5/12/2023 - 05- Nature(s) ?

  • il y a 4 mois
Cycle "Retour aux sources"
"Nature(s)?
Mardi 5 décembre 2023

La notion de protection de la nature a beaucoup évolué de Jean-Baptiste Say qui, à la fin XVIIIe siècle, considérait les ressources naturelles comme ne pouvant être "épuisées" à la stratégie nationale de la biodiversité de juillet 2023 qui les qualifie de "patrimoine commun et de capital pour l'avenir à préserver".
Ce Retour aux sources propose donc une mise en perspective historique au travers des sources disponibles des enjeux, de la pensée et des acteurs de la protection de la nature.

La programmation de cette séance s'inscrit dans une double actualité, la publication en mai 2023 des actes du colloque De la réserve naturelle intégrale à la nature ordinaire. Les figures changeantes de la protection de la nature (XIXe-XXe siècle) qui s'est tenu en 2020 aux Archives nationales et le centenaire du premier Congrès international de la protection de la nature en 1923, célébré lors du colloque Défendre la nature qui s'est tenu du 27 au 29 septembre au Muséum d'Histoire naturelle
Transcript
00:00 -Pour commencer, une présentation très rapide
00:02 des fonds privés d'associations conservées
00:05 par le département des archives privées
00:07 aux archives nationales.
00:09 Ce sont des fonds qui ne sont pas tout à fait marginaux
00:13 parce qu'ils représentent aujourd'hui
00:15 4,7 km linéaires et 0,3 Teraoctets d'archives définitives
00:21 pour environ 200 fonds privés.
00:23 Ce sont des fonds qui sont très bien conservés
00:25 et qui sont très bien conservés.
00:27 Ils sont définitifs pour environ 200 fonds
00:30 auxquels on peut ajouter les fonds conservés ça et là
00:33 par les différents départements de la direction des fonds.
00:36 Il m'a été demandé de présenter les fonds relatifs
00:39 à la protection de la nature et de l'environnement
00:41 dans un contexte bien précis
00:44 qui a déjà été rappelé par les uns et les autres.
00:47 Cette séance s'inscrit, en effet,
00:49 dans le prolongement du colloque organisé en septembre 2023
00:53 pour marquer les 100 ans du 1er Congrès international
00:56 de protection de la nature.
00:57 Et je vous prie tout de suite d'accepter mes excuses
01:00 par avance pour tous les raccourcis que je vais emprunter
01:04 et toutes les nuances qui ont été présentées
01:06 par mes prédécesseurs auxquelles je vais probablement
01:09 tordre le cou en allant un peu trop vite,
01:11 mais vous retiendrez que c'est plus complexe qu'il n'y parait.
01:15 Cette présentation a été l'occasion pour moi
01:18 de poser un nouveau regard sur l'ensemble des fonds.
01:21 Et on le verra tout au long de ce que je présente.
01:25 Au-delà des fonds très facilement identifiables
01:28 des associations estampillées
01:30 Protection de la nature et de l'environnement,
01:33 la préoccupation pour la nature traverse un grand nombre de fonds,
01:37 car la nature est un fait social total
01:40 avec lequel tout groupe est en interaction,
01:43 interaction qui laisse des traces directes ou indirectes
01:47 dans les documents en de très nombreux endroits.
01:50 Donc il n'est pas question pour autant
01:52 de présenter l'ensemble des fonds en une liste litanique
01:55 qui épuiserait à elle seule le temps qui met en partie.
01:58 Mon intention aujourd'hui, c'est de présenter l'histoire
02:01 de la structuration de la protection de la nature
02:03 et de l'environnement par le fait associatif
02:06 qui constitue encore aujourd'hui la cheville ouvrière
02:08 d'un mouvement de société
02:10 qu'on pourrait grossièrement qualifier d'écologie.
02:13 Comme c'est une présentation des archives conservées
02:17 qui les question, il faut mettre en avant
02:19 tout de suite plusieurs réserves.
02:21 Les fonds présentés sont exclusivement privés.
02:24 Pour une présentation des fonds publics,
02:25 je vous renvoie à la fiche d'aide à la recherche
02:28 constituée par Barbara Proenza, malheureusement absente aujourd'hui.
02:32 Vous trouverez le lien, pas en toutes lettres,
02:35 mais il se trouve assez facilement sur le site des archives nationales.
02:39 Deuxième réserve, c'est que les fonds conservés
02:41 comme associatifs remontent rarement en-dessous
02:44 de la fin du XIXe siècle.
02:46 Je passerai plus vite sur des périodes
02:49 où se mettent en place les fondations
02:51 de la protection de la nature.
02:54 Voilà.
02:55 La troisième réserve, c'est que les fonds conservés
02:58 aux archives nationales sont ceux d'associations
03:00 par définition d'envergure nationale
03:02 qui permettent rarement de documenter
03:04 l'action d'organisations non gouvernementales
03:07 opérant à l'échelon international, d'une part,
03:10 ce qui est regrettable,
03:11 car la protection de la nature et de l'environnement
03:15 sont nécessairement liées,
03:16 et nécessairement liées à la mondialisation
03:18 qui porte en elle une partie des causes,
03:22 des effets qui sont affrontés.
03:24 La protection de la nature, par ailleurs,
03:26 se fait aussi très souvent à un échelon très local
03:30 sur des sujets, espèces, sujets de mobilisation ponctuelle
03:33 sur l'aménagement du territoire très précis.
03:36 Les fonds des archives nationales
03:38 permettent de faire ce jeu d'échelle
03:40 dans une certaine mesure,
03:42 mais ne se substituent pas à la consultation
03:45 de fonds enracinés dans les territoires.
03:50 A ce titre, je suis incapable de vous dire
03:52 si une politique homogène de collecte
03:54 existe sur le sujet
03:56 dans le réseau des archives départementales,
03:58 et ça équivaut à dire qu'elle n'existe pas.
04:02 Pour le moment.
04:05 La présentation de ce jour et les fonds mobilisés
04:08 permettent de faire l'histoire également de l'État
04:11 mobilisé sur la question par différents acteurs
04:15 dont l'intérêt n'était pas toujours
04:17 la protection de la nature.
04:19 Je vais aussi évoquer des fonds
04:20 qui proviennent de producteurs
04:23 dont l'intention n'est pas la protection de la nature
04:26 et dont souvent l'action contribue à dégrader la nature,
04:32 ce qui permet aussi d'écrire cette histoire.
04:36 L'idée, c'est aussi de montrer comment le mouvement associatif
04:38 est au coeur de la création d'une catégorie d'action publique
04:42 pour laquelle la création, en 1971,
04:45 d'un ministère de la production de la nature et de l'environnement
04:48 ou la candidature écologiste de René Dumont en 1974
04:52 à l'élection présidentielle
04:53 sont des jalons assez timides.
04:56 L'intérêt des archives associatives
05:00 est de pouvoir contribuer,
05:01 au-delà de la question de la protection de la nature
05:03 et de l'environnement,
05:04 à l'écriture d'une histoire des relations
05:07 entre la société et le pouvoir public
05:09 et à la façon dont certains objets sont inscrits
05:11 à l'agenda public.
