Il veut augmenter le nombre de trains de 400 à 1000 par jour et développer le fret. L'idée, c'est aussi de rééquilibrer le trafic passager.
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00:00 - Getlink qui englobe à la fois Eurotunnel mais également les filiales Europort pour le fret et Electlink pour le transport d'électricité.
00:07 Bonjour Yann Le Riche. - Bonjour.
00:09 - L'inauguration du tunnel sous la Manche le 6 mai 1994, vous faisiez quoi ce jour-là vous ?
00:13 - Oh là, 6 mai 1994, j'étais étudiant à l'époque et je préparais mes concours.
00:19 Je me souviens en revanche très très bien de cette image de la reine d'Angleterre, Elisabeth II, François Mitterrand qui traverse.
00:25 Je m'en souviens, je pense que beaucoup de Français, beaucoup d'Européens et même beaucoup de gens dans le monde entier s'en souviennent.
00:31 Comme s'en souviennent aussi beaucoup de nos salariés, figurez-vous que sur les 2600 salariés du groupe aujourd'hui,
00:36 400 étaient déjà là à l'époque et ceux-ci devront être très fiers d'avoir pu participer à ce moment unique.
00:41 - On en a déjà entendu certains ce matin, Willy Crocs qui était avec nous à 6h15 et Stéphane Sauvage également.
00:47 Tout à l'heure, 30 ans plus tard, vous êtes donc le directeur général de ce groupe Getlink, 1,8 milliard d'euros de chiffre d'affaires l'an dernier.
00:54 Et en même temps, on se dit que vous pourriez faire mieux parce que quand vous avez présenté les derniers résultats,
00:58 vous avez dit que ce tunnel était sous-utilisé. Qu'est-ce que vous vouliez dire par là ? Qu'on peut aller encore plus loin ?
01:03 - Alors non, ce tunnel n'est pas sous-utilisé. Nous en avons augmenté la capacité.
01:08 Le tunnel, c'est d'abord une formidable réussite. Depuis les 30 dernières années, près d'un demi-milliard de personnes ont traversé la Manche grâce au tunnel.
01:18 Un quart des échanges de marchandises entre la France et la Grande-Bretagne aujourd'hui passent par le tunnel.
01:22 Mais ce tunnel en a encore beaucoup sous le pied parce qu'il est vert, parce que nous l'avons modernisé.
01:27 Et on se rend compte qu'il y a encore beaucoup de potentiel d'augmentation de son trafic.
01:30 - Et il y a ce chiffre, 400 trains par jour, mais on pourrait en faire passer 1000 quasiment. 1000 trains par jour à l'air-tour dans ce tunnel.
01:37 Pourquoi est-ce qu'on n'arrive pas à aller jusque là pour l'instant ?
01:39 - Alors, ce n'est pas qu'on n'arrive pas à aller jusque là. C'est que nous étions limités par son alimentation électrique.
01:44 On ne pouvait pas en faire plus. Et donc, on a décidé très récemment de changer tout son système d'alimentation
01:51 pour justement pouvoir aller jusqu'à 1000 trains par jour.
01:53 Aujourd'hui, on a en moyenne un train toutes les 4 minutes. On veut aller beaucoup plus loin.
01:57 Et le potentiel existe, que ce soit sur la grande vitesse ou sur le fret.
02:00 - Il y a du potentiel, potentiellement jusqu'à 1000 trains par jour, mais si on aurait la demande, est-ce qu'il y aurait les passagers pour ça ?
02:06 - Ah justement, c'est parce que cette demande existe que nous avons décidé d'investir près de 50 millions d'euros
02:11 pour justement pouvoir aller de 400 jusqu'à 1000 trains par jour.
02:15 Un exemple, en termes de grande vitesse, nous savons qu'il y a beaucoup de potentiel, par exemple,
02:21 pour des lignes directes entre Londres et des capitales allemandes ou suisses.
02:25 Francfort, par exemple, Genève, 2 millions de potentiel de voyageurs pour chacun de ces deux pays.
02:33 La Suisse et l'Allemagne, qui aujourd'hui ne sont pas développés, que nous allons développer grâce à ces investissements.
02:37 - C'est justement sur les rails, si je puis dire, c'est relié les grandes capitales.
02:41 Vous parliez de Francfort, Genève également, en Suisse, ce sont des projets qu'on pourrait voir arriver à moyen terme, sous quelle échéance ?
02:47 - Alors effectivement, ce sont ces nouvelles lignes directes et le renforcement des lignes directes sur lesquelles nous travaillons.
02:53 Elles n'existent pas aujourd'hui, parce que je le disais, limitation du tunnel, parce que des procédures qui étaient aussi un peu compliquées pour y arriver.
02:59 Nous avons réduit ce que nous appelons le "time to market", c'est-à-dire le temps qu'il faut pour lancer ces nouveaux services de 10 à 5 ans.
03:06 Ce qui rend effectivement aujourd'hui très très rétractif le fait de lancer de nouvelles destinations que nous attendons d'ici 3, 4, 5 ans.
