Découvrez les initiatives citoyennes porteuses de communs numériques afin de créer des services numériques d’intérêt général résilients.
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00:00 Un bien commun, finalement, c'est le partage d'une ressource
00:03 selon des règles bien définies pour qu'elle soit du coup pérenne
00:06 et utilisable par tous de façon juste.
00:08 Tout ce qui peut être mutualisé profite à tout le monde
00:11 et on donne le meilleur à chacun.
00:13 Quelque chose qui s'essème, quelque chose qui s'égrène,
00:16 quelque chose qui est presque et même mieux
00:20 dans les mains de quelqu'un d'autre que de soi.
00:22 Ce qui est utile à tout le monde,
00:24 on ne devrait pas générer de l'argent dessus.
00:26 Je pense que je dis magie, mais c'est aussi parce que ça
00:28 transpire le bon sens aussi.
00:30 C'est profondément humain comme mécanisme.
00:34 C'est trop bien en travail avec des pirates.
00:36 [Musique]
00:59 Les communs numériques, si on veut les définir,
01:01 il faut déjà parler des communs tout court
01:03 avant de parler de numérique.
01:04 Les communs, c'est un concept qui est à peu près vieux
01:07 comme l'humanité.
01:08 En fait, c'est l'idée que l'on puisse partager une ressource
01:13 qui va échapper à un modèle de propriété classique.
01:16 On va la partager au sein d'une communauté
01:19 qui peut être petite ou grande
01:21 et qui va se doter d'une gouvernance
01:25 qui va d'une part établir les règles du partage,
01:28 mais qui va aussi protéger la ressource
01:30 contre des éventuels intrus, prédateurs,
01:33 qui va la faire grandir et fructifier.
01:35 Ce que je trouve intéressant avec les communs,
01:37 c'est que moi j'ai fait une école de commerce
01:40 avant de partir dans la recherche
01:42 et on nous disait que le but c'était de faire des entreprises
01:46 et qu'ensuite c'était comme ça qu'on créait une économie.
01:48 Évidemment, je savais qu'il y avait l'étatisme.
01:51 L'État a son rôle aussi dans l'économie.
01:54 Évidemment, l'économie planifiée avait perdu ses heures de gloire.
01:59 Mais il y avait quand même ces deux pôles
02:01 et on pensait que l'économie devait s'organiser
02:04 à travers ces deux pôles, un pôle public et un pôle privé,
02:07 en nommettant l'activité citoyenne qui pouvait avoir lieu
02:11 et créer, produire, consommer autour de communs.
02:15 Et pour moi, les communs, ce que ça apporte,
02:17 c'est une nouvelle manière de penser la production
02:20 et la consommation de biens, de ressources et de services.
02:25 Ce qui est intéressant avec les communs,
02:26 c'est que quand on en parle,
02:27 généralement les gens ne connaissent pas forcément,
02:29 mais en fait ils connaissent.
02:30 Il y a beaucoup de communs autour de nous.
02:32 Il y a les crèches parentales, par exemple,
02:34 qui sont des formes de communs.
02:36 Il y a toutes les mutuelles.
02:38 Je suis dans un supermarché coopératif.
02:41 Il y a la sécurité sociale,
02:42 qui à la base pourrait être considérée comme un commun.
02:45 La ressource partagée, ça peut être une ressource naturelle.
02:48 Quand je dis que ça existe depuis le début de l'humanité,
02:51 ça peut être une rizière,
02:52 comme on en trouve aujourd'hui en Indonésie.
02:54 Ça peut être des terres agricoles, une forêt.
02:56 Ça peut être une ressource matérielle.
02:59 Par exemple, en France, on trouve encore des fours à pain.
03:02 Et puis, ça peut être aussi des ressources immatérielles.
03:05 C'est pour ça qu'on parle de commun numérique.
03:07 Ça va être des données qui vont être partagées
03:10 ou du code source qui va être partagé
03:12 ou plus généralement de la connaissance
03:14 embarquée dans un support numérique.