05:14 Aux archives nationales, nous conservons
05:16 8 fonds d'associations dont la mission première
05:19 est en lien avec la protection de la nature et de l'environnement,
05:22 ce qui représente à ce jour 144,5 mètres linéaires.
05:27 Je vous présente quelques enlevements synthétiques
05:28 avant d'entrer dans le détail.
05:31 Il faut voir qu'à deux exceptions près,
05:32 il s'agit d'associations qui sont créées
05:34 autour des années 60 et 70.
05:37 Il faut bien avoir en tête
05:39 que si on veut écrire l'histoire de la protection de la nature
05:41 et de l'environnement avant ces décennies,
05:43 et on a bien vu que c'était un mouvement
05:46 dont l'histoire s'écrivait bien avant ces décennies,
05:49 il faudra consulter les autres fonds d'associations
05:52 pas nécessairement spécialisés sur la question.
05:55 Autre remarque sur la temporalité, cette fois,
05:58 de la collecte du point de vue des archives nationales.
06:01 On remarque un premier mouvement au début des années 2000,
06:04 sans que, personnellement, je sache vous dire,
06:06 comme pour d'autres thématiques,
06:07 cela résulte d'une stratégie et d'une véritable programmation.
06:11 Puis une intensification ces dernières années
06:14 qui est très certainement attribuable au travail
06:17 réalisé par le département environnement
06:19 et aménagement du territoire agriculture.
06:22 Et je tiens à remercier Barbara, malgré son absence,
06:26 travail effectué avec l'association
06:29 pour l'histoire de la protection de la nature et de l'environnement.
06:32 Et on verra, quand je parlerai des collectes à venir,
06:34 que c'est une collaboration très active
06:37 qui permet de développer une véritable,
06:41 presque pôle interne aux archives privées d'associations
06:45 sur cette thématique.
06:47 Donc, thématique environnement consistante
06:50 dans les fonds privés qui reste à alimenter, on le verra.
06:54 Ce qu'on peut voir également, c'est que l'ensemble de ces fonds
06:58 est entré dans nos collections par la voie du don.
07:01 Je reviendrai rapidement sur les différentes possibilités
07:03 pour voir que ce n'est pas la seule.
07:05 Je disais deux exceptions
07:08 sur les temporalités dans lesquelles s'inscrivent
07:11 les différentes associations.
07:13 Ces exceptions sont intéressantes.
07:15 Elles sont constituées par les fonds
07:17 de la Société nationale pour la protection de la nature
07:20 et par le fonds de l'association pour l'histoire
07:22 de la protection de la nature et de l'environnement.
07:25 Les deux associations qui organisent
07:28 ce retour aux sources avec nous aujourd'hui.
07:31 Je prendrai le cas de la Société nationale
07:34 de protection de la nature, SNPN,
07:36 comme fil rouge de cette présentation,
07:38 parce que créée en 1854
07:41 comme société zoologique d'acclimatation,
07:44 elle documente des mouvements essentiels
07:46 permettant de saisir comment cette société savante
07:49 est devenue une association de protection de la nature,
07:52 en étant renommée SNPN en 1960.
07:54 Autre exception, l'APNE,
07:57 dernier né du contingent,
08:01 qui représente dans ses fonds une double singularité,
08:05 celle d'avoir donné des archives exclusivement électroniques,
08:09 j'y reviendrai,
08:10 et celle de constituer, on l'a déjà dit et souligné,
08:13 un acteur relais indispensable
08:16 pour l'émission des archives nationales
08:18 en œuvrant au repérage et à la préservation des sources
08:21 de la protection de la nature et de l'environnement.
08:23 Fait social total, la nature présente différentes figures
08:28 qui se reconfigurent tout au long du siècle associatif,
08:32 qui est le XXe siècle.
08:33 On ne s'étondra pas, donc, de trouver des informations
08:36 substantielles dans d'autres fonds.
08:38 J'évoque les fonds de personnalité,
08:41 sur lesquels je ne m'étendrai pas.
08:43 Il faut souligner qu'on en conserve assez peu
08:46 aux archives nationales sur ces questions-là.
08:49 Probablement, c'est une piste à explorer,
08:52 car la plupart des carrières politiques
08:55 centrées autour de ces questions
08:57 ne sont pas encore arrivées à leur terme.
09:00 Et je tiens simplement à souligner
09:03 que les archives ici, des fonds de Serge Antoine
09:05 et de Patrick Legrand, sont entrées aux archives nationales
09:08 dans les mêmes temporalités
09:09 que les fonds précédemment évoqués.
09:11 J'ai choisi, en outre, de mettre en lumière
09:15 une poignée de fonds d'association
09:16 qui relèvent d'une approche, que je dis ici, indirecte.
09:19 J'évoquerai au cours de ma présentation
09:22 toute une autre série de fonds
09:24 qu'on pourrait mobiliser pour écrire cette histoire.
09:27 Mais ici, le caractère pionnier du Touring Club de France
09:31 de la Société pour la protection des paysages
09:34 et de l'esthétique de la France,
09:36 entre autres, me semblait important à mettre en avant.
09:39 Et je retiens aussi, et on en parlera,
09:42 un cas comme celui de la FOSSEL,
09:44 l'Association Forée Cellulose,
09:46 dont les archives documentent l'usage productiviste
09:49 des ressources naturelles.
09:50 Les usages de la nature étant un enjeu de conflit,
09:56 de tels fonds peuvent permettre de faire une histoire,
09:59 alors pas forcément à parts égales,
10:01 ce n'est pas la question,
10:02 mais qui considèrent vraiment les points de vue
10:05 des acteurs de la protection de la nature
10:07 et des acteurs, même s'ils ne le diraient pas comme ça,
10:10 de la dégradation de la nature.
10:11 Les deux derniers fonds donnent un aperçu de deux dimensions
10:15 sur lesquelles la question environnementale intervient,
10:20 l'aménagement du parc et l'éducation.
10:23 Contrairement au premier ensemble présenté,
10:27 seule une fraction de ces fonds est relative à la nature,
10:32 et en donnant un métrage linéaire, même estimatif,
10:35 n'aurait pas d'intérêt.
10:37 Il faut vraiment plonger dans les fonds
10:38 pour essayer de repérer un archipel d'éléments
10:41 qui portent sur ces questions-là.
10:43 Mais ces acteurs,
10:46 comme le plan de mon intervention
10:48 entend en rendre compte,
10:50 sont centraux dans un premier temps
10:51 pour constituer comme question cohérente
10:54 la protection de la nature et de l'environnement,
10:57 en même temps que leurs activités, pour certains,
11:00 participent à vulnérabiliser les milieux.
11:04 Alors que la question se structure
11:06 et qu'un mouvement associatif s'organise,
11:09 ils ne font pas non plus oublier ces acteurs périphériques.
11:11 On y reviendra quand on traitera des fonds
11:14 de la seconde partie du XXe siècle.
11:16 Enfin, je terminerai en évoquant les pistes actuelles
11:19 pour l'enregistrement des fonds.
