La nouvelle Commission européenne d’Ursula von der Leyen est entrée en fonction après avoir été validée par le Parlement européen. Durant ses 100 premiers jours, elle va défendre une loi pour l’Industrie propre, en essayant de conjuguer ambitions écologiques du Pacte vert et relance de la compétitivité économique, priorité de la droite européenne. L’avenir du Pacte vert c’est le débat de la semaine dans l’émission Ici l’Europe. Année de Production :
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00:00France 24 LCP. Public Sénat présente.
00:05Générique
00:10...
00:25Bonjour à tous et à toutes. Bienvenue dans « Ici l'Europe ».
00:29Cette semaine en Europe, nous l'abordons du point de vue de la péninsule ibérique et de l'Espagne plus particulièrement,
00:36qui sera peut-être bientôt le dernier grand pays européen social-démocrate.
00:41Et à ce titre, à des politiques très différentes sur les questions de migration, mais aussi sur le Proche et Moyen-Orient.
00:47Nous allons en parler tout de suite avec le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Alvarez.
00:53Merci d'être avec nous. Alors l'Espagne, 49 millions d'habitants, un grand pays européen avec des positions singulières sur plusieurs dossiers.
01:03Alors on commence par un dossier qui divise particulièrement les Européens en ce moment, les accords entre l'Union européenne et le Mercosur.
01:12On comprend que vous avez des liens, bien sûr, historiques forts, vous les Espagnols, avec l'Amérique latine.
01:18Mais pourquoi jugez-vous que ce traité de libre-échange signé par la présidente Ursula von der Leyen, présidente de la Commission, est si indispensable ?
01:28Tout d'abord, je ne trouve pas que ça divise les Européens. Une large, large majorité des pays européens, nous sommes en faveur et même très en faveur du Mercosur,
01:41qui va donner lieu au plus grand marché de libre-échange sur la planète. 700 millions de personnes vont bénéficier.
01:49C'est mutuellement bénéfique pour l'Amérique latine et pour l'Europe. Mais pour nous, les Européens, les bénéfices sont beaucoup plus larges que les inconvénients,
02:00qui peuvent être très facilement nuancés par des mesures que la Commission elle-même peut prendre.
02:07Mais ce qui est très important, c'est qu'en ce moment où il y a la guerre en Ukraine, la guerre au Moyen-Orient,
02:13où nous avons besoin d'amis, de partenaires, d'alliés dans le monde, l'Amérique latine est la région la plus euro-compatible de la planète.
02:23Donc géostratégiquement, vous dites que c'est pour des raisons géopolitiques aussi.
02:27Aussi pour des raisons géopolitiques. Parce que pour nous, les Européens, le Mercosur est seulement un accord commercial.
02:34Mais pour l'Amérique latine, c'est un accord commercial bien sûr, mais surtout c'est le signe de l'engagement politique que l'Europe va donner à l'Amérique latine.
02:43Et je vous dis, l'Amérique latine aujourd'hui, elle a d'autres partenaires, avec d'autres agendas.
02:48La Chine en particulier.
02:50Et si on ne lui tombe pas la main, ils vont se retourner vers d'autres partenaires.
02:54Alors l'accord permet à l'Union européenne d'exporter plus facilement ses voitures, ses machines, ses produits pharmaceutiques,
03:00ce qui intéresse beaucoup les Allemands d'ailleurs.
03:02Il permet aux pays sud-américains d'écouler de la viande, du sucre, du riz, du miel, du soja.
03:07Mais que répondez-vous aux nombreux ONG estimant que les normes environnementales de ces pays sont plus faibles
03:13et que tout cela se fait au prix d'une accélération de la déforestation en Amazonie ?
03:17Il y a eu déjà des mesures qui sont installées dans les traités du Mercosur pour être sûrs que les accords de Paris,
03:26de la biodiversité vont être mieux respectés par nos amis de l'Amérique latine.
03:31Mais le président Macron dit le contraire et s'en inquiète.
03:35En dehors du Mercosur, s'ils vont dans d'autres pays qui n'attendent que ça,
03:40là ils n'auront pas certainement le respect des clauses qui sont dans les traités du Mercosur.
03:46Alors si c'est ce qui nous inquiète, c'est la biodiversité, l'environnement, l'Amérique latine est mieux avec nous
03:53qu'avec d'autres pays qui ne posent pas de questions et n'ont pas un agenda vert.
03:58Dans votre pays, l'Espagne, qui vient de subir les effets du réchauffement avec de grandes inondations dans la région de Valence.
04:05Votre Premier ministre Pedro Sanchez a pâti d'une polémique déclenchée sur ces terribles inondations.