03:17 Tout le monde connaît, par exemple, Wikipédia.
03:19 On l'a tous et toutes utilisé au moins une fois dans notre vie.
03:22 Wikipédia, c'est un commun numérique.
03:24 En fait, ça veut dire, un commun numérique,
03:26 ce sont des ressources partagées qui sont open source,
03:29 c'est-à-dire dont le code est ouvert,
03:31 les algorithmes sont ouverts, transparents.
03:33 Tout le monde peut y accéder, tout le monde peut modifier.
03:36 Dont les données sont ouvertes.
03:38 Donc, tout le monde peut accéder aux données,
03:40 les partager, produire des données.
03:42 Tout le monde peut contribuer,
03:44 c'est-à-dire qu'il y a une gouvernance.
03:46 Et ça, c'est très important pour comprendre la différence
03:48 avec, par exemple, ce qu'on va appeler des logiciels open source.
03:50 Il y a vraiment cette dimension de gouvernance
03:52 qui est au cœur de la construction des communs numériques.
03:54 Ça veut dire, quand on regarde Wikipédia,
03:56 que Wikipédia, c'est une communauté de contributeurs,
03:58 mais c'est aussi une communauté de mainteneurs.
04:00 Ce sont des gens qui sont engagés
04:02 pour maintenir l'architecture,
04:04 la cathédrale, même, si j'ose dire,
04:07 qui est devenue Wikipédia.
04:08 La pensée des communs n'est pas une pensée totalisante.
04:11 C'est-à-dire qu'elle ne cherche pas à renverser la table
04:13 et à s'imposer, à se substituer systématiquement à ce qui existe.
04:17 Elle ne se pense pas contre l'État ou contre le marché,
04:21 mais elle se pense en complémentarité de l'État et du marché.
04:23 Et donc ça, c'est extrêmement fertile
04:26 et ça ouvre des possibilités aussi de coopération
04:30 entre des acteurs du marché et des acteurs des communs et l'État.
04:34 Si vous prenez une entreprise comme IBM,
04:38 qui est une entreprise capitalistique purjue,
04:41 IBM finance soutien du logiciel libre.
04:44 Ils savent que pour eux, c'est intéressant d'être aussi un partenaire,
04:48 un soutien des communs.
04:50 Et à l'inverse, vous avez aussi l'État qui peut être un facilitateur de commun,
04:56 un financeur de commun, un partenaire de commun.
04:59 En fait, il y a un triangle entre ces trois pensées,
05:03 trois concepts et trois mondes sociaux
05:05 qui peuvent se répondre et travailler ensemble, coopérer.
05:08 Donc ça fourmille, on ne sait pas trop qui c'est,
05:12 et pourtant ça marche.
05:13 C'est un mélange assez fort des communs numériques
05:17 de résilience et de fragilité.
05:20 Et on est en permanence en tension entre ces deux pôles
05:24 quand on travaille avec des communs numériques.
05:26 En permanence, on se dit que c'est incroyable ce qu'on arrive à faire
05:29 avec la puissance de la multitude qui coopère
05:32 sans besoin d'être coordonnée par une instance centralisée.
05:35 Ce qui, quand on est dans l'État, est quand même un peu contre-intuitif
05:38 parce que ce n'est pas forcément comme ça que l'État s'est construit en France.
05:42 L'État jacobin s'est construit en France.
05:44 Et en même temps, d'un autre côté, on se dit
05:47 qu'on est en train de confier une partie de nos outils publics
05:51 à la multitude, et donc avec les questions aussi
05:55 de laisser un peu de ce pouvoir-là,
05:58 ou en tout cas de laisser un peu de contrôle aussi,
06:00 à la société civile.
06:02 Et ça c'est assez instable quand on est un acteur public.
06:08 Ce n'est pas une position très évidente,
06:10 et c'est une position qui est d'autant moins évidente
06:13 qu'on n'a pas encore tout le savoir-faire, à mon sens,
06:16 pour jongler entre ces deux pôles-là.