11:25 Donc, entre le XIXe siècle et le XXe siècle,
11:28 plusieurs groupes participent à la construction
11:31 d'une approche de la nature sous l'angle de la protection,
11:34 l'intensification des activités,
11:36 mettant davantage en évidence
11:38 les plus ou moins potentiels de certaines ressources.
11:41 C'est un mouvement contemporain.
11:44 On pourrait interroger les fonds à ce sujet,
11:46 mais ça a déjà été évoqué,
11:48 de l'invention du patrimoine et des paysages.
11:51 On verra que l'œil touristique
11:53 a tout particulièrement son rôle à jouer dans cette affaire,
11:56 notamment car les pratiques touristiques
11:58 et les mobilités qui les supportent
11:59 dilatent l'espace par le biais du train d'abord,
12:02 puis de la voiture,
12:03 avec le paradoxe qu'elle participe à sensibiliser à la nature,
12:07 en même temps que, de fait,
12:09 elle vulnérabilise l'espace des espèces.
12:12 La protection de la nature s'envisage
12:14 de différents points de vue.
12:15 D'abord, et les ouvrages et les travaux de Rémy Loulian
12:19 l'ont montré, au sein de sociétés savantes,
12:22 dont la Société Zoologique d'Acclimentation,
12:25 qui poursuivent le recensement des espèces
12:27 et commencent à comprendre, ou continuent à comprendre,
12:30 que les activités humaines menacent l'habitat de certaines d'entre elles.
12:35 La nature, le terme d'environnement lui,
12:37 apparaît beaucoup plus tard,
12:38 fait d'abord l'objet de discours savants.
12:41 Une partie des archives de la SNP en témoigne.
12:43 On voit ici, je vous ai représenté,
12:45 une lettre du ministre de l'Instruction publique,
12:48 datée de 1855,
12:50 au sujet de la reconnaissance d'utilité publique
12:52 des activités de la Société impériale d'Acclimentation.
12:57 Le fonds de la SNP permet d'approcher
13:00 que timidement les activités des premières décennies
13:03 jusqu'au fameux congrès de 1923,
13:05 mais ce n'est pas, malheureusement, la partie la plus fournie.
13:09 D'autres acteurs, en revanche, permettent de voir
13:12 comment cette question se met en place
13:14 autour d'enjeux locaux ou professionnels,
13:17 avant de se constituer en questions systémiques.
13:21 Les discours tournent alors beaucoup
13:24 autour de l'opposition
13:26 entre nature d'une part et dénaturée de l'autre.
13:29 Croiser l'analyse de l'ensemble des fonds
13:32 d'un point de vue lexical serait d'ailleurs
13:34 certainement très intéressant pour comprendre
13:36 comment le problème environnemental
13:38 a été défini et construit.
13:39 On peut, à ce titre, mobiliser les archives
13:44 du Touring Club de France,
13:46 dont les fonds sont extrêmement riches.
13:49 Le Touring Club a notamment beaucoup œuvré
13:51 directement à la question de la protection de la nature.
13:54 Ce n'est pas un acteur si périphérique
13:56 qu'on pourrait le penser.
13:58 Et il a contribué notamment directement
14:01 à la fondation de l'Association des parcs nationaux,
14:04 à l'occasion de la création, en 1913,
14:07 de ce qui deviendra plus tard le Parc national des écrins.
14:10 Les archives du Touring Club de France,
14:14 actuellement aux archives nationales,
14:15 en plusieurs entrées,
14:17 représentent 137 mètres linéaires,
14:19 qui rendent compte de bien des aspects,
14:22 en particulier l'entreprise de la description
14:27 du patrimoine naturel à protéger
14:30 à travers, par exemple, l'ensemble des planches et croquis
14:34 ayant servi à établir les tables d'orientation.
14:37 Vous avez l'exemple ici du pic du Canigou.
14:41 Il faut se représenter que c'est un dessin à l'aquarelle
14:45 qui fait plus d'un mètre de diamètre,
14:47 ayant servi à l'établissement des tables d'orientation.
14:53 Je reviens aussi sur le document
14:55 qui a servi de visuel pour le programme
14:57 et qui est joint à une lettre expliquant
15:00 comment l'aménagement touristique des plages de Saint-Lunaire,
15:03 près de Saint-Malo, dénature les lieux.
15:05 Là, on a un point de vue d'un acteur très particulier,
15:08 d'un particulier, en 1930,
15:11 qui expose des arguments qu'on pourrait retrouver
15:14 quasiment tels quels aujourd'hui également.
15:16 Ces dossiers constituent sur toute une variété de sujets,
15:20 rendent compte à la fois de conceptions plurielles de la nature
15:23 et d'une lame de fond qui est la définition
15:26 toujours plus robuste d'un patrimoine à protéger.
15:30 Patrimoine à protéger, comme le défend la Société
15:33 pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France,
15:36 fondée en 1901, dont on conserve également les fonds,
15:39 et qui fait partie des acteurs organisants en 1902
15:43 et en 1923, le 1er congrès international
15:46 de protection de la nature, dont il a été question précédemment.
15:49 La SPPEF intègre de fait, à ses préoccupations,
15:54 la question de la nature.
15:56 Lors d'un précédent colloque sur la mémoire des associations
15:58 de la protection de la nature,
16:00 dont on a les actes ici,
16:03 et dont on conserve les captations vidéo
16:05 dans le fond des archives de l'Association pour l'histoire
16:08 et la protection de la nature et de l'environnement,
16:12 une de mes collègues reprenait un bulletin de la SPPEF de 1902
16:18 exposant le problème, je cite, "des forêts dénaturées
16:22 "par le passage des voies de chemin de fer".
16:24 Donc on a vraiment cette question de dénaturer
16:27 qui revient assez souvent dans les fonds à cette période,
16:31 associée à l'idée que ce qu'il faut préserver,
16:35 c'est une nature dans sa dimension peut-être plus rurale.
16:40 Ce qui me fait penser à l'opposition
16:43 qui a été formulée lors de la première intervention
16:46 entre une nature remarquable et une nature ordinaire.
16:48 Je pense que les fonds de la SPPEF
16:51 peuvent tout à fait permettre d'alimenter cette analyse.
16:54 Dans le même esprit, d'autres fonds,
16:57 sur lesquels je reviens rapidement,
17:00 on aurait tout à fait pu s'interroger sur les liens
17:05 entre scoutisme et protection de la nature et de l'environnement.
17:08 Malheureusement, je crains que le fonds de la Fédération française
17:12 des éclaireuses qu'on conserve soit trop mince.
17:16 Là, il s'agit de 1,3 mètre linéaire pour 8 articles.
17:21 Il est peu de chance qu'il y ait des choses substantielles là-dessus,
17:24 mais la question peut se poser.
17:27 En revanche, pour le fonds du mouvement rural
17:29 de jeunesse chrétienne,
17:31 qui fait de mémoire plus de 200 mètres linéaires,
17:35 il est quasiment certain qu'on trouverait des éléments
17:37 sur ces questions, quoique ponctuels et plus tardifs.