04:10Et d'ailleurs, il y a eu aussi des difficultés pour la future commissaire en charge du climat, Teresa Ribeira,
04:18qui a été un peu chahutée lors de ses auditions sur le thème de la responsabilité.
04:22Vous répondez quoi ?
04:23Écoutez, je trouve assez lamentable que le Parti populaire espagnol essaie de prendre de la désinformation
04:32et des débats qui doivent avoir lié à l'intérieur du Parlement espagnol, qu'il essaie de les exporter vers le Parlement européen.
04:41Et je regrette très profondément comme ministre des Affaires étrangères et ministre de l'Union européenne de l'Espagne,
04:46comme citoyen espagnol, que le Parti populaire espagnol, pour la première fois, ait voté non seulement,
04:53non seulement contre la commissaire espagnole qui va être vice-présidente première,
04:57jamais l'Espagne a eu un poste de cette taille en Europe, mais contre la commission tout entière
05:02à un moment donné où l'Europe avait besoin d'une commission forte, active et qui va faire entendre sa voix dans le monde.
05:10Pedro Sanchez, votre Premier ministre socialiste, il a été reconduit d'ailleurs à la tête du parti.
05:14Il est quand même affaibli du fait que son gouvernement, qui est formé, on le disait, du Parti socialiste espagnol et de la gauche radicale sumar,
05:21ne dispose pas d'une majorité absolue au Parlement, où il dépend du soutien de petits partis et indépendantistes batsk et catalans.
05:29Et puis, le pays a déjà tourné une année sans loi de finances. Alors nous, ça nous inquiète beaucoup, cette situation en France.
05:36Mais vous, vous avez l'air de vous en satisfaire.
05:39Écoutez, depuis le début, on a été un gouvernement minoritaire avec des appuis parlementaires, par contrat très, très fort.
05:47Et les Espagnols, chaque fois qu'on les a appelés à voter, ils ont renouvelé la confiance dans le gouvernement actuel et dans Pedro Sanchez comme président.
05:57Pourquoi ? Parce que les résultats sont là. Nous sommes les pays de l'Europe dont la croissance est la plus grande.
06:03On est les pays de l'Europe qui sont en train de créer plus d'emplois en ce moment.
06:07Et on a prouvé qu'on peut arrêter l'extrême droite, la coalition d'extrême droite et droite. Et c'est ça qui est notre grande force.
06:15Et la situation en France, elle vous inquiète pour la zone euro ? Parce que la France, avec ses déficits très excessifs...
06:21Écoutez, la France est un grand pays qui a des institutions démocratiques.
06:25Je suis sûr que la France, un pays que je connais très bien et que j'aime beaucoup d'ailleurs, va être capable de surmonter n'importe quelle difficulté.
06:33Et l'Espagne sera à ses côtés pour l'aider.
06:35Le gouvernement espagnol vient d'adopter une réforme avec pour objectif de régulariser 900 000 étrangers sans papier d'ici trois ans.
06:43Une politique qui répond à toutes sortes de besoins économiques.
06:49L'Espagne espère ainsi compenser le manque de main-d'oeuvre et le déficit démographique.
06:54Un reportage tout de suite d'Armel Esposito.
06:57Accélérer l'obtention des titres de séjour, c'est l'une des mesures phares de la réforme sur l'immigration que vient d'adopter le gouvernement espagnol.
07:06Elle devrait permettre de régulariser 300 000 migrants par an au cours des trois prochaines années.
07:11Une politique d'accueil destinée à soulager plusieurs secteurs économiques comme celui de l'hôtellerie.
07:17Comme plus de 60% des restaurateurs espagnols, Fran a du mal à recruter.
07:22Parfois jusqu'à cinq personnes par jour viennent me demander du travail.
07:27Et elles sont très compétentes.
07:29J'ai besoin de personnel, mais elles n'ont pas de papier et ne peuvent pas travailler.
07:34J'espère que cette réforme va équilibrer l'offre et la demande et que tout ira mieux.
07:41Pour la ministre, à l'origine de cette réforme, ce texte garantira aussi de meilleurs droits aux migrants.
07:47Nous sommes conscients de l'importance des liens familiaux et nous avons pour cela assoupli le regroupement familial.
07:54Nous avons de la mémoire. L'Espagne, il y a des décennies, a été un pays démigré.
07:59Aujourd'hui, c'est un pays d'opportunités.
08:04Depuis janvier dernier, plus de 56 000 personnes sont entrées illégalement dans le pays, soit 13% de plus que l'an dernier.
08:11L'Espagne se singularise en Europe sur la question migratoire.