06:19 On n'a pas encore toute l'ingénierie juridique,
06:22 toute l'ingénierie financière,
06:24 tout le savoir-faire en matière de partenariat
06:27 nécessaire pour que vraiment ça soit très rodé.
06:30 Je pense qu'on arrive à un moment où les communs sont compris,
06:34 identifiés, ou en tout cas identifiés par l'État,
06:37 qui voit l'intérêt à s'adosser à un socle
06:40 construit par la société civile pour construire ses politiques publiques.
06:44 Et donc nous ne sommes plus dans le premier temps de plaidoyer,
06:48 où nous visions en tant que communeurs
06:51 une forme de reconnaissance de ces initiatives par les institutions.
06:56 Donc quels sont les objectifs pour nous aujourd'hui ?
07:00 Je trouve intéressant qu'un dialogue
07:02 et que des expérimentations soient faites
07:05 pour comprendre comment l'État peut devenir partenaire
07:10 ou consolider des initiatives qui peuvent construire
07:14 un socle collectif de communs
07:18 pour construire des politiques publiques plus fortes,
07:22 plus solidaires, aux plus proches des personnes.
07:25 Et donc ça demande peut-être une nouvelle forme d'engagement
07:29 de ces communs qui réfléchissent à leur gouvernance
07:32 et à leur rapport à l'État qui doit être, je pense, énoncé.
07:36 D'une part, les communs peuvent transformer de l'intérieur
07:39 le mode de fonctionnement des administrations.
07:41 Et donc c'est les exemples que je donnais
07:43 sur faire que les ressources soient partagées en accès ouvert,
07:48 que les modes de contribution soient plus ouverts
07:51 et que la gouvernance soit partagée
07:53 pour transformer l'action publique de l'intérieur.
07:55 Mais il y a une deuxième chose importante,
07:57 c'est que l'État peut soutenir le développement des communs numériques
08:00 dans la société.
08:02 Ça, c'est une chose que représente parfaitement par exemple l'AIC.
08:06 L'AIC, c'est l'État qui décide de soutenir financièrement
08:10 et avec d'autres ressources, des soutiens juridiques, etc.,
08:14 le développement de communs numériques
08:16 à l'extérieur de l'administration
08:18 pour qu'ils se développent dans la société.
08:20 On a réalisé pendant le Covid
08:29 qu'on avait parfois des initiatives citoyennes
08:33 qui venaient avantageusement,
08:38 on va dire, complémenter une politique publique.
08:43 En l'occurrence, par exemple, la politique publique de santé.
08:45 Et l'accélérateur d'initiatives citoyennes,
08:47 d'ailleurs, originellement, il est quand même né aussi
08:49 de ce constat-là pendant le Covid
08:51 avec une personne qui s'appelle Guillaume Rosier
08:55 qui, avec d'autres, a appris des briques techniques,
09:00 c'est-à-dire des données ouvertes de l'État
09:02 pour en faire quelque chose qui est un service numérique
09:05 qui a ensuite été utile pour apporter de la résilience
09:08 aux politiques publiques de santé dans une période de crise.
09:11 Donc cette année, on a choisi de positionner
09:16 l'accélérateur d'initiatives citoyennes
09:18 comme un laboratoire de soutien et d'accélération
09:22 pour les projets de communs.
09:24 En 2023, on a quatre lauréats.
09:26 Ce sont des communs numériques avec lesquels on a envie,
09:30 pendant 12 mois, de tisser des liens durables.
09:34 Et notre enjeu, aussi, à l'accélérateur d'initiatives citoyennes,
09:38 c'est finalement de faire en sorte que les acteurs publics
09:40 prennent conscience de ça, que quand ils utilisent
09:42 un commun numérique, il faut qu'ils contribuent aussi
09:46 à leur accompagnement et qu'on s'organise
09:49 entre administrations, qu'on s'organise avec
09:51 ces porteurs de projets de communs numériques
09:55 pour faire en sorte que le poids de la maintenance
09:57 soit soutenable à terme.