17:41 Le dernier élément que je voulais évoquer,
17:44 c'est le point de vue professionnel,
17:46 car il n'est pas toujours bien documenté dans nos fonds.
17:50 Et pour une raison très précise, en fait.
17:52 Les associations professionnelles
17:55 qui avaient donné ou déposé leurs fonds aux archives nationales
17:58 les ont pour la plupart transférés
18:00 au Centre des archives nationales du monde du travail,
18:03 à Roubaix, lors de son ouverture,
18:04 dans la foulée de son ouverture en 1992.
18:07 Donc on n'en a pas gardé énormément,
18:09 des associations professionnelles,
18:12 mais on en a conservé toutefois.
18:14 Et j'ai trouvé des éléments intéressants
18:17 dans les fonds qui sont restés à Pierrefitte,
18:19 à l'exemple de ce bulletin de la Fédération française
18:21 des syndicats professionnels de marins,
18:24 qui ici date de 1937,
18:27 et qui s'interroge explicitement
18:28 sur l'état de la ressource haléotique
18:30 et sur la façon de gérer la durabilité.
18:32 Alors j'y reviendrai,
18:34 protection de la nature et environnement et durabilité,
18:36 ce n'est pas tout à fait la même chose,
18:38 mais ce sont des débats
18:39 qui sont connectés par bien des aspects.
18:41 Donc point de vue intéressant,
18:44 parce qu'on voit que les acteurs du monde professionnel
18:47 introduisent souvent d'autres conceptions et d'autres logiques
18:50 dans un champ qui est déjà relativement conflictuel
18:53 et dont les intérêts divergent et sont parfois contradictoires.
18:58 L'ensemble de ces acteurs, on le voit,
19:00 à travers l'analyse de ces fonds,
19:02 constitue progressivement un réseau informel.
19:05 C'est-à-dire que ce sont des associations
19:08 qui sont en relation les unes avec les autres
19:11 et pour lesquelles il arrive que...
19:14 C'est une histoire qui reste à écrire.
19:18 Notamment, Rémi Louvillia a parlé d'une analyse de réseau.
19:21 En fait, il faudrait voir les cas d'appartenance multiple
19:26 de certains membres d'associations
19:29 entre les unes et les autres,
19:30 la SPPEF, le Touring Club de France,
19:35 la SNPN, la Société d'Acclimatation,
19:38 et voir comment ces réseaux et ces appartenances multiples
19:42 permettent ou non de diffuser un certain nombre d'idées,
19:44 de pratiques et de structurer le champ.
19:49 Donc un réseau informel qui fait émerger...
19:52 On l'a vu en 1923,
19:54 et même avant, c'était déjà très clair.
19:56 La question de la nature a déjà émergé.
19:58 C'est un sujet à part entière.
20:00 Mais ça doit devenir un champ bien établi
20:05 au niveau sociétal
20:09 et au niveau de l'opinion publique de plus en plus.
20:12 Donc dans le temps, ce structure,
20:18 un champ de la protection de la nature et de l'environnement,
20:21 presque au sens bourdieusien,
20:22 avec ses acteurs, ses codes, ses pratiques,
20:26 ses rapports de force,
20:28 un certain nombre de conflits, probablement.
20:30 Et c'est là que les fonds des archives nationales
20:33 permettent d'étudier de près la Constitution
20:36 entre les années 60 et 70,
20:39 de ce champ,
20:41 à travers l'étude d'un enjeu militant
20:44 et d'un enjeu scientifique
20:46 qui aboutit, ou en tout cas qui accompagne,
20:49 la définition d'une nouvelle catégorie d'action publique.
20:53 C'est-à-dire que l'État saisit bien la question de la nature
20:57 précédemment par différentes voies,
21:02 sans toutefois qu'elle soit jusque-là synthétisée
21:05 au sein d'un portefeuille ministériel,
21:07 ce qui est le cas à partir de 1971.
21:09 Ce qui ne veut pas dire que les autres portefeuilles ministériels
21:11 se désintéressent complètement de la question à la suite.
21:14 Donc les fonds montrent bien comment les associations
21:17 forment un réseau, je l'ai déjà dit,
21:21 d'interactions quotidiennes dans leur fonctionnement.
21:24 A l'échelon national, on repère bien,
21:28 et cela se replète dans les fonds,
21:30 un mouvement de création d'associations
21:31 ayant pour seul objet la protection de la nature
21:34 ou d'une partie de la nature.
21:38 L'engagement des personnes au sein des organisations
21:41 se fait militant au sens où il engage un rapport de force
21:45 plus ou moins conflictuel avec les pouvoirs publics
21:49 pour obtenir des mesures protectrices
21:51 quand les associations ne sont pas directement elles-mêmes
21:54 à la manœuvre en matière de protection
21:56 et de gestion de certains espaces.
21:59 Petite remarque, cette présentation,
22:01 elle est rapide, mais nécessairement
22:02 sur le même plan des évolutions
22:03 qui se font selon des temporalités propres et variables.
22:07 Ici, on écrase un peu le tout,
22:10 mais c'est aussi une question qu'on pourrait étudier
22:13 attentivement en mobilisant la complémentarité
22:15 entre les fonds publics et privés
22:17 qu'on conserve aux archives nationales
22:19 et qu'on pourrait mettre en avant
22:22 pour identifier d'autres fonds à collecter.
22:26 Dans les années 1960,
22:27 alors que le terme d'environnement
22:29 est progressivement importé de l'anglais,
22:31 une série d'associations voit le jour
22:33 qui prend pour objet la protection de la nature.
22:35 On a vu qu'il existait déjà des associations,
22:38 ce n'est pas la question.
22:39 La Ligue de protection des oiseaux, c'est 1912.
22:42 L'Union internationale pour la conservation de la nature
22:45 est déjà créée bien avant,
22:47 juste à la sortie de la Seconde Guerre mondiale,
22:50 mais pour autant, les fonds des archives nationales
22:53 en la matière montrent bien la structuration d'un mouvement
22:56 avec l'Association pour les espaces naturels en 1964,
23:00 France Nature Environnement en 1968,
23:03 Les journalistes écrivains pour la nature et l'écologie en 1969,
23:06 Les Amis de la Terre en 1970,
23:08 WWF France en 1973.
23:11 Vraiment, cette concentration n'a probablement rien d'un hasard.
23:18 L'Association pour les espaces naturels
23:21 est le résultat de travaux
23:22 qui sont d'abord menés par le groupe d'études
23:24 et réalisations en montagne,
23:26 qui s'est déconstitué dans le cadre de la réponse
23:29 à un concours d'architecture
23:31 pour l'aménagement de deux stations de sport d'hiver
23:34 dans les Alpes.
23:36 Ce groupe avait mis en avant dans son projet
23:39 des enjeux économiques et sociaux
23:41 liés aux questions environnementales,
23:43 qui étaient visiblement peu en phase
23:45 avec l'objectif principal de la vallée
23:48 qui avait lancé le concours,
23:50 celui de la rentabilité.
23:52 À partir de là, les architectes et urbanistes
23:55 derrière le projet se sont intéressés à cette question.
23:58 Ce fonds est intéressant
24:00 parce que cette association a une certaine proximité
24:03 avec les pouvoirs publics.
