Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Ici, c'est le 6/9 France Bleu Occitanie.
00:03 Bienvenue, nous sommes le mardi 7 mai 2024.
00:06 Il est 8h15 et ce matin, je vous le disais,
00:09 on va passer 5 minutes avec un historien pour parler
00:12 d'un podcast exceptionnel produit par France Bleu.
00:15 Oui, il s'appelle "Les voix du commando Kieffers".
00:18 On le retrouve, ce podcast, sur francebleu.fr
00:20 mais également sur les plateformes et évidemment sur votre appli ici.
00:24 80 ans après le débarquement de Normandie,
00:26 ce feuilleton retrace l'histoire des membres du commando Kieffers.
00:30 Ces 177 Français qui ont débarqué avec les Alliés le 6 juin 1944.
00:35 Et ce matin, notre invité est donc Stéphane Simonnet.
00:38 Bonjour.
00:39 Bonjour.
00:40 Vous êtes historien à l'université de Caen,
00:41 spécialiste de la Seconde Guerre mondiale.
00:43 Alors dans ce commando Kieffers, il y avait des Toulousains,
00:45 on va en parler.
00:46 Mais d'abord, parlons de ce podcast.
00:48 S'il peut exister aujourd'hui, c'est grâce à vous en fait.
00:51 Eh bien écoutez, c'est un peu ça,
00:52 même si ce n'était pas du tout l'objectif du départ
00:54 quand j'ai collecté le témoignage de ces vétérans français
00:57 il y a une vingtaine d'années.
00:59 Puisque j'ai commencé à les rencontrer en 2000.
01:02 Et l'idée c'était de préserver cette mémoire orale
01:04 qui allait disparaître.
01:05 Et j'étais loin d'imaginer que 25 ans plus tard,
01:07 on en ferait un podcast France Bleu.
01:09 Et vous les avez enregistrés ces entretiens
01:10 avec un petit dictaphone, c'est ça ?
01:12 Exactement, j'avais un petit dictaphone
01:14 et puis je me rendais chez eux en fait,
01:16 dans leur intimité, dans leur salon, dans leur cuisine.
01:18 Et je leur faisais raconter leur vie,
01:21 leur enfance, leur adolescence jusqu'à la guerre.
01:23 Et jusqu'à la fin de la guerre, ils m'ont raconté leur vie.
01:25 Et donc j'y allais de manière très discrète
01:27 parce que c'était des gens qui n'avaient jamais parlé quasiment.
01:29 Et donc il fallait être le plus discret possible,
01:32 notamment du point de vue technologique.
01:34 D'ailleurs ça a été facile de réveiller cette mémoire-là chez eux ?
01:38 Ça a été compliqué pour certains.
01:40 Certains m'ont fermé leurs portes,
01:42 quelques-uns, deux ou trois qui ne voulaient plus
01:43 tout parler de cette période-là.
01:44 Ils avaient vraiment tiré un trait.
01:46 D'autres avaient du mal à parler
01:49 devant l'émotion que mes questions suscitaient.
01:51 Et certains le faisaient vraiment très volontiers
01:56 avec leurs familles rassemblées autour d'eux.
01:58 Donc c'était des moments assez différents.
02:00 Tout dépendait de la personnalité de l'ancien.
02:02 Mais d'une manière générale, ça a été plutôt facile.
02:05 Même s'il y a eu des grands silences par moments
02:07 parce que ces gens-là avaient soit oublié,
02:09 soit été restés très pudiques sur cette histoire-là.
02:11 La plupart ne voulaient pas se mettre en avant surtout.
02:13 Et donc ils ne voyaient pas trop l'intérêt de raconter leur histoire.
02:15 Alors pour réexploiter ces entretiens audio,
02:17 le format radio, le format podcast,
02:19 ça s'y prêtait bien selon vous ?
02:22 Finalement oui.
02:22 Finalement, alors ça a été un sacré travail de découpage,
02:26 de réécoute et d'organisation des différents entretiens
02:29 parce que ce sont des parcours de vie qui durent entre une heure et deux heures.
02:32 Donc il a fallu trouver les bons moments, les bons passages,
02:35 les anecdotes et puis aussi la qualité du son.
02:38 Parce qu'à l'époque, il y a 25 ans, la qualité du son n'est pas la même qu'aujourd'hui.
02:41 Et je ne m'étais pas du tout mis dans la tête qu'un jour ça passerait à la radio.
02:44 Donc moi c'était des entretiens que j'ai fait pour les archives.