09:59 L'idée, c'est de permettre aux gens de se former et d'évoluer.
10:09 Par exemple, on s'en sert en école primaire,
10:11 mais demain, je suis dans la communauté Emmaüs
10:13 à Hercury, chez nous, et je vais présenter
10:16 la distribution à des jeunes migrants
10:19 qui sont hébergés à la communauté Emmaüs
10:21 pour qu'ils prennent en main le numérique et l'informatique
10:23 et qu'ils puissent travailler le français et autres,
10:25 mais aussi découvrir ce qu'est l'informatique.
10:27 On a pas mal de bénévoles qui développent,
10:29 mais on a aussi pas mal de partenariats
10:31 avec d'autres associations.
10:33 C'est-à-dire qu'on a des associations qui reconditionnent,
10:35 qui valorisent des PC qui ne pourraient plus être utilisés
10:39 parce qu'obsolètes pour certains systèmes.
10:42 Et donc, on a sur Lille, on a sur Loise,
10:45 on a sur Rennes des associations qui reconditionnent
10:48 le PrimTux pour équiper école, médiathèque,
10:50 sortes de loisirs, familles qui sont en fracture numérique.
10:53 Tous ces logiciels sont un plus pour les enfants
10:56 à la maison, tout à fait, et si une famille
10:59 n'a pas les moyens de s'équiter,
11:01 il ne faut pas hésiter à se signaler
11:03 sur le portail primtux.fr,
11:06 de montrer sa demande,
11:09 et on trouve des correspondants locaux
11:12 qui vont trouver une machine de réemploi,
11:16 mettre PrimTux dessus,
11:18 et puis la mettre à disposition d'une famille.
11:20 C'est tout à fait possible.
11:21 L'intérêt de l'AIC pour nous,
11:23 c'est le professionnalisme que ça amène.
11:25 La montée en puissance que ça va nous permettre,
11:28 et la montée en compétence pour chacun d'entre nous.
11:30 J'ai beau être une professionnelle du numérique éducatif,
11:33 dédiée au monde de l'enseignement,
11:34 parce que je travaille pour le réseau Canopé,
11:35 quand je ne suis pas bénévole,
11:37 ça nous offre quand même une ouverture sur le monde.
11:39 Du libre, on en fait tous depuis longtemps,
11:41 c'est ce qui nous récupère.
11:42 Donc les collectifs, les communautés, on a l'habitude.
11:44 Par contre, les communautés hébergées par l'État,
11:46 avec la puissance des acteurs de l'État,
11:48 ça c'est nouveau et c'est une chance unique.
11:50 Donc on va améliorer l'expérience utilisateur,
11:52 améliorer la documentation, ça c'est le premier point.
11:55 Le deuxième point, c'est avec l'AIC, améliorer le déploiement.
11:58 C'est-à-dire que grâce à leurs contacts,
12:00 grâce aux entrées qu'ils peuvent avoir un peu partout,
12:03 ils peuvent permettre de convaincre les décideurs.
12:07 Faire vivre le vieux matériel,
12:08 donc lutter en faveur de l'environnement,
12:12 économiser les ressources de la planète,
12:14 favoriser l'inclusion en permettant à tous les enfants
12:18 d'avoir des supports logiciels qui leur permettent d'avancer.
12:21 Comme les logiciels sont open source,
12:23 l'ensemble du logiciel est gratuit.
12:25 PIRONIR, c'est une association loi 1901
12:36 qui vise à démocratiser des solutions
12:38 de détection précoce de départ de feu
12:40 dans les espèces naturelles, particulièrement les forêts.
12:44 L'idée, c'est qu'on met des micro-ordinateurs,
12:47 des RAS-VRP pour les gens qui connaissent trop le terme technique,
12:49 et des caméras, qui sont des caméras de vidéosurveillance classiques,
12:52 on les place dans la forêt, sur des points hauts,
12:54 et du coup, le mini-ordinateur va contrôler les 4 caméras,
12:58 parce qu'il y en a 4 pour filmer à 360
13:00 et avoir une couverture totale de la zone.