24:04 On peut étudier à travers le fonds
24:07 comment s'établit ce dialogue.
24:09 Il faut noter que l'association,
24:11 dans la suite de sa carrière,
24:18 après les années 70,
24:19 va être présidée par des anciens ministres,
24:21 notamment Eugène Claudius Petit,
24:24 ancien ministre de l'Urbanisme,
24:27 et Hugues de Bouchardot,
24:29 ancien ministre de l'Environnement.
24:32 Ce fonds est intéressant
24:35 parce qu'il réunit des photographies
24:38 qu'on ne trouve pas forcément beaucoup dans les autres
24:40 et qu'il rend compte des activités de rédaction
24:43 et de publication d'une revue, Aménagement et nature,
24:46 qui documente l'action d'enquête publique
24:50 qui se met en place alors
24:52 et propose aussi une base de documentation
24:55 assez importante,
24:56 qui peut être tout à fait utile et intéressante.
24:59 On observe également la création d'associations
25:05 d'envergures nationales qui interagissent,
25:09 qui se focalisent sur la nature et l'environnement
25:11 et qui, dans le même temps, se spécialisent.
25:13 Cette spécialisation peut être territoriale,
25:16 donc là, je cite l'exemple de la SNPN,
25:19 qui a évidemment une vocation nationale,
25:21 mais qui récupère aussi la gestion directe
25:25 en délégation de services publics d'espaces protégés,
25:27 comme le parc naturel régional de Camargue.
25:30 Cette spécialisation peut être aussi thématique.
25:33 On a des associations qui interviennent
25:35 sur des périmètres comme l'eau, l'espèce, les énergies,
25:38 en la matière, la question du nucléaire.
25:41 En pratique, ce sont les archives
25:44 qui permettent de lire plus que les intituler
25:47 les véritables champs d'intervention des associations
25:50 au-delà d'une sensibilisation générale à ces questions.
25:54 Par exemple, on voit dans les archives
25:56 de l'Association pour les espaces naturels
25:58 que j'évoquais précédemment,
26:00 comment cette dernière intervient dans le champ de l'urbanisme,
26:03 de l'aménagement du territoire,
26:05 et participe à définir une question environnementale
26:08 qui ne se définit plus à la nature rurale,
26:11 mais qui intègre les espaces urbains
26:13 comme une partie fondamentale
26:15 du système d'interaction humain-nature.
26:18 La multiplication et la spécialisation croissante
26:22 des associations, peut-être ce qui reste à tester,
26:24 est un signe de la structuration du champ.
26:28 Elle entraîne également une multiplication
26:30 des conflits d'usages et des interactions
26:32 avec les différents acteurs de la société,
26:35 ce qu'on voit bien avec les affiches
26:38 nombreuses et assez intéressantes
26:40 de l'Association des Amis de la Terre,
26:43 qui interpelle directement le citoyen.
26:45 L'écologie devient l'affaire de tous,
26:48 tout au moins un sujet d'opinion publique,
26:52 et ça, de plus en plus.
26:54 Dans le même temps, l'État prend la mesure
26:59 de plus en plus des enjeux
27:01 et réunit toutes les questions fragmentées auparavant,
27:03 je l'ai déjà dit, dans un seul portefeuille,
27:06 ce qui consacre à peu près la délimitation
27:08 d'un champ autonome.
27:12 Et on remarque aussi que,
27:14 mais ça, ça reste à documenter
27:15 dans les fonds des archives nationales,
27:17 par une politique de collecte, j'y reviendrai,
27:20 que certains militants engagent des carrières politiques
27:25 qui essaient d'articuler l'action des associations et de l'État.
27:30 Et par ailleurs, dans certains des fonds
27:32 de personnalités politiques de la Vème République,
27:35 on trouve aussi les signes de ces évolutions.
27:37 J'ai pu repérer quelques éléments
27:38 dans les archives d'André Hollaud,
27:42 sous série 548 AP,
27:44 ou dans celle d'Alain Perfit, 718 AP.
27:48 Donc la protection de la nature et de l'environnement,
27:51 une sorte de compétence publique.
27:53 Ici, je renvoie une énième fois au fonds public.
27:56 Mais je pense qu'explorer les fonds privés
28:00 permet de voir comment la création du ministère
28:03 a été reçue par les acteurs implantés
28:06 dans la protection de la nature et de l'environnement,
28:08 et comment ceux-ci sont arrivés ou non
28:11 à informer la délimitation du périmètre d'action publique.
28:14 La constitution d'un champ autonome
28:19 de protection de la nature et de l'environnement
28:22 ne veut pas dire que tous les acteurs qui y interviennent
28:25 sont favorables à cette protection.
28:27 En fait, au-delà des associations labellisées
28:30 "protection de la nature et de l'environnement",
28:32 qui font une sorte d'OPA sur cette étiquette,
28:35 comme au début du siècle,
28:37 toute une nébuleuse d'acteurs continue
28:40 à intervenir dans ce domaine avec des intérêts très variés.
28:44 En dehors des associations de protection de la nature,
28:47 on a d'autres acteurs qui interviennent dans le champ
28:49 et qui défendent leurs propres intérêts,
28:52 parfois en contradiction avec la protection de la nature.
28:55 J'ai évoqué précédemment la SPPF
28:58 qui se mobilisait pour la protection de la nature.
29:01 La SPPF, son premier objet, ça reste "cité monument",
29:07 comme le nom de l'association aujourd'hui en témoigne.
29:11 Et on voit par exemple dans son fond, ici,
29:13 qu'elle va se mobiliser contre des projets d'aménagement
29:16 du site du pont Dugard dans les années 1990,
29:20 si je ne me trompe pas.
29:21 Et dans cette affaire,
29:23 la SPPF défend l'esthétique du site et refuse l'aménagement.
29:28 Donc les aménagements prévus qui existent aujourd'hui,
29:31 c'était la création d'un parking, d'un musée,
29:34 d'un espace de restauration,
29:37 sans mobiliser d'arguments relatifs à la nature.
29:39 Pourquoi la SPPF ne mobilise pas d'arguments relatifs à la nature ?
29:42 Parce que cet argument est déjà capté par l'autre acteur,
29:46 le Conseil général du Gard,
29:47 qui en a fait une sorte d'argument marketing.
29:50 Dans ce dossier, c'est tout à fait intéressant
29:51 de voir comment c'est vraiment mis en avant.
29:54 Le Conseil général du Gard fait de la protection de la nature,
29:59 et on le voit, projet de protection du site historique
30:02 et écologique du pont Dugard.
30:05 C'est un de ses premiers arguments,
30:07 sans qu'on se prononce vraiment sur qui a raison sur le fond.
30:13 Mais ce qu'on peut voir là-dedans,
30:15 c'est que dans de nombreux cas, la nature devient un paramètre,
30:20 un argument dans des conflits d'usage,
30:23 et que le fait que ça devienne un sujet de société
30:27 permet de l'en faire aussi un objet de communication
30:31 et de marketing.
