• l’année dernière
La journaliste Charlotte d’Ornellas était l’invitée de L’Heure des Pros, ce mardi 21 mai, sur CNEWS. Elle s’est exprimée sur le projet de loi sur la fin de vie : «Ils remettent toutes les décisions aux mains du patient lui-même. Une députée Renaissance avait proposé un délit d’incitation à l’aide active à mourir qui a été transformé en délit d’entrave».

Category

🗞
News
Transcription
00:00Ça arrive dans beaucoup de domaines, malheureusement, mais déjà, quand Emmanuel Macron a présenté son projet de loi,
00:06il y avait déjà plusieurs collectifs vraiment représentatifs de soignants qui s'étaient inquiétés du texte d'Emmanuel Macron,
00:12présenté par Emmanuel Macron, donc par le gouvernement, etc. Là, en l'occurrence, pourquoi ils s'inquiétaient ?
00:17Parce qu'ils disaient d'expérience partout dans les pays où ça a été légalisé, ces conditions strictes sur lesquelles
00:23s'appuyait énormément Emmanuel Macron pour vendre son projet, ce qui est déjà une manière étrange.
00:28Vous dites « c'est quelque chose dont nous avons absolument besoin », et pour que ça passe, vous êtes obligés de dire
00:33« attention, il y a des conditions et des garde-fous absolument partout », etc. Ils présentent ça, les soignants disent
00:38« attention, parce que ces garde-fous ne tiendront pas, ils ne tiendront pas sur la durée », et là, en l'occurrence,
00:43en commission spéciale, donc à l'Assemblée, le moment où on transforme le texte avant de le présenter en débat
00:49devant les parlementaires, en effet, ces conditions, elles ont sauté. Il y en a plusieurs. Vous parliez du pronostic vital
00:55engagé à court ou moyen terme. Là, les soignants avaient dit « ça ne veut rien dire, médicalement, c'est impossible de dire
00:59à court ou moyen terme, c'est quoi un court terme, c'est quoi un moyen terme ». C'est devenu une phase avancée ou terminale.
01:05C'est toujours aussi flou, mais on comprend bien que ça étend encore plus, parce que « phase avancée », en fait, ils remettent
01:10toutes les décisions entre les mains du patient lui-même. Ensuite, il y a la question de l'aide à mourir. Ça a l'air
01:15un peu de nous échapper à nous, mais les soignants avaient réclamé qu'il soit très clairement écrit que l'aide à mourir
01:21n'est pas un soin. Ça n'est pas un soin donné par le corps médical. Or, les députés de la Commission ont décidé de l'inscrire
01:27dans le Code de la santé publique, donc d'en faire par la force des choses un soin. La deuxième chose, c'est que dans le projet de loi,
01:33vous savez, on avait...
01:34Pardonnez-moi, mais qu'est-ce que ça change ? Si c'est un soin ou pas un soin ?
01:38Le rapport à la chose, vous savez, le personnel médical, notamment dans les EHPAD, dans les soins palliatifs, il n'y avait pas de clause
01:45de conscience collective. Donc, vous ne pouviez pas être vous, directeur d'un établissement, et dire, je peux assurer aux patients qui sont
01:53dans mon établissement qu'il n'y aura pas d'euthanasie ici. Ils n'avaient pas le droit de le faire. Les clauses de conscience n'étaient
01:57prévues qu'individuellement. Et donc, eux voulaient qu'il soit très clair que ça n'est pas un soin donné comme n'importe quel autre soin
02:03par un médecin. C'est autre chose qu'un soin. Donc, c'est évidemment dans la définition et dans ce que ça peut devenir par la suite.
02:11De la même manière que le projet de loi prévoyait, sans les nommer, on en avait déjà parlé, le suicide assisté et l'euthanasie, mais la plupart du temps,
02:18c'était un suicide assisté, c'est-à-dire on vous donne le médicament létal, la dose létale, et vous l'administrez vous-même, et des exceptions d'euthanasie
02:25quand ça n'était pas possible physiquement qu'un tiers vienne le faire. Là, les députés font sauter également cette chose-là, puisque désormais,
02:33le patient décidera de ce qu'il veut, quelle que soit la situation. Et ensuite, dernière chose, les directives anticipées. Quand vous écrivez dans une directive
02:42anticipée, donc quand vous êtes en bonne santé, et alors là, d'expérience, toutes les personnes qui accompagnent des gens malades vous diront que quand on est
02:49en bonne santé, on ne peut pas savoir la manière dont on réagira à la fois quand on est malade et en fin de vie, évidemment. Emmanuel Macron avait dit
02:56que les directives anticipées, c'est autre chose, il faut une pleine conscience, un plein discernement au moment de choisir l'aide à mourir. Là, les députés disent non,
03:04les directives anticipées pourront servir au moment de la fin de vie, notamment s'il n'y a plus de discernement. Et le plus révélateur, et qui vous résume tout ça,
03:12c'est qu'il y a une députée, Renaissance d'ailleurs, qui avait proposé un délit d'incitation à l'aide active à mourir. Donc là, pour le coup, elle voulait poser un garde-fou
03:21sur la promotion de l'aide à mourir ou la pression exercée sur la personne en fin de vie. Ce délit a été refusé, et à l'inverse, les députés ont créé un délit d'entrave à l'aide à mourir.
03:32Donc vous voyez bien, le rapport à l'aide à mourir est résumé par cette double décision.

Recommandations