13:02 Et du coup, il va interroger chaque caméra
13:04 toutes les 30 secondes pour demander une image.
13:05 Il va analyser cette image localement,
13:07 et il y a un algorithme qui va automatiquement détecter
13:09 s'il y a un départ de feu ou non,
13:11 et le cas échéant, il va envoyer une alerte aux pompiers,
13:14 via notre API, c'est le protocole de communication qu'on a développé,
13:18 et pour finir, on a une plateforme qui permet aux pompiers
13:21 de visualiser l'état des tours en temps réel,
13:23 et de voir une éventuelle alerte,
13:26 ce qui permet de valider qu'il y a bien un feu,
13:28 et le cas échéant, d'envoyer une équipe d'intervention.
13:31 Qu'est-ce qu'on attend de l'AIC ?
13:33 De mieux comprendre et faire connaître,
13:35 si accessoirement, le projet auprès des pompiers,
13:38 et faire connaître un projet qui est dans une démarche
13:42 ouverte et open source, et faire comprendre aussi
13:44 pourquoi ça sert de faire des projets de façon ouverte.
13:47 Donc ça, c'est le premier point.
13:49 Et le deuxième volet qui nous est utile pour l'accompagnement,
13:53 c'est que nous, on est une association avec que des bénévoles,
13:56 ça nous prend du temps, c'est génial,
13:58 mais on s'aperçoit aussi comment on se structure plus efficacement
14:02 pour animer la communauté de contributeurs,
14:04 et en même temps réussir à parler aux pompiers,
14:06 et en même temps, on a besoin de consolider la structure de l'assaut,
14:09 et ça, l'accélérateur va nous aider.
14:11 Nous, on est tous des ingénieurs à la base, un peu des geeks,
14:14 du coup, cette partie structuration de l'association,
14:18 créer un business model, etc., ce n'est pas notre corps de métier,
14:21 du coup, on avait besoin d'aide là-dessus,
14:23 et on est tombé sur l'AIC,
14:25 et on pense que ça peut correspondre exactement à nos besoins
14:28 pour nous aider à nous lancer et passer à l'échelle, comme on dit.
14:32 [Musique]
14:41 Youmap, c'est un outil en ligne pour créer des cartes
14:46 qui s'adressent à des gens non spécialistes.
14:48 On va créer des cartes pour préparer sa prochaine randonnée vélo,
14:52 pour savoir où est-ce qu'on va s'arrêter,
14:54 c'est quoi les options pour dormir.
14:56 Ça va être les collectivités qui vont créer des cartes
15:00 pour communiquer sur les travaux dans la ville
15:03 ou sur les bacs de dépôt de telle ou telle tri en fonction des quartiers.
15:10 La philosophie de Youmap, c'est que ce n'est pas un outil,
15:13 il n'y a pas Youmap.fr ou Youmap.com qui hébergerait toutes les cartes Youmap.
15:18 Normalement, il y a plusieurs instances.
15:20 C'est un outil qui est libre, que chacun peut installer.
15:22 Alors, chacun ne l'installe pas parce qu'il faut des compétences techniques,
15:25 mais il y a une instance qui est hébergée par OpenStreetMap France,
15:30 puisque Youmap est né dans l'écosystème OpenStreetMap jusqu'à présent,
15:34 donc Youmap a 10 ans, et jusqu'à peu,
15:38 c'était un outil qui avait été 100% développé sur du temps bénévole.
15:44 Et il y a sur l'instance d'OpenStreetMap France,
15:47 il y a quasiment un million de cartes, il y a 100 000 utilisateurs,
15:50 enfin ce n'est pas un tout petit truc.
15:53 Le moteur de Youmap, c'est les retours aux utilisateurs.
15:55 Ce n'est pas parce qu'il y a des gens qui l'utilisent et qui disent
15:57 « Ah, quand je suis là, j'aimerais bien pouvoir faire ça »
15:59 ou « Là, j'ai un problème, etc. » que ça continue à vivre et que moi, ça me motive.