30:34 C'est un objet de friction sur des sujets très précis,
30:38 à rebours de ce que tout le réseau de protection de la nature
30:41 et de l'environnement essaie d'imposer,
30:42 l'idée de la conception d'un système et d'un écosystème.
30:46 C'est-à-dire que tous les sujets sont liés entre eux.
30:49 Voilà.
30:51 Donc...
30:54 D'autres acteurs qui interviennent directement sur le champ
31:00 sont ceux qui, je l'ai déjà dit,
31:02 défendent leur droit à dégrader la nature et l'environnement.
31:05 Forcément, c'est pas expliqué comme ça,
31:07 mais c'est quand même très clair.
31:10 Et on retrouve dans certains fonds des archives nationales
31:16 issues de quelques associations professionnelles
31:19 qui ont, je l'ai déjà dit, laissé leurs archives sur le site,
31:24 d'abord de Fontainebleau, puis de Pierre Fitzsürsen.
31:27 Et c'est le cas du groupement de l'industrie métallurgique
31:30 de la région parisienne,
31:32 de l'Union générale des syndicats de la brasserie française,
31:35 de la chambre syndicale de la cédulogie française,
31:37 du groupement de l'industrie cérébralgique,
31:40 qui tous, en fait, permettent de voir
31:41 comment ces questions sont pensées ou non
31:45 dans le développement des activités industrielles.
31:48 Et comment...
31:49 Je pense que les fonds sont un peu trop anciens
31:51 pour le documenter,
31:53 mais comment, éventuellement, on compose avec ces impératifs,
31:58 quitte à en faire, comme je l'ai déjà dit,
32:00 des objets de communication.
32:03 Je mentionne également le fonds de l'association Forêt Cellulose,
32:07 en disant qu'à mon grand regret,
32:09 il n'est malheureusement pas classé à ce jour,
32:12 mais il serait tout à fait intéressant, à mon avis,
32:14 déjà de le classer et ensuite qu'il soit étudié,
32:18 parce que l'association Forêt Cellulose,
32:20 donc elle est intimement liée à l'industrie papetière,
32:24 à sa création, en fait, elle regroupe 14 sociétés
32:26 qui mettent en commun leurs activités
32:29 un peu recherche et développement,
32:32 recherche appliquée et études,
32:33 dans le but de maintenir une compétitivité durable
32:39 de la filière forêt/bois/papier.
32:41 Compétitivité et durable,
32:43 on pourrait étudier de près la façon
32:45 dont les conséquences environnementales
32:48 de ces activités sont ou non prises en compte.
32:53 La recherche de performance et de productivité
32:55 dans l'exploration silicole intensive
32:58 entre sans doute quelque peu en contradiction
33:00 avec les impératifs de la protection de la nature
33:02 et de l'environnement,
33:04 même si ce qu'on voit, c'est que le monde professionnel
33:06 a quand même une conscience de la nécessité
33:08 de la gestion de la ressource,
33:11 ce qui, je l'ai déjà dit, est loin d'être équivalent.
33:13 Ce qu'on voit dans le temps aussi,
33:18 c'est que davantage d'acteurs
33:20 sont sensibilisés à la question environnementale.
33:23 Et ça, c'est manifeste dans le fond
33:27 de la Fédération unie des auberges de jeunesse,
33:30 dans lequel le sujet environnement apparaît comme tel,
33:34 mais uniquement dans les années 2000.
33:36 Je me suis posé la question
33:37 quand j'ai vu la Fédération unie des auberges de jeunesse,
33:40 une logique qu'on pourrait penser
33:42 qui se positionne un peu sur les mêmes questions
33:45 que le Touring Club de France.
33:46 Je ne suis pas du tout en train de dire
33:47 que c'est les mêmes organisations,
33:49 mais je me suis demandé
33:50 si on ne pouvait pas trouver les mêmes logiques,
33:51 et j'ai été surpris de voir que la question
33:53 n'apparaît que dans les années 2000.
33:55 Et on voit que ça apparaît que quand c'est vraiment
33:59 un sujet public constitué,
34:01 et toutes les actions qu'ils proposent
34:05 répondent en fait à la logique des petits gestes.
34:08 C'est-à-dire qu'on met en place...
34:11 Alors, les documents ne permettent pas forcément
34:14 de bien le voir,
34:16 mais on met en place
34:18 une signalétique environnementale.
34:21 C'est comme ça que c'est appelé dans les auberges de jeunesse.
34:23 Alors, ce sont des auberges de jeunesse qui sont volontaires,
34:26 mais c'est-à-dire des petits cartels
34:31 qui signalent les bons gestes et les bonnes pratiques
34:34 en matière écologique, de recyclage des déchets,
34:37 d'économie de sous la douche, des choses comme ça.
34:40 C'est assez symptomatique.
34:43 Et l'environnement est une partie du plan de formation AJ2000,
34:48 auberge de jeunesse année 2000.
34:51 Voilà. Ce qu'on voit aussi dans ces documents,
34:54 c'est qu'ils témoignent que, dans ce cas,
34:57 et probablement dans les imaginaires aussi,
34:59 la protection de la nature et de l'environnement
35:00 est quand même assez liée à la ruralité,
35:04 aux espaces dits naturels, à des sites à préserver.
35:08 On le voit dans la liste
35:10 des auberges de jeunesse certifiées Labelle-Vert.
35:15 On a quand même essentiellement, voire exclusivement,
35:20 des auberges de jeunesse qui sont associées
35:22 à des lieux touristiques dont ils exploitent
35:25 l'image site naturel.
35:27 Et on ne voit pas apparaître
35:31 des auberges de jeunesse situées
35:33 dans des agglomérations importantes.
35:38 Voilà. Je souligne toutefois
35:41 que même pour le cas des auberges de jeunesse,
35:43 la thématique se développe en lien avec les acteurs publics,
35:47 dont les ministères et les acteurs privés.
35:51 Par exemple, la mobilisation,
35:55 pour l'occasion, par la Fédération unie des auberges de jeunesse,
35:59 d'un consultant en tourisme vert.
36:01 C'est vraiment écrit comme ça.
36:04 Des acteurs aussi internationaux
36:08 qui concourent à une offre de formation sur la question.
36:11 Je m'interrogeais aussi enfin sur la façon
36:16 dont ce dernier exemple témoigne d'une certaine professionnalisation
36:19 de la protection de la nature et de l'environnement
36:22 et de la requalification de certaines activités
36:27 sous cette enseigne parfois commode en termes de communication.
36:31 Pour terminer cette présentation,
36:34 il me semblait pertinent d'évoquer les dossiers en cours.
36:36 La vocation de cette demi-journée
36:39 est de présenter les archives et les travaux
36:40 qui sont issus de leur exploitation,
36:42 mais aussi les conditions des recherches à venir.
36:45 A ce titre, je me réjouis d'expérer la collecte
36:48 d'un supplément des archives de la SNPN
36:51 qui devrait entrer dès le 9 janvier prochain.
36:54 J'ai cru important de vous présenter au moins brièvement
36:59 les modalités de la collecte d'archives privées.
