L'échec de la réforme Touraine sur l'accès au soin [Aziza Laguecir]

  • il y a 5 mois
Xerfi Canal a reçu Aziza Laguécir, professeure à l'EDHEC Business School, membre du comité exécutif de l'association africaine de finance et comptabilité, pour parler de l'échec de la réforme Touraine.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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Transcript
00:00 Bonjour Aziza Lagesseer.
00:09 Bonjour Philippe Denis.
00:11 Aziza Lagesseer, professeure à l'EDEC.
00:12 Vous êtes éditrice associée de ContinForum.
00:15 Vous êtes membre du comité exécutif de l'association africaine de finance et comptabilité.
00:20 Je suis complètement passé à côté, je crois que je ne suis pas le seul,
00:23 c'est la réforme tourenne pour l'accès aux soins.
00:25 Il y a une décennie, dix ans, réforme Marisol Touraine, accès aux soins.
00:31 Quel bilan ?
00:33 Alors effectivement, en 2014, on a eu un certain nombre de réformes appelées tourennes.
00:42 Mais dans ces réformes, entre autres la retraite qui a plus marqué les esprits,
00:47 mais en tout cas dans ces réformes, on compte un volet sur l'amélioration de l'accès aux soins
00:55 et de leur qualité.
00:56 Alors, est-ce qu'on peut revenir d'abord sur l'objectif de cette réforme et ses moyens ?
01:00 Alors l'objectif de cette réforme, c'était d'une part de contenir les dépenses de santé
01:06 et d'autre part d'améliorer l'accès aux soins et la qualité des soins pour les patients.
01:12 Alors la réforme repose sur l'idée centrale que le patient doit jouer un rôle dans ces deux objectifs.
01:21 Alors l'idée de la réforme, c'était de faire pression pour une réduction des dépassements d'honoraires des médecins.
01:32 Donc auprès du praticien.
01:33 Oui. Alors, le moyen qui a été choisi, ça a été de limiter les prises en charge des complémentaires santé à 100%.
01:45 Ensuite, il y a eu des aménagements, mais en tout cas à 100% du tarif sécurité sociale.
01:52 Alors l'idée est simple, si la complémentaire ne rembourse plus complètement le dépassement au patient,
02:00 le patient va faire pression sur le médecin, secteur 2, qui va lui-même s'aligner sur le tarif sécurité sociale,
02:08 plus le dépassement d'honoraires.
02:11 Alors ça, c'est en théorie.
02:16 Et le résultat ?
02:17 Le résultat, c'est aujourd'hui, on est à peu près à 10 ans de la réforme,
02:22 et les résultats qu'on a de la part de l'adresse et de la part d'un cabinet Mercer, c'est tout le contraire.
02:31 Des dépenses de santé qui ont explosé, des tarifs sécurité sociale qui sont restés stables,
02:39 mais des dépassements d'honoraires qui ont augmenté, une qualité et un accès aux soins détériorés.
02:45 Et ce qui est le plus étonnant, c'est qu'on a des complémentaires qui n'ont pas baissé leur tarif de contrat,
02:59 qui ont développé des sur-complémentaires à la demande des patients,
03:03 et on a des patients qui sont beaucoup moins bien pris en charge au niveau du surcoût qu'ils ne l'étaient avant 2014.
03:13 Bien sûr.
03:15 Voilà comment on retrouve un grand enseignement de la recherche en management,
03:18 les effets pervers des réformes, des bonnes intentions, finalement, l'enfer est pavé de bonnes intentions,
03:25 souvent en matière de gestion.
03:28 Oui, mais je dirais que de ce point de vue-là, cette réforme peut sembler intéressante,
03:35 mais c'est ne pas prendre en compte ou ne pas tenir compte du poids relatif de chacun des acteurs ou des groupes d'acteurs.
03:43 On sait très bien qu'aujourd'hui, un patient n'a aucun pouvoir de négociation avec son médecin.
03:48 On a une pénurie de médecins, on a des attentes allant jusqu'à 9 mois, 12 mois pour des spécialistes.
03:55 Quand un patient, face à son médecin, lui demande de renégocier ses prix,
04:01 le médecin peut facilement passer à un autre patient, alors que le patient a du mal à trouver une alternative de soins.
04:08 C'est très clair. Merci Aziza Leguesia.
04:11 Merci Jean-Philippe Denis.
04:12 [Musique]

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