On a cette fameuse charte d'engagement républicain
00:26:15 qui met en difficulté un certain nombre d'associations.
00:26:18 Donc, moi, je pense qu'en France,
00:26:20 et c'est ce que cette étude démontre,
00:26:22 elle est assez sèche, c'est une étude rude,
00:26:24 c'est vraiment l'étude du droit,
00:26:26 c'est pas du blabla, c'est pas de la sociologie.
00:26:28 Elle montre comment on a déjà mis en place
00:26:30 un certain nombre de choses dans le droit,
00:26:32 d'exception, d'érogation au droit,
00:26:34 qui font que, effectivement,
00:26:36 si demain, des gens qui arrivent au pouvoir
00:26:38 et qui veulent être autocrates,
00:26:40 ils peuvent le faire déjà dans les conditions.
00:26:42 – Alors, c'est pas…
00:26:44 Ceux qui ont décidé ça, c'était pas dans cette optique-là.
00:26:46 – C'est pas du tout.
00:26:48 La personne qui a co-financé avec moi cette étude,
00:26:51 c'est le président de notre groupe au Parlement,
00:26:54 Philippe Lambert, c'est un Belge,
00:26:56 et lui, il l'a fait parce qu'il est proche
00:26:58 d'un certain nombre de gens
00:27:00 de la haute administration française,
00:27:02 qui, à l'époque de Hollande, lui avait dit
00:27:04 "mais nous, on fera jamais rien de tout ça".
00:27:06 Et il avait dit "on fait pas des lois pour des moments d'exception,
00:27:08 on fait des lois pour toujours,
00:27:10 et quelles que soient les personnes qui soient au pouvoir,
00:27:12 elles peuvent toujours être dévoyées, les lois,
00:27:14 mais si à la base déjà les lois ne sont pas dangereuses,
00:27:16 on a gagné beaucoup".
00:27:18 Donc oui, ça avait pas été fait pour ça,
00:27:20 mais aujourd'hui, on peut mettre dans les mains
00:27:22 d'un autocrate, et le Rassemblement national
00:27:24 a par deux fois au présidentiel,
00:27:26 déjà, été très proche du pouvoir.
00:27:28 Oui, et 2026 sera certainement aussi
00:27:31 un scrutin très important là-dessus.
00:27:34 Bon, on serait pas le premier pays européen
00:27:36 à basculer, mais la France, c'est quand même
00:27:38 pas rien dans l'Union européenne,
00:27:40 il y avait eu l'Autriche à une période.
00:27:42 Vous êtes quand même optimiste
00:27:44 sur le sursaut de la population française,
00:27:47 ou avec le recul, vous vous dites que...
00:27:50 Je suis pas très optimiste parce que je trouve
00:27:52 qu'on en parle pas, je trouve que l'Europe
00:27:55 n'est pas un sujet, ni auprès des journalistes,
00:27:57 ni auprès des partis politiques,
00:27:59 ni dans les formations politiques,
00:28:01 même chez les associatifs, il n'y a pas cette idée
00:28:03 d'une démocratie européenne à défendre,
00:28:05 et donc d'une démocratie française à défendre.
00:28:07 Donc non, je suis pas très optimiste.
00:28:09 Mais parfois, enfin, je suis pas optimiste,
00:28:12 mais je suis pas non plus...
00:28:14 Je baisse pas les bras, je pense que notre rôle
00:28:16 à nous, c'est de continuer à dire ça,
00:28:18 et de faire tout en France des gens qui se mobilisent
00:28:20 auprès des plus pauvres, des plus fragiles,
00:28:22 des plus migrants, des gens qui prennent des risques
00:28:24 en étant associatifs, etc.
00:28:26 Alors que vraiment, aujourd'hui, c'est un peu lourd
00:28:28 d'être associatif en France,
00:28:30 et même d'être journaliste.
00:28:32 La France est un pays qui cumule un nombre
00:28:34 de détentions de quelques heures pour des journalistes,
00:28:36 beaucoup plus que dans d'autres pays.
00:28:38 Ça choque beaucoup nos voisins, quand ils apprennent
00:28:40 qu'en France, un journaliste a fait une heure ou deux
00:28:42 de garde à vue parce qu'il s'est retrouvé
00:28:44 dans une manifestation, alors qu'il essayait
00:28:46 de rendre compte en tant que journaliste
00:28:48 de cette manifestation. Donc non, je suis pessimiste,
00:28:50 mais je suis, par contre, combative,
00:28:52 et je pense qu'il y a beaucoup, beaucoup de gens
00:28:54 en France qui le sont. Et je redis,
00:28:56 il y a un an, la Pologne avait
00:28:58 un gouvernement autocratique extrêmement
00:29:00 dangereux. Il y a des femmes qui sont mortes
00:29:02 avec des fœtus morts
00:29:04 en elles, en Pologne,
00:29:06 parce qu'on ne les... - On n'avait pas le droit d'avorter.
00:29:08 - Parce qu'on n'avait pas le droit d'avorter. On refusait même
00:29:10 quand le fœtus était mort de soigner ces femmes-là.
00:29:12 On avait des homosexuels en danger,
00:29:14 on avait vraiment... On avait une justice
00:29:16 plus du tout indépendante. Et puis,
00:29:18 il y a eu une immense mobilisation des jeunes
00:29:20 et des femmes aux dernières élections en Pologne,
00:29:22 immense. Ils n'avaient jamais vu un taux de participation
00:29:24 pareil aux élections. Ils ont changé
00:29:26 le gouvernement et ils sont en train de réinstaurer des choses.
00:29:28 Ce n'est pas miraculeux, ce n'est pas idéal,
00:29:30 mais quand les gens veulent être combatifs
00:29:32 et sont mobilisés, on arrive à bouger les choses.
00:29:34 - Il y a un des sujets sur lesquels
00:29:36 surfe le Rassemblement national depuis
00:29:38 des années, c'est l'immigration.
00:29:40 L'Europe est d'ailleurs souvent associée aux problématiques
00:29:42 d'immigration. C'est un sujet sensible
00:29:44 qui fait débat à chaque campagne
00:29:46 électorale. Il va aussi
00:29:48 être au cœur de cette campagne des Européennes ?
00:29:50 - Oui, je pense qu'il... Alors,
00:29:52 ils ne l'ont pas trop abordé encore. Moi, je suis un peu...
00:29:54 - C'est pour ça que je vous pose la question. - Non, non. Moi, je pensais que ça serait
00:29:56 un sujet beaucoup plus important. Mais de toute
00:29:58 manière, je ne sais pas de quoi on parle dans cette campagne européenne.
00:30:00 Je veux vous dire très franchement, qui concerne l'Europe. J'ai l'impression
00:30:02 qu'on parle beaucoup de choses qui concernent beaucoup la France,
00:30:04 ce qui a toujours été le cas. - C'est souvent le cas, oui. - Des élections européennes,
00:30:06 souvent, on les renationalise. Mais enfin, là,
00:30:08 je trouve qu'on est sur une pente particulièrement
00:30:10 ennuyeuse et ennuyante.
00:30:12 Mais
00:30:14 effectivement, l'immigration risque
00:30:16 d'être un sujet. Ça risque d'être instrumentalisé
00:30:18 par l'extrême droite et pas seulement par l'extrême
00:30:20 droite. Et c'est fort dommage
00:30:22 parce que
00:30:24 la France est un pays qui accueille de moins en moins
00:30:26 de migrants avec les années, alors qu'elle en a
00:30:28 les capacités. Il y a des
00:30:30 vraies problématiques, évidemment, en Grèce, en Italie,
00:30:32 où ils arrivent massivement.
00:30:34 Mais plein de pays ne prennent pas leur
00:30:36 part partout dans l'Union européenne.
00:30:38 L'Union européenne n'avance pas sur ce sujet-là. Elle n'est
00:30:40 pas sérieuse sur ce sujet-là. C'est un des sujets où je suis
00:30:42 le plus critique de l'Union européenne parce qu'il y a
00:30:44 vraiment, aujourd'hui, un besoin d'affronter ces questions-là
00:30:46 et de se dire comment on partage l'arrivée
00:30:48 de ces gens-là. On a besoin de ces gens-là.
00:30:50 D'abord, ils s'enfuient.
00:30:52 Ils n'ont pas d'autre solution. Ils fuient des conditions
00:30:54 climatiques extrêmes, des guerres, des
00:30:56 famines. S'ils prennent autant de risques,
00:30:58 c'est parce qu'ils sont tellement
00:31:00 en difficulté chez eux qu'ils n'ont pas d'autre solution.