03:13 - Ça veut dire ouverture à la concurrence également, pour faire par exemple relier Londres à Francfort, il faudrait faire brûler par exemple la Deutsche Bahn aujourd'hui.
03:20 L'Eurostar, c'est la SNCF, ça veut dire que vous attendez aussi l'ouverture à la concurrence du tunnel sous la Manche ?
03:25 - Tout opérateur intéressé par faire des services entre Londres et l'Europe est libre de le faire.
03:31 Aujourd'hui Eurostar en fait, Eurostar d'ailleurs a un projet de croissance, d'autres opérateurs se sont déclarés intéressés,
03:37 suite au travail de simplification que nous avons effectué, que j'évoquais.
03:41 Et donc oui, on s'attend à ce que de nouveaux services se développent très rapidement maintenant.
03:45 - En tout cas c'est possible, vous voulez vous étendre en Europe, mais en même temps vous avez stoppé les arrêts en gare de Calais-Fretin,
03:51 H-Fort de l'autre côté de la Manche s'est terminé également.
03:54 Est-ce que vous ne délaissez pas d'une certaine manière le territoire au profit des grandes capitales européennes ?
03:59 - Nous n'avons pas arrêté ces arrêts. Il faut faire la différence entre deux types de services.
04:04 Les services que nous opérons, ce sont les services le shuttle, nous transportons des camions, nous transportons des voitures,
04:10 et nous sommes les leaders sur le transmanche.
04:12 Il y a également d'autres services que nous n'opérons pas, comme l'Eurostar par exemple.
04:16 - C'est l'Eurostar qui ne s'arrête plus à Calais-Fretin.
04:18 - Exactement, et la décision d'ouvrir ou de fermer les destinations leur appartient.
04:22 - Vous ambitionnez d'étendre justement ces lignes en Europe ?
04:25 Est-ce qu'on pourrait imaginer un jour prendre une navette, le shuttle, avec sa voiture à l'île-Europe par exemple ?
04:31 Aujourd'hui c'est possible ici à Calais.
04:33 Est-ce que le shuttle pourrait aussi s'étendre avec un service de navette qui va de plus en plus loin ?
04:37 - Nous n'envisageons pas de sortir le shuttle du Thial d'une certaine façon, pour beaucoup de raisons, notamment techniques.
04:45 En revanche, on envisage de développer des services fret qui aillent plus loin en amont et en aval.
04:51 C'est une vraie demande et nous travaillons d'ailleurs avec les autorités britanniques pour faire évoluer le gabarit des lignes
04:57 qui sortent du tunnel pour aller notamment vers les grandes plateformes logistiques, ou à Wembley par exemple, ou Daventry.
05:03 Et donc oui, le tunnel va s'étendre sur un certain nombre de ces services.
05:07 - Yann Le Riche, directeur général de Gatling, vous gérez également avec le tunnel sous la Manche une frontière en quelque sorte.
05:13 La Grande-Bretagne n'est plus dans l'Union Européenne depuis le Brexit.
05:16 Quand un nouveau système sera mis en place avec des contrôles biométriques, il y aura de la reconnaissance faciale,
05:21 il y aura des empreintes digitales, comme dans les aéroports finalement.
05:24 Ce sera uniquement pour les Britanniques, côté Anglais, ou ça concernera également les passagers français, les autres passagers de l'Union Européenne ?
05:31 - Ce nouveau système, EES, va rajouter un certain nombre de formalités au pourtour de la zone Schengen.
05:39 Donc tous les ressortissants de pays qui n'appartiennent pas à Schengen, et donc les Anglais, vont devoir à l'entrée et à la sortie de l'Union,
05:47 passer ces nouveaux contrôles, effectivement qui vont passer par une prise de biométrie, visage et empreinte digitale,
05:53 et ceci à partir du mois d'octobre de cette année.
05:55 - Mais donc uniquement pour les Anglais, et vous promettez qu'il n'y aura pas de délai supérieur ?
06:00 C'est 7 minutes le chiffre, et s'ils s'inquiètent a priori côté Britannique des queues qu'il pourrait y avoir pour prendre le shuttle, pour prendre l'Eurostar,
06:06 ça devrait être limité cet impact ?
06:08 - Oui alors effectivement, Eurotunnel est extrêmement performant sur le passage de la frontière.
06:12 C'est le point le plus efficace en termes d'expérience client, en termes de vitesse,
06:16 et donc tout l'enjeu pour nous était de continuer à garder cet avantage, et même à le creuser,
06:21 avec ces nouveaux contrôles, de nouvelles formalités, mais nouvelles formalités ne veulent pas dire nouvelles bureaucraties, nouveaux temps d'attente.
06:28 On nous avait promis avec le Brexit des heures de queue, ça n'est pas arrivé, ça n'arrivera pas avec EES.
06:33 Effectivement on a beaucoup investi, 80 millions d'euros au total, avec des technologies toutes neuves,
06:39 beaucoup d'aménagements sur nos terminaux, qui effectivement permettront de limiter au mieux les temps de ces contrôles.
06:45 On a bien l'ambition d'être les plus efficaces et de renforcer encore notre compétitivité par rapport aux ferries notamment.