02:47 On en vient à notre Toulousain que vous avez rencontré,
02:49 l'abbé René de Noroines né à Villemur-sur-Tarne,
02:52 entré dans les ordres avant-guerre, aumônier du Commando Kieffer,
02:56 un homme d'église parmi les militaires.
02:58 Dites-nous déjà d'où il vient cet abbé
03:00 et comment il se retrouve à Londres, aux côtés de De Gaulle,
03:03 pour préparer le débarquement ?
03:05 René de Noroines, effectivement, c'est le Toulousain du groupe du Commando Kieffer.
03:09 Il a été ordonné prêtre en 1936.
03:11 Il a beaucoup séjourné en Allemagne où il était aumônier
03:13 à l'aumônerie de Berlin dans les années 30.
03:15 Donc il a vu arriver, il a vu sous ses yeux la montée du nazisme.
03:18 En rentrant à Paris en France, il l'a dénoncé.
03:21 Il a essayé de prévenir les citoyens français qu'un danger se préparait.
03:25 Et puis, il fait la seconde guerre mondiale.
03:28 Il est mobilisé.
03:29 Donc c'est un prêtre, mais qui part au combat.
03:32 Et puis, dès l'année 40, en fait, il demande à son évêque de Toulouse,
03:36 Monseigneur Saliège, de pouvoir partir en Angleterre,
03:39 rejoindre le général de Gaulle.
03:40 Et Monseigneur Saliège lui n'a pas l'autorisation.
03:41 Donc pendant deux ans, l'abbé de Noroines va continuer à enseigner
03:45 à l'Institut catholique de Toulouse et va continuer à être prêtre à Toulouse,
03:49 tout en faisant de la résistance, en organisant des sauvetages de juifs
03:54 par la Haute-Savoie, vers la Suisse, etc.
03:56 Parce qu'il sent que les juifs sont persécutés, donc il se met en danger.
03:59 Il est tellement en danger qu'il est poursuivi par la police de Vichy,
04:02 par la Gestapo.
04:03 Et donc, en novembre 1942, Monseigneur Saliège l'autorise
04:07 à partir en Angleterre, rejoindre de Gaulle, ce qu'il fait.
04:09 - Et d'ailleurs, il le fait par où ? Il le fait par l'Espagne ?
04:11 Il fait comment, en fait, pour aller jusqu'à Londres ?
04:13 - Voilà, il s'évade de la France occupée par l'Espagne.
04:15 Il traverse l'Espagne à pied, en train, de manière clandestine,
04:18 à travers les Pyrénées.
04:20 Il arrive à Gibraltar, et de Gibraltar, qui est un territoire britannique,
04:24 il trouve un bateau, qu'il remonte en Angleterre.
04:26 Et là, en 1943, il se met au service du général de Gaulle.
04:30 - Vous parlez de résistance, justement.
04:33 René Denorois parle dans ce podcast de la résistance passive
04:36 qu'il découvre à Toulouse. À quelle occasion ?
04:40 - Cette résistance, en fait, il l'organise un réseau.
04:46 Il est dans l'armée secrète, il est dans le mouvement combat.
04:49 Donc, il y a toute une organisation de résistance à Toulouse,
04:52 qui, effectivement, dont la principale mission,
04:56 c'est de sauver les Juifs à Toulouse.
04:58 - Et puis, il y a une manifestation en place du Capitole, un jour, c'est ça ?
05:01 - Oui, il y a tout un mouvement en place du Capitole,
05:04 et puis, lui-même, il fait de la résistance.
05:05 Lors de ses sermons, la Benrois n'hésite pas à faire des prédications,
05:09 et surtout à défendre les Juifs.
05:10 Donc, il prend des risques publics.
05:12 C'est pour ça qu'il est inquiété par la milice et par la Gestapo.
05:14 Et donc, cette résistance, il l'a dans le sang, quasiment,
05:18 parce qu'il a toujours résisté au nazisme depuis les années 30.
05:20 - Une histoire passionnante qu'on retrouve dans ce podcast
05:23 produit par France Bleu. Merci Stéphane Simonnet.
05:26 Je rappelle que vous êtes historien à Caen,
05:28 spécialiste de la Seconde Guerre mondiale,
05:30 et grâce à vous, on a pu entendre, réentendre ces voix du commando Kéfer
05:34 avec notamment ce Toulousain, l'abbé Denorois.
05:36 Merci à vous, bonne journée.
05:37 - Merci beaucoup, je vous remercie.