00:31:02 Donc, on n'arrêtera pas ça.
00:31:04 On va juste continuer à voir des gens mourir en mer ou en
00:31:06 montagne parce qu'on en a, là, à la frontière avec l'Italie.
00:31:08 Moi, je suis beaucoup à Montgenèvre,
00:31:10 à Brienzon. Il y a
00:31:12 chaque année un ou deux morts
00:31:14 ou, en tous les cas, des gens blessés
00:31:16 parce qu'ils traversent la neige dans des conditions
00:31:18 très difficiles. Donc, on ne va
00:31:20 pas l'enrayer. Et on ne sait pas, aujourd'hui,
00:31:22 ni l'accueillir, ni travailler cette question-là.
00:31:24 Et le paradoxe auquel on est arrivé
00:31:26 depuis 2-3 ans dans l'Union européenne
00:31:28 qui me terrifie en tant que féministe
00:31:30 et qui m'énerve vraiment beaucoup, c'est qu'en plus,
00:31:32 on dit aux femmes blanches de nos pays
00:31:34 "faites plus d'enfants". Et en France,
00:31:36 on a eu un président qui s'est permis de parler
00:31:38 de réarmement démographique. - À quelques semaines.
00:31:40 - C'est des mots que, moi, j'ai entendus en Hongrie,
00:31:42 que j'ai entendus en Pologne. C'est des mots extrêmement dangereux.
00:31:44 Donc, on dit aux femmes blanches
00:31:46 "vous, vous faites plus d'enfants, s'il vous plaît"
00:31:48 et on dit aux migrants "surtout, ne venez pas" alors qu'ils
00:31:50 arrivent avec une jeunesse, une énergie, une envie de faire.
00:31:52 On marche sur la tête.
00:31:54 Et en plus, encore une fois, c'est le corps des femmes
00:31:56 qui a fait des solutions à des problèmes politiques
00:31:58 et de politiques publiques. - Donc, ces migrants,
00:32:00 il faudrait les accueillir, mieux les accueillir,
00:32:02 en tirer, entre guillemets,
00:32:04 le positif, c'est votre positionnement là-dessus ?
00:32:06 - Ah bah oui, oui, vous savez,
00:32:08 on a parlé du Brexit, l'Angleterre
00:32:10 a voulu sortir de l'Union Européenne,
00:32:12 notamment sur cette question-là,
00:32:14 a fermé toutes ses frontières, il y a des tas de gens
00:32:16 qui meurent entre Calais
00:32:18 et la côte anglaise,
00:32:20 dans des conditions
00:32:22 assez dramatiques.
00:32:24 Il a voulu empêcher plein de gens de rentrer
00:32:26 et aujourd'hui, les bars, les cafés
00:32:28 londoniens, etc., manquent énormément de gens.
00:32:30 Donc, ils sont en train de réfléchir à recréer leur propre
00:32:32 filière d'arrivée des gens pour
00:32:34 pouvoir avoir des gens qui travaillent
00:32:36 dans tous ces endroits-là. Donc oui, évidemment,
00:32:38 on a besoin d'eux. Et puis,
00:32:40 surtout, on a besoin de faire preuve d'humanité,
00:32:42 parce que quand on s'habitue, autant qu'on est
00:32:44 en train de s'habituer aujourd'hui,
00:32:46 et on s'habitue de plus en plus à savoir
00:32:48 qu'il y a des gens qui meurent à nos frontières régulièrement,
00:32:50 dont des enfants, de la même manière qu'on s'habitue
00:32:52 à avoir des gens dans la rue, dans des conditions
00:32:54 pitoyables, eh bien, c'est une part de notre
00:32:56 humanité à nous qu'on perd. Donc, c'est nous-mêmes,
00:32:58 nous nous mettons en danger, nous-mêmes, je pense,
00:33:00 en tant que peuple et en tant que citoyenne et citoyen.
00:33:02 Vous évoquez les Anglais, ils ont aussi le projet
00:33:04 de renvoyer les migrants illégaux
00:33:06 au Rwanda. Ils ont passé un accord avec ce
00:33:08 pays pour renvoyer...
00:33:10 Oui, alors, pour l'instant, ça n'a jamais fonctionné. La Cour de justice
00:33:12 la plus haute
00:33:14 en Angleterre a toujours dit non.
00:33:16 Ils retentent régulièrement. Ça s'appelle
00:33:18 de la déportation. C'est un non.
00:33:20 Alors, c'est assez terrible. Donc, on est en train
00:33:22 de... Ils ont créé, en plus, ça représente
00:33:24 des tout petits nombres, mais quand même.
00:33:26 Donc, ça ne réglera pas du tout un problème. Mais, effectivement,
00:33:28 ils ont été mettre plein d'argent. - L'image est forte.
00:33:30 - Ils ont été mettre plein d'argent à Kigali, au Rwanda,
00:33:32 pour créer, dans un quartier,
00:33:34 ils ont donné de l'argent pour créer des maisons,
00:33:36 des rues, etc., etc., où ils espèrent
00:33:38 un jour envoyer ces migrants. Pour l'instant,
00:33:40 il n'y a jamais eu l'autorisation pour envoyer des avions.
00:33:42 Mais...
00:33:44 Mais c'est une idée qui circule aussi
00:33:46 au Danemark, aujourd'hui.
00:33:48 Je ne m'étonnerais pas qu'un jour,
00:33:50 on l'entende en France. Voilà.
00:33:52 Donc, là, vraiment, on tombe sur la tête
00:33:54 complètement. C'est-à-dire qu'on s'imagine des portes...
00:33:56 On va mettre de l'argent pour aller construire des quartiers
00:33:58 dans d'autres pays, et on s'imagine
00:34:00 renvoyer ces gens-là dans des pays
00:34:02 qu'ils ne connaissent pas, où ils n'ont jamais été,
00:34:04 au lieu de réfléchir à comment on peut mieux
00:34:06 les intégrer ici. Ils leur permettent souvent de rejoindre
00:34:08 une partie de leur famille qui est déjà là,
00:34:10 et très rapidement, les faire travailler
00:34:12 et leur permettre d'être des citoyens épanouis
00:34:14 qui participent à la vie de nos sociétés.
00:34:16 Bon, l'immigration, même si ça démarre
00:34:18 doucement, sera certainement
00:34:20 un des thèmes de la campagne
00:34:22 dans les prochaines semaines, d'autant que j'ai vu
00:34:24 que l'ancien directeur de Frontex,
00:34:26 qui est l'agence européenne
00:34:28 qui avait vocation, a vocation
00:34:30 à gérer les problèmes
00:34:32 d'immigration aux frontières européennes,
00:34:34 fait partie de la liste du Rassemblement
00:34:36 national. Ça vous a surpris ?
00:34:38 C'est un scandale, surtout,
00:34:40 parce que ce monsieur, il est parti...
00:34:42 Enfin, oui, c'est géré. Il est parti
00:34:44 de Frontex. Nous l'avons fait
00:34:46 partir. C'est le Parlement européen.
00:34:48 C'est les parlementaires européens qui ont...
00:34:50 C'était le patron, le directeur. Nous l'avons
00:34:52 fait partir. Nous avons demandé à ce qu'il parte
00:34:54 parce qu'il y avait d'immenses problèmes,
00:34:56 peut-être de détournement de fonds, en tous les cas
00:34:58 de maltraitance des agents Frontex
00:35:00 aux frontières et certainement de violences à l'égard
00:35:02 de... en tous les cas de complicité de violences
00:35:04 à l'égard des migrants,
00:35:06 des énormes problèmes de management. Enfin, c'est
00:35:08 un monsieur dont on a demandé qu'il quitte
00:35:10 cette agence européenne, tellement il faisait
00:35:12 mal son travail et tellement ça a créé
00:35:14 un scandale. Frontex, vous pouvez aller voir, hein,
00:35:16 Frontex a fait l'objet de plein d'articles
00:35:18 parce qu'il y avait
00:35:20 un problème à plein
00:35:22 de niveaux, encore une fois, de l'argent qui a
00:35:24 été mal géré,
00:35:26 du problème de management et des
00:35:28 agents Frontex aux frontières qui ont peut-être
00:35:30 participé à des violences. En tous les cas,
00:35:32 on a des forts soupçons. Et ce monsieur,
00:35:34 on le retrouve ensuite
00:35:36 numéro 2 sur une liste. C'est assez dramatique.