37:01 On a vu très rapidement des critères préalables
37:04 à l'intégration de fonds d'association
37:06 aux collections patrimoniales de l'État
37:09 au sein des archives nationales,
37:10 l'envergure nationale,
37:12 puisque les fonds d'envergure plus locale
37:16 peuvent être redirigés, on le fait souvent,
37:17 vers les archives départementales.
37:19 Ca a été cité dans le cadre de l'association
37:23 pour l'histoire de la protection de la nature et de l'environnement
37:26 à travers le partenariat avec les archives départementales.
37:29 Lorsqu'une proposition est adressée
37:32 aux départements des archives privées,
37:35 et le travail mené par le département environnement,
37:38 aménagement du territoire, agriculture et par l'APNÉ
37:40 est tout à fait appréciable en la matière,
37:42 surtout qu'aux départements des archives privées,
37:44 on n'a pas une connaissance aussi fine du champ.
37:46 Donc cette proposition a été évaluée
37:48 à la fois sur le plan matériel,
37:50 c'est-à-dire l'état des documents,
37:51 en particulier l'absence d'amiante,
37:53 il faut en avoir conscience,
37:55 évaluée aussi sur le plan intellectuel,
37:57 ça, c'est l'intérêt historique,
37:58 la cohérence avec la stratégie de collecte de l'institution.
38:02 Et on a un comité des entrées qui se réunit trois fois par an
38:06 qui en mesure, seul, d'accepter définitivement une proposition.
38:11 Donc il y a plusieurs possibilités
38:13 pour que les documents entrent dans les collections.
38:15 Le don, le dépôt ou la cession,
38:18 ces trois possibilités permettent à la personne détentrice
38:21 des archives de fixer des conditions
38:23 quant à la communication, la reproduction
38:26 et la réutilisation des archives.
38:28 Je mentionne l'adaptation, j'ai mentionné aussi la cession,
38:31 qui sont quand même à considérer comme des cas marginaux.
38:34 Tout ça pour vous présenter les conditions
38:37 dans lesquelles se fait la collecte
38:42 des archives de France Nature Environnement,
38:44 afin d'introduire le propos qui suivra de Jean-Pierre Graffin.
38:49 Et vous montrer que, concrètement, fixer les conditions,
38:52 ça ressemble à ça.
38:53 On voit deux types de conditions complètement différentes
38:56 de l'un à l'autre.
38:57 Alors peut-être que pour un œil novice,
38:59 ça peut paraître assez similaire,
39:01 mais pour l'archiviste, on voit des possibilités
39:02 complètement différentes.
39:04 Le deuxième don ouvrant la possibilité d'une ouverture
39:07 à terme de l'ensemble du fond
39:08 quand les conditions précisées par le premier
39:12 stipulent que la communication se fait sur autorisation
39:15 ad vitam aeternam,
39:16 ce qui peut nous bloquer pas mal du point de vue juridique.
39:20 Je ne l'ai pas mentionné ici, mais la seconde lettre de don,
39:23 elle ajoute aussi beaucoup d'autres dispositions contractuelles,
39:26 dont l'envoi de statistiques de consultation au producteur,
39:31 l'imposition de faire des éliminations sur autorisation seulement
39:35 de France Nature Environnement,
39:37 la remise aussi, par exemple, d'un exemplaire de l'inventaire.
39:41 Les actualités de la collecte.
39:46 Le principe, je vous rassure,
39:48 le principe de la remise d'archives aux archives nationales
39:51 est assez simple, assez modulable
39:54 à ce que souhaitent faire les associations,
39:57 bien que les opérations prennent souvent un peu de temps,
40:01 mais moins de temps que l'écart entre 1909 et 2023,
40:06 qui a été évoqué par Rémi Louglia,
40:08 en plus sur souvent un ou deux ans
40:10 entre la première proposition et l'entrée effective.
40:15 Les archives de Christian Garnier,
40:17 qui devraient rentrer prochainement,
40:19 ont été évoquées pour la première fois
40:21 devant le comité des entrées le 11 avril 2022.
40:25 Pour la SNPN, dont le supplément doit entrer le 9 janvier 2024,
40:29 cette évocation a été faite le 17 octobre 2022.
40:32 Il y a quand même un certain temps de latence,
40:34 ce qui explique que je n'ai pas présenté certains fonds,
40:37 parce que pour l'actualité de la collecte,
40:41 dans un grand nombre de cas, nous sommes au milieu du guet,
40:44 sans forcément d'informations,
40:45 des blocages qui peuvent venir droite ou à gauche
40:48 de raisons complètement différentes,
40:51 mais le comité des entrées a donné son accord
40:54 pour l'intégration au fonds d'associations
40:57 du Centre international de droit comparé de l'environnement
41:00 et de la Société française pour le droit à l'environnement.
41:03 On a également un accord qui a été donné
41:05 pour les archives de Cyril Le Clem et de Michel Priat.
41:08 J'ajoute également, je n'avais pas pensé à le faire,
41:15 mais l'entrée prochaine du fonds
41:17 de l'association des missions australes et polaires françaises.
41:20 On se retrouve sur un acteur peut-être indirect,
41:23 mais pas si indirect que ça, de la protection de la nature,
41:26 en lien avec Savants et naturalistes,
41:29 et toutes ces choses-là.
41:30 C'est un fonds qui pourrait être très intéressant
41:32 sur ces questions-là,
41:34 dont une partie est conservée au Muséum d'histoire naturelle
41:38 et qui devrait rejoindre, même cette partie,
41:40 les fonds des archives nationales.
41:42 Les sujets sur lesquels on a attente,
41:47 très rapidement, les archives des verts
41:49 sur lesquels on a été sollicitées,
41:51 qui étaient conservées à Grignon,
41:53 sur le site d'Agro-ParisTech,
41:55 et sur lesquels on a pas mal de difficultés
41:57 sur le plan juridique pour obtenir...
42:02 Comment dire ?
42:03 La certitude qu'on est bien en possibilité de les collecter.
42:06 Et un certain nombre de fonds liés et conservés au même endroit
42:13 sur des fonds de personnalité.
42:15 Ce calendrier chargé,
42:17 c'est un signe de la vitalité de la thématique
42:19 et de l'intérêt que prend l'histoire
42:21 de la protection de la nature et de l'environnement.
42:24 Cette actualité couplée à la présentation des fonds
42:30 me permet de suggérer quelques lacunes
42:32 qui sont d'autant de pistes
42:34 que la collecte à venir pourrait suivre.
42:36 Il y a bien entendu ce qui concerne les personnalités,
42:40 qui sont trop renombreuses dans le domaine
42:41 à avoir confié leurs archives.
42:43 Les fonds rendant compte d'engagement proprement politique
42:49 manquent,
42:50 mais ça pourrait être en partie résolu
42:52 par le don ou le dépôt des archives du parti, les verts.
42:58 Manquent également, à ma connaissance,
43:01 aux archives nationales,
43:02 tout ce qui est volet judiciaire
43:04 de la protection de l'environnement.
43:07 Je cite ici, par exemple,
43:08 la conservation aux archives départementales
43:12 des codes d'armore du dossier du cabinet Hugues Lollepage
43:17 concernant l'affaire de la Moko Kaddis.