08:14Après le renversement de Bachar el-Assad, l'Autriche a annoncé l'expulsion de réfugiés syriens,
08:19l'Allemagne le gèle de la procédure d'asile pour les Syriens, suivie par une dizaine d'autres pays.
08:25Alors José Manuel Alvarez, vous êtes un peu à contre-courant de l'Union européenne sur ces questions migratoires ?
08:31Écoutez, on connaît très très bien les phénomènes migratoires,
08:34puisqu'on est le seul pays en Europe qui a une partie de son territoire en Afrique
08:41et qui a ce qu'on appelle, dans le jargon de Bruxelles, un état de première entrée.
08:46On est juste là avec l'Afrique qui sont nos voisins.
08:50L'Afrique est le continent du futur et c'est pour cela que nous avons fait ces stratégies.
08:55Et concernant la migration, nous voulons une migration maîtrisée, sûre, ordonnée,
09:02avec nos frontières bien contrôlées.
09:04Mais en même temps, on veut aussi une migration humaine qui respecte les droits de l'homme.
09:10Et on ne veut pas de mensonges aux citoyens et on ne veut pas de s'amalgame.
09:13Les migrations irrégulières sont un tout petit pourcentage de tous les mouvements migratoires.
09:19La plupart des mouvements migratoires en Espagne, en Europe et dans le monde se font de façon régulière.
09:24Et ça fait des années que nous travaillons avec nos partenaires
09:27et nous avons des partenaires vraiment, vraiment, des choix.
09:31Le Maroc, la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, dont l'Afrique occidentale,
09:37sur trois piliers.
09:38Un dialogue politique à très, très haut niveau.
09:41Une forte politique de développement pour ces pays pour pouvoir proposer sur place
09:46à la jeunesse africaine qui ne fait que s'accroître des formations et des postes de travail sur place
09:53sans devoir se déplacer.
09:54On a multiplié par trois notre coopération au développement avec l'Afrique occidentale
10:00et finalement une lutte très efficace contre les mafias qui trafiquent avec des cétrains humains.
10:07Il ne faut pas oublier que la meilleure façon de décourager les migrations irrégulières
10:12c'est de proposer des filières de migration légale.
10:16Et il ne faut pas mentir aux citoyens.
10:20Les problèmes qui sont conjoncturels ont solution.
10:25Les problèmes qui sont structurels se gèrent.
10:28Et tant que la frontière entre l'Afrique et l'Europe est la frontière la plus inégale de la planète,
10:33peu importe quelle donnée on prend, il y aura cette migration.
10:38Par conséquent, il faut la gérer.
10:40Et c'est lui qui dit qu'il y a la solution magique, qui est en train de mentir aux citoyens.
10:45José Manuel Alvarez, vous êtes le chef de la diplomatie espagnole.
10:48La chute de Bachar el-Assad vous réjouit sûrement.
10:52Mais est-ce que l'Europe y a suffisamment contribué ?
10:55Est-ce qu'on n'a pas fermé les yeux pendant 10 ans sur ses exactions envers son peuple ?
11:01Écoutez, c'est toujours une bonne nouvelle quand on voit qu'une dictature...
11:05Tom, l'Espagne a souffert d'une dictature pendant 40 ans.
11:08On est très bien placé pour le savoir.
11:11Il faut vraiment regarder sur les premières actions le nouveau gouvernement de facto.
11:18Qu'est-ce qui va se passer ?
11:21Et il faut agir sur trois plans.
11:25Tout d'abord, ce mouvement qui pour le moment est un mouvement militaire,
11:29même s'il n'y a pas vraiment de combat, se transforme très vite dans un mouvement politique.
11:34Tout ce qui doit se passer en Syrie doit être pacifique.
11:38Deuxièmement, nous devons nous assurer que le futur de la Syrie sera un futur plus réel.
11:46Comme la société syrienne est plus réelle avec différentes religions, différents peuples,
11:51ils doivent tous être accueillis dans la future Syrie.
11:55Et finalement, nous devons garantir l'intégrité territoriale de la Syrie.
12:00Il ne doit pas y avoir des parties de la Syrie qui restent entre les mains de différents groupes.
12:05Il faut que la Syrie devienne une source d'estabilité pour le Moyen-Orient
12:09et pas d'inestabilité qui a déjà le Moyen-Orient assez.
12:13Sur le chapitre du Moyen-Orient, d'ailleurs, la position de l'Espagne est aussi très particulière.
12:17Les relations avec Israël se sont beaucoup dégradées en mai dernier,
12:21lorsque vous-même, l'Espagne, l'Irlande et la Norvège avaient reconnu l'état palestinien,
12:26sur initiative d'ailleurs de Madrid, qui a appelé à ne plus livrer d'armes à Israël.