00:35:38 - Et d'autant qu'il se met en avant
00:35:40 son expérience Frontex pour
00:35:42 aborder ces sujets avec un œil d'expert.
00:35:44 Alors, l'immigration,
00:35:46 ce sera un des sujets de campagne. Sûrement, l'agriculture
00:35:48 aussi, puisqu'elle s'est imposée dans
00:35:50 la politique française en ce début d'année.
00:35:52 Les agriculteurs qui ont bloqué
00:35:54 le pays pour crier leur colère pendant
00:35:56 plusieurs semaines. Ils en
00:35:58 voulaient notamment à l'Europe
00:36:00 et à ses normes. On voit quelques images, là,
00:36:02 dans les rues de Grenoble. Vous avez compris
00:36:04 cette colère, ce mouvement,
00:36:06 Gwendolyn Delbock-Hofeld ?
00:36:08 - On est obligé, en tous les cas, de l'entendre
00:36:10 et on peut la comprendre partiellement. On met
00:36:12 depuis des années les agriculteurs de France
00:36:14 et d'ailleurs dans des difficultés
00:36:16 très importantes. Alors, la France peut-être encore plus
00:36:18 qu'ailleurs parce que c'est... En France, on a particulièrement
00:36:20 développé
00:36:22 et encouragé le système
00:36:24 des agro-industriels
00:36:26 ou d'agriculteurs à l'agriculture intensive
00:36:28 qui s'endettent énormément, qui se retrouvent dans des
00:36:30 grandes difficultés, qui vivent beaucoup grâce
00:36:32 aux subventions européennes.
00:36:34 Subventions européennes qui ne sont pas données pour la qualité
00:36:36 de ce qui est produit ou par la qualité du travail
00:36:38 qui est fait, mais qui sont données à l'hectare.
00:36:40 Et donc, plus vous avez des très très grandes étendues,
00:36:42 plus vous avez des subventions européennes.
00:36:44 Donc, oui, on a mis les agriculteurs en difficulté.
00:36:46 On ne produit pas assez pour nourrir
00:36:48 ou on produit mal pour nourrir.
00:36:50 En plus, on produit une agriculture qui,
00:36:52 parfois, peut être même
00:36:54 empoisonnée de
00:36:56 pesticides et de choses qui ne sont pas
00:36:58 bonnes pour les gens, pour la santé des gens.
00:37:00 Donc, là aussi,
00:37:02 c'est un système qui ne fonctionne pas.
00:37:04 Donc, on peut entendre cette colère. Je ne la partage
00:37:06 pas toujours parce que ce n'est parfois pas ceux
00:37:08 qui sont le plus en difficulté parmi eux
00:37:10 qui sont les plus présents dans ces manifestations.
00:37:12 Le petit paysan
00:37:14 qui a choisi depuis longtemps de faire
00:37:16 une agriculture
00:37:18 respectueuse de l'environnement,
00:37:20 qui produit en circuit court auprès de ses
00:37:22 collègues, etc. Ce n'est pas forcément lui
00:37:24 qui manifeste le plus. Parfois, on est là-dedans
00:37:26 des gros agriculteurs.
00:37:28 Et puis, ce qui, moi, me pose
00:37:30 beaucoup de problèmes, je sais que ce n'est pas très
00:37:32 consensuel en face de dire ça, mais je le dis quand même,
00:37:34 c'est qu'à un moment donné, quand ces gens-là détruisent,
00:37:36 on ne leur dit rien, alors que
00:37:38 toute autre population
00:37:40 qui détruit, que ce soit un fonctionnaire,
00:37:42 quand ils font des manifestations, que ce soit les jeunes, que ce soit
00:37:44 les environnementalistes, les activistes, etc.
00:37:46 On va jusqu'à parfois de la prison,
00:37:48 en tous les cas de la garde à vue. On a une criminalisation
00:37:50 immense aujourd'hui de tous ceux qui
00:37:52 manifestent. Et on n'a bizarrement pas
00:37:54 du tout une criminalisation des agriculteurs
00:37:56 quand ils font des actes bien plus forts.
00:37:58 Donc, il faut à la fois savoir écouter
00:38:00 les agriculteurs, savoir changer le système,
00:38:02 mais aussi, à la fois, être juste. Il n'y a pas de
00:38:04 population qui devrait échapper aux règles de tout
00:38:06 le monde. Parmi leurs
00:38:08 reproches, je parlais de l'Europe,
00:38:10 ce sont les normes imposées, notamment
00:38:12 par l'Europe, et beaucoup sont liées à des contraintes
00:38:14 environnementales. Le gouvernement
00:38:16 français a choisi de calmer
00:38:18 la colère des agriculteurs en mettant
00:38:20 la pédale douce sur ces contraintes
00:38:22 environnementales. Un projet de loi a été déposé
00:38:24 cette semaine à l'Assemblée nationale
00:38:26 qui prévoit notamment un allègement des
00:38:28 sanctions au cas d'intentes à l'environnement.
00:38:30 Il y avait d'autres réponses,
00:38:32 j'imagine, à leur apporter que
00:38:34 d'appuyer sur ce levier-là ?
00:38:36 Oui, c'est-à-dire que ce que le
00:38:38 gouvernement français, c'est qu'il va accélérer
00:38:40 encore la problématique.
00:38:42 Pourtant, c'est ce qu'ils demandent, ces agriculteurs,
00:38:44 en tout cas ceux qui manifestent. Oui, c'est ce qu'ils demandent, mais ce qui est triste,
00:38:46 c'est qu'ils sont eux-mêmes victimes du système
00:38:48 et ils sont eux-mêmes victimes surtout des
00:38:50 effets des pesticides. Le nombre d'agriculteurs qui
00:38:52 ont aujourd'hui des maladies liées
00:38:54 aux produits qu'ils utilisent, phytosanitaires,
00:38:56 voire leurs familles,
00:38:58 voire leurs voisins. Donc c'est ça qui est
00:39:00 un petit peu dommage, c'est qu'au lieu de les accompagner
00:39:02 dans une sortie de ce
00:39:04 tout produit pétrochimique,
00:39:06 etc., et de leur permettre
00:39:08 de mieux aider
00:39:10 la nature, aider la biodiversité,
00:39:12 trouver des solutions, on va,
00:39:14 pour leur faire plaisir à court terme,
00:39:16 effectivement, mettre une pause sur des règles
00:39:18 environnementales qui sont pourtant essentielles
00:39:20 à notre santé, à tous, et surtout à la santé de notre planète.
00:39:22 Et à un moment donné, ils vont en plus se retrouver
00:39:24 avec des terres qu'ils ne peuvent même plus user, parce qu'à force
00:39:26 d'épuiser les terres, on a déjà aujourd'hui des agriculteurs
00:39:28 qui, soit pour question de sécheresse,
00:39:30 soit pour question de terres qui ne sont plus
00:39:32 des terres fertiles, parce qu'on les a
00:39:34 tellement exploitées, ne peuvent même plus gérer
00:39:36 leur travail. Donc
00:39:38 oui, au lieu de les accompagner,
00:39:40 au lieu de trouver des solutions
00:39:42 pour que, on pourrait imaginer
00:39:44 demain, des revenus minimums
00:39:46 pour les agriculteurs, on pourrait surtout imaginer
00:39:48 des revenus, une partie des revenus, pour
00:39:50 aider à
00:39:52 nourrir la terre, à préserver la nature,
00:39:54 etc. On pourrait dire qu'un des rôles des
00:39:56 agriculteurs, c'est aussi ça, c'est de préserver nos terres
00:39:58 et nos terres fertiles, notamment. Donc, les
00:40:00 aider de ce point de vue-là, on trouve
00:40:02 des solutions à très court terme qui
00:40:04 satisfont probablement beaucoup les
00:40:06 agro-industriels, mais qui ne seront ni une
00:40:08 solution pour les agriculteurs eux-mêmes,
00:40:10 ni pour tous ceux qui consomment les produits.
00:40:12 - Quand un État, comme la France, décide de revenir
00:40:14 sur des normes imposées par
00:40:16 l'Europe, l'Europe n'a pas le
00:40:18 dernier mot sur ce genre de sujet ?