06:51 - Au sujet des Britanniques, aujourd'hui ils représentent quasiment 70% du trafic des navettes.
06:57 Comment vous expliquez que les Britanniques utilisent plus le shuttle qu'on voit passer juste en ce moment derrière nous,
07:02 plutôt que les Français ? 70% c'est énorme !
07:05 - Alors c'est juste, 70% de nos passagers qui traversent la Manche en voiture sont des Britanniques,
07:13 qui pour faire simple viennent passer leurs vacances en France, certains ont même des maisons secondaires.
07:17 Le trafic est effectivement déséquilibré, c'est un enjeu d'ailleurs pour nous,
07:21 que de faire en sorte que beaucoup de Français aillent passer leurs vacances en Grande-Bretagne.
07:26 - Au contraire, sur le fret, les choses sont déséquilibrées dans l'autre sens.
07:31 La France exporte beaucoup plus de biens en Grande-Bretagne que la Grande-Bretagne en exporte en France.
07:36 Et donc vous voyez, on n'a pas les mêmes équilibres des deux côtés,
07:39 et tout l'enjeu pour nous ce sont autant de réserves de croissance qui concernent le rééquilibrage de ces flux.
07:44 - Le tunnel sous la Manche-Chaleneuriche, ce sont des passagers, ce sont des marchandises avec le fret.
07:48 Et il y a aussi de l'électricité depuis 2022 avec ELEC-LINC.
07:52 C'est un gros câble qui passe là, qui permet de transporter de l'électricité, un gros câble qui passe dans le tunnel.
07:57 Vous pourriez aller jusqu'où on transporte encore une fois des passagers, des marchandises, de l'électricité ?
08:01 On pourrait faire quoi de plus ? De la data par exemple ?
08:03 - On transporte déjà de la donnée, effectivement.
08:05 Nous avons déjà mis beaucoup de fibres optiques dans le tunnel, ça c'est évidemment fantastique.
08:11 Je reviens sur votre terme "grand câble", "gros câble".
08:15 Ces câbles, nous en avons deux, un dans chaque sens,
08:17 pour relier le réseau RTE en France à National Grid en Grande-Bretagne.
08:22 Nous participons au renforcement de la sécurité énergétique de ces deux pays.
08:26 Ces câbles, figurez-vous, ne font que 12 cm de diamètre.
08:30 On parle du diamètre d'un CD ou d'un DVD.
08:32 Et donc finalement, une infrastructure extrêmement moderne, performante,
08:35 qui est une première mondiale.
08:37 Personne, jamais avant nous, n'avait mis de câbles à haute tension dans un tunnel ferroviaire sous la Manche.
08:43 - Toute dernière question Yann Le Riche.
08:45 Ici dans le Calaisie, avec des migrants, des exilés, dont l'objectif est de se rendre en Angleterre.
08:50 Tout autour de nous, il y a des grillages, il y a des barbelés.
08:52 Est-ce que certains arrivent encore à monter dans les camions, comme ça se faisait à une époque ?
08:56 Ou est-ce que ça s'est terminé ?
08:57 Aujourd'hui, ce sont plus des embarcations.
08:58 Est-ce que vous avez encore des migrants, des exilés, qui arrivent à pénétrer ici sur le site d'Eurotunnel ?
09:03 - Sur les migrants, d'abord, n'oublions pas que c'est un drame humain.
09:06 Et que l'enjeu pour nous est d'abord un enjeu de sécurité.
09:08 Il est extrêmement dangereux de venir se cacher sur un camion, sous un camion,
09:12 sous un camion, pour essayer de traverser la Manche.
09:14 Et donc c'est bien ça qu'on veut éviter au quotidien.
09:17 C'est un sujet sur lequel nous travaillons avec les autorités françaises, britanniques,
09:21 qui nous guident, qui nous disent comment lutter contre ces aspects sécuritaires.
09:27 Et donc effectivement, beaucoup de grilles, trois niveaux de grilles, ont été mis autour du tunnel,
09:31 pour le protéger au mieux, pour assurer la sécurité de tous, des migrants,
09:34 mais effectivement aussi de nos personnels et de nos clients.
09:37 - Et c'est extrêmement sécurisé.
09:38 Donc quand on est arrivé, effectivement, on a dû passer plusieurs contrôles de sécurité.
09:41 Donc ça n'arrive plus, des exilés qui arrivent à pénétrer sur ce site, ça n'arrive jamais.
09:44 - Aujourd'hui c'est extrêmement rare.
09:46 - Yann Le Riche, directeur général de Getlink, qui englobe Eurotunnel et toutes ses filiales.
09:50 Et les clinks dont nous avons parlé, avec ce gros câble, que je qualifiais vulgairement de cette manière.
09:56 Merci beaucoup d'avoir été avec nous ce matin, pour célébrer les 30 ans du tunnel sous la Manche,
10:01 avec beaucoup d'événements qui vous attendent.
10:03 On peut vous souhaiter un joyeux anniversaire, c'est comme ça qu'on dit ?
10:05 - On peut nous souhaiter un joyeux anniversaire, oui, merci.
10:07 - A vous et à tous les salariés de Getlink, merci encore.