16:04 C'est le fait de rendre service en fait.
16:06 C'est l'utilité, le fait que quelqu'un ensuite dise dans un message
16:09 « Ah super, merci, j'ai pu faire ça »,
16:11 c'est ça qui fait que je me dis que ça a un intérêt et que je continue.
16:22 Avant de créer le projet, je me suis dit
16:25 « Ce serait super s'il y avait un Wiki et puis il y a des produits alimentaires. »
16:28 Et je me suis dit « Ce n'est pas possible, il y a quelqu'un qui a dû y penser avant. »
16:31 Donc j'ai cherché et j'ai trouvé des bases, mais qui étaient privées.
16:34 Il y avait même une base qui était faite par le gouvernement,
16:37 qui s'appelle Ocali, qui à l'époque était complètement fermée.
16:41 Ce qui était intéressant, c'est qu'il montrait comme exemple
16:44 les céréales pour plus été déjeuner avec un graphique.
16:46 Sur un axe, il y avait le sucre, sur l'autre axe, il y avait le gras.
16:49 Et puis il mettait « Entreprise A, B, C, D, E, E ».
16:52 Et il y avait marqué en gras « Aucun accès n'est prévu pour le grand public ».
16:55 Et là, je me suis dit « C'est complètement nul, c'est ce genre de truc.
16:58 Ça devrait être disponible pour tout le monde. »
17:01 C'est une des premières fonctions qu'on a faites dans OpenFoodFacts,
17:03 c'est justement permettre de faire un graphique avec les saucissons, le sel,
17:06 ou tout ce qu'on veut pour pouvoir comparer.
17:08 Nous, on ne se pose pas la question.
17:09 Dès le départ, c'est un projet associatif, on ne fait pas de start-up à côté, etc.
17:13 Et c'est pour ça que toutes les licences open source, open data, etc.
17:17 sont très importantes pour les communs.
17:20 Alors OpenFoodFacts, c'est en fait un projet citoyen français qu'on a créé il y a 10 ans,
17:24 qui est un peu le Wikipédia des aliments.
17:26 Donc on est parti du constat que dans un supermarché, c'est super compliqué.
17:30 Il faut s'imaginer un monde sans Nutri-Score.
17:33 Et dans un monde sans Nutri-Score, c'est super compliqué de savoir quel paquet de céréales choisir.
17:38 Il faut retourner le paquet, regarder le tableau nutritionnel,
17:41 et puis après c'est très abstrait.
17:42 Moi, personnellement, je n'ai jamais compris.
17:44 4 grammes d'acides gras saturés, qu'est-ce que ça veut dire ?
17:47 Et donc l'idée d'OpenFacts, c'est de collecter cette donnée depuis les emballages
17:51 et de pouvoir en faire des choses utiles, comme par exemple calculer les indicateurs,
17:54 comme le Nutri-Score qu'on a calculé dès 2015,
17:58 l'Eco-Score qu'on a calculé sur l'environnement dès 2021,
18:02 et permettre aux citoyens de mieux choisir leurs produits,
18:05 aux chercheurs de faire progresser la recherche sur le nutritionnel,
18:09 et aux pouvoirs publics de pouvoir prendre des décisions en fonction de cette donnée.
18:14 Ça a aussi un impact systémique, parce que les industriels,
18:17 voyant que les consommateurs se mettent à demander des produits plus sains
18:20 et moins impactants environnementalement,
18:22 adaptent l'offre et se mettent à reformuler leurs produits,
18:26 à réduire le sel, le sucre, le gras.
18:28 Et du coup, non seulement les gens qui utilisent ces applis de scan en bénéficient,
18:33 mais tout le monde en bénéficie en réalité,
18:35 et du coup on améliore le système alimentaire pour l'ensemble de la population.
18:39 Alors Open FoodFacts, c'est avant tout une communauté.
18:42 Il faut s'imaginer qu'on est parti de zéro produit en 2012.