12:31Benjamin Netanyahou a été inculpé par la Cour pénale internationale.
12:34La France estime qu'il jouait d'une certaine immunité. Et vous ?
12:38Écoutez, notre position est la position partagée de la plupart de la communauté internationale.
12:44Nous sommes 145 pays à avoir reconnu l'état de Palestine.
12:4911 pays de l'Europe à la liste que vous indiquez, c'est ajouté aussi l'Eslovenie.
12:54On l'a fait par justice envers les peuples palestiniens,
12:59qui ne doivent pas être condamnés à être éternellement un peuple de réfugiés.
13:02Et aussi en pensant à la sécurité d'Israël.
13:06Seulement un état palestinien vivant en voisinage avec l'état d'Israël
13:11peut garantir mutuellement prospérité et sécurité à tous les deux.
13:15L'Espagne est un pays fondateur de la Cour pénale internationale,
13:20un des pays qui a rédigé le statut de Rome.
13:23Et nous, évidemment, nous suivrons toutes les obligations que ce statut nous impose.
13:28Une guerre plus proche de nous encore du côté de l'Ukraine,
13:31la grande crainte, c'est évidemment le fameux plan de paix express de Donald Trump
13:36pour, sur le plan militaire, peut-être se désengager.
13:40En tout cas, au moins contribuer à l'OTAN.
13:42Les 27 s'étaient donnés d'ailleurs pour objectif.
13:452% du PIB investi dans la défense en Espagne, c'est 1,3%.
13:51Est-ce que vous comptez le rattraper ?
13:53Évidemment, on a dit qu'on sera en 2029 dans les 2%.
13:57Et année après année, on chemine vers cet objectif politique.
14:02Il ne faut pas seulement voir les financements, il faut aussi voir les déploiements de forces et les capacités.
14:06L'Espagne dépense plus de 20% de son budget militaire dans les grands équipements,
14:13qui est aussi un engagement à l'intérieur de l'OTAN.
14:16Et nos forces sont aujourd'hui déployées dans les pays baltiques, en Roumanie, en Slovaquie.
14:23Ils sont dans la mer Noire, nous sommes aussi présents en Irak et dans d'autres scénarios, sous le drapeau de l'OTAN.
14:29Ce qui est en train de se jouer en Ukraine, c'est la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'Ukraine, qui est déjà énorme.
14:35Mais au-delà, c'est aussi les principes les plus fondamentaux de la charge des Nations Unies.
14:41L'égalité souveraine des États, le refus de la guerre comme façon de ressoudre les différends entre les États.
14:48L'Europe est une construction d'épais pour la paix.
14:51Tout cela est en jeu.
14:53Si la Russie gagne cette guerre d'agression, les mondes et l'Europe seront moins sûrs des mains.
14:59Et concernant le futur et le futur en paix, je suis sûr qu'un jour la paix reviendra en Ukraine.
15:05Seule l'Ukraine peut vraiment parler dans son nom de ce qu'elle veut faire pour la paix, pour une possible négociation.
15:13Si un jour cette idée est sur la table, aujourd'hui elle ne l'est pas.
15:18Deuxièmement, l'Europe a beaucoup aidé l'Ukraine.
15:22Rien sur l'Ukraine sans l'Ukraine et sans la voix de l'Europe européenne.
15:28Des élections, il n'empêche, faussées par la propagande russe.
15:33En Roumanie, avec annulation d'ailleurs des élections présidentielles.
15:37Et puis en Géorgie, avec des manifestations non-stop.
15:41Est-ce que l'Union européenne se donne les moyens de défendre les démocraties ?
15:46Écoutez, le plus gros danger, je le crois fermement, de nos démocraties aujourd'hui, c'est la désinformation.
15:53Les réseaux sociaux, les journaux digitals, n'importe qui peut écrire n'importe quoi.
15:59Les fake news, la désinformation qui pollue tous les jours et qui arrive à tous nos citoyens sans aucun filtre.
16:05Et le vrai danger de nos démocraties.
16:08Toute cette désinformation, elle est là pour diviser nos citoyens, pour diviser nos sociétés et diviser nos démocraties.
16:15On voit en Géorgie, on voit en Roumanie toutes ces allégations.
16:19Nous suivons de très près les deux situations.
16:22Nous souhaitons que la Géorgie revienne sur le chemin européen vers l'Europe où nous l'attendons un jour.
16:29Et la Roumanie, qui est un pays latin, un pays ami de l'Espagne, un pays essentiel pour l'Union européenne,
16:36évidemment, nous sommes très solidaires du peuple roumain.
16:40Seuls les Roumains doivent décider sur leur futur.
16:44Et nous devons tous empêcher les ingérences dans les élections à l'intérieur de l'Union européenne.