00:40:20 - Alors, il y a deux choses. Il y a des choses
00:40:22 où on est encore dans des périodes,
00:40:24 il y a beaucoup de choses où l'Europe
00:40:26 dit "on est dans une période transitoire,
00:40:28 vous pouvez aller un peu plus lentement",
00:40:30 etc. Il y a aussi des choses où des fois, la France
00:40:32 se met carrément en porte-à-faux, et en la loi,
00:40:34 et du coup, la France
00:40:36 paye des amendes. Il faut savoir que sur la
00:40:38 pollution de l'air, ça fait
00:40:40 des années que la France paye des amendes très
00:40:42 importantes chaque année à l'Union européenne
00:40:44 par rapport à l'état
00:40:46 de l'air que nous respirons dans nos villes,
00:40:48 parce qu'on est très loin d'être au niveau de ce qui,
00:40:50 normalement, nous aiderait à être en bonne santé
00:40:52 dans un certain nombre de nos villes, et comme on n'a pas
00:40:54 pendant longtemps pris les mesures nécessaires, la France
00:40:56 paye des amendes. Alors après, comme la
00:40:58 France, de toute manière, elle contribue plus en termes
00:41:00 de budget au niveau européen qu'elle ne reçoit,
00:41:02 en fait, les amendes sont déduites
00:41:04 de ce qu'elle donne.
00:41:06 C'est pour ça que ça n'inquiète pas beaucoup, malheureusement,
00:41:08 la France. - Oui, c'est comme une déduction d'impôt
00:41:10 quand on cotise auprès d'une association,
00:41:12 etc. Bon. Je parlais
00:41:14 de ça parce que sur un problème
00:41:16 qui touche le monde agricole, ici, en Isère
00:41:18 et plus généralement dans les Alpes, le loup,
00:41:20 c'est l'Europe qui a encore la main, aujourd'hui,
00:41:22 sur la protection du loup.
00:41:24 On ne peut pas, en France, faire ce qu'on
00:41:26 veut, même si le gouvernement le voulait,
00:41:28 sur les tirs de loups, par exemple.
00:41:30 C'est d'ailleurs un peu en train
00:41:32 d'évoluer. En tout cas, il y a des questionnements, je crois,
00:41:34 au niveau du Parlement européen sur ce sujet.
00:41:36 - Oui, l'Union européenne
00:41:38 a longtemps été en avant-garde
00:41:40 sur les sujets de société,
00:41:42 femmes, communautés
00:41:44 LGBT, etc., et sur les questions
00:41:46 environnementales. C'est vraiment les deux dossiers où elle
00:41:48 était à l'avant-garde et donc elle a depuis longtemps
00:41:50 même sauvé, en quelque sorte,
00:41:52 notre planète, notre biodiversité, nos animaux.
00:41:54 À l'époque où, dans les États membres, on avait
00:41:56 encore des lois très, très en retard sur tous ces sujets-là.
00:41:58 Et ça fait longtemps qu'il y a
00:42:00 effectivement un grand cadre européen
00:42:02 qui protège les animaux
00:42:04 tels que loups, ours, lynx, etc.,
00:42:06 puisqu'ils avaient disparu de l'Union européenne,
00:42:08 et qu'on a voulu faire en sorte qu'ils ne disparaissent pas.
00:42:10 Parce que quand les loups, les ours
00:42:12 et les lynx auront disparu,
00:42:14 c'est non seulement une part
00:42:16 importante de
00:42:18 la biodiversité animale
00:42:20 de l'Union européenne
00:42:22 qui va avoir disparu, mais c'est une part de notre
00:42:24 histoire, c'est une part de notre culture,
00:42:26 c'est d'une immense tristesse à tout point de vue.
00:42:28 Donc il y a des lois européennes qui les
00:42:30 protègent, effectivement, régulièrement.
00:42:32 Le monde agricole, le monde de la
00:42:34 chasse, un certain monde agricole,
00:42:36 un certain monde de la chasse, remettent
00:42:38 en question jusqu'au niveau européen
00:42:40 ces grands cadres et disent "voilà, mais pour l'instant
00:42:42 on tient sur ces grands cadres", parce que l'Union européenne
00:42:44 a quand même été très longtemps un facteur
00:42:46 protecteur, encore une fois, de la biodiversité,
00:42:48 les sites naturels nobiles,
00:42:50 des grands espaces
00:42:52 sauvages, des animaux sauvages,
00:42:54 etc., etc.
00:42:56 Et il y a encore beaucoup de gens qui souhaitent
00:42:58 que l'Union européenne soit garante de tout ça. Donc pour l'instant
00:43:00 ça tient, mais c'est effectivement, il y a des coups de boutoir
00:43:02 régulièrement. Et quand en plus
00:43:04 les États membres, comme la France,
00:43:06 là encore, n'accompagnent pas, on donne souvent l'exemple,
00:43:08 mais il est réel. En Italie,
00:43:10 on accompagne les bergers, les bergères sur toutes ces
00:43:12 questions-là bien plus et ça fonctionne
00:43:14 beaucoup mieux. C'est aussi vrai
00:43:16 de plus en plus dans des pays de l'Est et d'Europe centrale
00:43:18 où on accompagne, là ça va être avec l'ours et
00:43:20 d'autres. Il ne faut pas
00:43:22 nier la difficulté d'avoir
00:43:24 aujourd'hui en France des troupeaux
00:43:26 dans des territoires où le loup ou l'ours,
00:43:28 parce que dans les Pyrénées c'est l'ours, peuvent sévir.
00:43:30 C'est sûr. Mais comment
00:43:32 on fait pour répondre à
00:43:34 cette contradiction que nous avons
00:43:36 mais qui est essentielle, d'à la fois
00:43:38 permettre à des bergers
00:43:40 de vivre et surtout de nous nourrir
00:43:42 et puis à
00:43:44 aux grands fauves de continuer à exister. Parce que sinon
00:43:46 on aura, là encore une fois, raté
00:43:48 en termes de politique publique
00:43:50 pour l'avenir de toutes et tous.
00:43:52 Alors l'Europe qui est confrontée aussi
00:43:54 depuis deux ans à une guerre, qui se situe
00:43:56 aux portes de son territoire en Ukraine.
00:43:58 Est-ce qu'Emmanuel Macron
00:44:00 a bien fait de laisser entendre que l'Europe,
00:44:02 ou en tout cas la France, ne se mettait
00:44:04 aucune limite sur l'aide qu'elle pouvait
00:44:06 apporter à l'Ukraine jusqu'à éventuellement
00:44:08 intervenir avec
00:44:10 des hommes armés sur le territoire
00:44:12 ukrainien ?
00:44:14 On va commencer. Je suis désolée, je vais redire toujours la même chose.
00:44:16 C'est que je ne comprends pas ce pays
00:44:18 où un monsieur peut un jour, au réveil,
00:44:20 dire ce qu'il a envie de dire sans avoir
00:44:22 consulté ni son Parlement, ni même
00:44:24 son gouvernement, ni l'Union européenne.
00:44:26 Donc non. Je ne pense pas qu'il ait eu raison de sortir
00:44:28 ça tout de go comme ça.
00:44:30 Entamer la réflexion collectivement
00:44:32 au niveau de l'Union européenne, comme dans chaque
00:44:34 Etat membre, de jusqu'où on va
00:44:36 dans la situation de l'Ukraine et face
00:44:38 à la Russie, oui, il est nécessaire de le faire.
00:44:40 On n'en est pas du tout
00:44:42 encore au point d'envoyer des hommes.
00:44:44 En réalité, il a un petit peu
00:44:46 joué le
00:44:48 grand militaire guerrier. Voilà, encore une fois,
00:44:50 dans une tradition très française d'être l'homme
00:44:52 prodigue, etc.
00:44:54 Donc oui, il faut commencer à aborder ces sujets-là.
00:44:56 Il a fallu d'abord aborder le sujet
00:44:58 de "est-ce qu'on aide militairement ?
00:45:00 Est-ce qu'on prend d'abord prendre un côté ?
00:45:02 On l'avait jamais fait, on a pris un côté. Puis après, on a dit
00:45:04 "on aide militairement". On voit bien que
00:45:06 cette guerre, si on veut vraiment faire face à la
00:45:08 Russie, qui est effectivement un projet
00:45:10 de société, un projet humain
00:45:12 terrifiant, un projet d'interdiction de tout,
00:45:14 d'autocratie
00:45:16 totale, où les
00:45:18 gens, on l'a vu, tous les
00:45:20 opposants meurent les uns après les autres et sont
00:45:22 tués par le pouvoir. C'est
00:45:24 une dystopie, la Russie, qui est assez
00:45:26 effrayante. Et si on ne veut pas
00:45:28 que nos enfants vivent dans un monde comme ça, on ne veut pas que la Russie
00:45:30 prenne le pouvoir demain
00:45:32 dans les pays baltes, demain dans les pays
00:45:34 nordiques qui sont les plus proches.