43:19 Ce sont des choses qui se font.
43:20 On n'a pas l'équivalent aux archives nationales.
43:22 Ce n'est pas un volet qui a été développé,
43:24 mais ce serait possible et envisageable.
43:26 On a des réflexions en cours sur les modalités d'archivage
43:30 des archives d'avocats qui pourraient le permettre.
43:33 Il y a aussi des associations majeures,
43:39 dont je cite quelques cas ici,
43:40 dont les archives ne sont pas conservées aux archives nationales
43:43 et qu'on pourrait tout à fait envisager de conserver avec plaisir,
43:47 et qu'on peut croiser aussi avec des thématiques peu documentées
43:51 sur la question des animaux, de la biodiversité des océans, etc.
43:55 Le fait que la Société nationale de protection de la nature
43:59 nous confie prochainement un supplément rappelle une chose,
44:03 c'est qu'une association qui a un fonds aux archives nationales
44:07 mais qui reste active,
44:09 ça ne signifie pas que toutes les archives
44:10 sont aux archives nationales.
44:12 Et pour la très grande majorité des cas que j'ai présentés,
44:16 on a des archives jusqu'au moment des dons.
44:19 On a vu que la moitié se faisait à peu près dans les années 2000.
44:23 Il est probablement envisageable et pertinent
44:25 de collecter des suppléments pour compléter les fonds.
44:28 Dernier point sur cette question,
44:36 parce que la question de l'éducation à l'environnement
44:39 pourrait apparaître aussi comme une des lacunes et comme un des manques.
44:43 Je signale simplement que le PAGEP,
44:46 qui est le pôle de conservation des archives
44:48 des associations de jeunesse et d'éducation populaire,
44:52 qui organise en cheville avec les archives nationales
44:54 et les archives départementales de Val-de-Marne,
44:57 qui est un peu l'apnée de l'éducation populaire,
45:01 a intégré récemment à sa politique de collecte
45:05 la question de l'environnement
45:07 et multiplié les activités à ce sujet,
45:11 avec notamment l'organisation d'un colloque,
45:13 des publications,
45:15 de collecte à la clé
45:18 et un travail sur un manuel pédagogique de synthèse
45:21 sur l'histoire de l'environnement,
45:22 qui devrait paraître à l'automne 2024
45:24 à la Documentation française.
45:26 Deux petits fonds ont collecté par le PAGEP,
45:31 par l'intermédiaire du PAGEP,
45:32 qui sont conservés aux archives nationales.
45:35 Un fonds de 7 articles
45:37 qui est vraiment assez réduit du réseau des écoles de citoyens,
45:40 qui a été créé à la suite
45:41 du Forum Sans Sol Mondial de Porto Alegre
45:44 et qui intègre la dimension environnementale.
45:48 Et le Fonds de l'Union nationale
45:51 des centres permanents d'initiative pour l'environnement,
45:54 qui est le résultat à peu près d'une initiative étatique
45:57 et qui organise notamment, comme on le voit ici,
45:59 des classes vertes
46:01 à destination des populations scolaires
46:03 la plupart du temps, je vous rassure.
46:05 Je termine rapidement
46:09 en abordant la question de l'archivage électronique,
46:12 puisque nous avons eu la chance de recevoir
46:14 en don les archives de l'Association
46:17 pour l'histoire de la protection naturelle de l'environnement
46:19 depuis sa création et même un peu avant sa création,
46:21 donc les travaux préalables à sa création, en 2009.
46:24 L'archivage des données n'est pas une question de l'œuvre.
46:27 Aux archives nationales,
46:28 on a conservé des archives électroniques
46:30 dès la fin des années 70
46:32 par l'intermédiaire du projet Constance,
46:35 mais qui était restreint, si je puis dire,
46:38 aux seules bases de données de l'INSEE et de l'INED.
46:40 Et c'est au moment de la refonte de l'institution
46:43 autour du projet Pierre-Philippe
46:44 qu'a été pensé un projet d'archivage électronique d'envergure.
46:48 Je crois que c'est une des dimensions
46:50 qui a toute sa place dans la politique de collecte actuelle,
46:55 et les associations n'ont pas forcément connaissance
47:01 qu'aujourd'hui les archives nationales
47:02 sont capables de faire ça.
47:06 C'est des projets qui ont été lourds,
47:08 car garantir la pérennisation et la conservation
47:11 des archives électroniques, ce n'est pas une mince affaire.
47:14 Qu'il s'agisse d'authenticité, d'intégrité, de souveraineté,
47:17 il y avait beaucoup de choses à construire,
47:19 mais des outils spécifiques ont été mis au point
47:22 permettant de constituer des paquets de données
47:25 et de métadonnées archivables.
47:27 Je passe sur les détails.
47:29 Ou de visualiser, par exemple,
47:30 les arborescences de manière simple.
47:32 C'est le cas ici.
47:33 On voit toute l'arborescence des documents de l'APNÉ
47:39 et le volume que ça représente par rapport à l'ensemble.
47:42 On voit que la très grande majorité du fonds en matière de volume
47:45 est occupée par les quatre vidéos
47:48 de la captation du colloque aux archives nationales en 2020.
47:52 Ça ne veut pas dire que le reste n'est pas intéressant,
47:54 même si ça représente un plus petit volume.
47:57 Mais voilà, c'est des choses qu'on sait faire.
48:01 Et la construction est toujours en cours.
48:03 C'est normal que les associations ne soient pas toujours au courant
48:06 que les archives nationales aux archives privées
48:10 sont capables de prendre en charge des archives électroniques
48:12 parce que la première entrée pour le département des archives privées
48:15 s'est faite seulement en 2022
48:17 avec les archives de la commission indépendante
48:20 sur les abus sexuels dans l'Église.
48:22 En 2023, l'APNÉ nous donne ces archives
48:28 qui documentent la création, le fonctionnement
48:31 et les activités de l'association.
48:33 Et donc, la boucle est bouclée quelque part.
48:39 Je voulais finir en disant que ce fonds me semble précieux
48:42 pour témoigner de la façon dont l'histoire et donc l'archivage
48:47 deviennent une des modalités d'action
48:50 de la protection de la nature et de l'environnement même.
48:53 C'est-à-dire qu'on a vu aujourd'hui que c'est un des leviers
48:57 qui permettait de clarifier la situation,
48:59 de montrer l'antériorité des démarches,
49:03 d'appuyer tous les arguments
49:05 en faveur de la protection de la nature et de l'environnement.
49:08 De les ancrer dans une histoire longue,
49:12 de rompre avec des approches très présenteïstes.
49:16 Et le travail réalisé avec l'APNÉ,
49:19 dont l'atelier d'aujourd'hui,
49:22 étant des symptômes qui manifestent l'intérêt et l'importance
49:27 qu'il y a à maintenir un lien étroit
49:29 avec la communauté universitaire
49:31 pour définir une politique de collecte
49:33 qui soit en phase avec les nouvelles démarches
49:36 et les nouveaux horizons historiographiques.
49:38 Je vous remercie.
49:40 (Applaudissements)
49:43 (...)

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