16:50José Manuel Albares, merci de cet entretien.
16:53Merci à vous à suivre notre débat.
16:55La commission européenne Van der Leyen 2 s'apprête-t-elle à poursuivre les ambitions environnementales du pacte vert ou à y renoncer ?
17:04On se retrouve au Parlement européen tout de suite pour en parler.
17:11Merci de nous rejoindre à Bruxelles, au Parlement européen,
17:15alors que la nouvelle commission européenne d'Ursula von der Leyen entre en fonction après avoir été validée par les eurodéputés.
17:22La commission a dévoilé son plan pour ses 100 premiers jours avec deux priorités.
17:27D'abord un pacte pour une industrie propre et puis la simplification administrative.
17:31Alors qu'en est-il des ambitions environnementales de cet exécutif européen qui penche plus que jamais à droite ?
17:37Le pacte vert initié il y a cinq ans par la présidente de la commission européenne pour atteindre la neutralité carbone en 2050 va-t-il être poursuivi ou détricoté ?
17:47Ursula von der Leyen assure qu'il ne sera pas détricoté. On l'écoute.
17:51Nous devons rester dans la course pour atteindre les objectifs du pacte vert européen.
17:58Mais pour réussir cette transition, nous devons être plus agiles, mieux accompagner les entreprises et les citoyens.
18:10Nous avons besoin de nous appuyer sur nos forces, notre industrie, notre innovation, nos travailleurs.
18:18C'est pourquoi nous allons mettre en place la loi sur l'industrie propre dans les 100 premiers jours de ce mandat.
18:27Alors il existe néanmoins des craintes sur l'avenir du pacte vert alors qu'au Parlement, le Parti populaire européen, le grand parti de droite,
18:36où siège d'ailleurs Ursula von der Leyen, joue sur plusieurs tableaux.
18:40Officiellement, il forme une majorité avec des sociodémocrates et les centristes,
18:45mais il vote aussi parfois avec l'extrême droite pour s'opposer à certains textes de ce fameux pacte vert.
18:53Très récemment, cette majorité alternative a tenté de vider de sa substance un texte crucial pour lutter contre la déforestation importée,
19:03repoussée finalement d'un an.
19:05Alors pour en débattre aujourd'hui, deux eurodéputés sont en notre compagnie.
19:09Merci d'être avec nous Laetitia Moratti.
19:11Bonjour.
19:12Vous êtes eurodéputée italienne, membre du Parti populaire européen et du Parti Forza Italia en Italie,
19:18très pro-industrie, dans la commission d'ailleurs du même nom, la commission Industrie.
19:23Et puis avec nous aussi Christophe Clergeau, eurodébuté français.
19:26Bonjour.
19:27Du groupe des sociodémocrates et du Parti socialiste en France, vous siégez, vous, dans la commission Environnement.
19:32Christophe Clergeau, est-ce que vous êtes sûr que le pacte vert est encore la priorité de la Commission européenne d'Ursula von der Leyen ?
19:39Moi, je vais être résolument optimiste et combatif.
19:42Peut-être que la droite et l'extrême droite rêvent de reculer sur le pacte vert,
19:47mais comme Ursula von der Leyen s'engage à aller de l'avant, je veux la croire.
19:52Je vois d'ailleurs que dans le programme d'action, il y a des nouvelles initiatives.
19:55Un pacte européen pour les océans, une grande stratégie pour l'eau en Europe.
20:00Donc, il va falloir rentrer dans le concret.
20:02Les textes ont été adoptés.
20:04Maintenant, il faut les mettre en œuvre, adapter des modalités peut-être, reculer jamais.
20:09Il y a une urgence à agir.
20:10Les 1,5 degré, on y est déjà.
20:13On a perdu 68% de la biodiversité depuis 50 ans.
20:17Les catastrophes naturelles, c'est déjà 250 milliards de coûts.
20:21Le coût de la non-action serait terrible.
20:23Nous n'avons pas d'autre choix, ni elle, ni nous, que d'aller de l'avant.
20:26Précisons, Madame Moratti, que le commissaire en charge, c'est le Français Stéphane Séjourné,
20:32qui travaille sur son pacte pour l'industrie propre, qui doit être représenté le 26 février.
20:39Est-ce qu'on s'en soucie plus d'ailleurs de l'industrie ou de l'écologie et du propre ?
20:45Selon moi, il faut tenir un équilibre entre la durabilité environnementale,
20:51c'est l'économique, la durabilité économique et sociale.
20:55Si on regarde le produit interne brut en Europe,
21:01qui est tombé dans les derniers 50 ans de 20% à 15%,
21:06la Chine a augmenté de 7 à 19%.