18:45 Aujourd'hui, on a plus de 3 millions de produits,
18:48 et au départ, on a tout saisi à la main.
18:50 Donc il faut s'imaginer prendre des photos avec son téléphone mobile
18:54 de la face, des ingrédients, de la nutrition,
18:56 et tout saisir à la main,
18:58 pas sciencieusement pouvoir calculer les additifs, le Nutri-Score.
19:02 Mais heureusement, depuis 2019, on a mis en place des systèmes d'intelligence artificielle,
19:07 donc on l'appelle affectueusement Robotoff,
19:09 qui permet d'augmenter, de donner des super pouvoirs à notre communauté,
19:12 et de lui permettre de déchiffrer les étiquettes beaucoup plus rapidement.
19:16 Open FoodFacts, ça sert aussi beaucoup à la recherche.
19:19 Il y a beaucoup de scientifiques, en particulier ceux qui ont créé le Nutri-Score,
19:22 qui font aussi une cohorte citoyenne qui s'appelle NutriNet Santé.
19:25 Ils utilisent les données d'Open FoodFacts pour voir
19:27 est-ce que les gros mangeurs de bio, par exemple,
19:30 ou est-ce que les personnes qui consomment tel ou tel additif,
19:32 est-ce que dix ans plus tard, ils ont plus ou moins de diabète,
19:36 est-ce qu'ils ont tel ou tel cancer, etc.
19:38 Et donc ça permet de trouver des liens, des corrélations,
19:43 et peut-être prouver un jour qu'il y a un lien de cause à effet
19:46 entre la consommation de tel additif et telle affection.
19:50 Et puis enfin, ça sert aussi à accompagner l'action publique.
19:55 Par exemple, le Nutri-Score, c'est quelque chose qui est optionnel.
19:59 Et avant que le Nutri-Score soit sur les aliments,
20:02 nous, on a demandé la formule à l'équipe qui l'a créée et nous l'ont donnée.
20:07 Et on a calculé le Nutri-Score sur tous les produits du monde.
20:09 On l'a affiché sur notre app, sur toutes les apps qui utilisent les données d'Open FoodFacts, etc.
20:13 Et ça a permis de créer de la demande et d'initier ce mouvement
20:16 qui fait qu'aujourd'hui, en France, quand on va dans un supermarché,
20:19 on voit des Nutri-Score quasiment partout.
20:21 Un des points qui me passionnent le plus dans le projet Open FoodFacts,
20:24 c'est l'idée de se dire qu'un projet citoyen comme ça,
20:26 juste en scannant des produits, en renseignant des informations, etc.,
20:30 on peut participer à faire avancer la recherche.
20:33 C'est vraiment super motivant pour moi et pour l'ensemble des contributeurs du projet.
20:38 La force d'Open FoodFacts, c'est sa communauté.
20:41 On a plus de 3 millions d'utilisateurs qui viennent tous les mois sur l'appli ou les sites.
20:46 Et on a 20 000 contributeurs actifs qui ont décidé de s'engager activement
20:51 dans la transparence alimentaire en modifiant, complétant des produits,
20:54 en faisant du développement informatique, de la communication.
20:58 Donc, Open FoodFacts, c'est une équipe permanente,
21:01 mais on ne serait rien sans ces gens qui décident de prendre quelques heures sur la soirée,
21:07 leur week-end, pour soutenir cette mission de transparence alimentaire.
21:18 En fait, l'AIC, déjà, ça apporte une sorte de tampon de l'admin, de l'État,
21:24 et qui, pour plein de gens, est un déclencheur d'intérêt, de considération.
21:30 L'AIC, trop bien. Ça a mis un gros coup d'accélérateur au projet cette année.
21:34 On est vraiment en train de se professionnaliser.
21:37 Enfin, je peux utiliser vraiment le terme que j'ai envie d'employer,
21:39 mais dans le sens où, jusque-là, c'était un petit projet d'ingénieur un peu dans notre coin
21:45 et on s'amusait bien à faire des trucs techniques.