00:45:36 Il y a une vraie inquiétude dans ces pays-là, européens
00:45:38 aujourd'hui. Les citoyens de ces pays-là, c'est pas du tout
00:45:40 comme en France. Pour eux, c'est pas loin.
00:45:42 Ils sont fontaliers, pratiquement.
00:45:44 La Finlande, les Lituaniens, les Letoniens,
00:45:46 les Estoniens, pour eux, ça a un sens
00:45:48 très réel, c'est à côté. Et ils ont
00:45:50 connu une période où ils étaient déjà soumis aux règles
00:45:52 de ce grand territoire. Donc
00:45:54 oui, il faut qu'on discute de
00:45:56 jusqu'où on va, comment on y va, comment
00:45:58 on inclut cette Ukraine. On a dit maintenant que l'Ukraine,
00:46:00 elle fait partie de l'Union européenne à terme un jour.
00:46:02 Comment on le fait ? Mais
00:46:04 encore une fois, tout ça, ça se travaille. Ça se travaille
00:46:06 avec des experts sur le sujet. Ça se travaille
00:46:08 avec une société. Ça se travaille avec un Parlement
00:46:10 et des parlementaires. Ça se travaille au niveau de l'Union européenne.
00:46:12 Et il n'y a pas d'autre
00:46:14 chef d'État qui s'est mis dans son pays à dire
00:46:16 des trucs pareils sans avoir
00:46:18 réfléchi avec les autres avant.
00:46:20 - Alors l'Ukraine demande à
00:46:22 faire partie de l'Union européenne. Vous le verrez
00:46:24 comme une forme de protection. Est-ce que
00:46:26 vous êtes favorable, vous, à cette intégration
00:46:28 de l'Ukraine à l'UE ? - Oui, j'y suis
00:46:30 évidemment favorable à très long terme. Moi, je suis
00:46:32 une pro-européenne qui pense que le projet
00:46:34 européen est loin d'être fini et en termes internes
00:46:36 de changement des règles pour qu'un jour
00:46:38 ce soit une démocratie. - Ils sont dans du court terme
00:46:40 dans leur demande. - Et l'intégration
00:46:42 un peu plus importante à tous ces territoires
00:46:44 qui font partie de l'histoire
00:46:46 de l'Union européenne. Il y a des pays qui sont en attente
00:46:48 depuis longtemps, qui sont les pays balkans.
00:46:50 La Serbie, la Bosnie,
00:46:52 l'Albanie, le Monténégro, etc. Il y en a
00:46:54 un certain nombre, qu'on fait attendre parfois
00:46:56 depuis 20 ans. Donc, on ne peut pas
00:46:58 intégrer l'Ukraine sans les avoir intégrés à eux.
00:47:00 Et puis, on n'est pas en capacité aujourd'hui d'intégrer
00:47:02 l'Ukraine. On n'a ni un système démocratique qui le permet.
00:47:04 On ne sait pas prendre des décisions déjà à 27
00:47:06 tous les jours. Donc, imaginez avec
00:47:08 autant de gens. C'est une population énorme, l'Ukraine.
00:47:10 C'est aussi, par exemple, une énorme
00:47:12 pression sur le système agricole. L'Union
00:47:14 européenne, un de ses grands budgets,
00:47:16 c'est la politique agricole commune. Si
00:47:18 l'Ukraine arrive, elle prend tout l'argent à elle toute seule.
00:47:20 Donc, on a beaucoup de choses
00:47:22 à travailler avant. Il faut se mettre au boulot.
00:47:24 Donc, ce n'est pas pour demain, mais à long
00:47:26 terme, il faut dire aux Ukrainiens
00:47:28 qu'effectivement, ils font partie de cette Union européenne.
00:47:30 - Ce n'est pas une solution qui peut régler leur conflit
00:47:32 aujourd'hui avec la Russie ?
00:47:34 - Alors, ce n'est certainement pas une solution qui peut régler
00:47:36 demain leur conflit. Et surtout,
00:47:38 la question du
00:47:40 pouvoir russe, de Poutine, du
00:47:42 projet russe, c'est
00:47:44 une question, encore une fois, qui va
00:47:46 beaucoup plus loin. L'Ukraine, c'est le territoire
00:47:48 où on a dit stop. On n'avait pas su dire stop
00:47:50 dans d'autres pays comme la Tchétchénie. On n'avait pas
00:47:52 su arrêter avant le pouvoir. C'est la première fois qu'on a vraiment
00:47:54 dit stop en Ukraine. Mais en réalité,
00:47:56 il y a plein d'autres moyens par lesquels la
00:47:58 Russie est aussi en train d'essayer d'imposer
00:48:00 son mode de vie, ses règles,
00:48:04 et cette idée, encore une fois, très autocratique du pouvoir
00:48:06 dans nos pays, à travers
00:48:08 l'ingérence, mais aussi, par exemple,
00:48:10 il y a, encore une fois, c'est un pays que je connais bien
00:48:12 parce que je travaille énormément dessus, le premier ministre
00:48:14 de Hongrie,
00:48:16 Viktor Orban, est régulièrement
00:48:18 une des personnes qui
00:48:22 parle pour Poutine au niveau de l'Union Européenne. C'est
00:48:24 un énorme problème. On a, comme ça, quelques personnes
00:48:26 dans l'Union Européenne qui continuent à être des proches de Poutine
00:48:28 et à témoigner de ce que veut la Russie.
00:48:30 - Vous faites partie de la commission des affaires
00:48:32 constitutionnelles, qui traite ce genre
00:48:34 de demande d'adhésion à l'UE.
00:48:36 Alors, si c'est compliqué
00:48:38 de faire rentrer un pays,
00:48:40 est-ce qu'à contrario, l'Europe a le pouvoir
00:48:42 d'exclure certains pays qui
00:48:44 sortiraient des valeurs défendues par l'Europe ?
00:48:46 Et vous parlez de la Hongrie, ça tombe bien. On peut prendre
00:48:48 ce cas concret, puisque depuis
00:48:50 plusieurs années, le gouvernement hongrois
00:48:52 porte atteinte à beaucoup de choses.
00:48:54 Vous parliez de la liberté de la presse,
00:48:56 tout à l'heure, les droits LGBT,
00:48:58 etc. Est-ce que,
00:49:00 concrètement, l'Europe pourrait décider d'exclure
00:49:02 la Hongrie ? - Non. Les textes ne le permettent
00:49:04 absolument pas.
00:49:06 Et moi, je suis plutôt favorable à ça, parce que
00:49:08 je pense que les citoyennes et citoyens
00:49:10 hongrois, ils ne sont pas
00:49:12 comptables totalement
00:49:14 de la situation. Ils le sont
00:49:16 partiellement, mais pas comptables totalement. - Ceux qui ont élu
00:49:18 Orban. - Ils ont élu Orban, mais Orban,
00:49:20 il a capturé le pouvoir,
00:49:22 capturé la presse, rendu la justice
00:49:24 plus indépendante,
00:49:26 capturé toutes les autorités indépendantes,
00:49:28 empêché l'opposition d'agir,
00:49:30 etc., etc. Et effectivement,
00:49:32 mis en place des lois très injustes pour les femmes,
00:49:34 pour les communautés LGBTI, pour les migrants
00:49:36 et pour d'autres, grâce notamment
00:49:38 à l'argent européen. Il a détourné
00:49:40 en quelque sorte de l'argent européen.
00:49:42 C'est son gendre qui recevait la plupart des grands
00:49:44 marchés publics européens, c'est vous dire.
00:49:46 On sait qu'en plus, les
00:49:48 projets n'étaient pas aboutis, les bâtiments n'étaient pas
00:49:50 finis. Et il récupérait cet argent, lui
00:49:52 et les oligarques proches de lui, pour acheter toute la
00:49:54 presse et pour s'installer,
00:49:56 installer son pouvoir de plus en plus fort. Donc,
00:49:58 l'Europe a en quelque sorte créé ce monstre-là, comme
00:50:00 elle en crée parfois d'autres.
00:50:02 Et les citoyennes et les citoyens,
00:50:04 il y en a énormément qui se battent encore en Hongrie.