21:09Si on regarde les premiers 50 industries au monde,
21:12il y en a 6 européennes, 13 chinoises et 20 américaines.
21:17La compétitivité est un impératif, mais c'est un impératif pour soutenir notre système social.
21:26Parce que sans une croissance et sans la compétitivité,
21:29notre système social, qui est le meilleur au monde, ne va pas être soutenu.
21:35On voit bien que la compétitivité économique est la priorité de la droite européenne.
21:40Est-ce que vous ne craignez pas que cet objectif prime sur la transition écologique
21:45avec cette nouvelle formule d'industrie propre ?
21:47D'abord, le propre, le clean, je ne sais pas ce que c'est.
21:50Le vert, le green, je sais.
21:52Ça veut dire changer les technologies, mais aussi changer de mode de vie,
21:56de manière de se déplacer, par exemple.
21:58Ensuite, on a un point commun, c'est qu'on veut défendre les emplois et la place de l'industrie.
22:02Mais l'industrie de demain, c'est celle qui sera verte.
22:05C'est celle qui, par exemple, produira des véhicules électriques.
22:08Et la question principale, ce ne sont pas les lois européennes,
22:11c'est l'absence de protection du marché européen face à la concurrence déloyale chinoise
22:16et c'est l'absence de soutien aux citoyens européens pour acheter des voitures électriques fabriquées en Europe.
22:22Quand les gens n'ont pas d'argent pour acheter une voiture électrique trop chère,
22:25l'industrie européenne a des difficultés.
22:28Ce n'est pas le pacte vert qui met l'industrie en difficulté,
22:31c'est le libéralisme.
22:33Non, ce n'est pas comme ça.
22:35Si on regarde le pacte vert, je suis d'accord, il faut défendre l'emploi.
22:40Mais si on regarde le pacte vert, il va éliminer des emplois qui sont liés au secteur polluant.
22:48Pour cela, il faut protéger maintenant, dans le processus de conversion, ces emplois.
22:55Je fais simplement quelques exemples.
22:58Dans le secteur des combustibles fossiles, les postes qui sont menacés sont 200.000.
23:06Si on regarde l'industrie lourde, dans le secteur du ciment, ce sont 100.000.
23:13Dans le secteur de l'acier, ce sont 200.000.
23:16Dans le secteur des produits chimiques, ce sont 150.000.
23:22Et si on regarde l'interdiction du moteur endothermique,
23:26on parle de 600.000 travailleurs qui sont menacés.
23:31Pour cela, c'est ce qu'il faut, selon moi.
23:34Je respecte et je suis tout à fait d'accord que l'objectif ambitieux de la Commission est juste,
23:40mais c'est le processus de conversion qui doit avoir des temps différents
23:47pour permettre aux industries de se reconvertir.
23:50Là, on comprend bien que c'est un des textes qui est dans le viseur de la droite.
23:55C'est précisément l'interdiction de vente des véhicules thermiques neufs en 2035,
24:01peut-être avec l'ambition de repousser la date en disant que ça va poser des gros problèmes pour nos industries.
24:08Est-ce que ce texte et ses ambitions sur les véhicules électriques et sur le thermique vont être poursuivis
24:18ou est-ce qu'il y a un lobbying industriel trop fort ?
24:21Les constructeurs automobiles, majoritairement, ne demandent pas le report de cette échéance.
24:27Ils demandent à être accompagnés pour accélérer et ils demandent à avoir des marchés.
24:33On peut repousser d'un an, deux ans, trois ans, quatre ans, ça ne changera rien aux emplois qui sont menacés.
24:39La question, c'est de faire en sorte qu'il y ait un marché européen pour les industries européennes.
24:44Juste un exemple, dans ma propre région, uniquement sur les énergies marines renouvelables,
24:50ces 3000 emplois qui ont été créés, donc on peut créer des emplois aussi avec les industries vertes
24:55si elles ne sont pas détruites par la concurrence chinoise, par le libre-échange que vous défendez.
25:00Laetitia Moratti, très concrètement, sur cette question de l'interdiction des véhicules thermiques neufs en 2035,
25:07est-ce qu'il faut reporter la date ?
25:09Selon moi, il faut voir quelles sont les conditions pour arriver à maintenir le target de 2035.
25:19Parce que si les conditions ne sont pas là, alors il faut avoir une autre date.
25:24Les conditions sont aussi les conditions d'une concurrence déloyale avec la Chine,
25:30parce que c'est la Chine qui produit les véhicules électriques, ce n'est pas l'Europe.
25:36Et la Chine a envahi l'Europe de ses produits électriques.