21:47 Et voilà, pour amener un projet mature et vraiment le plus efficace possible pour les pompiers
21:51 et de gérer tout l'à-côté de la technique,
21:55 du coup, ça fait du bien d'avoir un accompagnement avec nous
21:59 et de pouvoir nous conseiller sur tous les domaines où nous, on n'est pas du tout armés.
22:03 Le budget nous permet d'avoir d'autres compétences, comme je te le disais tout à l'heure.
22:06 Ça change beaucoup pour un projet comme ça, bénévole, classique d'open source.
22:13 D'un coup, d'avoir une UX designer, d'avoir une chargée de déploiement,
22:16 c'est le jour et la nuit.
22:18 C'est des gens qui font, c'est tous en fait, c'est des porteurs de projets,
22:22 mais c'est avant tout des ingénieurs, des développeurs, des personnes de métier.
22:27 C'est quand même un peu des héros, dans le sens où ils font des trucs par passion,
22:33 par un peu sens aussi d'intérêt général.
22:36 Et parce que je pense qu'ils ont été souvent confrontés aux problèmes
22:39 et ils ont choisi de se mobiliser pour y répondre.
22:41 Je trouve ça assez fascinant, c'est un super objet d'étude
22:50 et quelque part une alternative à la fois vieille et qui revient au goût du jour.
22:56 Les communs numériques, pour moi, sont un endroit dans lequel la puissance publique
23:01 peut trouver de la résilience, peut trouver du relais,
23:05 peut trouver aussi une forme de capacité à se dépasser et à innover.
23:10 Comme on l'a vu justement pendant le Covid.
23:13 En fait, avec le développement des intelligences artificielles,
23:17 on se rend enfin compte qu'on a besoin de communs numériques.
23:21 Et Wikipédia s'est construite là-dedans avec des gens qui ont écrit des millions d'articles.
23:27 Et aujourd'hui, on se rend compte qu'on a besoin de Wikipédia
23:32 pour que les intelligences artificielles apprennent à parler, si je crée caricature.
23:37 Parce qu'on a besoin de bases de données qui sont toujours plus grandes
23:43 pour pouvoir apprendre des choses toujours plus complexes pour ces intelligences artificielles-là.
23:48 Et donc on n'a plus juste besoin de Wikipédia parce que c'est un marqueur d'humanité incroyable,
23:55 on a aussi besoin pour des raisons presque industrielles, techniques,
24:01 on a besoin que Wikipédia continue à accueillir finalement des contenus
24:09 pour pouvoir entraîner les intelligences artificielles.
24:12 Moi ce que je trouve stimulant avec les communs,
24:15 c'est que ça donne un nouvel horizon d'organisation sociale.
24:21 Et je ne pense pas du tout qu'il faille faire des communs fétiches
24:26 qui s'opposent à l'État et au marché.
24:28 Mais ça nous permet de repenser des modes d'organisation
24:32 pour développer une économie qui soit plus coopérative, juste, écologique.
24:36 Et c'est très stimulant.
24:38 Et à mon avis, le fait que l'État s'intéresse au commun numérique
24:41 montre qu'il y a un intérêt à cette nouvelle forme d'organisation
24:46 qui existait depuis bien longtemps, mais qui retrouve ses lettres de noblesse aujourd'hui.
24:51 Parce qu'on se rend compte qu'elle a plein de bénéfices.
24:53 Coopérer, ça a plein de bénéfices économiques et politiques.
24:56 Et à côté d'un marché éthique, et à côté d'un État qui peut être garant de l'intérêt général,
25:01 le développement de cette économie coopérative,
25:04 gouvernée de manière démocratique dans des logiques de justice sociale et écologique,
25:08 c'est hyper stimulant en fait.
25:09 Et à mon avis, le fait que ça percute un peu plus les acteurs publics,
25:15 c'est un très très bon signe pour montrer que cette alternative est tout à fait viable
25:20 et que l'acteur public a tout à fait intérêt à coopérer avec cette logique-là.
25:24 [Musique]