00:50:06 Je pense qu'en Hongrie, il y a aujourd'hui la moitié de la population,
00:50:08 j'évalue à peu près à 50% de la population,
00:50:10 qui ne veut pas de Victor Orban,
00:50:12 qui veut rester en Allemagne européenne, qui veut avoir
00:50:14 les valeurs et les droits de tous les autres.
00:50:16 Et encore une fois, si demain, le Rassemblement
00:50:18 national arrive au pouvoir en France,
00:50:20 je le rappelle, ça sera sur un vote
00:50:22 au présidentiel, au deuxième tour,
00:50:24 avec peut-être 51% des voix,
00:50:26 sur une élection où plein de gens n'auront
00:50:28 pas été votés, et pourtant, on soubliera
00:50:30 tous les règles de ces gens-là. Donc, si on pouvait
00:50:32 exclure aussi rapidement un pays, ça serait très dangereux
00:50:34 pour tout le monde et très grave, donc non.
00:50:36 Par contre, moi, je ne veux pas aujourd'hui
00:50:38 qu'on exclue des pays, mais je veux
00:50:40 que Victor Orban
00:50:42 n'ait plus de droit de vote.
00:50:44 C'est ça, la vraie chose. - Mais ça, c'est possible.
00:50:46 - Ça, c'est possible, et ça n'est pas fait parce qu'il n'y a pas
00:50:48 de courage des autres pays, notamment
00:50:50 d'un Emmanuel Macron, mais de tous les autres. Il faut que les autres
00:50:52 chefs d'Etat, ils couragent aujourd'hui de dire
00:50:54 "Ce monsieur, quand il vient avec nous,
00:50:56 les 27, quand il se réunit, ce chef d'Etat,
00:50:58 pour prendre les grandes décisions au Conseil,
00:51:00 chaque mois, à peu près chaque mois,
00:51:02 il faut que ce monsieur n'ait plus le droit de vote
00:51:04 parce que depuis 2 ans,
00:51:06 il fait chantage à chaque Conseil pour obtenir
00:51:08 quelque chose pour la Hongrie en refusant
00:51:10 un vote sur un autre sujet, que ça soit une loi
00:51:12 qui concerne tout le monde, une grande directive qui concerne
00:51:14 tout le monde, ou que ça soit une aide à l'Ukraine,
00:51:16 ou que ça soit une position en politique
00:51:18 étrangère. Voilà, on appelle ça le droit
00:51:20 de veto de Victor Orban. Il se donne
00:51:22 ce droit-là régulièrement et les autres ne l'empêchent pas.
00:51:24 Il faut qu'on lui enlève ses droits de vote. Ce chef
00:51:26 d'Etat ne représente plus des valeurs européennes,
00:51:28 il ne devrait plus pouvoir voter.
00:51:30 – En tant que députée européenne, vous siégez également
00:51:32 dans la Commission des droits des femmes
00:51:34 et l'égalité des genres.
00:51:36 Les droits des femmes, c'est un sujet qui est
00:51:38 en pleine révolution depuis quelques années
00:51:40 avec notamment la libération de la parole
00:51:42 pour dénoncer les violences, le harcèlement.
00:51:44 C'est le cas en France, je ne sais pas si c'est
00:51:46 la même vague au niveau européen ?
00:51:48 – Oui, c'est la même vague au niveau
00:51:50 européen, mais après, nous, ce n'est pas le seul sujet
00:51:52 dont on parle. Évidemment, la question
00:51:54 des violences faites aux femmes ou du harcèlement sont des sujets
00:51:56 très importants, mais nous, au niveau
00:51:58 du Parlement européen, on travaille aussi beaucoup
00:52:00 la question de la représentation des femmes
00:52:02 en politique, dans le monde économique, etc.
00:52:04 et les grandes injustices qui existent encore.
00:52:06 On a fait durant ce mandat une grande directive
00:52:08 parce qu'en France, il y a une énorme différence,
00:52:10 vous le savez probablement, d'égalité de salaire.
00:52:12 Je veux dire, une femme et un homme au même poste
00:52:14 exactement avec la même expérience et le même diplôme
00:52:16 vont parfois gagner jusqu'à 30% de différence de salaire.
00:52:20 C'est incroyable, juste parce qu'il y en a une qui est femme
00:52:22 et qu'elle n'a pas su dire, au fait,
00:52:24 j'aurais droit à mon augmentation,
00:52:26 qu'elle ne sait même pas parfois que l'homme gagne autant.
00:52:28 Donc on a fait une grande directive qui va obliger
00:52:30 à la transparence sur les salaires
00:52:32 et à payer équitablement.
00:52:34 Il y a aussi beaucoup de travail à faire
00:52:37 pour qu'il y ait bien plus de représentation
00:52:39 des femmes en politique, parce qu'il y a encore
00:52:41 plein de pays où il y a peu de femmes en politique.
00:52:43 La France n'est pas le pays le meilleur,
00:52:46 mais avec la parité dans un certain nombre d'élections,
00:52:48 ça va un petit peu mieux. Il faut savoir qu'en Autriche,
00:52:50 aux élections européennes, vous pouvez présenter
00:52:52 une liste que d'hommes. Et d'ailleurs,
00:52:54 il y a des partis qui le font.
00:52:56 - La parité n'est pas respectée ?
00:52:58 - La parité, c'est une loi française.
00:53:00 Comment vous organisez vos élections ?
00:53:02 - Donc aujourd'hui, le Parlement européen n'est pas paritaire ?
00:53:05 - Il n'est pas paritaire. Il a 40% de femmes.
00:53:07 C'est le meilleur résultat qu'on n'avait jamais eu.
00:53:09 Mais s'il y a une grande arrivée de la droite
00:53:11 et de l'extrême droite aux prochaines élections,
00:53:13 ce qui est un peu prévu dans les sondages actuellement,
00:53:15 on peut avoir un Parlement qui redevient très masculin.
00:53:17 Il y a la question des droits des femmes
00:53:20 dans un certain nombre de dossiers et de sujets.
00:53:22 Il y a la question aussi de comment on pense
00:53:24 des politiques publiques en réfléchissant
00:53:26 à la perspective des femmes.
00:53:28 J'ai été dans mon village, le plateau des Petites Roches,
00:53:31 là, depuis quelques jours.
00:53:33 Et vraiment, il y a un gros travail qui a été fait
00:53:35 sur les trottoirs pendant très longtemps.
00:53:37 Dans tous les territoires de France,
00:53:39 on n'a pas fait de trottoirs parce qu'on ne pensait jamais
00:53:41 aux femmes, notamment à celles qui ont des poussettes,
00:53:43 aux personnes handicapées, aux enfants.
00:53:45 On pensait à l'homme dans sa voiture.
00:53:47 On a construit des villes pour le tout voiture.
00:53:49 Voilà, c'est comment aujourd'hui, on réinvestit
00:53:51 dans nos politiques publiques, l'aménagement de nos territoires,
00:53:53 mais aussi des grands sujets en se disant,
00:53:55 tiens, comment on pense aussi pour les femmes
00:53:57 et qu'on ne pense pas que pour la moitié de la population
00:53:59 de nos politiques publiques.
00:54:01 - Parce qu'on parle des femmes.
00:54:03 La France a inscrit le droit à l'IVG
00:54:05 il y a quelques semaines dans sa Constitution.
00:54:07 Il y a une grande disparité de traitement de l'avortement
00:54:11 dans les 27 pays européens.
00:54:13 On a du mal, sur un sujet comme ça,
00:54:15 à imaginer qu'on fait partie d'une même communauté.
00:54:17 - La santé n'est pas une compétence européenne.
00:54:19 Pour l'instant, c'est une compétence nationale.
00:54:21 La question s'est posée avec le Covid,
00:54:23 où les gens se sont dit, il serait peut-être temps
00:54:25 qu'il y ait des choses qui arrivent au niveau européen.
00:54:27 Moi, je défends beaucoup que la santé devienne
00:54:29 partiellement un sujet européen.
00:54:31 Des choses qui doivent rester nationales,
00:54:33 la sécurité sociale, etc.
00:54:35 Mais il y a des réflexions sur les produits pharmaceutiques,
00:54:37 les vaccins, les grands cadres de santé.
00:54:39 Ils devraient se penser au niveau européen.
00:54:41 Et effectivement, de ce fait-là,
00:54:43 beaucoup de pays ont jusqu'à présent
00:54:45 des tas de l'Union, des tas de membres de l'Union européenne
00:54:47 qui ont eu ce prétexte-là pour dire,
00:54:49 c'est de la compétence nationale.