25:41L'Europe n'a pas une demande de véhicules électriques, parce que les gens n'ont pas d'argent,
25:47et ce n'est pas le seul problème qu'on a, parce que si on regarde une autre directive,
25:52qui est la directive de l'efficacité énergétique des bâtiments, là aussi on a de grands problèmes.
25:59C'est une conversion énergétique juste, mais c'est une conversion énergétique qui doit donner du temps aux industries,
26:09et prévoir, et c'est ce que le PPE veut, une neutralité technologique.
26:15Parce que sans neutralité technologique, on ne va pas pouvoir aboutir à une véritable transition climatique énergétique.
26:24Mais vous entendez quand même qu'on est en train de vouloir reculer sur un certain nombre de textes.
26:29Ça a été le cas, Christophe Clergeau, sur la déforestation qui a imposé aux entreprises
26:34de prouver que les matières premières qui entraient dans la conception de leurs produits
26:38n'ont pas été cultivées sur des terres déboisées.
26:40Donc la déforestation a l'importation.
26:43Le chef de file du Parti populaire européen, Manfred Weber, a tenté de l'édulcarer,
26:50a réussi à le repousser avec l'appoint de voix de la droite plus extrême.
26:54Non, ce n'est pas comme ça que ça s'est passé.
26:56Tout le monde était d'accord pour reculer de six mois ou d'un an,
27:00parce que la Commission n'avait pas bien fait son travail et que les outils pour les entreprises n'étaient pas prêts.
27:05Mais le PPE, la droite, a utilisé cette opportunité pour essayer d'affaiblir le texte.
27:11Ça a été voté au Parlement, mais ça a été retoqué par le Conseil, et donc le PPE a échoué.
27:17Donc on peut mettre en échec les tentatives de la droite de revenir en arrière.
27:20Et par rapport à ce que dit Mme Moratti,
27:22s'il faut soutenir les citoyens européens pour acheter des véhicules électriques
27:26ou pour rénover leurs logements, et bien travaillons à cela ensemble.
27:30L'Europe peut aider les États, les collectivités locales, les citoyens
27:34à investir dans les nouveaux produits de la transition écologique.
27:38On a besoin d'un choc de demande pour que les industriels européens aient un débouché
27:42et d'un choc de protection pour lutter contre la concurrence déloyale.
27:46Sur la déforestation, j'ai une question.
27:49Toujours est-il, même si le Conseil européen est revenu en arrière,
27:53mais au Parlement européen, la majorité du PPE,
27:57en tout cas le groupe du Parti populaire européen, a essayé d'affaiblir ce texte
28:00avec les voix de l'extrême droite.
28:03C'est quoi ? C'est une nouvelle majorité alternative, anti-pacte vert ?
28:06Non, ce n'est pas une nouvelle majorité.
28:08Comme Parti populaire, on a nos idées.
28:11S'il y a des partis qui partagent nos idées, on n'est pas contraire à ça.
28:17Mais on a nos idées, et c'est sur nos idées qu'on construit nos politiques.
28:22Même si la majorité von der Leyen, qui a voté pour elle, est au centre ?
28:27Entre vous, Réunion, et les socialistes et les démocrates ?
28:29De toute façon, il y a une partie de la droite qui a voté pour la présidente von der Leyen.
28:35Il faut l'accepter.
28:38Mais comme Parti populaire, on a nos idées, et c'est sur nos idées qu'on construit nos politiques.
28:44Sur la déforestation, le thème est juste.
28:47Le texte de la Commission était un bon texte.
28:50Il pouvait être amélioré pour rendre plus possible le partage des agriculteurs européens
28:58avec les agriculteurs des pays tiers qui ont des difficultés.
29:02Parce que si vous parlez avec des agriculteurs en Éthiopie, en Ouganda,
29:07pour eux, être sûr de pouvoir cultiver dans des endroits qui ne sont pas pollués, c'est bien difficile.
29:19Alors il faut donner du temps à ces agriculteurs.
29:23C'est la seule chose que le Parti populaire voulait.
29:26Bon, on n'a pas réussi.
29:28Mais de toute façon, on avait soutenu le texte de la Commission.
29:33On pouvait l'améliorer.
29:35Bon, on ne l'a pas amélioré.
29:37Ne me dites pas que les amendements du PPE visaient à défendre les intérêts des agriculteurs africains
29:42puisque vous êtes vous-même les premiers à réduire les crédits de l'aide au développement en Afrique
29:46et à faire en sorte qu'on ne fasse rien concrètement pour les accompagner.
29:50Ça visait à préserver les intérêts des très grands industriels forestiers mondiaux,
29:55par exemple au Brésil ou en Indonésie, qui exploitent les forêts.