00:54:51 La santé, ce qu'on appelle la santé sexuelle et reproductive,
00:54:53 c'est notre problème à nous.
00:54:55 Ça ne peut pas être géré au niveau européen.
00:54:57 Nous essayons de nous battre contre ça.
00:54:59 On a passé cet automne une résolution
00:55:01 qui dit que le Parlement veut que les droits sexuels
00:55:03 et reproductifs deviennent de la compétence européenne.
00:55:05 Moi, c'est quelque chose que je défends depuis très longtemps.
00:55:07 J'ai beaucoup défendu au niveau du Parlement européen.
00:55:09 C'est pas simplement l'avortement.
00:55:11 C'est l'accès à la contraception.
00:55:13 C'est l'éducation sexuelle.
00:55:15 C'est l'accès à la contraception.
00:55:17 C'est l'accès à la santé des femmes qui est encore un gros problème
00:55:19 parce que la santé, encore une fois,
00:55:21 a été imaginée pour les hommes.
00:55:23 Vous savez que la plupart des tests médicaux se font sur des hommes.
00:55:25 La plupart des médicaments sont adaptés aux hommes.
00:55:27 On est aveugle sur la question de la santé des femmes.
00:55:29 L'accès à la contraception est très difficile dans tous les pays.
00:55:31 Tout ça, les droits sexuels et reproductifs,
00:55:33 il faudrait que ça fasse partie de questions européennes
00:55:35 et notamment que ça fasse partie de ce fameux texte
00:55:37 assez magnifique que les gens ne connaissent pas
00:55:39 qui s'appelle la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne
00:55:41 qui est un texte qui nous concerne tous,
00:55:43 jusqu'à la Cour de justice européenne
00:55:45 et qui dit que nous avons toutes et tous les mêmes droits.
00:55:47 Je ne sais pas si ça rentre dans le cadre de la santé,
00:55:49 mais j'ai vu que l'Allemagne,
00:55:51 depuis le 1er avril, avait autorisé
00:55:53 la consommation de cannabis.
00:55:55 La Hollande et d'autres pays
00:55:57 l'autorisent déjà.
00:55:59 En France, c'est interdit.
00:56:01 Là aussi, on est sur une grande disparité.
00:56:03 Si on est à Strasbourg et qu'on traverse le pont de l'Europe,
00:56:05 d'un côté, avec un joueur, ça passe.
00:56:07 De l'autre côté, on peut être sanctionné
00:56:09 et avoir une amende.
00:56:11 L'Europe a vocation à traiter ces sujets,
00:56:13 à essayer d'uniformiser.
00:56:15 Je ne crois pas qu'aujourd'hui,
00:56:17 l'Europe ait cette vocation-là.
00:56:19 Je suis une fédéraliste.
00:56:21 Il y a beaucoup de choses qu'on doit gérer au niveau européen.
00:56:23 Il faut y aller progressivement.
00:56:25 C'est pour ça que quand les eurosceptiques
00:56:27 ou même en France, beaucoup de gens racontent des mensonges
00:56:29 en disant qu'il y a trop de choses
00:56:31 qui sont décidées au niveau européen.
00:56:33 Les choses qui sont décidées au niveau européen,
00:56:35 c'est des choses qui font sens au niveau européen.
00:56:37 Encore une fois, les lois policières,
00:56:39 c'est complètement de compétence nationale.
00:56:41 On peut très peu dire de choses au niveau européen.
00:56:43 La santé, encore une fois.
00:56:45 Et effectivement, la légalisation
00:56:47 de telle ou telle chose, de telle ou telle substance,
00:56:49 c'est pour l'instant de la compétence nationale.
00:56:51 Alors, qu'on pense l'harmonisation
00:56:53 pour aider à régler le problème des drogues,
00:56:55 parce que c'est un gros problème sur le territoire européen
00:56:57 et ça crée de la criminalité.
00:56:59 On a des ports européens qui sont soumis
00:57:01 à de la grande criminalité parce que l'arrivée de drogue, etc.
00:57:03 Oui, il faudrait une harmonisation
00:57:05 et il faut un travail entre toutes les polices par rapport à ça.
00:57:07 Mais après, moi, je pense que,
00:57:09 par contre, j'ai ma propre opinion personnelle,
00:57:11 qu'en France, on criminalise
00:57:13 les consommateurs de cannabis
00:57:15 et les vendeurs de cannabis
00:57:17 de manière assez
00:57:19 forte
00:57:21 et surtout totalement inefficace.
00:57:23 Et qu'il faudrait, il est temps,
00:57:25 d'avoir une réflexion là-dessus importante.
00:57:27 Parce que trop souvent, en plus,
00:57:29 ça crée énormément d'injustices sociales.
00:57:31 Comme pendant très longtemps, aux États-Unis,
00:57:33 on a vu que c'était les Noirs
00:57:35 qui subissaient toutes les règles
00:57:37 de la justice criminelle
00:57:39 parce que c'était les populations les plus fragiles.
00:57:41 En France, on a des bourgeois
00:57:43 qui consomment du cannabis
00:57:45 sans jamais avoir de problème
00:57:47 et on a des vendeurs de cannabis qui viennent de quartiers populaires
00:57:49 qui, eux, ont des problèmes pas tous les jours,
00:57:51 plusieurs fois par jour.
00:57:53 Donc, on est en train de créer des injustices
00:57:55 qu'on ne règle pas par la criminalisation.
00:57:57 Et là encore, il y a un vrai problème
00:57:59 de prévention, d'accompagnement.
00:58:01 Moi, je ne suis pas pour que
00:58:03 on laisse tous les enfants de demain
00:58:05 utiliser du cannabis parce que ça reste quelque chose
00:58:07 qui influence l'intelligence, la mémoire, etc.
00:58:09 Moi, je n'ai absolument pas encouragé
00:58:11 mes enfants à utiliser ces substances-là.
00:58:13 J'aurais plutôt dit que ce n'était pas une très bonne idée,
00:58:15 à mon avis. Mais par contre,
00:58:17 que là, on bascule dans la criminalisation
00:58:19 au même titre que des drogues dures,
00:58:21 on est dans une politique inefficace, incohérente
00:58:23 et qui ne fait pas justice à la réalité
00:58:25 de ces substances qui sont quand même beaucoup moins graves
00:58:27 que les drogues dures.
00:58:29 – Dernier sujet dans cette émission.
00:58:31 On revient sur le local, même si l'Europe
00:58:33 est maître d'oeuvre. C'est le projet de liaison ferroviaire
00:58:35 Lyon-Turin qui va passer
00:58:37 sous les Alpes et
00:58:39 notamment en bordure de notre
00:58:41 département iséraux.
00:58:43 C'est un projet qui a vocation à délester
00:58:45 le trafic routier
00:58:47 pour mettre les marchandises sur le train.
00:58:49 Ça devrait plaire
00:58:51 aux écologistes, ce système ?
00:58:53 – C'est ce que tout le monde raconte.
00:58:55 Je ne sais pas pourquoi ça devrait plaire.
00:58:57 C'est un projet qui va perforer…
00:58:59 – Plus d'unions, plus de trains ?
00:59:01 – Non, en fait c'est un projet qui date
00:59:03 des années 80 dont déjà on n'a plus besoin.
00:59:05 Donc on a pensé à un projet il y a des années
00:59:07 en arrière et puis on a oublié que
00:59:09 depuis le monde a évolué.
00:59:11 – On a toujours autant de marchandises sur les routes.
00:59:13 – Alors d'abord on en a moins. Il y a moins de marchandises
00:59:15 qui passent entre la France et l'Italie.
00:59:17 Donc oui, non, en termes de trafic, on en a moins besoin.
00:59:19 On a aujourd'hui des solutions en termes
00:59:21 ferroviaires que la Suisse connaît très bien,
00:59:23 que l'Allemagne met en partiellement
00:59:25 en place aussi, etc. qui sont très efficaces
00:59:27 que nous ne regardons pas à travers les lignes
00:59:29 déjà existantes. Là il s'agit de perforer
00:59:31 la montagne.
00:59:33 Ça assèche, il y a déjà des pays,
00:59:35 des villages de Savoie et de Hauts-de-Savoie
00:59:37 qui connaissent une immense
00:59:39 sécheresse à cause du lion turin.
00:59:41 C'est surtout des milliards
00:59:43 et des milliards. C'est le projet
00:59:45 le plus cher. On s'est beaucoup battus
00:59:47 en France contre Notre-Dame-des-Landes.
00:59:49 C'est dix fois le prix d'un Notre-Dame-des-Landes.
00:59:51 Donc c'est énormément en termes de frais
00:59:53 pour résoudre très peu de problèmes.
00:59:55 Et surtout, aujourd'hui, il est temps
00:59:57 qu'on passe à une deuxième étape de la réflexion.
00:59:59 On ne peut pas avoir des projets qui sont
01:00:01 tellement polluants quand on les fait
01:00:03 qu'il va falloir cent ans
01:00:05 pour qu'ils deviennent utiles. Certes, on va
01:00:07 transporter certains produits des camions
01:00:09 sur les trains. Certes, un petit peu, même pas tous.
01:00:11 Mais en plus,
01:00:13 la création même de ce tunnel va
01:00:15 tellement, tellement faire de pollution.
01:00:17 C'est déjà le cas. Il y a de la pollution déjà dans ces...
01:00:19 Voilà, on voit là les images. - Là c'est les travaux qui en commencent.
01:00:21 - Donc il y a déjà la sécheresse,
01:00:23 il y a déjà les gravats sur la route,
01:00:25 il y a déjà la pollution des camions, etc.
01:00:27 Ça va déjà tellement... Et puis, il y a, en fait,
01:00:29 creuser des trous. Ça pollue,
01:00:31 en fait, en lui-même. Donc aujourd'hui, on ne pense pas...
01:00:33 Il faut qu'on condamnabilise aussi
01:00:35 quand on fait un projet,
01:00:37 l'effet
01:00:39 de la création du projet
01:00:41 lui-même sur plusieurs années, toute la pollution
01:00:43 que ça fait pendant les dix ans
01:00:45 où ça va être fait, qu'il faudra après
01:00:47 cent ans pour rentabiliser
01:00:49 en termes simplement environnementaux.
01:00:51 En termes économiques, ça ne sera jamais
01:00:53 rentabilisé, parce que c'est tellement de milliards que ça ne le sera
01:00:55 jamais. Donc voilà, c'est un projet
01:00:57 qui permet à un certain nombre de collectivités,
01:00:59 d'hommes politiques
01:01:01 et surtout d'entreprises
01:01:03 d'avoir
01:01:07 pour certains des bénéfices financiers
01:01:09 et en tous les cas des bénéfices
01:01:11 électoraux. Mais ce n'est pas un projet qui a été fait
01:01:13 en concertation avec les populations
01:01:15 et pour le bien-être des populations du coin.
01:01:17 - On voyait sur les images que les travaux
01:01:19 préparatoires ont déjà commencé depuis plusieurs années.
01:01:21 Vous qui connaissez bien le fonctionnement de l'Europe,
01:01:23 c'est un projet qui va aller au bout.
01:01:25 Aujourd'hui, les dernières étapes ont été franchies.
01:01:27 - Alors, les dernières
01:01:29 étapes sont loin d'avoir été franchies, surtout qu'aujourd'hui
01:01:31 l'Europe, en fait, elle s'occupe
01:01:33 juste du franchissement entre l'Italie
01:01:35 et la France. Et elle oblige
01:01:37 à peu de choses à partir du moment où ça arrive
01:01:39 en France. Aujourd'hui, les accès français
01:01:41 n'ont pas été pensés, ils ne sont toujours pas
01:01:43 prévus, les investissements ne sont pas prévus.
01:01:45 D'ailleurs, les investissements pour la partie,
01:01:47 le tunnel entre la France et l'Italie n'est pas prévu
01:01:49 non plus. Donc, en fait, ça se trouve, on va faire
01:01:51 un tunnel qui va
01:01:53 jamais avoir d'accès français. Donc, en fait,
01:01:55 ça ne sert à rien parce qu'après, ces camions vont revenir
01:01:57 sur les routes immédiatement quand ils seront sortis du tunnel.
01:01:59 Deuxièmement,
01:02:01 il n'y a pas l'argent pour le tunnel
01:02:03 lui-même entre la France et l'Italie.
01:02:05 Mais ça, comme c'est un traité bilatéral,
01:02:07 un traité entre l'Italie et la France, ça n'est pas
01:02:09 l'Union européenne qui a le pouvoir dessus. Donc, la France
01:02:11 et l'Italie ont décidé ça il y a des années.
01:02:13 Ça appartient à la justice
01:02:15 mondiale, malheureusement. Donc,
01:02:17 ça, on ne peut pas faire grand-chose pour bloquer. Donc, moi, j'ai
01:02:19 une énorme crainte qu'on ait des gros trous.
01:02:21 Une partie du tunnel fait que ça va prendre
01:02:23 des décennies. Pendant ce temps-là, les enfants
01:02:25 de la Maurienne continuent à ne pas pouvoir sortir
01:02:27 l'été, même au printemps,
01:02:29 dans leur cours de récréation parce que c'est trop pollué.
01:02:31 Pendant ce temps-là, les familles
01:02:33 savent qu'elles doivent emmener régulièrement des gens
01:02:35 en fragilité ou aux urgences. Donc, on ne règle pas le
01:02:37 problème sur les routes. Ça va prendre des décennies.
01:02:39 Et j'ai peur qu'à la fin, effectivement,
01:02:41 on ait un tunnel à moitié fait
01:02:43 ou un tunnel qui, encore une fois, sort
01:02:45 de la montagne mais sans accès de l'autre côté.
01:02:47 - Merci, Gwendoline
01:02:49 d'Elbe Scorfield. Une dernière mission.
01:02:51 Vous l'avez dit, vous vivez, quand vous n'êtes
01:02:53 pas à Bruxelles, sur le plateau des Petites Roches,
01:02:55 sur la commune qu'on a appelée avant Saint-Hilaire
01:02:57 du Touvet. La semaine prochaine,
01:02:59 à votre place, on recevra Henri Bell, qui est le président
01:03:01 de la communauté de communes du Grésive-Dent,
01:03:03 dont font partie les Petites Roches. Comme c'est la
01:03:05 tradition dans cette émission, je vous demande de regarder la caméra
01:03:07 en face de vous et de lui poser une question.
01:03:09 - Eh bien, plutôt qu'une question, M. Bell,
01:03:11 c'est un partage de réflexions
01:03:13 sur ce qui va se passer pour l'eau
01:03:15 dans le Grésive-Dent, mais aussi à Grenoble,
01:03:17 parce que c'est l'eau de Grenoble qu'on utilise pour la fameuse
01:03:19 extension de Estée
01:03:21 micro à Krol.
01:03:23 On est dans un conflit d'usage important,
01:03:25 ce n'est pas le seul conflit d'usage. Il y a aussi la question encore
01:03:27 de plus en plus importante de la sécheresse
01:03:29 dans nos territoires
01:03:31 qui sont de plus en plus chauds. Est-ce que
01:03:33 dans cette communauté de communes
01:03:35 où il n'y a pas d'élus
01:03:37 écolo qui siègent,
01:03:39 nous, c'est une réflexion qu'on a beaucoup, la question de
01:03:41 comment à la fois on continue à avoir de l'industrie
01:03:43 et du travail sur nos territoires, mais comment on préserve
01:03:45 nos ressources,
01:03:47 la terre, l'eau, l'air.
01:03:49 Comment vous allez régler cette
01:03:51 question des usages ? Qu'est-ce que vous avez comme
01:03:53 réflexion ? Est-ce que ça avance ? Est-ce qu'on
01:03:55 obéit à tout par rapport aux demandes
01:03:57 d'Estée ou est-ce qu'on essaye aussi de réguler
01:03:59 les demandes d'Estée ? Et comment on s'assure aussi
01:04:01 qu'on ne pollue pas l'eau
01:04:03 des grenoblois et de ceux qui vivent
01:04:05 en amont de Grenoble pour détourner
01:04:07 l'eau pour qu'il arrive jusque dans le Grésivaudan ?
01:04:09 - Eh bien merci Gwendoline Delco Scorfine.
01:04:11 On posera la question à Henri Bayle la
01:04:13 semaine prochaine. Bonne campagne,
01:04:15 on a jusqu'au 9 juin pour
01:04:17 ces élections européennes et puis on incite tout le monde
01:04:19 à s'inscrire et à aller voter
01:04:21 au mois de juin, on a compris avec vous, les enjeux sont
01:04:23 importants. - Merci.
01:04:25 [Musique]