29:59Et oui, le PPE joue avec l'extrême droite.
30:02Le PPE s'y brûle les doigts.
30:04Et au début, le PPE joue en votant des amendements de l'extrême droite.
30:07Et à la fin, le PPE perd, soit parce que le conseil d'Ix n'est pas raisonnable,
30:11soit parce que les textes ne sont pas votés.
30:13Parce que moi, à la fin, un texte dénaturé par la droite et l'extrême droite,
30:17je vote contre et à la fin, il n'y a plus de doigt.
30:19Réponse de Mme Moratti.
30:22Je n'accepte pas ça parce qu'on a parlé avec des industries européennes
30:28et ce sont les industries européennes qui nous ont demandé
30:31de préserver ce problème avec les agriculteurs africains.
30:36On n'a pas parlé du Brésil ou d'autres pays,
30:39mais c'était des agriculteurs africains qui nous ont demandé ça.
30:43Est-ce qu'il n'y a pas quand même une convergence de vues
30:45entre le PPE et les parties d'extrême droite au Parlement européen
30:49pour détricoter ce pacte vert ?
30:51Si vous revenez au pacte vert, on est absolument favorable au pacte vert.
30:56Ce qu'on veut, c'est avoir une transition qui soit une transition juste,
31:01une transition équilibrée, avec des ambitions,
31:04mais avec une réalité économique et sociale.
31:07Je regrette, mais lorsque vous dites que le pacte vert va créer des emplois,
31:11c'est vrai, mais il va créer des emplois.
31:14Pour l'instant, on est en train de perdre des emplois,
31:17des milliers et milliers d'emplois.
31:20Donc ça, notre position, c'est simplement celle de protéger
31:24les droits des travailleurs européens, ceux qui perdent leur travail.
31:29Si vous regardez Volkswagen, Michelin, Valeo,
31:33toutes les industries fermes en Europe, en Belgique, en France, en Allemagne,
31:40est-ce que vous ne voulez pas protéger ces travailleurs ?
31:43Cela n'a rien à voir avec le pacte vert.
31:45J'étais en réunion avec les industriels automobiles de ma région à Laval
31:49il y a quelques jours.
31:50Leur chute de marché date de la crise de la Covid et de la guerre en Ukraine.
31:54Leur cause principale de difficulté, c'est la concurrence chinoise.
31:58Ce n'est pas le pacte vert.
32:00Ce n'est pas le pacte vert.
32:02Au nom des travailleurs, vous instrumentalisez.
32:05Je n'ai pas terminé.
32:07Il faut remettre les choses à leur place.
32:09Les conséquences du pacte vert, du libéralisme et de la concurrence.
32:13Quand vous parlez du libéralisme, vous parlez aussi de ce fameux
32:17signé par Ursula von der Leyen début décembre.
32:20Mais la France s'y oppose.
32:22Toute la classe politique française s'y oppose.
32:25Le président Macron a dit que rien ne prouve que cet accord,
32:29dont on ne connaît pas bien les détails encore,
32:32respecte nos objectifs climatiques fixés ensemble.
32:35Est-ce que vous estimez qu'avec ce Mercosur,
32:39la Commission fait frimer notre croissance industrielle
32:42et notre capacité d'exportation sur l'écologie ?
32:45Ce modèle du libre-échange est totalement dépassé.
32:49Il n'y a plus que les Européens qui le défendent.
32:52La Chine protège son marché, l'Inde protège son marché,
32:55les Etats-Unis protègent leur marché.
32:57Je veux bien commercer avec des agriculteurs brésiliens
33:01qui produisent du soja bio et qui gagnent bien leur vie avec cela.
33:05Je refuse de commercer avec des agriculteurs brésiliens
33:08qui détruisent les forêts et qui exploitent les agriculteurs.
33:11Est-ce que cet accord signé par Ursula von der Leyen
33:14fait primer notre croissance, nos exportations sur nos ambitions écologiques ?
33:18On devra voir les détails de cet accord qu'on ne connaît pas.
33:21Mais pour l'instant, notre gouvernement a dit
33:24que nous n'allons pas signer cet accord
33:26si on n'a pas des protections pour nos agriculteurs.
33:30Ça, c'est bien clair.
33:32Et moi, j'espère et je suis sûre qu'au sein de PPE,
33:35on va trouver un compromis, un accord, une médiation
33:38pour protéger nos agriculteurs.
33:40Vous voyez que ce sera le prochain grand débat, évidemment,
33:43ici, au Parlement européen,
33:45qui va continuer à se jouer, je pense, en 2025.
33:48Merci à vous d'avoir été en notre compagnie.
33:50Et très bonne suite des programmes sur nos antennes.